EPISODE #3
Une personne, c'est comme un iceberg. On ne voit que la pointe qui dépasse. Pour vraiment connaître quelqu'un, il faut prendre le temps de regarder sous l'eau, sous la couche de protection. Derrière le paraître se cache l'être.
Inconnu
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5 septembre 2015
QG des Cursed Skulls
Je n'ai aucun sentiment, aucune émotion, aucune empathie. Ce n'est pas faute d'avoir déjà essayé pourtant mais aimer, souffrir, pleurer, rire, être heureuse ou même malheureuse, je ne sais pas comment faire. Du moins, je ne sais plus depuis longtemps.
Pourtant, j'ai déjà été heureuse, je m'en souviens même. C'était avec ma mère. Toujours et seulement avec ma mère. J'aimais quand elle brossait soigneusement mes cheveux avant de les tresser, quand elle embrassait le bout de mon nez pour me souhaiter bonne nuit ou même qu'elle me fredonnait une chanson quand j'étais malade. Tout ça, c'est loin maintenant. C'était quand j'avais huit ans. Je ne sais plus ressentir, ce n'est plus qu'un vague souvenir.
La dernière fois que j'ai ressenti quelque chose, c'était le 25 décembre 2001. Le jour de Noël.
Je me suis réveillée à l'hôpital, seule, dans mon grand lit. Des fils reliaient mon corps à des machines qui émettaient des bips qui me faisaient peur. Une infirmière m'a dit que j'avais eu un accident de voiture avec ma mère et que mon père allait venir me chercher mais je ne voulais pas. Je ne voulais qu'elle : ma mère. Ce jour là, cette gentille infirmière m'a expliqué, avec des mots bien particuliers, ceux qu'on souffle à une enfant, que ma mère était partie et qu'elle ne viendrait plus. Je n'ai compris que quelques jours plus tard que partie voulait dire morte. Et c'est la dernière fois que j'ai pleuré. Je n'ai pas pleuré depuis plus de douze ans.
Insensible. Impassible. Indéchiffrable. Indifférente.
Morte.
Voilà ce que je suis. Une femme qui respire et dont le coeur bat mais morte de l'intérieur, dénuée de son âme qui est partie avec sa mère un jour de Noël.
Le seul sentiment que je sais ressentir est le désir. Aller encore plus loin, dépasser mes limites, vouloir quelque chose d'inacessible. J'ai le besoin d'être la meilleure, de faire mieux qu'un autre. Et je fais tout pour y accéder, peu importe les dommages collatéraux.
Même si je ne ressens presque rien, s'il y a bien quelque chose que je sais maîtriser, ce sont les mensonges. J'aurais pu être actrice, si je n'avais pas choisi une autre carrière. Je sais parfaitement mentir, je sais faire semblant. C'est même ma spécialité.
- Tu aimes bébé ?
Alors que sa main appuie encore plus fort le creux de mes reins, il me pilonne encore plus fort.
- Oui. Oui, je souffle.
Je sens ses doigts glisser le long de mon ventre pour atteindre mon intimité. Il joue avec mon sexe qu'il connaît trop bien depuis toutes ces années et comme tous les hommes, il est incapable de bien y faire. Il n'y a qu'une femme qui sait comment toucher une femme. Mais je le laisse faire, tout aussi incapable que lui mais pour d'autres raisons. Esteban est pourtant ce qu'on pourrait appeler un bon coup et il a le mérite d'être le seul à réussir à me faire jouir.
Il jouit en moi et je simule mon propre orgasme. Ça le flattera, c'est une certitude. Les hommes sont ainsi. Ils ont toujours le besoin de se surpasser, qu'on leur dise qu'ils sont les meilleurs, qu'il n'y a qu'eux. Et surtout quand il s'agit de sexe.
Esteban pose sa joue sur mon dos et je dois repositionner mes mains pour ne pas m'effondrer sous son poids. Nous restons un instant silencieux, lui reprenant son souffle et moi fixant la tête du lit, incapable d'exprimer quelque chose ou même de savoir si ce qu'il vient de me faire m'a réellement plu. Sûrement. Sinon je ne lui écarterais pas les cuisses presque tous les soirs.
