Les premiers rayons de soleil caressaient timidement l'horizon, je commençais à somnoler à moitié, bercer par le battement des ailes de Gabriel. Alec nous suivait avec Hadès à bout de bras, suivi par Félix et Léon. Nous volions durant quelques heures, avant d'apercevoir une immense tour argentée, qui s'élevait au milieu de l'océan. Elle dominait de plusieurs centaine de mètres le centre d'une forteresse dont les murs étaient formés de plaques métalliques. Une fois arrivé à son sommet, je découvrais une cinquantaine de gardes en armure le long des remparts. Plusieurs canons se trouvaient de chaque côté, ainsi que quatre catapultes dans chacun des coins. Un endroit hostile pour quiconque tenterait d'y pénétrer sans y avoir été invité.   

- Je ne voudrais pas abuser de ton hospitalité mais pourrions-nous avoir des chambres s'il-te-plaît Alec ? demanda Gabriel.

- Oui bien sûr, répondit le roi en appelant une servante. Lucie va vous y conduire, ajouta-t-il.

Gabriel suivit la femme aux cheveux dorés, me portant toujours dans ses bras, nous prîmes l'escalier qui descendait à n'en plus finir. Chaque palier était numéroté par des symboles dans la langue des Premiers Anges. Nous continuions notre descente jusqu'à un étage numéroté soixante-dix-huit, nous empruntions ses couloirs pour arrivés dans une grande chambre, aux murs décorés de sculptures d'argent représentant des plumes. Sur la commode, il y avait un bouquet de fleurs fait de plusieurs métaux, d'or et de bronze. Quatre grandes barres torsadées formaient un lit à baldaquin argenté, un voilage blanc était suspendu de chaque côté. Gabriel me déposa sur le couchage.

- Tu vas bien ? me demandait-il calmement.

- Oui je suis juste très fatigué, dis-je.

- C'est normal, tu as dû te vidée de toute ton énergie, avec la puissance que tu as utilisée, au moins à tes dix-huit ans, tout le monde portera un bouclier et une armure de protection, me dit-il en plaisantant, ce qui me fit sourire.

- Mais comment Bélial est-il sortie de l'enfer, pourquoi voulait-il s'en prendre à moi ? lui demandai-je inquiète.

- Je l'ignore malheureusement, mais ne t'inquiète pas, ici nous sommes en sécurité. Je tenais à te remercier pour tout à l'heure, mais tu n'aurais pas dû prendre autant de risques. Tu t'es mise inutilement en danger, c'est moi qui suis censé te protéger.

-Je suis désolé, j'aurais peut-être dû y réfléchir avant, répondis-je

-Je vais envoyer un messager à mère pour la prévenir, en attendant repose toi, ajouta Gabriel.

Il me serra fort dans ses bras et embrassa mon front, avant de sortir de la chambre, un instant après Hadès rentra.

- Vous allez bien Princesse ? me demanda-t-il.

- Oui je vais bien, lui répondis-je.

- Le Royaume de Fer est réputé pour posséder le plus impressionnant terrain d'entraînement. C'est pourquoi j'aimerai y aller tôt demain matin, afin de m'y entraînais. Je trouverai un garde pour me remplacer, ne vous en faites pas.

- Je veux venir m'entraîner aussi, lui répondis-je.

- Les princesses ne s'entraînent pas et je doute que votre frère vous y autorise.

- Je vais me reposer, mais n'oubliez pas de me réveiller demain matin quand ça sera l'heure et je veux une tenue de garde afin de ne pas me faire remarquer.

Hadès leva les yeux au ciel et me répondit avant de partir :

- Dormez bien Princesse.

***

Le lendemain, j'entendais Hadès frapper à la porte, je me levai pour lui ouvrir.

- Bonjour Princesse, je vous remets votre toilette du jour en espérant que vous la trouverez à votre goût, me dit-il en me tendant la tenue de garde.

