Chapitre 15 : Tu... m'aimes ?
J'ouvre les yeux, réveillé par la sonnerie de mon téléphone. Aveuglé par la lumière étincelante du soleil, je ne vois pas le nom qui est affiché à l'écran. Alors, je décroche, encore déboussolé.
– Hé, Shun ! Qu'est-ce que tu fous ?!
Que... c'est pas possible... cette voix...
– G... Gēge ?
Suis-je... mort ?
– Qui d'autre ?! Bref ! Ramène ton cul en cours avant que je ne me fâche !
– Mais... tu... tu es vivant ?
– Hein ? Bien sûr que oui ! Je resterai à l'hôpital un certain temps mais je vais revenir, imbécil ! Si je meurs, qu'est-ce que tu deviendras, hein ?
– Gēge... je... j'ai vraiment cru que... balbuté-je, les larmes aux yeux.
– Ha ! Là ! Là ! J'oublie trop souvent que tu es encore un gamin. Écoute, Shun, ton grand frère va bien. Une balle l'a à peine frôlé donc il ne va pas mourir, d'accord ?
Je ne réponds rien, trop soulagé pour m'énerver contre lui et ses blagues à deux balles. Après avoir un peu discuté, on se dit "au revoir". Il est midi passé et... je suis vraiment mal en point. Je ne sais comment j'ai pu rentrer chez moi hier soir mais j'y suis bel et bien. J'ai faim, j'ai des engourdissements partout ( notamment au niveau du bassin... ) et ai la tête en feu.
Je me rends dans la salle de bain et asperge mon visage d'eau froide avant de l'essuyer brièvement et de m'habiller. Je bois ensuite une demi bouteille d'eau d'une traite et mange du riz qui traînait ( je préfère ne pas imaginer depuis quand ), avant de monter sur ma moto, en direction du lycée. Arrivé à celui-ci, j'entre dans ma classe, évidement en retard. Le cours avait certainement commencé depuis cinq minutes mais... peu importe !
– Désolé pour le retard.
– Va t'assoir, tu passeras à la division pour justifier ton absence de ce matin plus tard.
– Hm.
Sans poser un seul regard sur personne, je m'installe à ma place avant de m'allonger sur ma table. Ça fait un moment que j'ai les yeux fermés, écoutant brièvement le cours, quand on m'interpelle. Monsieur Johnson, qui est notre prof de mathématiques également, s'est mit à me réprimander incessamment sur le fait que je n'ai aucun respect pour son cours, que je dérange toute la classe et, sorti de nul part, il m'ordonne d'aller au tableau.
Un peu perplexe, je me lève et remarque que ma gueule de bois et ma fatigue ont commencé à baisser. Je me place donc devant le tableau, ridiculement heureux de me sentir mieux ; et, à ma grande surprise, le problème à résoudre est plus simple que je ne le pensais. Il faut, en gros, utiliser les équations de droites pour ensuite avoir assez de donnée pour placer pythagore et ainsi trouver la valeur de x. En bref, quelque chose de faussement compliqué.
Fière d'avoir résolu aussi rapidement ce problème, je me mets dos au tableau. Monsieur Johnson, certainement honteux de m'avoir sous-estimé, doit néanmoins admettre que mon calcul est correct.
– Rien de plus normal pour un redoublant, dit-il.
Je pose alors le regard sur Haeli – ignorant les provocations de mon professeur – et lui fais un clin d'œil ce qui le fait pouffer de rire... et me valut une sanction pour "distraction intentionnée de ses camarades de classe". Peu importe, vous l'aurez compris : ce prof ne m'aime vraiment pas.
Après cet événement, Haeli et moi étons restés en classe pour nous avancer sur nos devoirs ( pour tout vous dire, c'est son idée... je reste seulement parce que j'aime passé du temps avec lui ). Bref, on est donc assis côte à côte, révisant nos contrôles à venir.
– Tu ne comptes pas travailler ?m'interroge Haeli, m'interrompant dans sa contemplation.
– C'est pas trop mon truc.
– Apprends au moins les définitions, ça pourra t'aider.
– Tout ce que tu voudras, poupée.
Haeli lève les yeux au ciel et se remet à étudier tandis que moi... je me remets à le regarder étudier.
– Shun... pourquoi tu n'étais pas là ce matin ?
Ça me fait plaisir de voir qu'il s'inquiéte pour moi.
– J'étais trop fatigué.
Bouclette laisse échapper un rire moqueur puis, soudainement, il commence à me fixer, perplexe.
– Un problème ?
– Tu... qu'est-ce que tu as sur le cou ? Tu t'es blessé ?
