Le Pacte de Sang
J'observais l'horrible paysage qui se dessinait devant moi, totalement impuissante et désemparée. Rubis qui était assise près de moi, sanglotait le corps tremblant. Son visage était teinté de désespoir, des rideaux de larmes tombaient de chaque côté de ses joues. Couverte de sang, son regard était porté sur la lame luisante, qui dépassé de la poitrine de sa mère. Sa main extirpa lentement le poignard, avant que Lucius, ne prenne le corps de Verona, pour le déposait près de celui de Belphégor, sur un bûcher recouvert de roses rouges. Asmodée utilisait son don, afin d'éteindre les dernières flammes, qui continuaient de brûler autour de nous. Il restait à peine une dizaine de gardes sur pieds, et une quinzaine de diablotins, tous étaient occupés, à ramasser les corps inertes de leurs camarades, éparpillés dans le jardin.
Encore étourdie par la dernière onde de choc, je tentai de me relever avec difficulté. Mon corps était lourd et affaiblit par les attaques de Kaya. Les mains appuyées sur le sol de dalles, noircit par les cendres, qui continuaient de flottées dans l'air telles des flocons de neiges. Je sentis la main d'Hadès glisser sur mon dos, et passait son bras sous mon épaule pour me soulever.
-Tu n'as rien ? m'interrogea-t-il avec inquiétude.
-Non, juste un peu sonné, soupirai-je en découvrant avec horreur, trois servantes pendues dans l'immense arbre derrière nous.
-Nous ne sommes plus en sécurité ici. Nous devons partir, ne t'inquiètes pas pour les autres. Ils viendront nous rejoindre, m'avertit Hadès en me regardant dans les yeux.
Je remarquai avec tristesse, sur un coin de la terrasse, une démone pleurait sur le corps d'un des gardes. Lucius serrait Rubis dans ses bras, face au bûcher, qui venait de s'embraser, par la main d'Asmodée. Je ressentais leur douleur rien qu'en les regardant, comme si chaque larme, m'était destiné, pour m'imprégner de leur chagrin.
-D'accord... lui répondis-je tristement.
Il nous téléporta directement dans sa chambre, effaçant les dernières images funestes qui défilaient devant mes yeux.
-Repose toi, je vais rester et veiller sur toi, je ne peux pas te laisser seule après ce qu'il vient de se passer, me confia Hadès en s'installant dans un fauteuil face au lit.
Sans un mot je me tournai pour enlever ma robe mais je me stoppai net et demandai à Hadès de se retourner, le temps d'enfiler une de ses chemises, qui avait été déposée sur le lit. Puis je m'allongeai et m'endormis quelques minutes après, plongeant dans la chaleur de mon rêve :
Hadès était torse-nu allongé sur moi, ses lèvres dévoraient les miennes, pendant que ses mains parcouraient mon corps. Mes doigts accrochés à ses épaules, glissaient jusqu'en bas de son dos. Sa tête se releva un instant, des cornes apparurent sur le dessus de sa tête, et une pointe triangulaire vint effleurer ma main. Je l'observai avec curiosité et toucha la pointe de l'une de ses cornes. Quand soudain une fumée noire rentra dans la pièce, laissant apparaitre une femme, aux longs cheveux noirs et aux cornes pointues, sans visage distinctif avec une peau blafarde. Elle s'approchait lentement de nous, et semblait flotter à quelques centimètres au-dessus du sol. Hadès m'embrassa de nouveau, comme s'il ne percevait pas, cette vision inquiétante dont j'étais témoin. Et d'un geste imprévisible, elle planta une longue lame, dans le dos d'Hadès ce qui lui transperça le cœur.
Je me réveillai en sursaut, le cœur battant à mille à l'heure. Le rêve me parus tellement réel, que je sentis des larmes couler le long de mes joues. Par reflexe, Hadès se téléporta dans le lit et me prit dans ses bras afin de m'apaiser.
Je me laissai aller contre sa poitrine sans résister. J'avais besoin de ce contact, en cet instant et de sentir qu'il était là, bien que j'eusse toujours une certaine rancœur contre lui. Cette sensation d'avoir cru en mon rêve, m'avait terrifié et ravivé des sentiments, que j'avais jusqu'à maintenant, tentais d'enfouir au plus profond de moi. Hadès resta silencieux et me serra fort contre lui. Le réconfort de ses bras, réussit à calmer mon angoisse, et je pus me rendormir.