J'enfilais rapidement la chemise blanche qui était trop grande pour moi, la glissant à l'intérieur du pantalon et resserrai le tout avec une ceinture. Je mis la veste noire aux épaulettes argentés, il y avait un emblème brodé dessus. Chaque royaume avait le leur, celui-ci venait du mien, il était bleu ciel avec une plume argenté. Je finis par mettre les bottes et me nouais les cheveux en un chignon. Je sortis de la chambre, et suivis Hadès qui m'attendait devant ma porte. Nous descendîmes le long escalier, près d'une soixantaine d'étages, avec un nombre incalculable de marches. Je n'avais même pas commencé l'entraînement que j'étais déjà à bout de souffle. Une fois dehors, pas la moindre verdure, le terrain d'entraînement remplissait toute la surface de la cour ovale, des cibles dessinaient sur des plaques circulaires métalliques étaient disposé sur la droite. De l'autre côté des anges s'entraînaient avec des mannequins en métal. Il y avait même un parcours d'obstacles avec des lames qui se balançaient suspendue à un système de poulie. Un arsenal d'armes était déployé au milieu de la cour avec plusieurs tonneaux débordant de flèches. Un groupe d'une vingtaine de gardes courraient tout autour du terrain.

Je remarquais Gabriel qui se battait contre trois gardes. Pendant que Félix tirait à l'arc sur les cibles de l'autre côté.

- Par quoi voulez-vous commencer Princesse ? me demanda Hadès.

- Le tir à l'arc, répondis-je déterminée.

Hadès m'accompagna près d'un point de tir. Il me donna un arc et des flèches.

- Bonne chance Princesse ! Essayez de ne pas vous blesser, me dit-il d'un ton sarcastique.

Félix ne parut pas me reconnaître, j'étais sur le point de tir, à seulement quelques mètres de lui. Je l'observais pour pouvoir reproduire ses gestes. Une fois prête, je me lançai l'arc en mains, posa la flèche dans l'encoche, et tirai sur la corde, je me concentrai sur la cible. J'essayais de rechercher la même force que lorsque je me suis trouvée face au monstre. Mon esprit focalisé sur mon objectif, jusqu'à ressentir des picotements dans le bout de mes doigts, puis je lâchais la corde de mon arc. Cherchant le cercle rouge au milieu, la flèche partie à toute vitesse, et transperça le haut de la cible, s'enfonçant presque entièrement dedans. Hadès, qui regardait, me fit un sourire. Même si j'avais manqué le centre, j'étais assez satisfaite d'avoir touché la cible. Félix me dévisager étonner, en regardant Hadès, il comprit qui j'étais, et s'avança vers nous.

- Bonjour Princesse ! Hadès tu n'as pas vu Léon ? demanda-t-il.

- Qui ça ? répondit-il surpris.

- Le garde qui était avec nous hier, l'ange, il a trente minutes de retard.

- Non désolé, je ne l'ai pas vu, répondit Hadès.

- Félix, surtout ne dites pas à mon frère que vous m'avez vu !

Il acquiesça et repartit sur sa cible.

- Ne me dites pas que je porte la tenue de ce Léon ? dis-je à Hadès avec embarras.

- Vous m'avez demandé une tenue. Vous l'avez. Je ne vois pas où est le problème ? répondit-il.

Je vis au loin Léon arriver avec une tenue grise beaucoup trop grande pour lui.

- Vous voyez ? Il a réussi à s'habiller sans problèmes, ne vous inquiétez pas pour lui... reprit Hadès en souriant.

Gabriel s'arrêta en plein combat et alla vers Léon. Je l'entendais crier d'ici alors que nous étions à l'opposé de la cour.

- TU FERAS CENT POMPES ET DIX TOURS DE TERRAINS !

Je me sentais tellement gênée pour lui, que je n'osais plus regarder dans sa direction. Hadès me tendit un couteau.

- Essayez avec ça.

Je saisis la lame par le pommeau, mais Hadès me corrigea en plaçant le côté pointu dans ma main. Il m'aida à ajuster ma position, leva mon bras près de mon visage. Sa main glissa sur ma hanche pour me placer face à la cible, une jambe légèrement ouverte à droite. Son contact me donna un léger frisson et fit accélérer les battements de mon cœur. Je tentais de me concentrer sur mon objectif. Je sentais l'énergie montait jusqu'à la lame comme si c'était une extension de mon corps. Je la lançai aussitôt, elle se planta juste à quelques centimètres au-dessus du centre de la cible. J'entendis au loin la voix d'Alec appelé Hadès, il se dirigeait vers nous.

- J'aimerais une revanche ? Mais cette fois tous les coups seront permis ! Suis-moi, nous allons sur l'arène !

Gabriel était toujours en train de s'entraîner de l'autre côté. Je vis Léon qui devait sûrement être à son troisième tour de terrain. Je commençais à suivre Alec, et Hadès, qui marchaient le long d'un rempart, ils montèrent un escalier. Arrivés en haut, le roi tira une manivelle, des plaques métalliques se soulevèrent des murs extérieurs, formant un grand cercle environ une trentaine de mètre juste au-dessus de l'océan.

