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ERWAN

Mon téléphone vibre sur le matelas. Un grognement s'échappe de ma gorge. Qui peut bien m'appeler, si tôt ?

Je saisis l'appareil anthracite et glisse mon doigt, machinalement, sur le tactile. L'écran affiche un plafond.

--- Allô ? fis-je, d'une voix rauque.

--- Mon chéri ! C'est mamie.

--- Bonjour mamie, comment vas-tu ?

Mollement, je me relève pour poser mon buste sur la tête de lit, martelée.

--- Ça va. Annie n'arrête pas de me considérer comme une enfant. Tu ne sais pas à quel point cela m'agace.

Mamie est actuellement, placée en maison de retraite. Elle a, malheureusement, contracté une maladie, qui lui fait perdre la mémoire, petit à petit. Ainsi, elle ne peut plus rester seule chez elle, surtout dans l'immense demeure qu'elle possédait.

--- Elle ne veut que ton bien, mamie.

--- Je sais me débrouiller seule quand même, j'ai quatre-vingts cinq ans.

--- Quatre-vingts sept, exactement.

Parfois, son Alzheimer est plus marqué. Elle peut facilement nous confondre, ou bien même oublier notre existence en quelques minutes. J'ai un pincement au cœur, rien qu'à l'idée, qu'une fois, elle ait pu m'oublier. Putain de maladie !

--- Qu'est-ce que tu es beau, mon chéri.

--- Merci, c'est parce que je te ressemble. Mais, je ne te vois pas, abaisse ton téléphone.

--- Tu as hérité de ma beauté naturelle. Tu me vois, maintenant ?

Un visage familier apparaît sur mon petit écran, me faisant instantanément sourire. Mamie n'a pas changé, malgré qu'elle semble plus ou moins fatiguée. Ses cheveux poivre et sel, sont relevés en un chignon sur le haut de son crâne. Des petites mèches se sont faites la malle, lui donnant un air plus jeune. Ses yeux océan reflètent de la joie, elle est heureuse de me voir. Ma mamie est vraiment belle, encore plus belle que dans mes souvenirs.

--- Oui, oui, c'est parfait.

--- Ah, j'allais oublier quelque chose de très important.

--- Quoi donc ?

--- Aujourd'hui est un jour spécial, c'est l'anniversaire de mes deux plus belles merveilles. Alors, joyeux anniversaire, mon chéri.

--- Merci, mamie. Cela me fait très plaisir.

Du bruit se fait entendre, de l'autre côté du téléphone. Annie, la femme aux cheveux rouges, qui s'occupe de ma grand-mère, apparaît dans mon champ de vision.

--- Bonjour Erwan, joyeux anniversaire !

--- Merci, Annie.

--- Vous allez devoir lui dire au revoir, madame.

--- Déjà ?

Annie hoche la tête, tandis que ma grand-mère arbore une mine déconfite.

--- Bon, je dois te laisser, mon loulou. Prends soin de toi, je t'aime.

--- Moi aussi, mamie. Gros bisous, on se voit bientôt.

Elle m'envoie des bisous avec sa main et, je fais de même. La communication coupe, et je m'octroie un petit moment de faiblesse. Des perles salées coulent le long de mes joues, pour atterir sur mon torse dénudé. Ma mamie me manque tellement ; j'aimerai vraiment la voir plus souvent...

Mon téléphone atterit mollement, sur le lit. Je passe une main sur mon visage, afin d'essuyer toutes traces de larmes. Mamie ne voudrait pas que je pleure, le jour de mon anniversaire. Mon regard dévie sur ma droite, et je découvre l'heure sur le radio-réveil, 9:00 am.

Les bras tendus, je m'étire, afin de bien commencer cette journée. Aujourd'hui, mon alter-égo et moi, avons dix-huit ans. Soudain pressé, je me lève à la hâte, pour rejoindre la chambre de ma blonde préférée.

Sans prendre la peine de frapper, j'entre dans son cocon, et me précipite vers son lit. Comme un poids mort, je me laisse tomber sur elle, l'écrasant de tout mon poids.

--- Happy Birthday, angel.

Mes lèvres viennent se poser sur son front. Ses bras encerclent mon cou, dans lequel elle niche sa tête.

