chapitre trente-six
CHARLES EST PENSIF.
Demain est le jour qu'il attend le plus. Après pratiquemment un an de lutte. Demain il sera au tribunal. Au cœur du procès à l'encontre de son ancienne compagne et il est terrifié. Tout bonnement terrifié qu'elle s'en sorte par miracle, terrifié qu'elle s'en sorte avec une simple réprimande.
N'importe quelle sanction le soulagerait. Un an, trois ans, dix ans ou plus, il n'en a rien à faire. Il souhaite juste que justice soit faite à son égard. Pour avoir terni tous ses maigres espoirs. Avoir démoli sa vie au point qu'il ne puisse guère observer son reflet dans le miroir.
Charles est esseulé dans cet appartement niçois, Sterenn est au centre-ville accompagnée d'amies de sa faculté. La déception est maître mot de ses ressentis actuellement, lui qui, sans l'avouer, aurait préféré l'avoir à ses côtés pour la soirée. Le monégasque se maudit d'être si égoïste, néanmoins il ne peut s'en empêcher. S'empêcher de songer au fait qu'il la souhaiterait au creux de ses bras afin qu'il ne tremble pas de froid, malgré l'arrivée de l'été.
Son téléphone sonne, son entraîneur vient le déranger, certainement afin de lui faire part de ses horaires d'entraînements pour le surlendemain.
- tu as dix minutes pour te préparer, je t'emmène manger dehors
Charles est particulièrement surpris de sa proposition. Connaissant son entraîneur depuis une quinzaine d'années, il sait ô combien il fait attention à ce que mange l'athlète durant la totalité de la saison.
- es-tu malade ?
- imbecille, non me ne frega ! andiamo, arrivo alle sette*
- bene bene ! mi dispiace signor**
Charles sourit, content de sa bêtise, lui qui aime tellement embêter son entraîneur.
Bien que le monégasque ait tout sauf la volonté de sortir ce soir, il prend son mal en patience et va se préparer en dix petites minutes top chrono. Comme promis, l'italien l'attend devant l'immeuble, avec un sourire en coin qui interpelle directement son petit protégé.
- Pourquoi est-ce que tu souris comme un idiot ?
- Je n'ai pas le droit d'être heureux ?
- Tu me caches quelque chose, j'en suis certain.
- Ne t'épuise pas à faire des hypothèses débiles, tu perds ton temps.
Le brun se renfrogne sur son siège tel un enfant ne dépassant pas la dizaine d'années, et se laisse porter par le trajet qui lui semble plutôt long. Il n'ose pas demander à Andrea où est-ce qu'ils se rendent, toutefois il trouve la situation étrange dès l'instant où ils quittent le centre-ville niçois pour des petites routes de campagne. Charles a une impression de déjà-vu qui le perturbe d'ailleurs fortement.
Durant le reste du trajet, il tente de fouiller minutieusement dans son esprit à la recherche du moindre détail pouvant le mener à la résolution de l'énigme qu'est cette soirée. Une partie de lui est pertinemment sûr que son entraîneur n'est qu'un complice d'un événement qui lui échappe. Son impatience le fait trépigner sur son siège et lorsqu'Andrea se gare, il comprend.
Cette plage qui a abrité ses tourments, un an auparavant.
Devant ses yeux brillant.
Le pilote se tourne vers l'entraîneur dont le sourire est à présent béant. Il s'est fait berner en beauté et ses pensées envers Andrea ne sont que des remerciements sincères, bien qu'aucun son ne sorte de sa bouche.
‐ Ne me regarde pas comme ça, regarde plutôt qui est présent sur la plage ! Et dégage de ma voiture, je dois rejoindre ma femme.
Son regard se porte sur la plage de sable fin, illuminé par le soleil encore haut dans le ciel, bien que son zénith date de quelques longues heures. Au beau milieu de celle-ci trône une jeune femme aux cheveux de jais que Charles reconnaîtrait parmi mille. Il balbutie des paroles incompréhensibles envers son entraîneur, certainement pour le remercier, et aussitôt sorti de l'habitacle, la voiture démarre, le laissant esseulé, face à celle qui l'a sauvé depuis une année.
Ses pas l'amènent machinalement vers la jeune femme qui arbore un sourire immense et surtout contagieux qui font apparaître les fossettes sur le visage du brun au fur et à mesure que ses pieds se plantent dans le sable. Sa robe longue et fleurie virevolte légèrement face à la brise naturelle du sud, tout comme ses cheveux. Son cœur bat à tout rompre.
Charles est tout simplement impressionné et les mots ne parviennent à sortir de sa trachée. Sterenn a confectionné un pique-nique pour eux, sur la plage où tout a commencé, afin de l'épauler la veille de la plus grande échéance de l'année. Elle n'a pas oublié. En ce jour si important, elle ne l'a pas abandonné. Elle n'a fait que travailler dans l'ombre, puisque chez elle, c'est inné.