Parfois, j'arrive à m'en vouloir d'être ainsi. À ne pas savoir ressentir. Je suis une garce sans coeur, sans état d'âme, prête à tout pour réussir. Aussi froide que la glace avec un tempérament de feu. Mais j'ai appris depuis longtemps que je ne peux compter que sur moi- même. Je ne peux donner ma confiance à personne. Esteban est sûrement le seul en qui je pourrais avoir confiance.
- Merde ! Je vais être à la bourre ! Dit-il après plusieurs secondes qui me paraissent des heures.
Rapidement, il dégage sa queue de moi et je le sens s'éloigner. Je prends quelques secondes avant de me retourner et m'asseoir sur le matelas. Je l'observe dégager le préservatif qu'il jette dans une poubelle près de la table basse. Il se rhabille à la hâte. Je n'ai toujours pas dit un mot mais Esteban ne s'en formalise pas. Il sait que je ne suis pas une grande bavarde, que j'exprime rarement mes éventuels sentiments. Mais avec lui, je n'ai jamais eu le besoin de le faire. Esteban comprend tout de moi en une seconde. Il sait quand je ne vais pas bien, malgré que je fasse tout pour le cacher.
Une fois la ceinture de son pantalon bouclée, il relève son visage vers moi et me sourit. Il s'approche de moi, son regard dans le mien.
- T'inquiète bébé, on fera le second round plus tard. Tu peux me rejoindre dans ma chambre ce soir.
Je lui souris, ne sachant pas quoi répondre. Ses lèvres se posent délicatement sur les miennes. S'il y a une chose qu'Esteban sait faire, c'est embrasser. La première fois qu'il l'a fait, c'était tellement intense que j'ai été étourdie quelques secondes. J'avais treize ans, lui en avait quinze.
Il me fait tomber sur le matelas et sa langue vient taquiner la mienne. Sa main est déjà sur mon sein, je sens son érection contre mon bas-ventre. Esteban est insatiable au lit mais je ne me plains pas. Baiser est peut-être le seul acte qui arrive à me faire ressentir quelque chose.
- Tu n'es pas attendu? je souffle alors que ses lèvres ont quitté ma bouche pour trouver mon sein.
Il relève la tête rapidement, m'interroge du regard avant de se relever brutalement.
- Ah oui ! Merde !
Il enfile rapidement sa chemise qu'il avait pris soin de plier tout à l'heure puis passe sa veste. Je m'habille à mon tour, enfile ma petite robe bleue électrique et profite du miroir au dessus du lit d'Esteban pour me recoiffer avec mes doigts.
- Attends-moi, je fais. Je descends avec toi.
Esteban me sourit et nous finissons tous les deux par quitter la suite qui lui sert de chambre. Nous rejoignons l'ascenseur en silence.
- Quoi de prévu pour toi, ce soir ?
- Rien de particulier. Je vais faire un tour au bar, comme tous les soirs et après, je remontrai dans ma chambre et je m'endormirai sûrement devant la télé.
- OK. Alors c'est moi qui te rejoins cette nuit, je suppose ?
Il agrémente sa question par un petit sourire. Lui et moi passons rarement une nuit sans l'autre. Et ça finit toujours de la même façon. Esteban a été mon premier mec au lit. J'avais quatorze ans. Ça peut paraître tôt pour certains mais ça m'avait paru tellement naturel à l'époque. Et ce jour-là, j'avais ressenti quelque chose depuis bien longtemps, ce qui m'a donné envie de recommencer.
Esteban De La Vega est mon plus vieil ami. Le seul en réalité donc je pourrais le mettre dans la catégorie "meilleur ami". Depuis que nous sommes nés, nous nous connaissons. Nous avons été élevés presque ensemble. Son père, Carlos, est le chef de notre gang : les Cursed Skulls. Depuis presque trente ans, il est le propriétaire du Madness Paradise, le casino de la ville d'Ironwood et c'est son fils qui reprendra les affaires plus tard.
Son téléphone vibre et il le saisit de la poche de son costume. Durant toute la descente, il pianote sur son écran et souffle plusieurs fois d'agacement. Je sais que c'est son taf. Il n'y a que ça qui met Esteban dans cet état.
Esteban et moi, on ne parle jamais de boulot. Quoi, rarement. Il connaît mes activités, je connais les siennes mais aucun de nous n'interfère dans les affaires de l'autre. C'est notre règle.
Les portes de l'ascenseur s'ouvrent et je me dirige aussitôt vers le bar. Esteban me retient par le coude et me force à m'arrêter. Il me fixe, ébahi.
