S'éduquer
A priori, si vous poursuivez la lecture de cet essai, c'est que vous êtes plutôt d'accord avec cette idée du changement. Mais changer qui ? Quoi ? Comment ?
Commençons par une transformation à la portée de tous. Pour cela, il me faut — après avoir à l'instant défendu l'ambition avouée du titre de ce texte — réduire l'échelle du monde à son niveau cellulaire. Autrement dit, si l'on admet que notre société est constituée d'humains, alors l'individu en représente l'une des innombrables cellules. Il arrive que la médecine se focalise sur les symptômes d'une maladie au lieu d'en traiter la cause. Si l'on se contente de poser un pansement sur une plaie infectée, d'ostraciser les handicapés, de faire la chasse aux SDF, bref, de lustrer l'apparence d'une société équilibrée et harmonieuse, on ne l'en guérit pas pour autant des maux qui la rongent au niveau cellulaire, individuel.
Où veux-je donc en venir ? La conclusion de cet aparté est la suivante : pour changer le monde, il faut qu'un premier changement s'opère d'abord au niveau de la personne. En effet, on ne peut pas s'engager dans un mouvement contestataire ou révolutionnaire sans avoir au préalable traversé soi-même une crise intellectuelle identitaire et remis en question ses propres convictions. En gros, inutile de militer « pour la forme » si le fond de notre pensée ne suit pas le mouvement. Aussi, comment s'y prendre pour faire en sorte que nos actions reflètent fidèlement nos principes ? (Et inversement ?) La réponse est d'une simplicité toute relative.
Tout d'abord, admettons la nécessité de nous placer dans une démarche de recherche, une quête de sens. Pour ceux d'entre nous qui sont déjà engagés, je conçois que l'on puisse considérer cette remise en question comme futile, voire contre-productive. Or je suis de celles et ceux qui voient l'apprentissage comme une aventure qui n'est jamais censée prendre fin, un livre dont les chapitres se multiplieraient au fur et à mesure de la lecture. Qui, dans sa vie, peut refermer un ouvrage et dire en toute bonne foi : « Voilà ! Maintenant, je sais tout ce qu'il y a à savoir au monde ! » Au contraire, plus l'on s'instruit, plus l'on prend conscience de la mesure de notre ignorance.
Cela dit, il serait vraiment dommage, voire carrément imbécile, de faire une croix sur cette quête avant même d'avoir commencé ! Il n'est jamais trop tard pour s'y mettre et toujours trop tôt pour abandonner ! Voilà pourquoi la première proposition de ce petit manuel du Changement invite à s'éduquer. Certes, l'éducation est un terme un peu vague qui peut laisser dubitatif. Précisons donc que la démarche qui consiste à s'éduquer aujourd'hui implique les actions suivantes :
1. Obtenir une carte de lecteur à la médiathèque la plus proche. Eh oui, la charte des bibliothèques stipule dans ses missions que ce service public, en plus d'être nécessaire à l'exercice de la démocratie, « doit assurer l'égalité d'accès à la lecture et aux sources documentaires pour permettre l'indépendance intellectuelle de chaque individu et contribuer au progrès de la société. »
Lire le texte de la charte ici : http://www.enssib.fr/bibliotheque-numerique/documents/1096-charte-des-bibliotheques.pdf
Le Manifeste de l'UNESCO sur la bibliothèque publique va plus loin en soulignant le caractère essentiel de cet instrument dans le cadre du « développement de la paix et du progrès spirituel par son action sur l'esprit des hommes et des femmes. »
Lire le Manifeste ici : http://www.unesco.org/webworld/libraries/manifestos/libraman_fr.html
Ne sont-ce pas là de belles missions ? Il serait fort dommage de voir disparaître de notre horizon culturel les derniers remparts faisant front à l'obscurantisme, faute d'usagers.
2. Lire. Suite logique du premier point ci-dessus, car une fois qu'on a sa carte de lecteur, il s'agit de rentabiliser ce petit investissement culturel. Alors, lire, c'est bien, mais lire quoi au juste ?