Alec déploya ses ailes, saisi une épée dans l'un des tonneaux, et se dirigea sur l'arène. Hadès pris une arme et se téléporta pour rejoindre Alec.

Je m'approchais du bord du rempart pour mieux les observer. Ils se mirent tous deux en garde, Alec s’élança sa rapière pointée sur son adversaire, mais se heurta à la parade de celui-ci. Il continua tentant de frapper les côtes, mais mon garde ne relâcha pas sa posture. Alec s’élança à nouveau sur lui pour le frapper près de la tête, mais ce dernier se téléporta. Il se retrouva derrière lui puis le poussa d'un puissant coup de pied. Alec tomba sur les genoux, il jeta son épée en l'air, qui se mit à se mouvoir seule. Elle plongea aussitôt sur Hadès qui parait chaque coup avec de plus en plus de mal. L'épée était plus rapide et précise, n’éprouvant aucune fatigue elle semblait animée d’une vitalité sans limite. Alec se tenait debout en retrait, concentré sur les mouvements de son arme. Hadès se téléporta derrière lui puis le poussa à nouveau du pied, l'épée tomba en même temps que le roi.

Quand il se releva, la rapière partie comme une flèche sur Hadès qui dû se téléporter pour l'éviter de justesse. Alec semblait imperturbable, les yeux fixés sur son épée. Mon garde continuait de se téléporter à plusieurs reprises pour esquiver les coups, tout en enlevant sa veste au fur et à mesure. Il finit par se jeter sur Alec, le maintenant au sol et lui banda les yeux avec son habit. Mais celui-ci parvint à inverser la tendance. En se retournant, il fit basculer Hadès, d’une surprenant prise avec ses jambes. Une fois debout, il enleva rapidement la veste, qui lui obstruée la vue. Soudain, la plateforme se plia de chaque côté, se rétrécissent pour formait une poutre métallique. Tous deux de chaque côté, se ruèrent l’un sur l’autre, leur épée en avant. Hadès se téléporta juste derrière son adversaire, au dernier moment. Mais Alec avait anticipé son attaque, et lui donna un coup de pied-arrière, ce qui déséquilibra Hadès. Le roi se retourna pour le balayer de sa jambe, puis pointa sa lame sous la gorge.

-Tu t’es bien défendu, j’ai même pensé, que tu allais finir par m’avoir, rétorqua Alec en aidant Hadès à se relever.

-Votre Majesté est trop modeste, répondit Hadès en remettant sa veste.

La plateforme repris sa forme initiale en quelques secondes.

- Attendez avant de partir ! J'aimerai essayer quelque chose. Si quelqu'un aurait l'amabilité de bien vouloir venir me chercher ?

Hadès se téléporta en moins de deux secondes à côté de moi, me prit la main et en un flash, je me retrouvais sur la plateforme, me rendant compte une fois dessus de sa hauteur.

- Majesté, j'aimerai vous demandez un service. Si vous pouviez m'envoyer des objets métalliques, j'aimerais pouvoir essayer de les bloquer.

Il me regarda surprit par ma demande.

- Princesse, je pense qu'il ne faut peut-être pas sauter les étapes dans votre entraînement improvisé, me dit Hadès.

- Je voulais commencer avec des couteaux, mais si ça peut vous rassurer, j'ai une pièce !

Je l'envoyais à Alec qui la rattrapa.

- J'aimerais que vous visiez mon visage, mais n'y allait pas trop fort je vous prie.

- Très bien, dès que vous être prête, faites-moi signe et je vous l'enverrai, me dit Alec.

Je restais droite et essayais de me concentrer sur la pièce. Je lui fis signe de la main. Puis, il jeta la pièce en l'air et l'envoya lentement sur moi. Je m'efforçai de stopper sa trajectoire, mettant ma main comme bouclier, je sentais venir mon pouvoir invisible, et réussi à faire stopper la pièce.

- Vous avez le don de contrôler les métaux ? me demanda Alec surprit.

- Je ne suis pas sûre, lui répondis-je.

Je lui racontais ce qu'il s'était passé avec Bélial et mon entraînement avec la flèche et le couteau. Il semblait intrigué et intéressé.

- Vous avez peut-être le talent de télékinésie ? C'est un talent rare et puissant ! D'après ce que vous me décrivez, vous pourriez contrôler tous les éléments, me dit-il. J'aimerais faire une expérience, si cela ne vous dérange pas ? Hadès si vous pouviez me ramener un tabouret en bois qui se trouve sur le rempart, s'il-vous-plaît ?