- Tu ne salues pas les gars ?
- Euh... Si, si ! Bien sûr !
C'est la règle ici. Tous les soirs, nous devons aller saluer notre boss. Carlos aime savoir où sont ses membres et ne pas venir le saluer serait un affront qu'il mettrait un moment à pardonner. Carlos n'est pas le genre d'hommes qu'il faut froisser.
Arrivés dans le restaurant du casino, je n'ai pas besoin de scruter la salle pour retrouver les plus importants membres de notre gang assis à leurs tables. Ils ont leurs habitudes et personne d'autre qu'eux ne mange sur cette table. Pas même les clients. Seuls les Cursed Skulls y ont droit.
Esteban se dirige droit vers son père, assis en compagnie du mien et de quelques hommes de confiance. En mode pilote automatique, je suis Esteban entre les tables des clients dont plus de la moitié ignore qu'ici se prennent des décisions autre que celles d'un casino classique. À cette table se jouent les coups les plus tordus et les plus immoraux qu'il soit. Trafic de drogues, d'armes, passages de clandestins et j'en passe.
- Ah Alexis ! Ravi de te voir, fait Carlos. Comment vas-tu ?
- Très bien merci.
Je tente d'étirer mes lèvres.
- Tu es particulièrement ravissante ce soir. Tu as un rendez-vous galant ?
Je vois le visage de mon père pivoter vers moi. Je continue à fixer Carlos, évitant le regard de mon père.
- Non. Pas de rendez-vous.
- C'est dommage ! Une belle jeune fille comme toi.
La main de Carlos s'abat sur l'épaule de mon père.
- Il va falloir lui trouver un mari, Gabriel. Et au plus vite !
Mon père renifle. Il ne semble pas d'accord avec l'idée que vient de nous soumettre notre chef mais ne dit rien pour autant.
- Si tu penses qu'il est temps, Carlos. On va devoir y songer.
Carlos hoche la tête, satisfait.
- Pourquoi pas le gamin de Munoz ? Javi ? Reprend notre chef. Ou pourquoi pas ton fils, Diego.
- Ça dépend lequel, intervient le bras droit du gang. Sur mes quatre garçons, il n'y en a aucun de marié, Alexis aurait l'embarras du choix.
- Ton premier bien sûr. Sebastian.
Je déporte mon regard vers Munoz et Diaz qui me regardent tous les deux avec intérêt. Mon Dieu ! Ni l'un, ni l'autre. Je ne veux aucun de leurs fils. Ça ne serait qu'à moi, je ne me marierais même pas. Et surtout pas avec eux. Mais quitte à choisir, Sebastian serait mon premier choix.
Quoi qu'il en soit, je n'aurais pas mon mot à dire. Chez les Cursed Skulls, c'est comme ça. On épouse la personne que son père nous a choisi et si Carlos prend une décision, mon père ne s'y opposera pas, même s'il n'est pas d'accord sur le choix.
- Je ne crois pas que Munoz ou Diaz serait fait pour Lexis. Elle est beaucoup trop fougueuse pour eux, intervient Esteban.
Je relève mon visage vers lui et le remercie du regard. Esteban prend toujours ma défense, quoi qu'il advienne.
- Es-tu en train de dire que mes hommes n'ont pas suffisamment de couilles pour dompter Alexis ? Et est ce que je t'ai demandé ton avis, mon fils ? Crois-tu que j'ai besoin de toi pour prendre mes décisions ?
La tête haute, Esteban ne pipe pas un mot. Il fixe sans père un instant avant d'hocher la tête.
- Bien, fait Carlos. Mais je suppose qu'il n'y a rien qui presse. Nous avons encore le temps d'y réfléchir et de trouver le mari idéal pour Alexis.
Je souffle intérieurement. Carlos est réputé pour prendre des décisions et pour son entêtement. S'il décidait que je devais me marier dans l'heure, il ferait tout pour qu'on lui obéisse sans résistance.
- Tu te joins à nous, Lexis ? Me propose Esteban, les lèvres tirées.
Chaque soir, il me le propose et chaque soir, mon père répond la même chose. Je ne sais pas pourquoi mon ami s'acharne ainsi. Chez les Cursed Skulls, aucune femme ne fait partie du gang. Du moins, pas officiellement. Car même si je n'ai pas la marque du gang, j'ai tout de même mon rôle à jouer parmi eux.
