Tobias nous emmène rapidement à la tente de Kara. Kara doit encore dormir, vu l'heure à laquelle on a débarqué. Même Tobias est encore en pyjama.

Le chef de la Garde nous demande d'attendre devant la tente. Il pénètre à l'intérieur et nous patientons. Kasey s'assied sur l'estrade et moi, je reste les bras croisés appuyée à côté de lui.

Je commence à stresser. Je ne veux pas qu'il leur arrive quoi que ce soit. Ce sont des gens honnêtes et tranquilles. Pourquoi l'Armée viendrait les attaquer ? Qu'est-ce qu'il y a ici qui peut bien les intéresser ?

_ Eh !

Je tourne la tête vers Kasey, qui me bouscule dans mes pensées. Ses yeux se veulent rassurants mais rien ne me tranquillise depuis que j'ai vu cette note dans la tente.

_ Tout va bien se passer.

Il pose sa main sur mon épaule et me caresse d'une manière amicale. Je secoue la tête et m'éloigne, laissant sa main retomber dans le vide.

Je marche vers le couloir du potager. J'ai besoin de me calmer. D'être seule. Et puis, je ne manquerai à personne. Kasey pourra très bien expliquer la raison de notre retour sans moi.

Il m'a impressionné, d'ailleurs. Je ne pensais pas qu'il pouvait être aussi prévenant et agile dans ses mouvements. Et le coup avec les singes, je ne l'avais pas vu venir ! Il n'est peut-être pas si idiot qu'il le laisse paraître au premier regard.

J'arrive à l'entrée de la grande salle et mon sang recommence à couler normalement dans mes veines quand je revois cette lumière bleutée au-dessus des fruits, des légumes et des arbres qui pendent au plafond. Mon cœur ralentis sa cadence et je me surprends à être... Dans un sentiment de bien-être ? C'est très confus, mais je pense que c'est ça. Je ne l'ai jamais ressenti alors...

Mes chaussures foulent l'herbe et me traînent jusqu'au centre du potager. Mes bras toujours sur ma poitrine, je lève la tête et fixe les étoiles au-dessus de moi, à travers la crevasse dans le coin de plafond. Il faudra que je demande à Tania comment ils ont fait pour faire tout ça.

Il faudra que je la protège. Il est hors de question qu'elle participe à tout ceci. Je vais devoir la cacher. Pour qu'elle soit en sûreté avec les autres enfants. Les mortels. Tania ne doit pas être témoin de ce possible massacre. Elle ne doit pas être en danger. Il faut que je la protège.

Je ne sais pas pourquoi j'y prête attention. Je suis devenue un peu plus humaine depuis le début de cette histoire. Ça me fait tout drôle à l'intérieur. Comme si quelque chose au fond de moi se réchauffait.

Non, il ne faut pas que je sois comme ça. Je cours à ma perte. Je vais finir comme tous ces gens qui sont blessés et qui meurent à cause des autres. Il faut que je me protège moi-même. De tous. Même de Kasey. Mais il faut quand même que je protège Tania. Juste Tania. Le reste m'importe peu.

Je resserre plus mes bras autour de moi et quelque chose de froid et dur vient se frotter contre ma peau. Je fronce les sourcils et plonge ma main dans mon débardeur pour en sortir l'objet. L'arbre de Faniath se matérialise devant mes yeux. Avec toujours ce cercle l'enfermant dans une bulle. Comme la pierre qui enferme le village souterrain.

Il ne faut pas que le cercle se brise. Il ne doit pas se briser. En aucune façon et sous aucun prétexte. De toute façon, Faniath a une longueur d'avance sur l'Armée. Ils sont immortels. Et personne ne sait où nous nous trouvons. Personne. Je soupire en fermant les yeux. On doit réussir. On le doit. On doit...

_ Nam ?

Je sursaute en entendant la voix de Tobias au fond de la salle, à l'entrée. Je le regarde. Il s'est changé. Il arbore sa tenue de guerrier. Je range mon pendentif et marche vers lui. Une fois à sa hauteur, il poursuit sa phrase.

_ Kara te demande.

_ Kasey ne peut pas tout expliquer, lui ?

