L'Expedition

Point de vue de Gabriel :

Le clair de lune, se reflétait au milieu des flaques de sang et des éclats de verre. Le sol était un tapis de corps inanimés, anges et démons entremêlés parmi les décombres. L'odeur de la mort empoisonnait l'atmosphère, un rappel impitoyable de la brutalité de la cérémonie. Une profonde crevasse traversait la terrasse, témoignant du passage de Bélial. Dans la salle de bal, les buffets, qui étaient chargés de mets délicieux, furent désormais occupés par des anges blessés. Mélissa, Eden et Chen, les seuls à posséder le don de guérison, étaient chargés de soigner, les blessures les plus graves des victimes. Devant la porte-fenêtre, les servantes nettoyaient les débris, pendant que les gardes ramassaient dignement les corps des anges. Quinze minutes venaient de s'écouler, depuis la fuite soudaine de tous nos ennemis. Je me dirigeai vers ma mère, qui était encore près de l'autel, seule, son visage habituellement si doux, semblait profondément choqué de la situation.

-Vous allez bien ? Où est Nora et où est Gérald ? demandai-je à ma mère, en scrutant les jardins par-dessus la balustrade.

Un enchevêtrement de démons et de diablotins se formait en contrebas, sous le bruit assourdissent, des battements d'ailes des gardes qui continuaient d'alimenter la pile.

-Un Ancien Démon l'a emmené, il ressemblait étrangement à Hadès, les cheveux plus longs et des cornes. Je n'ai rien pu faire... murmura ma mère les yeux brillants prêts à déborder. Gérald est blessé, il est dans l'attente de se faire soigner dans la salle avec les autres gardes.

Je la serrai dans mes bras pour tenter de la réconforter. La disparition soudaine de Nora m'inquiéta profondément, je ressentis le poids écrasant de la culpabilité m'accabler. La colère s'empara de moi, en me rappelant mon choix, de l'avoir confié sous la protection de ce traître. Mon regard se porta sur la reine Céleste, qui s'avança vers nous, d'un pas décidé, prête à nous interrompre.

-Tu savais que cette enfant était celui d'un démon, dit-elle à ma mère avec dégoût.

-Oui je le savais, tout comme le fait qu'elle est aussi celui d'un ange, répliqua ma mère en se détachant de mon étreinte, pour faire face à la grande reine.

-Tu as perdu l'esprit ! Cela va à l'encontre de nos lois les plus fondamentales. Elle pourrait anéantir l'équilibre de nos deux mondes ainsi que celui des humains, s'exclama Céleste.

A ces mots, la famille du Royaume des Neiges Eternelles se rapprocha du côté de la grande reine. Je vis un garde mettre le feu au tas de démons, répandant une fumée rouge, causée par la pigmentation des diablotins, dans la nuit noire étoilé.

-C'est une abomination, une ignominie ! Je n'aurais jamais toléré sa présence ici, si je l'avais su, ajouta la reine Chioné l'air scandalisée.

Alize, Sun et Alec s'avancèrent pour me rejoindre.

-N'insultez jamais plus ma sœur, devant moi, menaçai-je la Reine Chioné les poings serrés.

Son regard glacial me dévisagea avec un regard accusateur. Si elle avait été un homme, je l'aurais probablement frappé. Je continuai de la fixer, sans ciller, avec le plus grand mépris, avant que son époux ne surgisse entre nous afin d'apaiser la tension qui était devenue insupportable.

-Elle ne connaissait pas ses véritables origines, je devais lui révéler cette nuit. C'étaient les dernières volontés de sa mère, avoua Stella la voix pleine de regrets.

-Sans doute, une traînée à démons, soupira Chioné les dents serrées derrière son roi.

Ma mère m'agrippa le bras pour me retenir, avant de s'exclamer d'une voix sèche :

-C'est la fille d'Evangélique ! Vous lui devez le respect !

-Vraiment, mais comment est-ce possible ? Elle n'a jamais eu d'enfant avant de disparaître mystérieusement, dit soudain la Reine Gaia confuse.

-C'est impossible, rétorqua la reine Chioné en regardant ma mère l'air outrée.

-La seule chose que vous avez à savoir, c'est que Nora m'a été confiée par Evangélique en personne, j'ai une lettre de sa main signée qui porte son sceau pour le prouver. Même si son père est un démon, dont je ne connais pas l'identité, elle est l'héritière légitime du Royaume des Cieux.

Les familles la regardaient avec stupeur, tous semblaient fascinés et à la fois inquiets par son annonce.

