le souvenir ému de ton corps nu
(cover et bannière réalisées par moonlimbs <3)
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L'amour n'avait toujours été qu'une notion floue pour Junpei, un paradoxe né : à la fois réparateur et destructeur. Pendant longtemps, il n'avait connu que l'amour maternel, et n'avait su faire de différence entre ces sentiments délicats qu'étaient l'amour et l'affection. Ce n'était à l'époque qu'un jeune homme perdu, aux idées trop noires et à la vie compliquée, qui avait finit par en rencontrer un autre.
Itadori Yuji. Un véritable rayon de soleil venu embaumé ses journées les plus sombres, une présence apaisante venue l'aider dans ses nuits les plus tourmentées.
Yuji n'avait d'abord été que la touche de nouveauté dans le tableau qui représentait sa vie, ce courant d'air frais qui éteint une routine trop installée.
Junpei s'était pris d'affection pour lui.
Puis il était devenu la lumière au bout du chemin, leurs moments étaient devenus les plus précieux, et le sourire de l'autre était désormais un trésor à chérir.
Junpei était tombé amoureux.
Pendant plusieurs mois, il avait connu un bonheur indescriptible, mais il vivait dans ce monde où tout était éphémère.
Le rayon de soleil, la présence apaisante, le brin d'air frais, l'affection.
La lumière, les moments précieux, les sourires et autres trésors, l'amour.
Tout n'était que vagabonds, emporté par la douce brise du temps.
Et comme tout iceberg a sa face cachée, leur relation n'avait pas excepté à cette règle cruelle.
Junpei était devenu dépendant.
Cette dépendance qui nous fait chavirer dans les méandres d'un quotidien plus sombre, qui fait couler le navire trop plein d'amour sur lequel on navigue.
Un soupir désespéré résonna comme un écho, une mélodie fataliste, à l'idée même de cette relation vouée à l'échec. Junpei se tenait, seul, dans le grand salon de son unique amour, et pour cause car ce dernier se délectait encore du matelas douillet et des couvertures chaudes. Son regard balaya la pièce de son air mélancolique, et s'attarda sur le piano, trônant fièrement en son milieu.
L'homme qu'il aimait était un musicien, le piano étant son instrument de prédilection il en avait bien entendu un chez lui, et ce piano était à lui seul une barque de souvenirs aussi bien agréables que démants.
Ses doigts fin parcourèrent la surface noire et lisse de cet instrument si imposant, alors qu'il imaginait d'un sourire tendre leurs moments à deux. Il imaginait Yuji, jouant sur son piano, assis sur ce petit fauteuil et les doigts ancrés sur les touches faites de blanc et de noir, une douce mélodie s'infiltrant à ses tympans alors qu'il lui souriait de cette manière qu'il aimait tant. Il imaginait Yuji avec son regard débordant d'amour, comme ces fois où il se concentrait plus sur Junpei que sa propre partition. Puis il s'imaginait lui-même assis à ses côtés, avec cette façon qu'il avait d'être comme pendu aux lèvres du pianiste, comme accro à cette mélodieuse harmonie.
Mais l'harmonie avait commencé à sonner faux, s'était retrouvée comme embrouillée. Junpei se souvenait de ce jour où ils s'étaient violemment disputé, à cause de lui bien entendu, de lui et de cette dépendance bouffante. Cette dépendance qui le consumait à petit feu, le rendant trop collant, trop jaloux, trop sensible, trop tout. Il en était même venu à se détester, et il se demandait bien comment Yuji faisait pour l'aimer encore et toujours. Son attention se fit à nouveau sur l'instrument, notamment sur un de ses coin abîmé, rayé : le jour où, lors d'une énième dispute et par rage pure, Junpei avait balancé ce qui lui était venu sous la main contre l'instrument.
Quelle ironie, il avait blessé ce qui était une immense part de l'âme du musicien, et pourtant ce dernier n'avait fait que le prendre dans ses bras pour l'apaiser de ces émotions nocives, comme s'il était la victime de cette histoire.
Au final, ce piano était à la fois le symbole de leurs beaux débuts, mais aussi celui de ce qui résultait de leur fin trop proche.
Leurs journées n'étaient plus faites que de dispute sans but réel, de cœurs brisés et d'âmes déchirées. Les moments de paix se faisaient plus rares, mais les nuits d'amour plus fréquentes, comme si c'était là leur seule échappatoire : ils s'aimaient la nuit, et se haïssaient le jour.
Et le noiraud se tenait comme unique responsable de ceci, il avait fait sombrer leur idylle dans les abysses ténébreuses d'un océan déchaîné, et ils leur étaient impossible de remonter à la surface.
Ils étaient destinés à couler, du moins du moment qu'ils restaient ensemble.
─ J'ai tout gâché...
L'unique murmure du jeune homme sembla s'évaporer, alors qu'il restait à présent planté là. Ses beaux yeux devièrent cette fois sur sa valise, qu'il avait bouclé la veille avant que Yuji ne le retienne. Il avait craqué oui, parce que malgré tout Yuji restait son monde, mais ce n'était pas une bonne chose.
