Ep6 : Le vrai visage de notre amitié - P1/P2

« Ma... Marek ?

– Salut Levi. Tu verrais ta tête. On dirait que tu as vu un mort !

– Au moins un fantôme vu comment tu me ghostais ! »

Ils s'enlacèrent et Marek l'invita à entrer. Ils avaient beaucoup de choses à se dire.

Mabel s'était chargée de sortir des biscuits apéritifs (rassis depuis le temps qu'ils croupissaient dans l'armoire de la cuisine) et Lev, des boissons gazeuses. Marek, quant à lui, échangeait des banalités qui ne servaient qu'à le prémunir d'entamer de vraies discussions.

« J'ai vu Adelheid la dernière fois, elle m'a dit être inquiète pour toi, amorça Lev.

– Elle a toujours été d'une nature inquiète. Je crois que, c'est le propre d'une maman.

– Et tu te sens obligé de me le préciser car ?

– On sait que tu ne connais pas la tienne ? », le taquina Marek.

Ce à quoi Lev riposta en lui balançant une poignée de chips sur lui.

« Merde, je crois que ça m'a éraflé le visage, feignit­ Marek. Elles sont tellement rances que ça pourrait être une arme blanche !

– Ha, ta gueule peut pas être pire. Et il t'est arrivé quoi au fait ? Tu t'es battu, demanda Mabel en pointant du doigt les pansements sur son visage et son poignet. Quand Lev et toi vous êtes accolés virilement, tu as grimacé aussi. »

Lev plissa les lèvres, l'accent russe de Jeanina rendait tout (bizarrement) plus épique.

« Quoi ? Tu n'as pas remarqué, Lyovka ?

– Si, si. T'es bien amoché.», confirma‑t‑il simplement.

Marek semblait hésitant. Ses deux amis le charrièrent sur les possibles causes de ses blessures, mais ils devinrent plus suspicieux en s'apercevant que cette hésitation cachait de la crainte.

« Sérieux Marek. Ça commence à devenir vexant que tu restes évasif, comme ça.

– Je ne sais pas MJ. En vrai c'est rien...

– Et bien, parle. Ou on oblige Lev de nous parler de son crush. Et on sait tous que ça va être embarrassant.»

Marek souleva un sourcil inquisiteur. Lev faillit s'étrangler avec sa propre salive et balbutia misérablement :

« Comment ça ? Je n'ai pas de cru... Comment tu sais ?

– Je n'en savais rien, tu viens de le révéler, rétorqua la jeune femme.

– Merde, je suis trop con ! À chaque fois je tombe dedans.

– Laisse‑le MJ, si tu nous l'énerves, il va nous cramer l'appart !

– Ce n'est pas vrai, on parlait de Marek il y a deux secondes... »

Marek rit de bon cœur, cependant Lev remarqua bien que se rire n'atteignait pas ses yeux.

Leurs plaisanteries légères prirent fins, le portable de leur ami d'enfance sonna. Celui‑ci s'excusa auprès de Mabel et Lev et se leva pour y répondre. La magicienne ne l'avait pas quitté des yeux.

« Qu'est‑ce qu'il y a ? Crache le morceau, l'interrogea Lev.

– Il a l'air d'avoir fait une grosse connerie. Ça se voit, tu ne le sens pas ?

– On devrait lui demander.

– Pour qu'il le confirme ? T'es fou ! J'ai dit ça... comme ça ! J'ai déjà toute la commu au cul, on ne peut pas m'en rajouter.

– S'il est dans la merde, il doit nous le dire.

– Ferme‑là, il revient.

Vous parlez en russe pour que je ne vous comprenne pas ?, s'offusqua faussement Marek de retour.

– Non, non !, réfuta Mabel. Je me moquais de ta coupe de cheveux type balais à chiotte. Oupsie, j'ai cafté.

– T'es vraiment sans pitié avec moi. Lev, je peux pioncer chez toi pour cette nuit ? »

Distrait, Mabel lui mit un coup de coude pour le réveiller. Il lui confirma que oui, bien sûr. Mais qu'il devrait se contenter d'un matelas d'appoint, ce qui ne dérangea pas Marek car ça ne pouvait pas être pire que ces derniers jours.

Ils avaient commandé des pizzas, et désormais, la soirée était bien avancée.

« Comment ça ? T'as dormi dehors ? », demanda Lev en ramenant une couverture qu'il avait en plus.

Mabel était sortie pour fumer. Marek se frotta la nuque.