Ma mère m'avait déjà raconté l'histoire des Premiers Anges. Evangélique était la première, à être arriver sur terre, avec Séraphin en second, ils battirent ensemble le Royaume des Cieux. Ensuite, mon père fut le troisième à les rejoindre, Céleste la quatrième et ma mère la cinquième. Ils étaient huit au total, avant l'arrivée des Anges Royaux. Evangélique, la plus puissante des Anges et d'après certains la plus belle, fut la première Grande reine. D'après les livres, elle aurait disparu avec Séraphin, pendant la guerre, probablement tuer par des démons. C'est seulement depuis la trêve, que Céleste fut couronnée Grande reine.

Je n'aurais jamais imaginé que Nora puisse être la fille d'Evangélique, de plus celui d'un démon. Ma mère m'avait enseigné la tolérance envers eux, bien que je les ai toujours détestés. Ils m'avaient privé de mon père, et maintenant de Nora. Bien qu'elle soit un à demi-démon, je ne pouvais la haïr. Je l'aimais profondément, la peur de ne plus jamais la revoir me glaça le sang, il fallait que je la retrouve. Hadès était responsable de sa disparition, il devait mourir.

Pendant que les autres continuaient de débattre de la situation, je m'éloignai de la foule en silence, à la recherche de Félix. Il s'était battu à mes côtés, je ne pouvais croire qu'il nous avait trahis aussi. Je descendis dans le jardin en prenant un escalier au bout du balcon. Alize, Alec et Sun me rejoignirent au milieu des marches de glaces.

-Ou vas-tu ? me demanda Alize inquiète.

-Je cherche Felix, lui répondis-je en contournant des pierres sûrement tombées, à la suite de la secousse de Bélial.

Des décombres de balustrades jonchaient le sol enneigé, des débris de sculptures de glace éparpillé en mille morceaux. Nous cherchâmes un long moment, dans l'obscurité de la nuit, éclairé par le feu du bûcher qui brûlait en bas des marches.

-Il est là, venez vite ! cria Sun, plus loin.

Félix était allongé dans la neige, sous une statue d'ange, la jambe en sang. Je couru vers lui, Soulevant la sculpture, et la balança de tout son poids en arrière.

-Tu vas bien ? lui demandai-je en m'accroupissant près de lui.

Il ouvrit les yeux et respirait avec difficulté.

-Je crois que ma jambe est brisée, et je dois avoir une ou deux côtes de cassé, soupira-t-il d'une voix à peine audible.

-Alize, peux-tu demander à la princesse Mélissa de venir, elle pourra nous aider avec son talent de guérison, c'est la seule en qui j'ai confiance là-haut.

Elle ne répondit pas et partit immédiatement. Cinq minutes plus tard elle revint accompagnée de Mélissa, sa robe turquoise, sertie de perles, était tâchée de sang, ses cheveux châtain clair, ondulés sur ses épaules nues. Elle avait l'air épuisé, mais elle s'avança vers nous avec élégance et bienveillance.

-Il faut que tu l'aides s'il te plaît, c'est mon garde, et peut être ma seule chance de retrouver ma sœur. Sa jambe et ses côtes sont cassées, lui demandai-je.

-Oui bien sûr, je vais essayer, même si je n'ai jamais soigné de démon, dit-elle en s'accroupissant près de Felix.

Elle posa ses mains sur sa jambe ensanglantée. Une lumière bleue apparut autour de la blessure, puis s'éteint quelques secondes après. La plaie semblait avoir disparu comme si elle n'avait jamais existé. Ensuite, Mélissa, mit ses mains sur le torse de Félix, la même lumière bleue réapparut.

-Il sera sûrement un peu fatigué, mais il est totalement guéri, dit-elle en se redressant.

Je te remercie infiniment, en l'enlaçant avec reconnaissance.

J'aidai Félix avec Alec, à se relever, il se redressa lentement sur ses jambes et semblait en meilleure forme.

Merci princesse, je me sens beaucoup mieux grâce à vous, dit-il en s'inclinant devant elle.

Félix, il faut que tu m'accompagnes aux portes de l'enfer, je suis sûre que Nora est quelque part là-bas, lui demandai-je.

Alize et Sun me regardèrent inquiet.

-Tu ne comptes tout de même pas aller en enfer tout seul ! Surtout après ce qu'il vient de se passer ! s'exclama Mélissa l'air choquée.

-Bien sûr que non, je vais venir avec lui, intervint Alize d'une voix déterminer.

-Si, Alize t'accompagne, je viens aussi, ajouta Alec suivi de Sun.

-Dans ce cas, je vais vous suivre, si quelqu'un se blesse, vous aurez besoin de moi, reprit Mélissa.

-Je vous remercie pour votre aide, mais ne vous sentez pas obligé de venir, ça pourrait être dangereux, déclarai-je en tentant de les dissuader.