Le lendemain, je me réveillai le visage posait sur le torse d'Hadès. J'entendais les battements de son cœur, qui résonnaient comme une mélodie apaisante. Je levai les yeux vers lui, et croisai son regard, ses bras qui m'enveloppaient toujours, m'offraient un sentiment de sécurité.
-Depuis combien de temps es-tu réveillé ? demandai-je.
-Après ton réveil, je n'ai pas pu fermer l'œil de la nuit, me répondit-il d'un ton tracassé. Est-ce que ça t'arrive souvent ?
-De quoi parles-tu ? l'interrogeai-je confuse en me redressant.
-De tes cauchemars, ajouta-t-il. Je t'entendais, pendant mes gardes au Royaume de Fer.
-J'en fais régulièrement, mais celui-ci en particulier m'a paru bien plus réel que mes rêves habituels, lui avouai-je en fuyant son regard.
-Et est-ce-que certains se sont déjà réalisés ? me demanda-t-il intrigué.
-D'une certaine manière, te concernant, c'est comme si on avait tenté de me prévenir, mais je ne les ai jamais pris au sérieux, rétorquai-je en repensant à mon rêve.
Même si je savais, qu'il pouvait déceler mes émotions, la tristesse que j'éprouvé ne pouvait se taire. La vision de l'avoir cru mort, m'avait tellement effrayée, l'idée même que ce cauchemar se réalise me fit frissonnée.
-Tu étais dans mon rêve... soupirai-je.
-Et qu'est-ce-que je faisais dans ton rêve ? me demanda-t-il d'un air présomptueux.
Je me mordis la lèvre, ma respiration s'attarda avant de lui répondre :
-Tu étais mort... Une femme t'a tué, je n'ai pas vu son visage, puisqu'elle n'en avait pas... rétorquai-je le plus calmement possible.
-Te rappelles tu d'autres détails ? m'interrogea Hadès la mâchoire crispée.
-Non, hormis que tu avais des cornes et une queue... D'ailleurs je me demandai pourquoi tu es le seul à ne pas en avoir ? lui demandai-je en retour le regard sérieux.
-Cela fait presque dix-huit ans que je les dissimule, mon don me permet de modifier mon apparence, c'est de cette manière que j'ai pu prétendre être un démon commun. J'ai fini par m'en m'habitué à ne pas les avoir constamment, m'expliqua Hadès adossait contre la tête de lit.
Je l'observai silencieusement après cette confession, qui me rappela sa trahison. Il semblait aussi perdu que moi dans ses pensées.
-J'aimerais te proposer de faire un pacte de sang avec moi, annonça-t-il en prenant un ton des plus sérieux. Ce serait évidemment, uniquement pour ton bien. Te rappelles-tu ? Ce pacte permet aux démons de communiquer par la pensée, peu importe la distance. Il nous permettrait également de partager nos rêves et nos souvenirs. Mais tu dois savoir que c'est un acte irréversible.
- Après tout ce que tu as fait, je ne suis pas sûre que ça soit une bonne idée. Je ne t'ai pas pardonné tes mensonges, qui m'ont profondément blessé, j'ignore même si j'en serai capable un jour, rétorquai-je amèrement.
- Je regrette de t'avoir blessé, ça n'a jamais était mon intention. C'étaient les ordres et ma mission, si tu savais le nombre de fois, où j'ai voulu te parler et te dire la vérité. Sache que tout ce que nous avons partagés, était sincère pour moi. Je comprends que tu ne veuille pas me faire confiance, mais après ce qu'il s'est passé hier soir, cela me permettrait de te protéger, dans le cas, où nous serions amenés à être séparer. Tu pourrais même accéder à tous mes souvenirs si tu le désire, et connaître toute la vérité à mon sujet. Enfin, si cela peut te rassurer, le lien peut être contrôlé et réduit au silence selon notre volonté, rétorqua Hadès d'une voix pleine de remords.
Mes pensées s'emmêlèrent, au fond de moi je voulais croire en cette sincérité, que je cru percevoir dans son regard. J'avais envie de lui faire confiance et d'en savoir plus sur lui. L'idée n'était peut-être pas si terrible, que cela en avait l'air.
-Et comment établi-t-on un pacte de sang ? De quoi avons-nous besoin ? Le questionnai-je curieuse et en même temps troublée.
-Oh pas grand-chose ton âme suffira, répondit-il impassible.
-Comment ça mon âme ? rétorquai-je inquiète.
-Je plaisante, je voulais juste détendre l'atmosphère, me dit-il avec un sourire en coin.
Je levai les yeux au ciel en réponse. Puis Hadès poursuivit tout en se levant.