« Façon de parler. Ce n'est pas une période facile, disons que je n'ai pas eu un moment pour me poser.

– Mais t'es quand même venu. Et ça me fait vraiment plaisir. On n'a pas pu se voir depuis un moment. Et je sais que j'y suis pour beaucoup aussi. Je sais que t'as essayé de passer il y a deux semaines. »

Lev était un peu embarrassé de lui avouer qu'il avait eu pas mal d'occasions de le contacter mais qu'il ne l'avait pas fait pour... parce que... sans raisons valables en fait.

« Non, c'est moi aussi, le rassura Marek. Et je te dis ça pour pas que tu me fasses un monologue d'auto‑flagellation.

– Parce que c'est ton truc dans le trio ?

– J'allais te parler de mon sang allemand mais je t'épargne ça.

– Putain, t'es grave ! », rétorqua Lev amusé.

Son humour grinçant lui avait manqué et d'une certaine manière le naturel de leur échange confortait Lev que rien n'avait changé. Marek s'assit sur la chaise près de la table de la cuisine ouverte du studio.

Puis Lev s'éclaircit la voix, cherchant à savoir comment aborder le sujet sensible, sans que ça paraisse faux ou poussif :

« Je dois aller au Manoir demain, tu viens avec moi ?

– Non, je ne pense pas.

–Adelheid y sera, c'est ... »

Lev le dévisagea, étonné par ce refus, avant de reprendre :

« T'as d'autres plans ?

– Je sais qu'elle est aux Arcades et je préfère éviter d'aller là‑bas. Je ne suis pas franchement le bienvenu en ce moment. »

Lev marqua une pause et jeta sur le fauteuil le linge de lit.

« Attends, il faut que tu m'expliques là. Pourquoi tu ne serais pas le bienvenu ? J'ai l'impression que tu veux nous dire un truc. Qu'il se passe quelque chose de grave ou... »

Et il s'interrompit car il n'avait aucune idée où il allait avec sa dernière phrase. Le silence de son ami ne l'aidait pas et le déstabilisait un peu plus.

Puis Marek, las de fatigue, vint à sa rescousse.

« Je suis dans un truc assez sérieux Lev. Mais je voulais vous voir avant que... ce ne soit plus possible. »

Le visage fermé, il regarda vers le sol accablé. Cet accablement était communicatif et Lev se résigna à clôturer cette discussion qui ne menait nulle part.

« D'accord. Si tu ne veux pas en parler, d'accord. Mais avant que ça parte en vrille totale, on est là avec Mabel. Et je ne dis pas ça pour la forme. »

Marek acquiesça sans le regarder puis mit la main devant la bouche, il avait l'air soucieux soudainement.

Lev comprenait qu'il voulait lui dire quelque chose sans arriver à accoucher des mots. Puis, Marek finit par se lever :

« Si tu peux... ne dis pas à Adelheid qu'on s'est vus. Elle pourrait mal le prendre que je ne vais pas la voir. »

Lev ne put s'empêcher de croire qu'elle aurait raison, de ne pas bien le vivre. Il se garda de lui donner son avis, se contentant d'un simple hochement de tête en guise de réponse.

Ils n'auraient pas d'autre occasion de creuser le sujet. Et juste comme ça, l'ambiance s'était éteinte.


Dans son lit, emmitouflé dans sa couette, Lev scrollait sur son portable quand il s'aperçut que Lorelyne lui avait envoyé un message, il y a de cela quatre heures déjà. Il s'agissait d'une photo d'un repas au restau, accompagné d'un mot, lui demandant si sa soirée se passait bien. Trop tard pour lui envoyer une réponse, déjà parce qu'il ne savait pas quoi écrire, puis ça aurait été juste un mauvais timing.

Il ouvrit sa conversation avec Sam dont le dernier envoi (qui datait déjà de deux jours étonnamment) était une photo de lui habillé d'une chemise blanche zébrée en sequin et d'un brassard accordé. Une femme, qui portait une robe assortie, l'accompagnait et tous les deux se partageait une grosse peluche jaune. La légende disait « Still in my Paris Hilton era ». Vu l'arrière‑plan, il avait l'air d'être dans un hôtel chic et exotique. Pourquoi il lui avait envoyé ça ? Est‑ce que c'était pour lui rappeler qu'il était fauché ? Lev leva les yeux au ciel tellement que ça l'agaçait.

Lui aussi voudrait pouvoir se payer des vacances en charmante compagnie. Dans ses rêves peut‑être ? Et là‑dessus, la fatigue l'emporta.

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