Chapitre 5 : Stupéfaction, stress et effroi

Contrairement à hier, le réveil de ce matin est bien plus rapide et brusque. Je sens que l'on me secoue pour me réveiller, je ne tarde pas à ouvrir les yeux.

J'aperçois Jaze, l'air paniqué, qui me supplie de me réveiller.

Sans plus attendre, je me redresse sur le lit, l'air fatigué, je regarde le réveil à côté de mon lit qui indique dix heures. Lentement je lui demande :

- Qu'est-ce qui se passe ?

- Il faut que l'on se barre Rei, et vite ! Bouge ton cul !

Reprenant mes esprits, je me lève rapidement, enfilant mes habits et mes chaussures en quatrième vitesse pour me diriger en bas, là où tout le monde m'attends. Adréa est au téléphone en hautparleur, je peux reconnaitre la voix de Gahar, il est en plein milieu d'une phrase. De ce que je comprends sur le coup, il veut qu'on s'en aille. Après qu'il ait raccroché, je demande toujours un peu sonné :

- Pourquoi devons-nous fuir ?

- Le CRAI est passé à l'action et envoi des agents fouiller les résidences de ses employés, ils vont arriver d'une minute à l'autre. Me répond Mona qui, par ses mouvements, montre de grands signes de stress.

Très vite, je comprends mieux l'urgence de la situation, et me prépare à sortir de la maison avec les autres. Le plan est le suivant : Mona va rester à la maison afin de faire diversion pendant que Léo, Adréa, Jaze, Calua et moi, nous nous dirigerons vers l'appartement d'un certains Joey, un grand ami d'enfance de la dragonne et du lion qu'ils ont prévenu en avance.

C'est donc comme ça que le ténébreux, l'abruti et moi, nous nous sommes retrouvés dans le coffre d'une Renault, serré comme des sardines pendant qu'Adréa et Léo conduisent l'engin.

Personne ne parle pendant le trajet, ce dernier durant une dizaine de minutes. Je n'apprécie pas vraiment la position dans laquelle je me trouve, et je ne pense pas être le seul.

Après quelques brefs rebonds causé très certainement par des dos-d'âne, Adréa vient nous ouvrir le coffre ce qui me fait tomber au sol à cause de mon ancienne position. Calua explose de rire mais Jaze le frappe instantanément au visage pour qu'il se taise, ce n'est clairement pas le moment pour rire.

La dragonne m'aide à me relever. On se trouve dans une sorte de stationnement souterrain, Léo nous explique très brièvement que nous sommes dans le sous-sol de l'immeuble où habite Joey.

Ce dernier habite au troisième étage, Adréa nous explique qu'il habite en collocation avec un Humen loup. Je suppose qu'ils doivent être vraiment des gens de confiance pour qu'Adréa et Léo nous emmène nous cacher chez eux... enfin, je l'espère.

Nous prenons tous l'ascenseur, chose étonnante : Nous tenons tous dedans. Une petite musique agaçante peut être entendu, mais cela ne dure point longtemps, forte heureusement.

Nous nous arrêtons à l'appartement numéro quatre, Adréa sonne, des frissons me parcours tout le corps. Quelle gueule étrange il va encore avoir celui-là ?

Un Humen lapin au pelage vert et aux yeux marron nous ouvre la porte avec rapidité et force, il parait stressé. Il est habillé d'un t-shirt bleu et d'un short gris. Sans trop nous regarder, il nous lance :

- Enfin vous voilà ! Vite vite ! Rentrer !

Il nous laisse pénétrer à l'intérieur d'un vaste trois pièces plutôt bien aménagé et bien rangé, même si pas mal de d'assiettes sales et de débris jonchent la table basse et le sol. Je reste très méfiant.

Le lapin referme la porte derrière nous puis marche très vite pour se mettre face à nous, il s'incline et lance toujours avec cet air stressé :

- B-bonjour ! Je me présente : Je... je suis Joey, ravi de faire votre connaissance !

- Salut. Nous lui répondons quasiment tous en même temps.

- Désolé de débarquer comme ça Joey, on n'a pas eu le choix. Réplique Adréa en prenant un air désolé.

- Ce n'est rien, ce n'est rien, je ne m'attendais pas à vous recevoir si tôt... Et j'ai tellement de questions !

Après avoir expliqué pendant une bonne quinzaine de minutes ce que nous sommes, nous les Humains, Joey semble se calmer pendant un instant.