Le fait que l'on m'appelle comme un vulgaire esclave ne me plaît pas du tout. Tobias sent que je suis tendue et il me prend par les épaules.

_ Nam, tu es importante. C'est une situation de crise, tu dois être là.

Ses yeux me demandent de l'écouter. Je souffle un bon coup et le contourne pour aller voir ce que Kara me veut. Je ne vois personne à l'entrée de la tente. Seulement un garde. Lorsqu'on s'approche de lui, il nous fait un signe de tête. Je ne réponds pas et entre aussitôt dans la grande tente.

Kasey est assis devant un bureau, dos à moi. Il discute avec Kara. Lorsqu'ils s'aperçoivent que des gens les interrompent, ils se retournent et me scrutent. Comme pour juger si je suis énervée ou si je suis calme. Question difficile à laquelle répondre.

_ Nam, assieds-toi, je te prie.

Je ne bouge pas d'où je suis. Je n'ai aucune envie de m'asseoir en face d'elle. Je n'aime pas cette femme. Elle non plus ne m'aime pas. Alors pourquoi faire comme si nous étions des copines qui allaient boire un verre ensemble ?

_ Je préfère rester debout.

Kara accepte de la tête et s'affale dans son fauteuil. Ses yeux vont de Kasey à moi, puis encore à Kasey. Ses iris changent de couleur quand ses yeux fixent le garçon. Sa lèvre inférieure frémit. Et une certaine atmosphère ressemblant à de la chaleur humaine s'installe dans la tente.

Elle lui fait du gringue alors qu'elle a le double de son âge !

_ Explique-moi Kasey. Que se passe-t-il ?

Je regarde Tobias avec des yeux mi-clos. Ma bouche se pince.

_ Et tu crois vraiment que je dois être là ?, chuchoté-je à mon ami.

Il hausse les épaules et je rejette ma tête en arrière en soupirant. Kasey commence à parler.

_ Eh bien... Nous étions dans la forêt et nous... Nous étions pourchassés par des singes hybrides. On a réussi à les piéger et...

_ Comment ?

Kara se lève et contourne son bureau. Elle s'assied dessus, juste à côté de Kasey pour qu'il puisse loucher sur ses jambes découvertes finement taillées. Quand elle les croise, Kasey a eu un mouvement de recul. Il est mal à l'aise. Je le serais moi aussi, à sa place.

_ Je... Je... J-... J'ai posé un piège, il y a longtemps... Plusieurs même, et je m'en suis servis pour les coincer...

_ Quel brave tu fais, mon cher Kasey !

Elle glisse sa main juste à côté de celle du garçon. Quand elles sont assez proches, Kasey se recule et s'éloigne d'un mouvement rapide de la femme. Elle a un sourire triomphant. Kasey, lui, est tout retourné. Il est nerveux. Il bégaie et tremble comme une feuille.

Kara redescend de son bureau et s'avance vers lui. J'en ai marre de ce petit jeu à la con !

_ Si vous voulez qu'on vous laisse, dîtes-le ! Et vu que vous n'avez pas besoin de moi, je m'en vais.

Kasey me regarde avec des yeux sortant de leurs orbites. On dirait qu'il me demande de rester pour l'aider à se sortir de ce pétrin. Oh non, mon gars ! Tu es grand, tu te débrouille tout seul !

Kara a un petit sourire en coin. Un jour, il va lui arriver des bricoles, je vous le dit. Tobias me regarde d'un air désolé. Je ne m'en occupe pas et sors de la tente une seconde après.

Je regarde autour de moi. Où vais-je aller ? Je lève la tête vers les parois de Faniath et découvre une silhouette dans l'encadrement d'un trou rectangulaire. C'est Tania, la tête posée sur ses bras croisés, eux-mêmes posés sur le rebord du rectangle. Mon humeur change tout de suite quand je fais un pas vers les escaliers. Je suis soudainement plus calme que dans la tente.

Je monte les marches trois par trois et quand j'arrive dans le couloir, Tania se retourne sur moi. Dès qu'elle voit mon visage, le sien s'illumine et elle s'élance vers moi pour me sauter au cou. Nos rires se mélangent quand je referme mes bras autour de son petit corps de jeune fille.