J'étais inquiet, et ne voulais pas qu'ils leur arrivent quelque chose.

-Ne discute pas, Nora est mon amie, je ne compte pas rester là sans rien faire, retorqua Alize avec assurance.

-Je ne vais pas pouvoir téléporter tout le monde et même à deux, c'est bien trop loin, avoua Félix soucieux.

-Je vais prévenir ma mère et on se rejoint devant le palais, nous prendrons les Pegasus, annonçai-je en me dirigeant vers l'escalier avec mon garde.

Je croisai le regard de la reine Chioné, toujours suspendu au bras de son mari, en retrait avec Céleste et leurs enfants. Je tentai de prendre ma mère à part, qui discutait calmement avec la reine Gaïa. La foule semblait s'être dissipée ainsi que les cris de douleur provenant de la salle de bal. Le sol gelé était désormais nettoyé des tâches ensanglantées, et des débris seul la crevasse demeurait au milieu de la terrasse.

-Je pars à la recherche de Nora, dis-je à ma mère avec conviction.

Son visage adouci se plissa, elle me serra dans ses bras, comme si c'était la dernière fois, qu'elle pourrait le faire. Elle murmura dans mon oreille :

-Tu devrais passer au palais avant, récupérer la plume de ton père...

Ces derniers mots résonnaient dans ma tête, me rappelant tous les sacrifices qu'il avait fait pour nous, pour notre monde. Je n'avais jamais voulu utiliser sa plume, que j'avais reçu à ma naissance. Elle était restée dans une boite sceller dans ma chambre, en dessous de son poignard iridescent. J'embrassai ma mère sur la joue avant de m'en aller, d'un pas décider.

Une fois devant le palais, les autres m'attendaient près des Pegasus. Alec et Alize montèrent ensemble sur le même, Sun et Felix prirent chacun une monture. Je proposai à Melissa de partage le dernier. Sachant que le voyage serait sûrement long, je préférai économiser mes forces.

-Nous allons chez moi, je dois récupérer quelques choses, déclarai-je, en m'installant à l'avant du Pegasus avec Mélissa juste derrière moi.

Au bout de quatre heures de vol, nous arrivâmes devant mon palais, les premières lueurs se dessinaient sur la porte en cristal incrusté de diamant. Je descendis de ma monture en proposant aux autres d'aller se rafraîchir en m'attendant. Je grimpai les marches qui menaient à ma chambre, accompagné de Félix. La pensée qu'on fasse du mal à Nora me terrifia, je me rattachai à l'espoir de la retrouver le plus vite possible, saine et sauve. Quiconque m'en empêchera, subira ma colère.

-Va chercher des gardes pour nous suivre, ordonnai-je à Félix en haut de l'escalier.

Il acquiesça d'un signe de tête et redescendit les marches. Une fois, franchis la porte de ma chambre, le poignard luisant m'invita à le saisir. Je pris le temps de me changer, optant pour un uniforme plus simple, aux épaulettes argentées. Laissant ma couronne d'argent sur la commode, je posai mes doigts, sur l'écrin rectangulaire en velours bleu cobalt. Je l'observai un moment, sans oser l'ouvrir, avant de le mettre dans ma poche. Après une longue hésitation, je pris également la lame iridescente accroché au mur.

Je redescendis aussitôt rejoindre les autres à l'extérieur, nous décollâmes aussitôt accompagnés des cinq gardes en plus. Après avoir survolé le continent vers l'Ouest, durant trois heures, je sentis l'odeur du sel marin caresser mes narines. Le soleil était presque à son zénith, j'observai les vagues se dessinaient tel un tapis de saphirs.

La main de Mélissa me tapota légèrement l'épaule.

-On devrait faire une pause dans mon royaume c'est à une heure de vol, nous pourrions nous reposer un moment, et nourrir les Pegasus, me proposa-t-elle un peu anxieuse.

-Oui, c'est vrai, tu as raison, lui répondis-je ressentant la fatigue m'envahir.

Je préviens Félix que nous allions nous arrêter chez Mélissa sur le trajet. Quand enfin, nous arrivâmes sur l'île, je descendis sur le sable fin de la plage. Le souffle du vent salé, me balaya les cheveux. J'étais toujours autant émerveillé par la beauté du palais avec son grand dôme de verre semblable, à une immense véranda et son entrée face à la mer. Des rideaux de lin blanc flottaient au rythme des courants d'air.

