Après avoir survécu à l'enfer, oui je parle bien des vingt dernières minutes, nous finissons par apercevoir le bout du voyage !

Une étendue de champ de maïs et de blé nous accueille. Personne à l'horizon. C'est le calme plat dehors.

Adréa nous désigne un portail en fer légèrement rouillé dans une allée. Elle est entourée d'arbres touffus. Après avoir ouvert le portail, Léo remonte dans la voiture et nous lance :

- Ici vous serez en sécurité. Personne ne vient jamais dans ce patelin, vous pouvez être tranquille.

- Nous n'avons pas vraiment d'autres options. Lui répond Jaze d'un air neutre mais tout de même reconnaissant.

Adréa ne met pas longtemps à nous faire traverser le chemin qui suit le portail. Un grand virage à droite plus loin et nous arrivons enfin à destination !

Une immense ferme plutôt moderne s'offre à nous. Les bâtiments sont étonnement bien entretenus ! Ils ont tous un toit rouge foncé et des murs blanchâtres décorés de volets rouges également. Les chemins sont propres et la pelouse est très courte ! La personne habitant ici prend vraiment bien soin de son espace de vie.

Adréa gare la voiture à côté d'un grand tracteur et nous dit avec le sourire que nous pouvons enfin descendre du véhicule.

Je dois dire que mettre enfin le pied à terre fait un bien fou après autant de temps de trajet assit à ne rien faire...

Les autres restent silencieux, plus personne n'émet le moindre bruit excepté le son creux de nos pas sur le gravier. Je profite de ce silence pour me laisser bercer par la douce mélodie de la nature qui m'a tant manqué ! Les gazouillis des oiseaux et des insectes me font ressurgir beaucoup de souvenirs de mon monde...

Mais je choisis de ne pas trop divaguer et de me concentrer plutôt sur la ferme en elle-même :

Il y a un bâtiment central plutôt imposant qui comprend deux étages. Je reconnais ensuite une grange un peu plus loin avec une grande porte en bois. A côté se trouve une petite cabane faite de la même matière et pour finir, un immense bâtiment se trouve à cinq-cents mètre de nous. On peut supposer qu'il s'agit de la ménagerie. D'autres bâtiments de taille moyenne sont visibles mais impossible pour le moment de connaître leur fonction.

Soudain, Calua se met à me tirer sur ma manche pour que je cesse de scruter l'horizon et que je regarde en face à moi.

Sortant du premier bâtiment, un homme-dromadaire en salopette grise, bottes noires et chemise blanche s'avance vers nous. Adréa fait le premier pas et vient à sa rencontre avec un large sourire.

« Coucou Farys ! » Lance-t-elle d'un air enjoué.

Ce dernier ne cache pas sa joie de voir la dragonne mais semble tout de même très intrigué par notre présence. On peut voir sur son visage qu'il est même un peu gêné, il termine son avancée dans les bras d'Adréa pour un câlin de retrouvaille.

Calua me murmure alors, stupéfait :

- Tu as vu Rei, il a des cheveux longs noir et brun !

- Oui peut être que certaines espèces en ont. Répondit immédiatement Jaze en haussant les épaules.

- C'est le cas, et je ne vois pas pourquoi vous faites la remarque, j'en ai des cheveux aussi. Et vous n'avez jamais rien dit. Soupir Léo qui est resté non loin de nous et qui a tout entendu.

A la suite de sa remarque, Jaze, Calua et moi sommes resté bloqué devant la crinière de Léo pendant deux petites secondes. Puis, Farys s'avance vers le lion pour le saluer à son tour.

Il se tourne ensuite vers nous. Toujours avec cet air intrigué, il se place en face de nous puis, mal à l'aise, il nous lance avec un léger trac :

- Salut ! Et bienvenu chez moi... hum... Humains ! Je me nomme Farys et ici c'est ma ferme.

- Bonjour ! Merci beaucoup pour votre aide monsieur ! Je lui réponds alors d'un air sympathique. Je m'appelle Rei, ravis de vous rencontrer !

- Bonjour monsieur, Je suis Jaze et je suis enchanté de même.

- Moi c'est Calua !

- C'est bien « Humain » c'est ça ? J'ai peur de m'être trompé. Nous avoue-t-il en se grattant la tête.

- Oui c'est cela, ce n'est pas si difficile à retenir étant donné que ce n'est pas si différent de votre nom d'espèce. Répondit Calua en haussant les épaules.