_ Je ne pensais pas que je te manquerai autant !, se moque-t-elle en s'éloignant de moi. Qu'est-ce que tu fais ici ?

Il ne faut pas que je lui dise ce qu'il se trame. Je ne veux pas qu'elle s'inquiète. Mon visage se ferme pendant un bref instant mais se rallume dès que je sors ma phrase :

_ J'avais oublié de cueillir une tomate !, dis-je en souriant.

On rigole ensemble et nous nous mettons en place à la fenêtre. Pendant quelques minutes, nous ne parlons pas. Nous admirons juste le vue que l'on a depuis notre petit coin. J'entends Tania prendre sa respiration pour parler et je la fixe.

_ Comment ça se fait que tu sois encore là ?

Qu'est-ce que je peux dire ? Il faut que je lui réponde. Dois-je raconter un mensonge ? Je ne vois que ça. Mais quoi ?

_ On a voulu revenir parce que...

Les mots ne sortent pas. Je n'arrive pas à lui mentir. Elle est trop vulnérable, trop précieuse pour que l'on se moque d'elle. Alors je ne réponds pas et rejette mes iris sur les lumières en-dessous de nous.

_ C'est grave, n'est-ce pas ?

Je n'ose même pas lui faire face. Ça va l'inquiéter et je ne veux pas.

_ Ne nous attardons pas sur ça. On y pensera plus tard. Profitons que je sois là, d'accord ?

Elle a un air soupçonneux mais elle fait tout pour ne pas me le faire voir. Mais je le sens quand même. Elle capitule, mais pas pour longtemps.

_ Où est Kasey ?

Rien que de penser à ce qu'il se passe dans cette tente me donne la nausée.

_ Il est dans la tente de Kara avec Tobias. Ils... Discutent...

_ De quoi ?

Elle veut me faire cracher le morceau.

_ Je ne sais pas de quoi. Ils n'ont pas voulu que je vienne avec eux. Enfin je suis restée une minute dans cette tente mais je n'ai pas voulu rester davantage.

_ Pourquoi ?

Je lui explique ce qu'il s'est passé et dès que je finis ma phrase, Tania explose de rire. Il est communicatif. Je ris avec elle pendant une bonne dizaine de secondes.

_ Kara est très bizarre, se moque Tania.

_ Je le pense, aussi !

_ Je crois qu'elle essaie de te rendre jalouse d'elle.

J'avale ma salive de travers et commence à m'étouffer avec. Tania frappe mon dos doucement pour que j'arrête de tousser. Je lui réponds un faible « ça va » et nous nous regardons.

_ Pourquoi tu penses qu'elle veut me rendre jalouse ?, demandé-je.

_ Parce que Kasey et toi, vous êtes... Enfin, ça se voit que tu lui plais. Et depuis que Kara vous a vu ensemble, elle s'est mise en tête que vous êtes en couple, lui et toi.

Je recommence à rire, mais seule cette fois. Tania reste au contraire très sérieuse. Dès que je vois son expression, j'arrête de suite ce que je fais.

_ Il faut être barré pour penser que Kasey et moi, on...

_ Je ne suis pas barrée, moi. Et je le pense pourtant. Du moins, lui, il n'a pas l'air d'être indifférent à ton égard.

Je réfléchis à ce que Tania me dit. Mais ma tête me fait non.

_ C'est impossible. Lui et moi, jamais. Je l'aide seulement à retrouver son frère. Je le déposerai devant Acropolis comme prévu et je rentrerai. C'est ce qui est prévu.

Quand je repense à ce que je viens de dire, je grimace. Je ne rentrerai nulle part. Je n'ai plus de chez moi. Laina a été attaquée. Je pense que les soldats ont tout pillés pour que tout revienne à Acropolis. Ils ont dû trouver ma cabane et récupérer tout ce qu'il y avait, sauf ce que j'ai emporté avec moi. Je ne rentrerai pas.

Rentrer à Faniath ? Même pas en rêve. Je ne souhaite pas croiser Kara tous les jours. Une fois de temps en temps est déjà assez à supporter.