Calua, n'ayant pas sorti son quota de bêtise pour la matinée, lance d'un air dubitatif :

- Au fait, je ne savais pas que les lapins sont verts dans ce monde, c'est vachement moche !

- QUI EST-CE QUI EST VERT ?! Réplique quasi-instantanément Joey en montrant une agressivité faciale particulièrement surprenante... et adorable car sa petite truffe de lapin s'est aussi mise à bouger ce qui rend le tout plutôt ridicule.

Surprit par cette réponse, Calua, pour sa propre sécurité, fait un pas en arrière, Jaze éclate de rire. Gêné je dis à Joey :

- Excuse mon ami, il est un peu provoquant de nature.

- Non, ça ne fait rien... Me répond le lapin en baissant ses oreilles de honte.

- Joey a subi un traumatisme lorsqu'il était au collège à cause de la couleur spécifique de son pelage... Et bon, fait attention, ça l'a rendu très susceptible. Me murmure Adréa.

- Je n'suis pas susceptible... ronchonne le lapin en croisant les bras.

- Au fait Joey, il est là ton pote ? Lance Léo d'une voix aussi neutre et fatiguée que possible.

À la suite de ça, notre hôte relève ses oreilles et se tourne vers une porte, il vient toquer à cette dernière. « Hé Le loup, ils sont arrivés, lâche ton ordi. ».

Une petite seconde après son annonce, un hurlement puissant se fait entendre et nous fait tous frissonner de surprise et de peur « TU NE ME DONNES PAS D'ORDRE OKAY ?! ».

Puis, après que le lapin soit à plus de deux mètres de la porte, cette dernière s'ouvre avec un fracas considérable et un Humen Loup nous fait désormais face. Il a le poil tout hérissé, des traces de griffures un peu partout sur le corps, un casque audio autour du coup, des piercings sur les oreilles et un regard empli d'une haine incommensurable qui me donne envie de m'en aller au plus vite de cet appartement.

Dans le plus grand des calmes, Joey nous présente son... colloque :

- Je vous présente Le loup.

- Ouais. Nous répond-t-il directement en nous balayant d'un regard inquisiteur.

- C'est juste « Le loup » ? Demande Calua, curieux. Visiblement il n'a l'air de n'en avoir rien à carrer du monstre qu'il a en face de lui. Non, ce qui retient surtout son attention c'est qu'il n'a pas de nom propre...

- C'est JUSTE Le Loup... Soupire celui-ci en haussant le ton avant de se diriger vers le réfrigérateur.

Il sort de ce dernier une bouteille de ce qui semble être de la vodka ainsi qu'un immense steak. Il mord dedans et ingurgite instantanément un morceau avec bestialité. Il garde ensuite le steak pendant d'une manière morbide hors de sa gueule et la bouteille dans sa main droite qu'il débouche d'un seul coup de griffe. Suite à ça, il se dirige à nouveau vers sa chambre.

« Bah, tu t'en vas déjà ? C'est des Humains quand même ! Tu pourrais en avoir quelque chose à foutre non ? ». Ronchonne Joey.

Mais... il n'est pas bien ce lapin ?! Il n'a pas peur que ce monstre le bouffe tout cru ? Non ! Qu'il parte dans sa chambre ! Il a l'air d'y être si bien ! Je me porterais clairement mieux sans ce... truc !

A mon grand bonheur, la bête partit sans dire un mot en direction de sa chambre et en claquant la porte.

Très vite, je regarde Adréa et Léo avec une incompréhension légendaire. Ils étaient au courant que leur pote héberge un truc pareil ? Jaze prit alors la parole d'un air très surpris :

- Charmant. Et y'a du cannibalisme chez les Humens ? Non parce que j'ai un léger doute maintenant.

- Hm... Son cas est particulier, mais n'ayez crainte, il ne s'en prendra jamais à des humains ! Lance Joey en tentant de nous rassurer un peu.

- Mais tu n'as pas peur ? Comment t'en es arrivé à avoir comme colloque ce type ? Demande Calua d'un air curieux.

- C'est... compliqué, vraiment, disons que je fais partis de sa « thérapie ». Tente d'expliquer Joey en se grattant derrière une oreille.

- Soit... on va dire que c'est juste pour cette nuit, tout va bien se passer... Je réplique lentement, fermant la conversation avec un long soupir.

