Chapitre 2 : Rencontrer. Retrouver. Découvrir

« Sujet#2304, où devrais-je dire « Rei ». Je suis Enzo. Et je fais partis de l'équipe qui s'occupe de vous et qui vous étudie. Comment vous sentez vous ? »

Je ne relève pas la tête, tétanisé par cette voix qui m'est encore inconnue. J'ai l'infime espoir qu'elle appartient à un humain à l'entente de son prénom... Mais je me crée des idées futiles et j'ai trop peur de découvrir quel genre de tête et de corps étrange cette nouvelle personne possède.

Sa voix est déjà plus aigre et aigüe que Gahar, et sonne bizarrement à l'oreille, sans pour autant être gênant.

Je décide finalement de répondre faiblement à sa question :

- Je... je vais bien... Mais où est Gahar ?

- Je le remplace pour le moment, il est occupé. Que faisiez-vous avant que je n'arrive ?
- Et bien... j'écrivais monsieur...

La curiosité prit le dessus, je lève doucement ma tête pour regarder mon interlocuteur.


Il a l'apparence d'un mouton brun anthropomorphique, bien rasé au niveau du visage, habillé d'une blouse blanche tout comme Gahar, il est d'ailleurs beaucoup plus petit que ce dernier et bien plus rondouillard.
Cet Enzo n'a pas l'air tyrannique, même plutôt doux, cela doit venir de l'image que j'associe à l'animal auquel il ressemble. Ça me permet d'être plus à l'aise avec lui dès le début.

« Vous écriviez ? Intéressant... et dans notre langue à ce que je vois. »

Enzo semble surpris que je sois capable de le comprendre et d'écrire dans sa langue, pour moi, il s'agit juste de ma langue maternelle : le français.

Doucement et avec honnêteté je lance :

- Vous savez, j'ai toujours parlé cette langue monsieur.

- C'est fascinant...

L'homme-mouton s'installe sur la chaise en face de moi d'un air très intrigué à mon égard avant de reprendre :

- Et que pouvez-vous nous dire sur l'histoire de votre peuple ?

- Nous... nous sommes des humains, ou dans un terme scientifique « homo-sapiens ». Nous sommes une espèce plutôt jeune par rapport à l'âge de notre terre et... Nous mangeons de tout et prenons trois repas par jour avec un petit supplément vers seize heure...

J'ai du mal à trouver mes mots, je me contente de réciter ce que j'ai bêtement appris en cours d'histoire et de biologie. Je continus mon baratin pendant trente bonnes minutes.

« Je vois que nos deux peuples sont similaires en certains points »

Commente Enzo stupéfait, j'hoche lentement la tête pour approuver mais reste timide dans mon comportement, doucement, je lui réponds :

- Pouvez-vous me dire comment est-ce que je suis arrivé ici ?

- Un accident malencontreux, c'est tout ce que je peux vous dire.

Il lance ça d'un ton sec et froid. Cela me convainc de ne pas revenir sur le sujet pour le moment.

Le mouton continu de me poser différentes questions sur l'humanité, j'essaye de lui répondre le plus correctement possible. Certaines de ses interrogations sont bien trop compliquées pour moi, comme des termes scientifiques ou encore des informations géopolitiques aberrantes sur mon monde.

Après près d'une heure de discutions, Enzo se lève de la chaise et déclare la fin de l'interrogatoire, je le regarde avec les yeux mi-clos, fatigué mais toujours un peu angoissé. Le mouton récupère ma feuille discrètement et me regarde une dernière fois avant de sortir de ma salle.

Je me mets à bailler à m'en décoller la mâchoire, cet interrogatoire m'a donné un sacré mal de tête. Je me lève péniblement pour me diriger vers le lavabo. A force de parler, ça a asséché ma gorge, je décide donc de m'hydrater en buvant directement au robinet avant de m'allonger sur mon lit.

Péniblement, je soupire. Je suis sur le dos et regarde les néons sans penser à rien.

Je suis pris d'un coup d'une soudaine mélancolie, je n'ai plus envie de rien faire et je n'ai même plus la force de penser de manière rationnelle, mon emprisonnement n'arrange pas mon état.

J'ai vraiment besoin de dormir... je ferme lentement mes yeux tout en me tournant sur le lit afin de recevoir le moins de lumière possible du plafond.

J'ignore combien de temps j'ai dormi mais ce fut suffisamment court pour m'empêcher de rêver. Quelque chose me bouscule et fait bouger mon corps dans tous les sens ce qui provoque brutalement mon réveil. Surprit, désorienté et effrayé je me tourne et observe ce qui m'a fait sortir prématurément des bras de Morphée.

Les néons m'éblouissent, je ne distingue pas en premier lieu l'individu mais ce dernier semble resté fixe et droit devant mon lit et se met à me parler avec une voix sombre, calme et très grave.