--- Happy Birthday, my twin.

Je ne peux m'empêcher de sourire. Cette journée commence, définitivement bien.

--- Il est quelle heure ?

--- Neuf heures.

Mon corps est projeté sur le sol. Je geins, mon coccyx ayant senti la violente chute.

--- Saperlipopette ! Je vais être en retard.

Ma sœur s'affole et court partout dans la pièce, sous mon regard blasé. Ah, les filles !

Difficilement, je me relève. Elea n'aurait même pas pensé à m'aider, bien que ce soit elle, la fautive.

--- On peut savoir pourquoi tu t'agites ainsi ?

--- On doit faire les boutiques, avec Lizzy.

Effectivement, c'était convenu. Cela me remémore que je dois gérer au mieux, l'organisation de la fête surprise. Rien que d'y penser, mon cœur de fragile bat plus rapidement. J'espère que tout ira comme je le souhaite.

--- Je te laisse, alors.

Sans un mot de plus, je quitte sa chambre pour aller prendre le petit-déjeuner.

--- Happy birthday to you, happy birthday to you, happy birthday to you my baby, happy birthday to you, m'accueille maman.

Je la serre dans mes bras afin de la remercier. Mon sourire ne quitte pas mes lèvres, ce qui est très rare. D'ordinaire très ronchon, cela me surprend que je sois comme tel.

--- Hum, ça sent super bon !

--- Oui, je vous ai préparé des pancakes avec plein de sirop d'érable.

Maman pose l'assiette sous mon nez, et je m'en lèche déjà les babines. Bien que je sois athlétique, j'adore manger. Je vis pour ça, même.

--- Merci, maman. C'est adorable, fis-je, en embrassant sa tempe.

J'attaque goulûment mon péché mignon. Des pas rapides martèlent le parquet en bois clair, de la maison. Ma sœur fait son apparition dans la cuisine, essoufflée.

--- Bon anniversaire, mon deuxième bébé, dit maman, en la prenant dans ses bras.

Elea répond à son étreinte chaleureuse et la serre, un peu plus près d'elle. Les deux femmes de ma vie sont réunies sous mes yeux, il n'y a rien de plus beau.

--- Assieds-toi, pour prendre ton petit-déjeuner.

--- Désolée mummy, je suis pressée.

Elle chope ma fourchette et la fourre dans sa bouche, avant de quitter la pièce. La porte d'entrée claque, me faisant sursauter. Qui l'a permise de manger mon pancake ?

--- Bon, et bien, je vais aller me préparer pour le travail, annonce ma mère.

J'opine du chef, et continue ma dégustation. Notre mère travaille dans une boutique de vêtements, très réputée à Manhattan. Elle y travaille depuis plusieurs années, maintenant et elle adore toujours autant ça.

L'assiette dans la main, je me lève pour la mettre dans le lave-vaisselle. Le bouton clignote, et j'appuie dessus.

Il faut que j'aille aussi me préparer, pour cette folle journée.

***

La sonnerie de la maison retentit, faisant aboyer mon toutou. Je tire un peu le rideau afin de regarder à travers la fenêtre, qui peut bien être là ? La silhouette de mon meilleur ami se dessine sous mes yeux et, je m'empresse d'aller lui ouvrir.

--- Hey, mon pote. Bon anniversaire ! s'exclame Bastien, en me faisant une accolade.

--- Merci !

Gipsy lui saute dessus et, Bastien en profite pour le caresser. Mon chien remue la queue, heureux. Je crois que c'est l'animal le plus sociable que je n'ai jamais vu.

--- Bon, t'as les décos ?

--- Yes, au sous-sol.

--- C'est parti !

Nous descendons les quelques marches qui mènent à l'étage inférieur de la maison, Gipsy sur nos talons. L'ampoule s'allume, après que j'ai appuyé sur l'interrupteur, envahi par les toiles d'araignée.

Les décorations occupent pratiquement tout l'espace. Il faut dire que je n'ai pas fait les choses à moitié. Mon porte-monnaie en a pris un sacré coup, mais bon, c'est pour la bonne cause.