Un long silence s'installe alors. Celui-ci est rapidement coupé par un gargouillement provenant du ventre de cet enfoiré aux cheveux verts. Adréa m'aide à digérer cette rencontre en posant une main sur mon épaule, elle a sûrement cerné que j'ai éprouvé un profond malaise à la vue de cette bête.

Les minutes qui ont suivi, Joey s'occupe de nous réchauffer quelques plats afin de nous rassasier. J'ai toujours en tête cette chose que j'ai aperçu, elle n'a croisé mon regard à peine une seconde que mon sang s'est glacé en un instant.

Alors une telle chose existe ? Et je dois dormir non loin d'elle ?! Pour sauver ma peau ? Quelle ironie...

Nous avons donc mangé un reste de tartiflette et de lasagne. J'ai pour habitude de manger beaucoup, mais cette fois, l'appétit ne vient pas. C'est sans aucun doute lié à cette récente rencontre. Je m'inquiète surtout à propos de quand est-ce que ce type va sortir manger ?! Très vite et sans trop tarder je demande au lapin. Ce dernier hausse les épaules et me répond dans le plus grand des calmes que Le Loup mange quand il le veut et ce dont il a envie dans la limite du raisonnable. Adréa continue de me rassurer, Calua se fout de ma gueule, j'ai envie de lui mettre des tartes parfois à celui-là... Mais ce qui m'étonne le plus, c'est le calme olympien de Jaze. Il n'a pas décroché un mot depuis quelques temps déjà.

Est-il en train de réfléchir à la suite des événements ? Ou est-ce que, comme moi, cette dernière rencontre l'avait-il aussi impacté ?

Après ce repas, Joey nous montre là où nous allons dormir ce soir. A quatre mètres de la chambre de la chose, se trouve celle de Joey. C'est une pièce spacieuse et simplement décoré. Je ne suis pas du genre à juger les goûts et les couleurs, mais Joey a vraiment un problème avec l'agencement des couleurs... Mais je préfère dormir dans un endroit moche plutôt qu'être une minute de plus dans la même salle que ce truc.

La salle est assez grande pour qu'on y dorme tous, il faudra se serrer un peu mais Joey avait prévu à l'avance des tapis de sol et des coussins qu'il avait achetés au préalable.

Malgré qu'on n'ait pas grand-chose à faire dans cet appartement, les heures défilent rapidement. Cet alors que Joey, bien enfermé avec nous dans sa chambre et après une question de ma part, se décide à nous en dire plus sur sa rencontre avec Le Loup.

« Au début j'avais besoin d'un logement car l'orphelinat ne pouvait plus me garder. J'ai donc travaillé très tôt et j'ai donc dû aussi zapper mes études. Je vous épargne les détails.

J'ai rencontré Le Loup dans une boîte de nuit où je m'occupais du stockage de boisson. Pour résumé, je devais faire en sorte qu'il y ait toujours à boire pour les clients. Lui, il était au son.

Il mixe des sons plutôt bons d'ailleurs, je n'ai rien contre sa musique, c'est juste qu'à trop forte dose, j'ai l'impression que ma tête va imploser.

Je l'avais très vite remarqué, et je pense qu'il m'a aussi rapidement cerné également, car il me regardait toujours avec ce regard jaunâtre intense. Et un soir, lorsque je finissais ma journée vers quatre heures du matin, j'ai comme entendu des gémissements dans une ruelle tout près de la boîte de nuit.

En m'y approchant, je le vis, dans l'ombre, comme appuyé contre un mur. Ce que je n'avais pas remarqué tout de suite cependant. C'était contre quoi il s'appuyait réellement...

Le corps gisant d'une prostituée, il venait de lui bouffer la jugulaire d'un seul coup de mâchoire. »

Nous restons attentifs, et apeurés, c'est donc ça qui dort juste à côté ? À quatre mètres de la chambre ?! Malgré cette histoire morbide, je suggère d'en rester là pour le moment. Les autres sont d'accord et proposent de dormir tôt afin d'être en forme pour demain.

Le tapis de sol me fait amèrement regretter le lit douillet de chez Gahar. Mais je parviens à m'endormir, serré entre Calua et Léo. Je choisis rapidement de dormir dos à Léo car sa grosse et épaisse crinière me chatouille les narines.