_ Tu pourrais habiter ici et...

_ Non, dis-je sans détour.

_ Pourquoi ?

_ Je ne suis pas chez moi, ici. Je n'ai plus de maison. Je n'ai plus rien.

_ Alors reconstruis un chez-toi. Quelle meilleure occasion que celle-là ?

Je plonge mes yeux dans ceux de Tania. Ses yeux sont d'un bleu déconcertant. On dirait que la mer s'y déchaine. Ils sont magnifiques. Et soudain, je me rends compte à quel point elle est d'une beauté presque maladive. Elle doit être protégée.

J'ouvre mes bras et lui demande de venir près de moi. Je la serre fort et plonge ma main dans ses cheveux.

_ Promets-moi que quoi qu'il arrive, tu ne feras rien de stupide, lui dis-je bas à l'oreille.

_ Pourquoi tu dis ça ?

_ Juste, promets-moi.

Un silence s'installe et elle finit par répondre.

_ D'accord, je te le promets.

Je ferme fort les yeux pour me calmer. Elle est tellement fragile. S'il lui arrivait quelque chose, je ne me le pardonnerais jamais. Alors, il faut que je la protège. Et elle survivra. Comme nous tous. Mes yeux se perdent dans la lumière des torches de la place du village.

Oui. On survivra tous.

*

Au bout d'un moment, Kasey, Kara et Tobias ressortent de la tente. Kasey et Tobias regardent partout autour d'eux, comme s'ils cherchaient quelqu'un. Peut-être qu'ils me cherchent. Qu'importe. De toute façon, je m'en irai aussi vite que possible. Kara n'a pas l'air de s'en soucier. Elle traverse la place et disparaît dans un couloir. Les garçons restent devant la tente. Je regarde Tania et elle acquiesce de la tête.

Une fois près des garçons, ils se retournent sur nous et Kasey pousse un soupir de soulagement quand il me voit.

_ J'ai cru que tu étais partie du village et que tu m'avais laissé seul avec cette folle.

_ C'est ce que j'ai fait. Enfin, en partie.

_ Tania, que fais-tu debout ?, demande Tobias.

Tania adopte un air coupable. Elle est sur la défensive. En même temps, n'importe qui le serait face à Tobias. C'est une armoire à glace !

_ Je n'avais pas sommeil... Je suis restée avec Nam jusqu'à maintenant.

_ Qu'est-ce qu'on fait alors ?, demandé-je aux deux gars devant moi.

_ Kara est partie voir quelque chose. Je lui ai tout raconté. Ils auront besoin de nous, Nam. Genre vraiment...

L'idée de me battre, dans un vrai combat, me fait froid dans le dos. Après tout, en acceptant d'aider Kasey, je savais que j'allais finir par en arriver là.

_ D'accord.

Nous restons plantés là pendant plusieurs minutes à attendre que Kara pointe le bout de son nez. Tania est assise à côté de moi sur l'estrade. Elle me prend la main. Je me tourne vers elle.

_ Dis-moi ce qu'il y a.

Je soupire. Je dois lui expliquer. Mais je ne sais pas si je fais juste ou pas. Elle doit quand même le savoir. Et si elle faisait quelque chose d'irréparable parce que, justement, elle n'était pas au courant ? Je m'en voudrais encore plus. Je me mords la lèvre inférieure et ouvre la bouche pour lui dire.

_ On...

_ Venez avec moi.

Kara vient de m'interrompre alors que j'allais tout dire à Tania. Pour une fois qu'elle fait un truc bien dans sa vie, celle-là !

_ On en reparlera plus tard. Je ne vais pas lâcher le morceau, me dit Tania en s'éloignant avec un petit sourire.

Son petit sourire. Je ne sais pas pourquoi mais... Elle me fait penser à une sœur. A une petite sœur qu'il faut absolument tenir loin des mauvais garçons ou des autres dangers qui parcourent ce monde.

Je descends de l'estrade et suis Kara, précédée de Tobias et Kasey. Tobias passe devant moi. Kasey attrape mon poignet dès que l'on a parcouru dix mètres du tunnel.

_ Tu es sûre que ça va ?, me demande-t-il.