Je fais partie de ceux qui font le sale boulot. Personne ne connait mes activités au sein du gang, hormis Carlos et Esteban. Mon père l'ignore, bien que je me fous qu'il le sache un jour. Ce job, je l'ai commencé il y a un an, rien que pour le plaisir de pouvoir buter mon père de mes propres mains. Je sais que ce que j'ai dit est dur mais mon père est le pire fils de pute que la terre ait porté. Et ce jour arrivera, je le sais. Mon père finira par faire une connerie et Carlos ne le loupera pas. Il mettra un contrat sur sa tête et j'aurai le plaisir d'y loger une balle.
- Les femmes ne peuvent s'asseoir à cette table, répond sèchement mon père.
Bien sûr, il n'a pas offert un regard. Cela fait des années que nous ne nous parlons pas et nous ignorons. C'est bien mieux ainsi. Parfois, je me demande pourquoi je n'arrive pas à ressentir quoi que ce soit. Mais en réalité, les chats ne font pas des chiens. Mon père est comme moi. Froid, indéchiffrable, cruel. Et lui, il est macho et encore plus violent que moi.
- Assieds-toi, mon fils, ordonne Carlos. Le dîner va bientôt être servi.
Esteban contourne la grand table et part s'installer à la gauche de son père, là où est sa place. Moi, je patiente, attendant qu'on me congédie.
- Bonsoir tout le monde, j'entends alors.
Je n'ai pas besoin de me retourner pour savoir qui vient d'arriver. Je l'ai reconnue au timbre nasillard de sa voix et son parfum qu'elle s'asperge avec trop de zèle à chaque fois. Monica passe devant moi sans un regard, comme elle sait s'y bien le faire. Je ne m'en plains pas. Aussi loin que je m'en souvienne, Monica et moi n'avons jamais pu nous piffrer. Nous avons toujours été hostiles l'une envers l'autre.
Je la vois sautiller autour de la table et je me retiens de rire en voyant son attitude de gamine. Elle embrasse son père sur la joue. Monica est la fille aînée de Diego, le bras droit de Carlos mais aussi la fiancée d'Esteban. Il ne la veut pas mais il n'a pas le choix. Dans quatre mois, il devra épouser Monica. Le mariage est arrangé depuis tellement longtemps, avant même qu'ils n'aient plus besoin de couches. Je sais qu'Esteban fait semblant et je dois avouer qu'il le fait bien. Lui aussi aurait pu être acteur et maîtrise l'art du mensonge avec brio.
- Oh ! Ma Puce !
- Bonsoir Chéri. Tu vas bien ?
Elle ne lui laisse pas le temps de répondre que sa bouche aspire déjà celle d'Esteban. Je me retiens de secouer la tête devant cette mascarade. Si je le faisais, Carlos pourrait le voir comment un affront et je ne donnerais pas chère de ma peau. Diego finit par se racler la gorge devant le spectacle alors que Carlos semble satisfait.
Les yeux de Monica se relèvent alors vers moi et elle m'offre un petit sourire satisfait. Elle croit me rendre jalouse ou je ne sais pas mais elle est loin du compte. Si seulement elle savait que je suis incapable d'aimer, que je considère Esteban comme mon meilleur ami. Juste comme mon meilleur ami et que c'est le seul pour qui je ressens de l'affection et que je le respecte trop pour risquer de tout foutre en l'air avec des sentiments.
- Si vous le permettez, je vais vous laisser dîner tranquillement, je dis.
Mon père me fixe, le regard menaçant alors que Carlos hoche la tête avec respect.
Je tourne les talons et pars vers mon endroit préféré ici. Le bar du casino. Ici, j'y ai mes habitudes et après Esteban, Andres est le seul qui pourrait faire office d'ami.
Quand il me voit depuis l'autre bout du bar, son visage s'illumine et il s'empresse de me rejoindre.
- Olá Querida !
- Salut Andres.
- Puis-je me permettre de te dire que tu es scandaleusement sexy ce soir.
J'hoche la tête, agrémenté d'un petit sourire. Il n'y a qu'Andres qui arrive à me faire sourire. C'est sûrement son visage amical ou ses yeux toujours rieurs qui me mettent en confiance.
- Tu as quelque chose pour moi, ce soir ?