-Tout d'abord, il faut que chacun de nous se fasse une entaille au creux de la paume, ensuite nous avons juste à réciter un serment, en nous tenant la main, afin de mêler nos sangs, m'expliqua-t-il tout en allumant des bougies dans la chambre.
-Et les bougies c'est pour quoi ? demandai-je sceptique.
-Ah ça ? C'est juste pour l'ambiance et je trouve que c'est plus romantique. D'ailleurs, tu peux aussi enlever tes vêtements si tu le souhaite, ça ne me dérange pas, répondit-il tout en me provoquant du regard.
-Fais attention à ce que tu souhaites démon, ça pourrait bien être la dernière chose que tu verrais, avant de perdre malencontreusement la vue, l'avertis-je.
Il reprit son sérieux, se rapprocha de moi, sortit sa lame puis me la tendit.
-Veux-tu bien te lier à moi ? ajouta-t-il d'un ton solennel.
Je réfléchis un court instant, l'idée que nos pensées soient liées pour toujours me laissait perplexe. Mais ça pouvait avoir son utilité si nous devions être séparés. Et après tout, s'il pouvait être couper selon notre bon vouloir. Sans plus attendre je pris la lame avec détermination, je me tranchai la paume d'un coup sec laissant ruisseler quelques gouttes de sangs.
-Et ensuite ? dis-je en lui retournant la lame.
Il la saisi, me regarda intensément, se coupa le creux de la main à son tour puis la joignit à la mienne.
-Répète après moi : Par mon sang, je fais le serment de me lier à toi pour l'éternité.
Je répétai mot pour mot ses paroles, sentant une brûlure émaner de nos mains liées.
Je sentis aussitôt une présence dans mon esprit, comme quand l'on pense être seul et que l'on nous observe. La voix d'Hadès retentit dans ma tête comme un murmure, une caresse dans mes oreilles :
« Princesse... »
Assis face à moi sur son lit, il se leva et parti chercher deux morceaux de tissus dans l'une de ses commodes. Il prit ma main ensanglantée et me fit un bandage.
Quelqu'un vint frapper à la porte me ramenant à la réalité. Je repensai à Rubis et Ryu, ainsi que Hel qui avait était kidnappée. La mort soudaine de leurs parents, me glaçait le sang.
« C'est Lucius. »
La voix d'Hadès résonnait sans qu'il n'ouvre les lèvres. Je l'entendis lui répondre dans son esprit :
« Entre »
La porte s'ouvrit, Lucius apparut, vêtu d'une veste en cuir, aussi sombre que son regard.
-Rubis voudrais que vous nous accompagnés, nous annonça-t-il.
-Où et dans combien de temps ? demandai-je concerné.
-Dans une heure... Elle voulait attaquer le Royaume des Ombres, mais père la dissuadait et suggère que l'on aille voir Bélial avant, pour lui demandai de l'aide, expliqua Lucius en se posant dans un fauteuil.
-D'accord je vais me préparer et je viens, dis-je déterminée à venir en aide.
J'entendis au même moment les pensées d'Hadès, il semblait contrarié et furieux.
« Je ne veux pas, que nous la mettions en danger ! »
Bien que je n'entendisse pas les pensées de Lucius, je savais qu'ils communiqués ensemble.
-Si vous pouviez éviter, de faire comme si je n'étais pas là, quand vous parlez de moi, leur dis-je légèrement agacée.
-Je suis désolé, mais je ne veux pas que tu ailles avec eux, c'est une mauvaise idée ! s'exclama Hadès d'un ton grave.
-On a besoin d'elle pour convaincre Bélial et tu le sais très bien, renchérit Lucius.
-C'est décidé je viens, avec ou sans toi Hadès, répondis-je avec fermeté en le défiant du regard.
« Je ne veux pas qu'il t'arrive quelque chose... » continua la voix d'Hadès dans mon esprit.
-Comment fait-on pour bloquer le lien ? demandai-je à Lucius en ignorant ses avertissements.
-Il faut que vous établissiez vos codes, avec Rubis nous avons trois mots que nous utilisons : « Silence » : quand nous sommes fâchés ou occupés, cela nous bloque l'accès des pensées de l'autre. Ou si tu préfères « La ferme » à la place c'est ce que j'utilise avec Hadès. « Urgent » : comme tu l'imagines pour toutes les situations urgentes, même si nous sommes en Silence, nous entendons l'alerte et le message que l'on veut se transmettre. Enfin, pour mettre fin au Silence on utilise : « Permission » m'expliqua-t-il avec calme.