Ne voyant pas de quoi il parle, je le laisse, sans comprendre, poser délicatement ses doigts sur ma peau. Et, c'est seulement en voyant sa réaction, que je comprends que j'ai merdé. J'ai certainement des marques de suçons de la veille ! Bordel, je ne savais pas que les putes laissaient ce genre de chose !
– J... je vois, dit-il simplement en détournant la tête.
Il ne faut pas être un génie pour comprendre l'embarras qu'il doit ressentir en ce moment même. Haeli se remet à lire sa leçon mais ne semble pas pour autant concentré, il paraît tourmenté.
– Ça... va ?
Il acquiesce. Alors, je veux poser ma main sur sa tête mais il la repousse violement.
– Désolé, lache-t-il, j'ai juste... besoin de prendre une pause.
À ces mots, Haeli se lève et sort précipitamment de la salle. Je n'attends pas bien longtemps avant de le suivre. Il est allé dans la cour arrière. Arrivé dans celle-ci, il m'aperçoit et détourne le regard.
– Haeli...
Des larmes s'échappent de ses yeux.
– Désolé, désolé, désolé... répéte-t-il inlassablement en essuyant désespérément ses joues.
Je déteste le voir dans cet état. Je me sens tellement impuissant et je m'en veux terriblement.
– Ne t'excuses pas.
– Je... je n'ai pas le droit de pleurer parce que... on n'est même pas en couple mais... mais ça fait... tellement mal, larmoie-t-il en redoublant ses pleurs.
J'avance vers lui et veux le prendre dans mes bras mais il me repousse.
– N... ne me touche pas...
– Haeli, écoute...
– Comment as-tu pu... faire ça ? Tu... tu n'es pas sensé m'aimer ?
Je m'agenouille devant lui en prenant ses poignets entre mes mains pour qu'il arrête d'essuyer ses yeux.
– Bébé, j'ai vraiment déconné hier et je... je n'ai aucune excuse mais mes sentiments pour toi n'ont pas changé ; il n'y a rien de plus sincère, crois moi.
Haeli secoue sa tête de gauche à droite.
– Je... je t'aime tellement, commence-t-il, que je n'arrivais même pas à embrasser Dojin sans me sentir mal... et toi tu prétends m'aimer et tu... tu fais ça ?
– Que... qu'est-ce que tu viens de dire ?!
Bouclette baisse la tête, comme ayant avoué quelque chose qu'il ne fallait pas.
– Merde... prononce-t-il simplement.
Ce n'est vraiment pas le bon moment pour être heureux... mais je ne peux m'empêcher d'éprouver ce sentiment.
Je le prends alors dans mes bras et me lève afin de le porter.
– Tu m'aimes vraiment ?! Hm ?! C'est pas une blague ?!
Haeli essuye ses yeux et détourne la tête.
– C'est pas le sujet.
– Je sais, je sais, mais je veux juste... que tu me le confirmes.
Il reste un long moment silencieux avant de cacher sa tête dans ses mains.
– Je... n'ai jamais cessé.
Au comble du bonheur, je le serre encore plus fort.
– Ne t'emballe pas ! Ça ne veux pas dire que je vais sortir avec toi...
Je le repose et prends sa tête entre mes mains.
– Je t'assure que ce qui s'est passé hier soir ne se reproduira plus jamais. J'étais simplement... bouleversé et il me fallait une source de réconfort immédiate. Alors... alors j'ai merdé; mais à présent je ne recommencerai plus jamais !
Haeli me fixe longuement avec ses yeux ronds et sa mine tristounette avant de détourner le regard.
– Tu... as intérêt.
Rassuré qu'il me refasse confiance, je descends mon visage vers le sien afin de déposer un délicat baiser sur ses lèvres. Haeli met ses mains sur ma nuque et les scelle de nouveau. Et, emporté par l'excitation, je commence à le dévorer avec douceur et amour.
Pourquoi est-ce à la fin de chacune de nos disputes qu'on s'embrasse ? Peu importe. Je vais simplement profiter de ce moment terriblement agréable. J'ai un millier de questions à lui poser et de choses à lui dire mais... je préfère me taire pour le moment. Plus je goûte à ses lèvres, plus mon corps en redemande. La chaleur que je ressens à chaque contact me monte à la tête, me faisant fondre et me rendant faible.
Est-ce qu'il ressent ça lui aussi ? Est-ce que lui aussi a la sensation que plus rien n'a d'importance ? Qu'il ne pourrait se détacher de moi ? Merde... je sens que je deviens accroc. Non, je suis obsédé par lui. Je veux le toucher encore et encore, sentir chaque passerelle de son corps et... et en découvrir d'autre.
Je ne sais combien de temps on a passé à s'embrasser, mais quand on parvient à se décoller l'un de l'autre, le cours suivant a déjà commencé... depuis un bon moment déjà. On se précipite donc vers notre classe et, voyant qu'on est bel et bien en retard, il faut trouver une excuse.