Il avait peut être tout gâché, mais il était bien décidé à changer les choses, et c'est par son départ qu'il comptait le faire. Pour eux, pour lui.
L'idée même de s'éloigner de son amour le faisait affreusement souffrir, comme si son cœur se retrouvait déjà transpercé de milles aiguilles, mais c'était nécessaire : Yuji devait être heureux, et il savait pertinemment que ce n'était plus possible avec lui.
Cependant, il refusait de le laisser sans un mot, il voulait le revoir une dernière fois, l'embrasser une dernière fois, lui dire « je t'aime » une dernière fois.
Alors il attendait que son amour se réveille, et il revivait leurs souvenirs pendant ce temps.
Les souvenirs de la veille, d'ailleurs, quand Yuji avait finit par le retenir, le persuader de rester, au moins pour cette nuit là.
Lorsque leurs deux corps avaient fondu l'un contre l'autre, dans une étreinte douce mais désespérée. Cette terrible envie de se retrouver, une dernière fois pour l'un, et dans l'espoir que tout irait mieux demain pour l'autre. Les draps froissés avaient semblé comme la représentation de leurs âmes, tandis que leurs corps s'étaient abandonnés à cette passion charnelle et que leur plaisir mutuel avait fait office de mélodie, emplissant cette chambre dans laquelle ils s'étaient déjà tant retrouvés.
Tant de baiser volés, de gémissements arrachés et d'amour partagé, dans cette intimité propre à eux seuls.
Ces souvenirs là Junpei voulait les chérir autant que le temps le lui permettait, puisque ce n'était presque que de cette manière qu'ils arrivaient à s'aimer sainement, comme avant.
Par la même occasion, il voulait abandonner toute réminiscence de sentiments négatifs. Sa relation avec Yuji avait été l'unique, la plus douloureuse mais non moins la plus belle, et tout ce qu'il désirait désormais, c'était partir avec les moments les plus dégoulinants de bonheur, même s'ils n'étaient vers la fin plus que des moments charnels.
Le reste, il voulait bien le laisser sombrer.
C'était d'ailleurs car leurs souvenirs heureux se faisaient de plus en plus rares qu'ils étaient si précieux. Junpei frissonna en pensant à son propre souvenir qui disparaîtrait sûrement de la mémoire de Yuji, chassé à tout jamais, comdamné à être oublié. Même s'il faisait ça pour l'homme dont il était littéralement fou amoureux, pour le rendre plus heureux, le noiraud ne pouvait s'empêcher d'avoir cette pensée égoïste ; celle d'espérer qu'il prendrait du temps à passer à autre chose, et ce même jusqu'au point de ne jamais l'oublier.
Imaginer le musicien se débarrasser des nombreux bribes de souvenirs qui les enveloppaient le frustrait au plus haut point, il aurait certainement cette impression de s'être fait des films, de n'avoir jamais compté.
De ne jamais avoir été aimé.
Et pourtant il n'avait pas le droit de se plaindre, puisque c'était lui qui allait y mettre fin.
En somme, il voulait que Yuji soit heureux sans lui, mais il ne voulait pas non plus que leur vécu ne s'évapore pour toujours, tout simplement car lui resterait amoureux encore longtemps. Il le savait.
Un énième soupir triste s'empara de Junpei, alors qu'il observait son propre reflet à travers le miroir sali par le temps. Il se trouvait affreux, l'homme qu'il voyait dans cette glace était abominable, tant par ses actes immoraux que par son cœur éméché. Une unique larme roula sur sa joue, qu'il ne prit même pas la peine d'effacer.
Le bonheur était bien cruel, et c'est l'unique réflexion qu'il se fit en constatant qu'il n'y avait définitivement pas droit. Dans le fond, Junpei se débarassait de leurs chaînes pour permettre à Yuji de remonter à la surface, mais il savait très bien qu'il causait par la même occasion son propre naufrage.
C'était un paradoxe inévitable.
─ Alors tu vas vraiment partir ?
Dans un maigre sursaut, le noiraud s'extirpa de ses pensées en entendant enfin la voix de l'homme ayant pris son cœur ; le timbre du musicien n'était qu'un pâle chuchotement, comme si parler plus fort aurait pu le briser. Junpei se retourna vers lui, et encra son regard de jais dans les yeux marrons de son aimé, espérant lui faire comprendre tout ce qu'il ressentait à travers ce simple contact.
─ Yuji...
Il s'était avancé doucement de celui qu'il aimait tant, qu'il aimait trop, et lui faisait désormais face. Lentement, il se pencha vers lui et scella une toute dernière fois leurs lèvres, mettant officiellement fin à leur histoire par ce simple geste. Un baiser d'adieu, en somme.
─ Merci pour cette dernière nuit d'amour, et pour toutes les autres. Merci de m'avoir aimé jusqu'à la fin.
La dernière chose qu'il put entendre fut les sanglots de son musicien, avant de disparaitre à jamais de sa vie.
Malgré cette fin douloureuse, Junpei emportait avec lui tous leurs bons moments, sans s'occuper du reste.
La seule chose qu'il espérait désormais, c'était que Yuji fasse de même, afin de se remettre de cette histoire qui ici s'achevait.
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