Ep14 : Mon Paradis en Flammes - P1/P2


Alicia regarda par la fenêtre puis se tourna vers le lit. Elle était inquiète et avait de la peine à le dissimuler. Les derniers événements lui semblaient dérisoires par rapport à l'état actuel de Marek qui était au mieux... préoccupant.

Elle avait demandé de l'aide au gérant du petit hôtel de passes miteux dans lequel ils s'étaient retrouvés, à quelques pas de la gare. Vu les profils qu'il accueillait, il avait des contacts. Notamment un médecin qui n'avait pas pu exercer dans le pays car son diplôme n'était pas reconnu mais qui était assez compétant lorsqu'il s'agissait de rattraper des « accidents » provoqués par les clients sur les filles, ou le contraire.

C'était la deuxième nuit qu'ils passaient ici, le médecin était revenu pour ausculter Marek. Le diagnostic était peu encourageant : un traumatisme crânien important, une respiration laborieuse, douleurs au dos et cervicales... Il avait eu de la chance d'en réchapper.

« Vous pensez qu'il pourra être debout bientôt ?

– Je suis désolé, c'est compliqué. Vous avez déjà de la chance d'avoir pu venir jusqu'ici, bien que j'aie du mal à comprendre comment. »

Les yeux fatigués du médecin, sûrement par ce dont ils avaient déjà été témoin dans ces chambres, la scrutaient. Il faisait sûrement allusion sa petite silhouette. Il va sans dire qu'elle n'allait pas lui expliquer leur condition et que le médecin au black était loin de vouloir faire connaissance...

Il changea les compresses de sa brûlure au poignet et reprit :

« Il faudrait penser à aller à l'hôpital si son état ne s'améliore pas. Il supporte les antidouleurs mais pour l'après, il faudra de véritables soins plutôt que mon bricolage.

– Je comprends. Votre... l'argent est sur la commode. »

Il hocha la tête et partit.

Alicia s'approcha doucement de Marek. Comment allait‑elle faire ? Comment allaient‑ils faire ?

Elle pouvait le laisser là, livré à son sort. L'ancienne Alicia l'aurait fait mais c'était différent désormais. Sans lui, ça n'avait pas de sens.

Ils risquaient trop gros pour la mort de son ex‑mari et celle (probable) de celui qui s'était battu contre Marek.

À de rares exceptions près, leurs lois étaient impitoyables contre les meurtriers de Manciens. Et qu'Alicia fût une victime dans cette histoire n'y changeait rien.

Elle prit la main de Marek qu'elle serra de toutes ses forces. Ça ira, tout ira bien, se répétait‑elle pour ne pas s'effondrer. Il suffisait d'attendre qu'il aille un peu mieux pour qu'ils puissent se déplacer et ils partiraient, loin.

En Australie, comme ils en avaient souvent parlé. Alicia avait toujours aimé l'Australie. Et ils vivraient comme ils l'entendraient, ils feraient vœu d'apostasie, abandonneraient leurs pouvoirs respectifs, vivraient comme les autres.

Ils avaient encore le temps. Ils pouvaient encore réaliser ce rêve.

« Ali, chuchota Marek. Il faut... il faut que tu partes.

– Je suis avec toi, je reste là. »

Leur ennemi et allié était le temps. Il fallait que Marek se rétablît pour qu'ils quittent définitivement l'influence de la Communauté.

Puis elle en était certaine : ils voudront régler cette affaire discrètement. S'ils étaient incapables de les retrouver, ils ne chercheront plus.

Pour l'instant, la police humaine n'était pas impliquée et heureusement. Ni elle, ni Marek n'étaient capables de vivre comme des fugitifs dans cette dimension. Et ça importait peu car ses amis marginaux les auraient aidés quoi qu'il aurait pu se passer. S'ils pouvaient résister à la corruption, l'argent ou la blanche.

Il restait Nita mais même elle était en danger... Alicia n'avait plus de nouvelles depuis qu'elle avait décidé de se terrer dans un univers parallèle avec sa clique. Et comment lui en vouloir ?

Le problème était et resterait leurs pairs à qui on ne tournait pas le dos sans payer le prix fort.

Elle soupira de fatigue. Il fallait penser à autre chose et vu qu'elle avait un peu de monnaie sur elle, elle pensa aller à la supérette pour acheter de quoi manger un peu.

Alicia caressa le visage de Marek en lui promettant de revenir. Elle salua le gérant de l'hôtel, vissé à son bureau, qui ne daigna pas lui répondre. Peut‑être parce qu'il considérait moins que des gens ceux qui allaient et venaient ici...

Elle n'avait qu'à traverser une rue pour atteindre la supérette quand un frisson la parcourut. Elle avait un mauvais pressentiment.

Il fut d'autant plus fort lorsque Alicia sentit la bile remonter sa gorge. Suivant son intuition, la jeune femme se précipita de nouveau dans l'hôtel. Elle monta les marches sans reprendre son souffle, son cœur prêt à lâcher tant il battait fort.


Et en ouvrant la porte, elle cria son prénom comme pour conjurer cette intuition funeste :

« Marek ! »

Marek n'était pas seul. Un autre homme était là, assis sur une chaise, en face du lit. Il avait une stature imposante et des yeux bleus acérés. Un pistolet silencieux à la main, il lui ordonna de fermer la porte. Le ton de sa voix ne laissait présager rien de bon.

« Qui êtes‑vous ? Qu'est‑ce que vous nous voulez ?

– Reste calme et tout ira bien. »

Le sang d'Alicia ne fit qu'un tour.

« Ça a l'air sérieux. Ce n'est pas ici que ça s'arrangera, reprit l'homme.

– Ne lui faîtes pas de mal, je vous en prie. »

Loin d'être implorant, le ton de sa voix était contrôlé dans une piètre tentative de ne pas laisser la panique prendre le dessus. L'homme pointa alors son arme vers Marek et comme pour jouer avec ses nerfs, il reprit désinvolte :

« J'ai presque envie de l'aider, l'aider à aller mieux. »


Alicia tenta de bouger, mais l'individu armé l'en empêcha en la mettant en joue :

« Fais quoi que ce soit la reine des neiges, et c'est entre tes beaux yeux que cette balle finira. »


C'était donc ainsi, on avait envoyé quelqu'un... Elle plissa des yeux, la colère fit bouillir son sang, elle était prête se battre.

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