Andres ouvre la bouche mais ne dit rien. Il se contente de lever son index pour me faire patienter. Je le regarde s'éloigner jusque la tireuse à bière. Il prend un sous verre où il griffonne quelque chose dessus puis rempli le verre avant de revenir vers moi.
Devant moi, il dépose une bière rousse en souriant. Je plisse le front.
Qu'est-ce que cela signifie ? Une bière rousse ? Cela fait un an que je me suis engagée, je n'en ai jamais eu jusqu'à présent. Je ne savais même pas qu'elle faisait partie des codes pour dire vrai. Et quand on est une tueuse des Cursed Skulls, on ne part pas en séminaire d'entreprise ou ne nous recevons pas le guide du parfait tueur.
Le principe est simple, ça, je l'ai compris depuis bien longtemps. Les contrats, c'est Andres qui les "distribue" en offrant une bière à son équipe.
La bière blanche signifie juste une mise en garde. Bien sûr, pour être le plus crédible possible, il ne faut pas hésiter à user du poing. J'en ai eu que très rarement, cette bière est souvent offerte aux hommes. Je peux en compter trois depuis que je travaille et à chaque fois, j'ai dû mettre les points sur les i à plusieurs femmes qui devaient du fric à Carlos.
Une bière brune signifie que la tête de la cible est mise à prix. C'est la bière fatale, celle qui m'a été offerte le plus souvent pas Andres. Sept fois exactement.
Alors ce onzième contrat est vraiment surprenant.
- Rousse ?
Andres hausse les épaules tout en essuyant un verre avec un torchon.
- Ça veut dire quoi ?
J'ai l'air conne de le demander mais je suis vraiment perdue avec cette bière. Et si j'accepte ce contrat, ce que je ferai, il va de soit que j'aie tous les éléments.
- Ça veut dire que tu dois te renseigner sur ta cible. Tu vas devoir te rapprocher d'elle discrètement.
- Me renseigner ?
Le barman hoche la tête.
- Ouais. Ton client te contactera prochainement.
- Qui c'est ?
- Tu sais que cette information doit rester confidentielle.
C'est vrai. Et c'est une autre règle dans ce boulot : on ne pose pas de question. Si on accepte ce contrat, on exécute sans rien demander d'autre que notre cachet une fois la mission terminée.
- Quand ?
Andres s'apprête à me répondre mais il se ravise. Ses yeux se déportent et son sourire retombe. Je sais qu'il s'agit d'elle. Andres ne peut pas la sentir non plus. Il se contente de la respecter poliment. Monica s'installe sur le tabouret à ma droite et je l'ignore totalement, déjà agacée par sa présence.
- Je vous sers quelque chose, Mademoiselle Monica ? Demande le barman.
Elle agite sa main devant elle, faisant tinter ses bracelets en or entre eux. Elle n'oublie pas de me mettre sous le nez sa bague de fiançailles, certie d'un énorme diamant que seule une grue pourrait soulever. Si on jettait cette conne à la flotte, elle coulerait sans problème. Et ce n'est pas moi qui irait la repêcher.
Esteban ne s'est pas foutu d'elle le jour où ils ont officialisé leur future union. Carlos a vu les choses en grand pour le mariage de son fils unique et je sais que cela enchante Monica. Elle aime être au centre de l'attention.
- Non. Je ne reste pas.
Son visage pivote vers moi mais je continue à garder ma tête droite. Elle et moi n'avons jamais été amies et l'animosité qu'elle me voue s'est intensifiée le jour où elle a surpris Esteban en train de me prendre contre un mur de son bureau. Elle sait que je baise régulièrement avec l'homme qu'elle doit épouser dans les prochains mois. Esteban et moi ne nous lui cachons pas que c'est ainsi, que nous couchons ensemble depuis presque sept ans.
Même si cela ne la réjouit pas, elle sait qu'elle n'a pas d'autre choix que d'accepter la situation. Un homme a des besoins, qu'elle compte satisfaire uniquement quand son mariage sera prononcé. C'est son choix de se préserver pour un seul homme, moi, je ne le pourrais pas. Le sexe est la seule chose qui me fait sentir vivante.
Andres s'éclipse discrètement et j'aimerais pouvoir en faire autant. Je l'observe rejoindre des clients à l'autre bout du bar.
- Tu étais avec lui ?
Je tourne mon visage vers elle et la fixe. Mes lèvres s'étirent, en bonne provocatrice que je suis.
- Tu me demandes si je viens de faire jouir ton fiancé ?