« Debout la belle au bois dormant. »

Je plisse mes yeux qui commencent à s'habituer à la lumière ambiante et je peux à présent distinguer son visage.

Ce visage bien humain et blanchâtre, ce regard rouge, ces cheveux noirs mi-long et ce manteau long... nul doute ! C'est lui ! C'est Jaze ! Très vite et avec un regain d'espoir et d'énergie, je me lève et prends ce dernier dans mes bras sans dire un mot.

Très vite, mon ami recule et me lance, le visage neutre :

- Désolé mais on n'a pas le temps pour les retrouvailles pour le moment, je suis là pour te faire sortir d'ici.

Je reste sans voix et hoche la tête en gardant mon calme.

En taille, Jaze m'a toujours dépassé, il fait plus d'une tête de plus que moi, cependant je le dépasse en largeur.

Très vite il se met à partir vers la porte en me chuchotant de le suivre. Au passage, je remarque très rapidement que la led de la caméra est éteinte, j'en conclu que les systèmes de surveillances ont sûrement été désactivé.

Je sors donc de la chambre, les couloirs blancs sont larges et silencieux, j'en ai des frissons. Jaze me prend le bras et m'entraine jusqu'au fond du couloir en partant à droite de ma chambre. Il me tendit par la même occasion un bien étrange objet ressemblant à un pistolet orné d'une sorte de capsule grosse comme une boule de pétanque en son centre, juste au-dessus de la détente, qui semble s'ouvrir via un mécanisme, mon ami me donne également une feuille au format A4 pliée en quatre.

« On m'a dit de prendre ça dans la salle juste à côté de la tienne, c'est au cas où tout ne se passerait pas comme prévu, j'ai aussi pris la notice » Me dit-il sur un ton pressé.

Une arme ? Je pense lire la notice avant l'utilisation de cette chose par mesure de précaution, mais dans ce genre de contexte, lire une notice est sûrement la dernière chose à faire. Toutefois, l'objet est plutôt léger, il a l'air d'être fabriqué en métal et je peux y lire l'inscription « Sujet#2303 : « Béatrice » » sur le côté gauche. Je le range dans ma poche avant droite de mon pantalon, n'ayant pas le temps de m'attarder dessus.

Une fois arriver au fond du couloir, nous tournons à gauche puis un nouveau couloir profond et silencieux nous fait face. Mais entrainé par Jaze, je n'ai pas le temps de réfléchir et cours aussi vite que je peux. J'aperçois entretemps des portes sur le côté avec des numéros inscrit sur celles-ci qui ne cesse d'augmenter au fur et à mesure que l'on traverse ce couloir.

Arrivé tout au fond, lorsque nous devons tourné à gauche pour continuer, nous nous faisons surprendre par Enzo qui transportait un plateau sur lequel on peut brièvement apercevoir des endives, des tripes dans un bol ainsi qu'un verre contenant un liquide inconnu opaque.

Le mouton, surprit, laisse tomber le plateau et se met à crier. mais Jaze me lâche le bras et le plaque contre le mur tout en dégainant un couteau qu'il place en travers de la gorge d'Enzo. Là, ce dernier cesse ses cris et regarde mon ami avec terreur. Jaze place doucement son doigt sur les lèvres de l'homme-mouton et prononce le « Chut » le plus calme et le plus flippant que j'ai jamais entendu de toute ma vie. J'ai beau me souvenir que mon ami connait des techniques de self-défense mais le voir exécuter une telle action me fais me sentir beaucoup plus en sécurité à présent.

Puis d'un seul coup, Jaze attrape le mouton par la peau du cou puis se met derrière lui, le poussant pour qu'il avance.

Un otage ? C'est une bonne idée si jamais on tombe dans une situation compliquée. Encore surpris par les actes de mon ami, je lui lance à voix basse pendant que nous avançons d'un pas rapide :

- Comment tu comptes nous faire sortir d'ici ?

- Tu verras, mais si rien ne se passe comme prévu, nous avons un otage, et toi tu as ton... arme.

- Tu n'as pas d'arme à part ta dague ?!

- Tais-toi, on parlera après.

Enzo reste silencieux. Après plusieurs minutes de marche rapide et de couloirs qui semblent interminables, nous arrivons à ce qui semble être un ascenseur. Là, Jaze sort une carte blanchâtre magnétique de sa poche et la fait passé dans un scanner, ce qui a pour effet d'appeler l'engin. Enzo reste tétanisé et silencieux.

Tout se passe si vite que j'ai encore du mal à réaliser ce qui est en train de m'arriver, pendant que l'ascenseur arrive je tente de me remettre les idées en place. Jaze, d'un seul coup, sans prévenir, vient me tapoter le dos en m'envoyant un sourire dessiné brièvement au coin de sa bouche, il me dit alors :

- Ça fait du bien de te revoir, ta gueule insupportable m'avait manqué.

- Ce n'est pas toi qui disais qu'on parlerait après ?