- Elle est très jolie votre ferme ! Vous avez l'air de bien l'entretenir ! Je décide de le flatter afin de le détendre. Je remarque qu'il est plus petit qu'Adréa d'une tête et moins épais du corps. Il a toutefois un ventre plus rond.

- Oh, merci ! Oui, je l'entretien tous les jours, je préfère vivre dans un endroit propre. Me répond-t-il d'un air plus sympathique.

Après une courte parlotte, Adréa et Léo nous lancent avec regret qu'ils vont devoir s'en aller rejoindre Gahar et Mona à la capitale. Je regarde alors la dragonne d'un air légèrement triste, je me suis déjà attaché à eux et ils doivent partir ? Je voudrais qu'ils restent encore un peu avec nous...

Mais la dragonne me répondit qu'elle et son frère n'ont pas le choix et qu'ils préfèrent rentrer pour ne pas trop éveiller les soupçons. Ils ne veulent pas non plus mettre leur père en danger.

En observant son visage, Adréa semble triste de nous quitter également. Toutefois, elle et Léo nous promettent de revenir la semaine prochaine nous rendre visite.

En guise d'au revoir, je viens enlacer Adréa. Je suis vraiment heureux de voir que nous ne sommes pas seul et que des Humens décident de nous aider ainsi... La dragonne ne semble pas surprise par mon acte et me serre fort dans ses bras. Ma tête se retrouve presque dans sa poitrine et me met un peu dans l'embarras. Après ce câlin, les deux Humens nous disent de bien nous porter et de demander à Farys de les appeler en cas de soucis.

C'est donc ainsi que nos deux amis hors du commun repartent avec la Renault en nous laissant là, en pleine nature, avec un dromadaire fermier.

Un long silence plutôt gênant s'installe alors. Nous n'osons pas trop regarder Farys et ce dernier n'ose pas non plus nous dévisager. Mais après quelques longues secondes insupportable. Jaze se décide à ouvrir une conversation avec le dromadaire :

- Monsieur... hum... Serait-il possible de nous faire visiter ?

- Oh, oui ! bien sûr ! Répond quasi-immédiatement ce dernier en nous tournant le dos et en nous indiquant sa maison. Suivez-moi, je vais d'abord vous montrer où vous allez loger.

Nous nous mettons à suivre l'Humen jusqu'au palier, une fois entré à l'intérieur de la bâtisse. Nous remarquons plusieurs choses : L'odeur y est plutôt agréable, on dirait de l'encens avec un doux parfum de fleur des champs ! Farys nous présente son rez-de-chaussée avec son séjour plutôt grand avec un canapé énorme, une petite cuisine ainsi qu'une grande table de salle à manger. Les meubles que je peux apercevoir sont en bois massif et quelques peu rudimentaires, ils sont là depuis longtemps et cela se voit !

Farys nous désigne par la suite la porte de sa chambre ainsi que la chaufferie. Il nous fait ensuite monter à l'étage par un escalier de pierre pour passer à la suite.

Nous nous arrêtons à la première porte à gauche, Farys respire un coup avant de lancer :

- C'est ici que dormaient Adréa et Léo lorsqu'ils venaient me rendre visite étant petit. Deux d'entre vous peuvent dormir ici, j'aurais une chambre d'ami un peu plus loin avec un autre lit.

- Pas de problème, je dormirais dans la chambre d'ami. Lance alors Jaze d'un air neutre.

- Excusez-moi monsieur, mais je me demandais, Adréa et Léo viennent souvent vous voir ?

- Plus vraiment... Vous savez, j'habite loin et eux commencent à être préoccupés par leur avenir. Bien sûr que j'aimerais les voir plus souvent mais c'est la vie, je n'y peux rien. Nous répond alors Farys d'un air légèrement triste.

- Je comprends, désolé. Lui dis-je en m'excusant, regrettant d'avoir posé la question.

- Ce n'est rien. Conclu-t-il en nous tournant le dos à nouveau.

La visite se poursuit sans autres encombres ou moment gênant. Farys nous raconte quelques anecdotes à propos de sa ferme. Par exemple : Il ne la quitte plus depuis qu'il l'a fait construite il y a vingt ans pour être en marge de la société. Il déteste la ville et préfère rester bien au chaud dans sa ferme. On apprend également que ce dromadaire à quarante-deux ans et qu'il est un très bon ami d'enfance de Gahar, qui lui, en a trente-huit. Il nous avoue avec un sourire nostalgique pendant la visite de la ménagerie qu'il défendait beaucoup le dragon qui se faisait embêter à l'école à cause de sa petite taille.