Suite à la victoire de Donald Trump aux élections présidentielles américaines en novembre 2016, l'auteur indépendant Neil Jomunsi a lancé sur son blog un appel aux livres ! Pour résumer son initiative, je me permets de le citer : « Je voudrais établir, avec votre aide, une liste. Une liste de livres. Mais pas n'importe quels livres. Il faut que ce soient des livres qui puissent changer une vie ; des livres extraordinaires, qui prônent la tolérance, l'ouverture, qui éclairent les esprits quand il fait sombre, qui montrent la voie. Des livres qui nous renseignent sur l'histoire aussi, qui nous montrent le mauvais exemple, ce qu'il ne faut plus faire, ce qui ne doit plus jamais se répéter. »
Lire l'article en entier ici : https://page42.org/aux-livres-citoyens/#more-5775
Il s'agit donc de recenser les ouvrages (fictions et documentaires confondus) qui favorisent l'acquisition d'un certain esprit critique, le développement d'un intellect indépendant, d'une conscience altruiste, etc. N'hésitez pas à contribuer si dans vos lectures, certaines œuvres correspondent au profil recherché.
Et si vos PAL ne sont pas encore assez remplies, permettez-moi de partager dans les pages qui suivent un résumé de quelques ouvrages qui, à mon humble avis, contribuent à nous faire grandir en tant qu'individus conscients de notre unicité ainsi que de notre appartenance à un collectif d'humains qui, malgré les divergences qui nourrissent les conflits, tendent tous à un idéal commun : un équilibre harmonieux, en soi comme en dehors de soi.
3. Multiplier nos lectures va de pair avec la multiplication des sources d'informations. En effet, se contenter des nouvelles d'une seule chaîne télévisée ou d'un seul quotidien, c'est un peu comme si l'on se limitait à la bibliographie d'un seul auteur. C'est formidable d'avoir lu tout Poe. Mais Poe n'étant pas l'unique auteur de nouvelles fantastiques, on passe forcément à côté de trésors littéraires à refuser d'explorer d'autres plumes, d'autres formats, d'autres genres.
J'en vois qui froncent le sourcil : avec la multitude de sources qui existent sur Internet, où trouver des informations fiables ? Je reconnais là l'angoisse qu'inspire le spectre du Fake News, cet épouvantail que les médias traditionnels agitent frénétiquement dans un but incertain. Certes, ces sites de propagande prolifèrent, mais je déplore qu'ils soient systématiquement placés dans le même panier que les médias indépendants, des sources d'autant plus respectables qu'elles n'ont aucun compte à rendre aux grands groupes médiatiques qui, jusqu'à présent, décidaient seuls de l'actualité.
Les médias indépendants et fiables existent ! Recensons-les ensemble.
4. Retourner à l'école ! Quel que soit le niveau d'études atteint, il n'est jamais trop tard pour les poursuivre, se former, apprendre un nouveau métier, perfectionner une technique, ou encore changer de carrière. En matière de formation continue, les offres ne cessent de se multiplier. De nombreuses universités traditionnelles proposent désormais dans leur catalogue une offre « à distance » qui permet aux étudiants des quatre coins du monde de se retrouver dans un amphithéâtre virtuel pour assister à une même conférence, de soumettre leurs devoirs sur l'ENT dédié, de passer les épreuves dans un centre d'examen à proximité pour enfin obtenir le même diplôme.
De nos jours, une simple connexion Internet suffit à accéder aux cours de professeurs renommées et d'universités prestigieuses. Le succès des MOOC, ou CLOM en français (cours en ligne ouvert à tous) prouve l'existence d'une véritable demande en matière d'éducation démocratisée et gratuite. Ces plateformes proposent une variété de formations dans tous les domaines du savoir. Apprendre la guitare, s'initier à l'œnologie, analyser un poème, philosopher, ou encore, explorer les subtilités des circuits électroniques... Quels que soient vos centres d'intérêt, il existe un cours qui répondra à vos besoins, comblera des lacunes, ou encore, éveillera votre curiosité à tel point que vous ne pourrez vous soustraire à l'envie de creuser plus profondément un sujet.
L'excuse du manque de temps ne tiendra pas longtemps. En effet, que représentent 2 à 4 heures de travail dans une semaine ? 1 et 2 % respectivement.
S'éduquer, c'est donc à la portée de tout le monde. Qu'attendons-nous ?
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