– Laisse moi faire, me conseille Haeli.
On entre donc et il prétexte qu'il m'a accompagné à l'infirmerie. Et, sans même demander de justificatif de passage, le professeur nous laisse entrer. Ha ! Là ! Là ! Ma poupée a une tellement bonne réputation que tout le monde lui fait confiance aveuglément. Bref. C'est le dernier cours de la journée et pourtant, il me paraît interminable !
Je suis tellement excité par le fait que je sois enfin avec Haeli que je n'arrive pas à me concentrer sur autre chose que lui. J'ai hâte que la sonnerie retentisse pour que l'on se retrouve pour passer du temps ensemble. Mais le plus déroutant est que j'ai l'impression que Haeli ressent la même chose que moi. Il se retourne régulièrement pour que nos regards se croisent et regarde à la même fréquence l'horloge de la classe.
L'heure se termine enfin et, après avoir fini de ranger mes affaires, je pars m'assoir sur la table de Haeli qui prend toujours plus de temps à partir. J'attends qu'il soit prêt et nous partons en direction de la sortie. Bizarrement, l'atmosphère n'a rien à voir avec celle du temps où on était "juste ami". Je veux dire... on ne parlait pas, osant à peine se regarder et encore moins se toucher. Et pourtant, au moment où nos chemins devaient se séparer, aucun de nous voulait quitter l'autre.
– Je t'accompagne jusqu'à ton arrêt de bus. Si ça ne te dérange pas, bien sûr.
– D... d'accord.
Au moment de se mettre en route, je lui présente ma main, regardant ailleurs et cachant légèrement mon visage complètement rouge de l'autre. Haeli la prend avec un peu d'hésitation et on se dirige vers l'arrêt. Je tente désespérément de m'empêcher de sourire à chaque fois que je réalise à quel point sa main est petite dans la mienne.
Arrivé à destination, je suis heureux d'apercevoir que le bus passe dans dix minutes ; on va pouvoir rester encore plus longtemps ensemble. En attendant, je devrai chercher un sujet de conversation. Je pourrai lui parler des cours ? Non, trop ennuyeux. Lui demander comment s'est passé sa journée ? Non, on l'a passé ensemble. M'excuser encore pour hier soir ? Non, ça plombera l'atmosphère. Alors quoi ?!
– Hum... Shun ?
Tiré de mes pensées, je pose les yeux sur lui.
– Enfait je me demandais si tu ne voudrais pas venir chez moi... aujourd'hui.
– Chez... toi ?
– Hm. Mes parents ne sont pas là et...
Je lui pince la joue.
– Tu ne penses pas que c'est trop tôt ? Je veux dire... on vient à peine de se mettre ensemble. Enfin moi ça ne me dérange pas, au contraire mais le problème c'est que...
– Que ?
– On n'a ni lubrifiant ni capote.
Le visage de Haeli semble s'enflammer et ses yeux s'arrondissent. Je comprends alors que, finalement, j'ai peut-être l'esprit plus mal placé que lui.
– J... je ne veux pas t'inviter chez moi pour... ça ! C'est... c'est juste pour qu'on passe plus de temps ensemble !
– Mais alors... pourquoi avoir précisé que tes parents ne seraient pas là ?
– Pour que tu ne sois pas mal à l'aise en pensant les rencontrer aujourd'hui !
– Je... vois.
Haeli soupire bruyamment et je me sens un peu honteux de lui avoir exposé ce genre d'idée.
– Bref. Alors, tu veux venir ?
– J'aimerai bien mais j'ai quelque chose d'important à faire plus tard.
– Oh... je comprends... dit-il, visiblement déçu.
Je pose alors un léger baiser sur sa joue avant de me redresser, le regardant fixement.
– Ne fais pas cette tête là, bébé, à partir de maintenant on pourra passer encore plus de temps ensemble.
Haeli détourne le regard.
– Tu ne devrais pas... m'appeler comme ça, marmonna-t-il.
– Pourquoi ? Tu n'aimes pas ?
– Ce n'est pas ça. C'est juste que... je voulais déjà le faire... avec toi.
– Tu voulais... m'appeler "bébé" ? m'exclamé-je sur un ton rieur.
Haeli acquiesce ce qui me fais pouffer de rire. Je me penche vers son oreille avant de murmurer :
– Je préférerai "Daddy".
Il fait un pas en arrière, embarrassé et surpris, ce qui m'arrache un rire, attendri par son adorable réaction.
Quelques minutes plus tard, le bus arrive et, après s'être salué, Haeli monte à l'intérieur et je me dirige vers ma moto.
_________________________________________
Fin du chapitre 15.
Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top