_ Oui.

Je le force à me lâcher et continue de marcher. Mais Kasey me barre la route. La lumière d'une torche fait briller ses cheveux et ses yeux.

_ Je te dis que ça va, Kasey !

_ T'as peur de le dire à Tania ?

Je relève la tête directement vers lui quand il prononce son nom. Je m'inquiète une fois de plus à l'idée de tout avouer à mon amie. Je soupire et secoue la tête.

_ Je lui dirai, moi. Ne t'en fais pas.

_ Non, c'est à moi de le lui dire, le contredis-je. Je dois le faire. C'est à moi de la protéger.

_ Comme tu voudras. Mais si jamais tu ne t'en sens pas capable, je le ferai si ça peut t'aider.

Je fronce les sourcils à l'entente de sa phrase.

_ Pourquoi tu veux m'aider ?

_ Parce que je te dois bien ça.

Il triture ses mains, à cause de la gêne du moment. Il est plus grand que moi, mais il ne me fait pas peur. Il... Je ne sais pas. Je ne veux pas faire face à lui.

Je le contourne et m'aventure dans le couloir. Kasey me suit un mètre en arrière et nous débouchons enfin sur une petite salle, remplie d'une dizaine de caisses noires.

_ Qu'est-ce que c'est que ça ?, les interrogé-je.

_ Ça, c'est ce pour quoi l'Armée veut nous attaquer.

Tobias saisit un pied de biche et l'enfonce dans la fente en haut d'une des caisses noires. Il pousse et fait sauter le couvercle.

Un tube de vingt centimètres gris se présente sous nos yeux. Je le prends et le regarde attentivement. Le récipient est gris anthracite. Une couleur bleue et luisante provient du liquide qui se balade à l'intérieur, au fur et à mesure qu'on penche la tige à droite ou à gauche. Tellement la lumière bleue est puissante, elle luit dans la pièce toute entière.

On dirait le dessin à côté de l'arbre, sur la carte du bureau, dans la forêt.

_ Qu'est-ce que c'est ?, interroge Kasey au-dessus de mon épaule.

Le savoir aussi proche me donne des frissons. Je me concentre sur le liquide pour essayer d'oublier mon malaise.

_ C'est du Pluratium, explique Tobias. Une invention d'un de nos vendeurs sur la place. Ce liquide est très dangereux.

_ Je l'ai déjà vu.

Tout le monde arrête de respirer quand je parle. Je lève les yeux vers Tobias.

_ A côté de l'arbre de Faniath sur la carte, un dessin représentant le tube était gribouillé juste à côté, entouré de bleu. C'était avant que je ne trouve la note, confirmant l'attaque.

Tobias respire de plus en plus vite. Kara s'approche de lui et le force à la regarder.

_ Que sais-tu ?, gronde-t-elle.

_ Rien. Je ne sais rien. Je ne savais pas qu'ils étaient au courant en haut, crache-t-il en dégageant son bras pour qu'elle le lâche.

_ Attendez, à quoi ça sert ?, s'inquiète Kasey.

_ Ces ogives ont été inventées pour une machine spéciale qui se trouve à Acropolis. L'homme qui l'a conçu vivait là-bas. Il travaillait dans le laboratoire où le Pluratium a été créée. C'était notre taupe, à la Capitale. Mais dès qu'il se doutait qu'il avait été repéré, on l'a évacué en emportant tout le Pluratium qu'on a trouvé.

_ Ça ne répond pas à la question ! Qu'est-ce que ça peut provoquer ?

Kara regarde Tobias de travers et s'éloigne en silence. Je reporte mon regard sur Tobias qui a du mal à formuler sa phrase. Mais, finalement, il la sort d'une traite.

_ Si l'ogive est armée dans la machine, et si elle est lancée, le Pluratium peut détruire une ville entière. Ainsi que tous ces occupants.

Quoi ?

Je regarde autour de moi et vois qu'il y a exactement dix-sept caisses noires. Il y a dix-huit villes sur Atorn. Mes yeux s'agrandissent au fur et à mesure que j'assimile l'information.

L'Armée veut réduire en poussière les villes du Sud, sauf Acropolis.