Après avoir dormis quelques heures, un fort besoin de m'hydrater me réveille. Assommé par le réveil quelque peu pénible, je me lève lourdement dans le but de boire un peu d'eau tout en faisant très attention à ne pas réveiller mes amis. Je pris donc la porte pour me diriger vers la cuisine. Mes yeux sont encore entre-ouvert et je ne distingue pas grand-chose, mise à part qu'une lumière très légère est allumée, comme une veilleuse. En m'avançant plus loin, je remarque une chose qui me fait instantanément ressentir un frisson d'effroi : La porte de la chambre du monstre est grande ouverte, et qu'il n'y a personne à l'intérieur. En l'inspectant rapidement, je remarque que l'intérieur est un bordel sans nom. Les murs sont jonchés de griffures profondes ainsi que des posters représentants des femmes ensanglantées et des groupes de musiques obscurs accompagnés d'une tour d'ordinateur jonchées de néons cyan, créant ainsi une ambiance particulière que je n'avais encore jamais vu.

Je respire fortement, et me frotte les yeux. Le Loup serait sorti ? Je l'espère...

En me retournant pour me diriger à nouveau vers l'évier, mes yeux sont dorénavant un peu plus adaptés à l'obscurité et je parviens à y voir plus clair. Mais en tournant la tête.

Je l'aperçois.

Il est là, appuyé contre le plan de travail à ma droite, les yeux rivés sur la cafetière. Je ne bouge plus d'un cil... Qu'est-ce que je fais ? Qu'est-ce que je fais ?!

Trop tard, il bouge une oreille, et ses yeux pointent maintenant dans ma direction.

« Donc, toi c'est Rei ? ». Me lance-t-il d'un ton sombre.

Je tente de ne pas bouger, je frissonne de tout mon corps, un tremblement de terreur qui me torture, je veux sortir d'ici. Par pitié.

« Ton odeur te trahit. Vous n'êtes là que depuis quelques heures, mais je sais vous différencier »

Je respire un grand coup, et m'avance vers l'évier, je cherche un point d'appui, vite, où je vais m'écrouler sur place.

« Mais... Comment ça ?! ». Lui répondis-je.

Je ne sais pas ce qu'il me veut, mais d'après ce que je vois. Il veut juste du café. Je l'espère.

- Vous, les Humains, vous avez une odeur qui m'attire.

- Et... qu'est-ce que ça veut dire ? Je lui réponds, transpirant de peur.

- Que votre chair est gouteuse. Dit-il en se léchant une canine.

- Vous... vous avez...

- Oui. Me coupe-t-il.

- Mais... qu'est-ce qui vous motive à faire ça ?! La peur laisse place à l'incompréhension. Malgré ce sentiment de terreur constant, ma curiosité semble prendre le dessus.

- La viande... La viande humaine est si particulière. Comme du porc, en plus doux. Lance-t-il d'une voix lente. Il marque une courte pause avant de reprendre : D'ailleurs... tu sais, tu devrais gouter une cuisse. C'est gras, il y a de la viande, c'est l'un de mes morceaux préférés.

Horrifié par ce que je viens d'entendre. Je recule d'un pas, je ne lâcherais pas cet individu du regard, quoiqu'il advienne.

Mais quelque chose me vient d'un seul coup : Joey. Il ne s'est toujours pas fait bouffer lui ? Très vite et frénétiquement, je demande à la bête :

- Et... et le Lapin ?! Joey ?!

- J'me rachète... sinon, tu veux un café ?

Un... un café ?! Il croit que c'est le moment de boire un café ?!

Il faut que je me calme, je ne sais plus quoi penser. Un Loup qui mange des gens... et il est juste en face de moi ! Très vite je lui dis tout en tentant de garder mon calme :

- Non... je... j'ai juste besoin d'un peu d'eau...

- En même temps, trois heures du matin, ça doit être un peu tard pour vous. Je comprends. Réplique-t-il d'un air étrangement enjoué.

- D'accord... je... je crois que je vais me recoucher. Je frémis de tout mon corps, chaque nouveau frisson qui parcourt mon être est une véritable horreur à supporter. Je décide alors de tranquillement me rediriger vers la chambre de Joey en reculant.

- Aller. Bonne nuit. Termine-t-il en posant le fond du paquet de café moulu à côté de la cafetière avant d'embarquer cette dernière dans sa chambre.

Je finis donc ma nuit, marqué, et j'espère ne jamais recroiser cette chose de toute ma putain de vie.

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