--- Il faut installer tout ça ? demande mon ami, en pointant du doigt les diverses décorations.

--- Bien sûr que oui !

Le visage de Bastien se décompose.

--- Fais pas cette tête, aide-moi plutôt !

Mes bras sont encombrés de ballons à gonfler, tandis que ceux de Bastien possèdent tous les autres préparatifs.

Je dépose le tout sur la table de la salle à manger. Celle-ci est d'ailleurs remplie, si bien qu'on ne voit plus le marbre qui l'habille.

--- J'en ai déjà marre, me plains-je.

--- Ah, c'est toi qui l'as voulu !

Je lève les yeux au ciel.

--- Je sais.

***

La pompe à ballon dans la main, je gonfle ces fichus mini montgolfières rose gold. Cela fait plus d'une heure que je m'affaire à cette tâche, et j'ai hâte que cela se finisse. Il m'en reste encore une dizaine, ce qui est raisonnable, par rapport à la centaine de ballons que je viens de gonfler.

--- Je pose ça, où ?

Bastien me montre le cadre photo que j'ai fait fabriqué, sur mesure.

--- Sur la table, derrière.

Mon ami s'active, faisant exactement ce que je lui dis. La pièce principale a, totalement changé de style. Des ballons colorés, volent dans les airs. Les meubles ont bougé de place, donnant plus d'espace. Une table est installée dans un coin, sur laquelle se trouve le fameux cadre et des déguisements pour faire des photos. D'ailleurs, j'ai loué une borne pour faire des photos, qui se présente comme un photomaton.

Le DJ ne devrait pas tarder à arriver, pour installer son espace. Le centre de la pièce est libéré, pour en faire une gigantesque piste de danse.

--- On a fini ! soufflé-je.

--- On va enfin pouvoir aller se préparer.

--- Oui, tu connais la maison.

Nous montons tous les deux à l'étage, se dirigeant chacun vers une salle de bain différente. J'ai bien mérité cette douche.

***

Vêtu de mon éternel jean noir, déchiré aux genoux, et de ma chemise blanche, je descends les escaliers pour rejoindre Bastien, dans le salon. Celui-ci est installé sur le canapé, habillé de façon classe.

--- Tu as mis les petits plats dans les grands, le taquiné-je.

--- Tu peux parler.

Nous blaguons, jusqu'à ce que la sonnette se déclenche. Je pars ouvrir la porte et tombe nez à nez, avec des boîtes métalliques.

--- Bonjour, je suis le DJ.

--- Entrez, allez y.

Une chevelure décolorée dépasse des encombrants. Un gars aux piercings, entre dans le hall. Étonné, je ne réagis pas lorsqu'il me demande de décaller. Sa main tatouée passe devant mon visage et je m'exécute.

Pendant que le DJ installe son matériel, les invités commencent à arriver. Je les accueille, ne pouvant rien faire d'autre.

Lorsque tout le monde semble là, je décide d'envoyer un message à Elea.

C'est avec les mains tremblantes, que je tape une excuse bidon sur le clavier. Mon doigt dérive sur le bouton Envoyer. Mon cœur bat un peu plus vite que la normale, étant stressé. C'est la première fois que je réalise quelque chose d'aussi fou, et j'ai peur que cela ne lui plaise pas.

--- T'inquiètes, mon frère. Ça va bien se passer.

--- J'espère, chuchoté-je.

Sa réponse ne tarde pas à arriver. Elle accepte de venir en coup de vent. Un poids s'enlève de mes épaules.

Il ne reste plus qu'à attendre que les minutes défilent.

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Bonjouuuur, comment allez-vous ? 🌞
Je reviens aujourd'hui vers vous, avec un chapitre totalement inattendu.

J'ai décidé d'écrire un chapitre de transition sous le point de vue d'Erwan. C'est un peu un pari que je me lance, puisque je n'ai jamais écrit sous un autre point de vue que celui de Lizzy.

J'espère tout de même que ce chapitre vous aura plu. N'hésitez pas à me donner votre avis en commentaires, cela me ferait très plaisir !

Je vous souhaite une bonne journée ensoleillée (j'espère qu'il fait beau aussi chez vous).

Xoxo,
♡thecatsy

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