Cela me fait rire quand on voit maintenant le colosse qu'il est actuellement.

Nous terminons la visite et il est déjà dix-sept heures... Farys nous dit qu'il préfère que l'on reste dans sa maison pour aujourd'hui. Il nous explique qu'il n'a pas trop envie qu'on aille trop nous éparpiller dans la nature pour le moment. Nous obéissons et nous nous retrouvons à l'intérieur pendant que le dromadaire est allé rentrer ses bœufs et ses poules dans leurs enclos.

En attendant, nous sommes assis sur le canapé, un silence pesant prend place pendant plusieurs secondes avant que je ne décide à élever doucement la voix :

- Qu'est-ce que l'on va devenir...

- On se cache, c'est tout ce que l'on peut faire. Soupire Jaze en feuilletant un vieux magazine de mots-croisés par simple curiosité.

- Je refuse de le faire toute ma vie... Ce n'est pas ce que j'appelle vivre ça ! Je lance en me mettant à protester.

- Va dire ça aux pignoufs qui veulent notre peau dehors alors... Me répond Calua d'un air neutre.

Je produis un profond soupire, ils n'ont pas tort mais... Cela me fatigue déjà... Je n'aime pas l'idée d'être chassé comme un animal.

- Les gars, vous le sentez comment Farys. Lance subitement Jaze, toujours le nez dans son magazine.

- C'est un ermite je dirais, du genre à s'en foutre des problèmes des autres. Répond Calua en haussant les épaules.

- Il n'a pas l'air méchant, il est un peu effrayé et ça peut se comprendre, on doit gagner sa confiance pour avoir la conscience tranquille. Je ne vois que ça. Je leur dis en me tournant littéralement les pouces.

- Je suis de votre avis, mais je reste tout de même méfiant à son égard... Soupire Jaze. Il n'a pas cette même aura de confiance que je pouvais sentir chez Gahar ou Adréa.

- Tu dis ça parce que c'est un dromadaire et que tu flash sur une dragonne ? S'esclaffe Calua.

- Non ça c'est Rei Ahah ! Lui répond aussitôt le ténébreux en se mettant à rire à son tour.

- N'importe quoi... Tout ça à cause d'un câlin je vous jure... Je me mets à râler en croisant les bras.

- Non mais arrête, on te connais Rei, on a bien vu comment tu la regardes à chaque fois. Ricane Jaze en fermant son magazine.

- Tu t'entends parler ? Vous déjantez les gars ! Je ronchonne.

- Je le vois rougir ! Rei a une 'tite copine géante ! Réplique Calua, le sourire aux lèvres.

- C'est pas gagné, t'imagine pour l'embrasser ? il lui faudrait un escabeau ! S'esclaffe Jaze en éclatant de rire, Calua le rejoint dans son fou rire. De mon côté je m'indigne.

- Le câlin que j'ai fait à Adréa était purement platonique et j'avais envie de la remercier pour tout ce qu'elle avait fait pour nous... Même si j'aime bien sa compagnie, ça ne veut pas dire qu'on est compatible !

Mais rien ne marche, ils continuent de se moquer... Je prends donc la décision de bouder dans mon coin le temps que ses deux guignols se calment.

Deux heures plus tard, Farys revient de l'extérieur et nous demande de mettre la table le temps qu'il prépare le repas. Ce que nous acceptons de suite sans broncher.

Ce soir nous allons manger une soupe de vermicelle accompagné d'une salade de fruit. Après que nous nous sommes tous installés, l'Humen nous sert un à un. Une fois le bol de soupe en face de moi, curieux, je demande au dromadaire :

- C'est vous qui l'avez faites monsieur ?

- Oh... hum... pas vraiment, il y a un petit marché qui se déroule dans un village à l'Est et j'y vais de temps en temps pour faire mes emplettes et aussi pour vendre mes récoltes. Me répond-t-il calmement. Cependant, j'ai réalisé de A à Z le dessert de ce soir. Je n'en fais pas souvent et j'ai trouvé ça juste de vous en faire profiter.

- C'est trop d'honneur monsieur. Lui répond alors Jaze après avoir goûté la soupe qui n'a pas l'air mauvaise du tout.

- Appelez-moi Farys, je n'aime pas que l'on m'appelle monsieur ça me vieilli.

- Très bien ! Bon appétit à tout le monde alors ! Je lance avec enthousiasme en attendant ma soupe.