-Merci Lucius, si vous pouvez sortir tous les deux que je puisse enfin me préparer, leur dis-je en insistant mon regard sur Hadès.
Ils se levèrent tous deux et sortir de la pièce. Une servante vint m'aider à me laver rapidement, elle me donna des vêtements que j'enfilai aussitôt. Un pantalon noir ajusté à ma taille et un bustier rouge, probablement des vêtements de Rubis. Des gouttes écarlates étaient brodées sur le haut, semblable à l'emblème que portait ses gardes. Une fois terminé j'appelai Hadès :
« Je suis prêtes. »
Il réapparut dans la chambre, me prit la main et nous téléporta. Nous nous retrouvâmes dans une grande salle, avec un magnifique lustre parsemé de rubis, reflétant la lumière de petites taches rouge sur le sol en marbre.
Asmodée était debout dans son uniforme royal noir, il discutait avec Rubis qui était habillée d'un pantalon bordeaux en cuir et un corset de la même teinte, ses cheveux écarlates lâchés tombaient au milieu de son dos. Ryu portait un uniforme rouge aux épaulettes dorées et semblait perdu dans ses pensées. Lucius se tenait en retrait près de son père et Rubis.
-Il faut partir maintenant, nous avons assez attendu ! s'exclama Rubis au roi.
-Tu vas vraiment venir ? lança Ryu à Hadès surpris de sa présence.
-Oui, je vais venir vous aider, répondit Hadès avec une certaine retenue.
-Je suis sûr que Nyx sera ravi de te revoir, ajouta Ryu sur un ton provoquant.
Je vis soudainement, le visage d'une très belle femme aux cheveux châtain clair, apparaître dans mon esprit, ou plutôt celui d'Hadès, qui était resté silencieux jusqu'à l'annonce de ce prénom.
-Qui-est-ce ? demandai-je alors soucieuse de connaitre la réponse.
« Elle n'est rien pour moi. » retentit la voix d'Hadès dans ma tête.
-C'est la fille de Bélial, Hadès ne t'as pas parlé d'elle ? ajouta-t-il en le défiant du regard.
Je ressentis une vague de colère, dans l'esprit d'Hadès, qui tenter de lutter et de ne rien laisser paraitre.
-Ryu ce n'est pas le moment ! Nous devons partir, intervint Rubis les yeux rouges.
-Oui, tu as raison allons-y maintenant, répondit Ryu un sourire en coin, juste avant de se téléporter en un bruyant flash.
Rubis prit la main de Lucius et ils se téléportèrent à leur tour, suivi d'Asmodée et d'une dizaine de gardes. Je restais seule face à Hadès dans un silence pesant.
-Avant de partir j'aimerai sérieusement que tu m'explique ou Ryu voulait en venir ? le questionnai-je, légèrement agacée par cette femme que je ne connaissais pas.
-Quand nous étions jeunes Nyx et moi étions proches, elle est tombée amoureuse de moi mais je ne l'aimais pas comme elle l'aurait espéré, c'est pourquoi j'ai mis un terme à notre amitié, ce qui la profondément blessé, m'expliqua Hadès sereinement.
-C'est quand la dernière fois que tu l'as vu ? demandai-je en le regardant dans les yeux.
-Je ne l'ai pas revu depuis la fin de la guerre, quand elle m'a avouée ses sentiments. Bélial a pris mon refus pour un affront, c'est pour cette raison qu'il s'était allié à Lilith. Mon père a eu beaucoup de mal à le dissuadé de revenir de notre côté. C'est uniquement parce que sa femme Némésis était proche de ma mère, qu'il a accepté. Le péché apparenté à leur royaume étant la colère, ils sont très impulsifs et imprévisibles, me répondit Hadès tout en me prenant la main. Tu es sûre de vouloir y aller ?
-Oui... soupirai-je déterminée en lui prenant la main.
Son regard se posa un instant sur moi, sans rien dire. Je sentis son esprit tourmenté, telle une mer agitée. Mais après le rêve que je venais de faire, je n'avais pas envie de resté une minute de plus ici. Les images de notre baiser, apparut juste avant qu'Hadès nous téléporte.
Nous nous retrouvions au bord d'une vertigineuse falaise de roches blanches, un palais de couleur rouge se dressait sur ses bords. La rivière des âmes se jetait, devant nous en une cascade dans une immense mer écarlate. Asmodée, Lucius, Rubis, Ryu et les gardes nous attendaient devant une grande grille, où se trouvait l'entrée de ce somptueux château.
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