Les souvenirs de mon séjour après mon couronnement revinrent. C'était ici, que Mélissa et Malone m'avait appris à maîtriser l'eau. Nous avions passé beaucoup de temps elle et son frère sur cette plage. Nous baignant de jour comme de nuit, nous nous étions très vite rapprochés. Je m'entraînai au combat avec Malone qui était très puissant, il n'y allait jamais de main morte. Mélissa avait dû me soigner après presque chacun de mes entraînements. Plus d'une fois, elle était venue me réveiller aux aurores, en me jetant une cascade d'eau sur le visage. J'entendais encore ses rires moqueurs, lorsque je me réveillai en sursaut complètement trempé et que je tentai de lui courir après, dans tout le palais pour l'asperger en retour. data-p-id=a1a182ede8f27f67f9a951f1d1e946fb,À la fin de mon séjour, Mélissa m'avait confié, qu'elle n'avait pas passé un aussi bon moment, depuis la mort de sa mère. Je lui avais répondu que j'avais adoré le temps passé en sa compagnie et qu'elle était devenue une véritable amie.


Mélissa entra la première et appela une servante.

-Il nous faut de la nourriture pour les Pegasus avec quatre sceaux, préparez-moi aussi, un bain dans ma chambre, ordonna-t-elle avec sa voix mélodieuse.

Pendant ce temps je vis Sun s'allonger sur un hamac, accroché entre deux palmiers. Alize et Alec s'enlaçaient, en regardant la mer. Je m'approchai de Mélissa :
-Tu n'es pas obligé de venir, je m'en voudrai s'il t'arrive quelque chose, lui confiai-je en la regardant dans les yeux.


-C'est moi qui m'en voudrais, si je ne venais pas, me répondit elle en me prenant la main. Tu sais je comprends le fait que tu sois attaché à ta sœur, je ferais la même chose pour mon frère.

-Merci Mélissa, ça compte beaucoup pour moi, lui dis-je en fermant mes deux mains sûres la sienne.

Des servantes revinrent avec de la nourriture pour les Pegasus et quatre seaux en bois vide.
Melissa les remplit avec de l'eau, qu'elle fit jaillir de ses mains, puis les domestiques, allèrent les apporter aux Pegasus.
Je reconnus Marina, qui apporta un plateau de fruits et des petits sandwichs, elle le déposa sur une table près du hamac. Sun sauta toute suite sur les sandwichs, Alize et Alec s'approchèrent de la table et se servir à manger.


-Combien de temps nous faut-il pour arriver aux portes de l'enfer ? demandai-je à Félix en réfléchissant à plan.

-Je pense qu'il reste au moins trois heures de vol, mais il faut que vous sachiez que l'entrée est gardée par des chiens de l'enfer, me dit-il sereinement.

Sun avala son sandwich de travers à cette annonce, je lus la fatigue sur le visage d'Alize, me rappelant la mienne. La main dans la poche, je retournais nerveusement l'écrin entre mes doigts. Il fallait que je l'utilise, je n'avais plus le choix, j'avais besoin de la faculté de mon père, qui pouvait créer des boucliers et des boules d'énergies. Même si je devais revivre le souvenir qui était lié à cette plume, pour obtenir ce pouvoir.

-Allons nous reposer, nous partirons ce soir à la tombée de la nuit, annonçai-je sérieusement.

Marina vint glisser un mot dans l'oreille de Mélissa, qui remplissait un verre d'eau pour Sun. Son bain devait sûrement être prêt, je la rattrapai avant qu'elle ne retourne dans le palais.

-Je peux utiliser la chambre que j'avais la dernière fois ? lui-demandai-je timidement.

-Oui bien sûr, fait comme chez toi, me répondit-elle en souriant.

Après avoir traversé les couloirs tapissés de coquillages, je rejoignis la chambre. Une fois à l'intérieur, je m'assis un instant sur le lit, en déployant mes ailes, je sortis de ma poche la boite en velours. Mes doigts tremblèrent légèrement, en ouvrant l'écrin, puis je pris la plume de cristal et la dirigeai lentement vers mon aile droite. Mes yeux se fermèrent, lorsque la plume s'encra entre les miennes. Je vis le souvenir de mon père apparaître dans mon esprit. Son visage, que je n'avais pas vu depuis l'âge de trois ans, était devant moi, il portait dans ses bras un nouveau née, avec un large sourire dessiné sur ses lèvres. Ses mèches dorées laissaient entrevoir son regard pétillant, des gouttes perlaient aux coins de ses yeux. Quand sa voix retentie dans mes oreilles, je sentis mon cœur trembler : « Gabriel, j'ai choisi de te partager mon plus beau souvenir, c'est le jour de ta naissance. C'est à ce moment-là, que j'ai pris conscience de la chance que j'avais d'être père. Même si je ne sais pas ce que l'avenir nous réserve, une chose est sûre, je t'aime mon fils pour l'éternité... »

Une larme coula sur ma joue, tandis que l'image de mon père fini par s'estomper. 

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