Hadès se téléporta et revint avec le tabouret.

- Voilà ! Si vous pouvez le faire voler quelques instants, nous serons fixés sur votre don, reprit-il avant de reculer.

- Je vais essayer, lui répondis-je en me concentrant.

Je pointais ma main vers le tabouret en prenant une profonde inspiration. Je mis quelques minutes à ressentir l'énergie au creux de ma paume circulé jusqu'au bout de mes doigts, puis, le tabouret se leva de quelques centimètres au-dessus du sol. Je me concentrais davantage, mais il retomba aussitôt.

- C'est un bon début ! s'exclama Alec. Pensez-vous que vous pourriez le détruire ?

J'étais un peu surprise par sa demande, mais la curiosité de connaître l'étendue de mon talent était plus forte. Je me focalisais encore une fois sur le tabouret. Je sentais une puissance se propageant dans tout mon corps et s'échappait par ma main. L'objet se mis à tressaillir, un pied explosa et un deuxième en plusieurs morceaux. Bien que j'étais contente de mon exploit, je ressentais une grande faiblesse m'envahir.

- C'est impressionnant ! Vous n'imaginez pas tout ce que vous pouvez faire. Avec un peu d'entraînement ici vous pourriez même détruire un Ancien Démon, sans même une lame de plume, me dit Alec à la fois enthousiaste et me mettant un peu mal à l'aise à l'idée de tuer un être vivant.

- Pardon Hadès, je ne dis pas ça pour vous, reprit Alec, puis il enleva sa chemise exposant ses muscles saillants.

- J'aimerai faire un dernier essai voulez-vous ? Je vais sauter dans le vide et j'aimerai que vous tentiez de m'intercepter, du moins, m'empêchiez de tomber dans l'eau. Elle est plutôt froide par ici, ajouta-t-il en souriant. Ne vous mettez pas trop la pression, je déploierai mes ailes si je m'approche trop près de l'eau.

- Je ne suis pas sûre d'y arriver... répondis-je me sentant de plus en plus fatiguée.

Il sauta dans le vide, je positionnais mes mains en avant, les pieds au bord de la plateforme. Mes doigts commençaient à me picoter, je m'efforçai de le rattraper avant qu'il ne touche l'eau, malgré la vitesse de sa chute, je parvins avec beaucoup de mal à l'immobiliser un instant dans les airs. Je sentais son poids m'attirait vers lui, j'essayais de le remonter en tirant mentalement sur des fils invisibles qui me reliaient à lui. J'étais de plus en plus essoufflée comme si je soulevais un homme de quatre-vingts kilos à bout de bras. Je sentais mes forces faiblir, ma vision se brouillait, je finis par lâcher prise et m'évanouir, me laissant tomber dans le vide. Alec avait déployé ses ailes et tenta de voler vers moi.

Un flash retenti, Hadès me rattrapa au vol puis me ramena sur la plateforme dans un second flash. Je repris mes esprits dans les bras de mon garde, pendant qu'Alec remettait sa chemise.

- Vous allez bien Princesse ? me demanda Alec inquiet. Je suis désolé, je n'aurai pas dû vous en demander autant, reprit-il.

- Je vais bien merci, je suis juste fatigué, j'aimerai aller me reposer. Si vous pouviez garder cette expérience secrète je vous en serais reconnaissante, lui répondis-je.

- Je vais vous ramener dans votre chambre, afin de vous éviter ces escaliers interminables, me proposa Hadès.

- Merci, lui répondis-je.

Je sentais les battements de son cœur vibrer sous sa poitrine, en un flash nous nous retrouvions dans ma chambre. Il était proche de midi, mais je n'avais pas faim. J'étais juste très fatiguée comme si j'avais marché des kilomètres avec des charges lourdes sur le dos. Je m'allongeais dans le lit puis je m'endormis aussitôt.

Je me mis à rêver : « Un feu immense brûlait sur un bûcher, je sentais sa chaleur me morde les joues. Le paysage était sombre, le sol était tapi de roches noires volcaniques parsemésd'ossements noircis. Je ne voyais pas de ciel, seul la fumée noire émise par le feu, flottée dans l'air répandant une odeur âcre de soufre qui me piquait les yeux. Des milliers de démons communs et de diablotins dansaient autour. Sur le sommet d'un rocher, j'aperçus Hadès entouré d'ombre me fixant avec ses yeux rouges"