Posé sur le comptoir, je vois le poing de Monica se serrer. Elle fulmine et j'en tire une certaine satisfaction.
- Dois-je te rappeler que nous nous marrions dans quatre mois.
- Non. Pas besoin. J'ai reçu le fair-part. Esteban me l'a donné en main propre juste après m'avoir sauté.
Elle prend une grande inspiration et ferme les yeux.
- Je le sais. Esteban m'en a parlé ce matin. Et justement, c'est pour ça que je viens te parler. Si non, je ne t'adresserais même pas la parole.
- Alors tu peux économiser ta salive de vipère et retourner à tes escarpins.
Je prends ma bière et en bois une gorgée. C'est la première fois que j'en goûte et je trouve ça très bon.
- Je te demanderai de ne pas venir au mariage.
J'éclate de rire. C'est plus fort que moi. Elle ose tout de même me demander de ne pas venir au mariage de mon meilleur ami.
- Et pourquoi je ne viendrais pas ?
- Tu peux comprendre que je ne veux pas voir la garce qui couche avec mon futur mari, le jour qui est censé être le plus beau de ma vie.
- Et tu comprendras qu'en tant que garce, c'est mon rôle d'être présente pour lui. Il faudra bien que je le détente avant la cérémonie. Et que je le console juste après pour avoir épousé la dinde que tu es. Je ne mettrai pas de string ce jour-là, pour le côté pratique.
Monica serre les dents et je souris de la voir aussi en colère. J'aimerais pouvoir ressentir autant de choses qu'elle parfois, elle est tellement facile à lire.
- Alexis, je te préviens, je ne veux pas t'y voir.
Serait-elle assez folle pour me menacer ? Ne sait-elle pas qui je suis ?
- Écoute, Monica. Que tu le veuilles ou non, que tu me préviennes ou pas, je serai au mariage de mon ami, alors habitue-toi tout de suite à l'idée. Et autre chose, mariée ou non à toi, je n'arrêterai pas d'écarter les cuisses pour lui et jouierai toujours quand il aura sa langue ou sa queue entre ma chatte.
Je descends de mon tabouret, sans oublier de prendre mon dessous de verre en carton. Il est temps que l'on arrête cette entrevue. Et j'aime marquer ma sortie en appuyant sur quelque chose qui fait mal. Esteban est le point faible de Monica. Elle en est folle amoureuse depuis si longtemps.
- Maintenant que nous avons fini, je vais monter dans la chambre d'Esteban. Je suis d'humeur pour une petite pipe. Tu le sauras peut-être un jour, mais il adore ça. Bonne soirée Monica.
Je m'éloigne du bar sans un regard, l'empêchant de répondre quoi que ce soit. Arrivée dans l'ascenseur, j'y monte et la fixe au loin, toujours assise sur son tabouret. Elle essuie une larme sur sa joue et je jubile. Je sais, je suis une garce.
Les portes de l'ascenseur se referment et j'appuie sur le bouton du septième étage. Une fois seule, je retourne alors le sous-verre en carton et vois le nom. Et merde !
Ma prochaine cible est Devon Thomas.
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Hello les Broth'Addict !
Tout le monde va bien ? Votre week-end s'est bien passé ? Le mien était super. J'ai fêté ma nouvelle bougie entourée de ma famille et j'ai été gâtée.
Merci à tout ceux qui ont pensés à moi, ici, sur Insta ou Facebook.
Et si on parlait un peu de ce dernier chapitre ?
Vous venez de découvrir le personnage de Lexis et je sais déjà ce que vous pensez. Cette nana est une tueuse ! Et c'est vrai ! J'avais envie d'inverser les clichés et Alexis est à des années lumières de la petite jeune fille bien sous tout rapport.
Elle n'a pas beaucoup d'estime d'elle même et semble n'avoir confiance en personne, hormis Esteban. Bon, il faut dire que leur relation est bien particulière quand même. Clairement, c'est une garce, la pauvre Monica peut en témoigner.
Je tenais à préciser qu'il y aura peu de point de vue de Lexis. Brothers Of Death est l'histoire de Devon après tout.
Mon rythme de publication sera tous les lundi, mercredi et vendredi
(Et oui, le week-end est fait pour faire la fête et se reposer).
Allez, je vous laisse mes Broth'Addict et vous fais des bisous.
L
(DeathWriter)
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