Ses bras encerclent le petit corps bronzé grâce aux premiers jours ensoleillés de la fin du printemps, et Sterenn resserre cette étreinte si rassurante.
- Surprise, murmure-t-elle sans quitter les bras du jeune homme.
- Tu es vraiment fourbe.
- Tu croyais réellement que j'allais sortir avec des amies alors que l'on est à la veille de quelque chose de si important ? Il fallait bien que je te change les idées, alors assieds-toi, je meurs de faim.
Charles rit en s'asseyant en tailleur, retirant ses chaussures afin de savourer la sensation du sable encore chaud à son contact. Il ne remarque pas la façon dont Sterenn l'observe. Comme s'il était la huitième merveille du monde, à protéger à tout prix.
- Andrea m'a aidé à tout préparer, mais évidemment... elle sort une boîte en carton de son sac, et le visage du brun s'illumine. il ne sait pas tout.
- C'est une déclaration d'amour que tu me fais.
Le jeune homme prend des mains le carton que lui tend la jeune femme. L'odeur d'une pizza prend ses narines et éveille son odorat. Ils savourent tous deux cette spécialité italienne tout en admirant le soleil se coucher devant eux. La plage est côtoyée par quelques personnes, néanmoins pas énormément pour se faire déranger de trop. Leur dîner terminé, ils s'aident afin de débarrasser, sachant pertinemment que la fainéantise prendra le dessus lorsqu'ils s'en iront.
Comme quelques mois auparavant, Sterenn se cale contre le torse du brun. Son dos entre en contact avec son abdomen, et elle se sent bien. Voudrait rester ici pour toujours, arrêter le temps afin de ne jamais éclater cette bulle de plénitude les englobant actuellement. Charles est si heureux de l'avoir dans sa vie. Jamais il n'aurait pensé avoir une connexion aussi forte avec quelqu'un. Longtemps, il a pensé que cette connexion inexplicable était celle avec Chloé. Il a suffi d'une soirée, d'un échange de regard afin de désordonner ses plans.
La bretonne frissonne dans ses bras réconfortant. Le pilote remarque un plaid dépassant d'un des sacs, il se décale légèrement afin de l'attraper et de les recouvrir, tous deux, de la couverture.
- À quoi tu penses ? dit-elle, ayant remarqué son regard perdu dans le vide.
- Je pense à quel point je suis reconnaissant de t'avoir dans ma vie.
La jeune femme rigole au premier abord, mais se fait pincer gentiment par le monégasque, priant de l'écouter.
- Je ne blague pas Sterenn, tu ne te rends pas compte du bien que tu m'as apporté en un an, j'ai l'impression d'avoir tellement grandi, d'être une nouvelle personne.
- Je partage tes pensées. Peut-être que tu ne le remarques pas, mais tu as eu le même effet sur ma vie. Tout me semblait tellement terne avant que tu ne viennes l'éclairer. Tu ne te rends pas compte à quel point tu es solaire, Charles.
Avec tendresse, s'effectuent des carresses sur ses avant-bras, provoquant des frissons dans son corps tout entier. Sterenn rougit, elle sait qu'il l'a senti frissonner et cela devient une torture pour elle de ne pas lui avouer ses sentiments. Son cœur pourrait sortir de sa poitrine, et encore plus lorsque leurs iris entrent en contact. Encore plus lorsque le visage du brun se rapproche considérablement du sien, afin...
De déposer un tendre baiser sur son front.
Ils pourraient rester ainsi, à se regarder dans le blanc des yeux des heures durant, alors que la nuit pointe le bout de son nez et les étoiles également.
- Jules est là, elle pointe du doigt une des étoiles les plus brillantes, et juste à côté il y a ton père, et Anthoine.
- Sterenn... sa voix tremble alors.
- Demain ils te soutiendront et te donneront la force de l'affronter.
- Merci mon étoile, souffle le brun en resserrant son emprise sur la jeune femme afin d'être sûr qu'elle ne s'en aille pas.
Dans quelques jours, tout sera fini après que le jury rende le verdict. Il a tellement hâte de passer à autre chose. Tellement hâte de se consacrer à une seule et même personne, qu'il côtoie à temps plein.
Ils sont tellement heureux de se considérer comme des amis.
Néanmoins dans leur tête, ils savent, qu'amis, ils ne pourront jamais l'être sur le long terme.
□□□
*idiot, je m'en fous -dans le sens je m'en fiche que tu manges mal ce soir- allez, j'arrive à dix-neuf heures
**ok ok ! excusez-moi monsieur
NON, je ne ferai pas de tome 2 à bruises tout simplement parce que la plupart des "tome 2" sont ratés, et je n'ai pas envie d'écrire pour écrire alors qu'avec ce chapitre, l'épilogue et les 3 bonus, ça sera amplement suffisant. + sachant que je puise mon inspiration de la tristesse, j'estime que charles a assez souffert comme ça
on se retrouve vendredi pour l'épilogue !
-alcools
Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top