Je lui réponds avec le sourire, un peu d'humour est toujours le bienvenu. La porte de l'ascenseur s'ouvre et nous entrons rapidement à l'intérieur. Jaze appui sur le bouton du Rez-de-chaussée.

« Il n'y a pas grand monde dans ce centre... »

Je me mets à me questionner sur ce détail qui me frappe que maintenant, Jaze hoche la tête et me répond qu'a minuit, peu de gens travail dans le centre, c'est bon à savoir. Ce plan parait sans faille à l'entendre parler, je lui fais entièrement confiance là-dessus. Jaze sait toujours ce qu'il fait.

Les portes de l'ascenseur s'ouvrent une fois arriver à l'étage souhaité. Jaze sort en premier, toujours en braquant Enzo avec son couteau, je le suis de très près en regardant autour de moi.

« On va sortir par derrière, et le mouton, si tu dis le moindre mot, je te tranche la gorge »

J'ai presque de la peine pour Enzo, mais il le fallait... Nous sommes dans une grande salle qui ressemble à un hall, chacun de nos pas résonne et provoque un écho sur le sol de marbre. Derrière nous, nous apercevons un comptoir d'accueil et des portes coulissantes, mais ce n'est pas par-là que nous allons. Nous restons le plus discret possible. Notre destination est une porte se trouvant tout au fond, elle semble entrouverte.

Plus loin on aperçoit un homme-chevreuil habillé d'un bleu de travail qui ne nous a pas encore repéré, il semble se diriger vers la sortie. Nous nous cachons derrière un mur le temps qu'il parte avant de reprendre notre traversé de ce grand hall.

Nous n'avons pas trainé, après seulement quelques minutes, nous voilà arriver à la fameuse porte. Après l'avoir passé, Jaze pousse un profond soupire de soulagement avant d'assommer avec un violent coup de coude Enzo qui s'écroule par terre. Je ferme la porte derrière moi.

Nous sommes dans ce qui semble être une remise, les murs sont gris et la salle semble beaucoup moins propre par rapport à ce que l'on a vu auparavant. Jaze place sa main sur mon épaule et range sa dague. Il me regarde, souriant légèrement, j'en conclus alors que tout son plan s'est déroulé comme prévu. Encore nerveux, je me mets à rire. Mais Jaze me frappe rapidement derrière la tête pour que je me taise. En avançant plus loin dans cette pièce, Nous arrivons devons une grand porte gris-claire fermé avec un gros verrou, là, mon ami se met à frapper cinq fois à cette dernière, puis il croise les bras.

Après quelques secondes, nous entendons le bruit fort et mécanique du verrou qui se déverrouille. Ensuite, la porte s'ouvre dans un grincement désagréable et derrière nous apercevons Gahar en tenue urbaine : Polo bleu et pantalon marron mais toujours pas de chaussure. L'homme-dragon est soucieux, derrière lui, j'entraperçois une grande voiture noire.

Je me mets à sourire à Gahar, ce dernier m'en retourne un léger. Il m'impressionne toujours avec sa taille et son corps mais je sais que je peux lui faire confiance à présent.

Jaze lui sourit également, toujours les bras croisés, puis, sans dire un mot, se dirige vers la voiture en m'invitant à le suivre, ce que je fais immédiatement.

Gahar nous dit de nous cacher à l'arrière le temps d'arriver chez lui.

La voiture ressemble à une Renault Clio mais en beaucoup plus grande, Jaze ouvre la portière et me laisse entrer en premier. Ensuite, nous nous cachons sous une couverture noire tout comme les sièges afin de passer inaperçu.

Nous entendons Gahar monter et allumer le moteur, et me voilà sortis de cet enfer !

Je profite du voyage pour reposer mon esprit et me remettre les idées en place, je n'arrive toujours pas à croire ce qui est en train de m'arriver. Jaze me demande à voix basse si je vais bien, je lui réponds alors que grâce à lui j'ai éviter qu'un homme-mouton me fasse avaler un bol de tripes. Nous nous mettons à rire pendant un court instant, nous aidant ainsi à déstresser.

Pendant le voyage, nous sentons la voiture s'arrêter à deux reprises très brièvement avant de reprendre sa route, Gahar nous rassure en nous informant qu'il s'agit de petits contrôles de sécurité, mais comme ils connait bien les gardiens et qu'il a une bonne tête, ils le laissent passer sans même fouiller sa voiture. Cet homme-dragon a vraiment un pouvoir sur le mental des autres, c'est fou !

Après trente minutes dans une position plutôt désagréable, la voiture s'arrête et une main immense viens me tapoter la tête. Je retire la couverture, Jaze est déjà sortit du véhicule et l'homme-dragon me regarde en souriant, mon ami me lance sur un ton moqueur :

« Bon alors tu te bouges où tu veux retourner là-bas manger tes tripes ? »

Cela me motive suffisamment pour sortir de la voiture.

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