Chapitre 12 - Deuil et Samouraï

Le jour n'était pas encore levé. Les yeux gonflés par un trop plein de larmes versées, je fixais la toile de ma tente d'un regard vide. Une fois encore, l'horreur était venue frapper à notre porte avec la mort en guest star.

Dale nous avait quitté deux jours plus tôt dans des conditions insoutenables. Il avait souffert le martyr, éviscéré par un rôdeur avant d'être achevé d'une balle dans la tête par Daryl.

Incapable de dormir, je me levai, glissai le couteau de chasse de mon ami dans la ceinture de mon jean, et attrapai la paire de ballerines écarlates qu'il m'avait offert quelques jours plus tôt. Il s'était passé tellement de choses en si peu de temps, que cette soirée me semblait dater d'un autre siècle.

Après avoir enfilé mes Doc Martens et ma veste de sport, je m'élançai en silence vers la grange.

Armée de ma lame, j'entrepris de déchirer mon jean à mi-cuisses pour en faire un short. Je retirai mes rangers pour les troquer contre mes chaussons rouges. Comme je l'avais fait des dizaines, des centaines de fois, je préparai mes pointes consciencieusement. Je les pliai pour les assouplir, et sans colophane pour l'adhérence, je griffai les semelles avec mon couteau. Après quelques minutes, je les enfilai en commençant par le pied gauche. Je nouai les rubans de soie autour de mes chevilles, savourant le contact frais et léger du tissu contre ma peau nue.

Je fermai les yeux et m'élançai du haut de mes pointes sur le solo de Victoria qui résonnait en silence dans ma tête. Je repensai avec rancœur à mon professeur de danse qui, lors de ma première année de conservatoire, m'avait assuré que jamais je ne serai à la hauteur de ce monument. Elle me répétait sans cesse que je n'étais qu'une gosse, qui n'avait pas vécu assez d'expériences traumatisantes pour pouvoir porter cette variation à son paroxysme. Elle ignorait tout de ma vie d'enfant battue, de la mort de ma sœur, de ma tentative de suicide avortée, de l'enfer de mon existence toute entière. Pour elle, je n'étais qu'une gamine de plus, prétentieuse dans son désir de mettre son corps au service de la danse.

Habitée, presque possédée, j'enchaînais les pirouettes fouettées, les arabesques et les grands jetés sans m'arrêter, sans reprendre mon souffle, droite et souple sur mes pointes qui soulevaient un peu plus de poussière à chacun de mes pas. Je n'étais plus dans cette grange froide et glauque, vêtue d'un short en jean déchiré et d'un débardeur tâché de sang. Je me retrouvais propulsée sur la scène de l'opéra de Sydney, dans la robe virginale de Victoria, ma longue chevelure bouclée qui me manquait tant flottant allègrement dans mon dos au gré de mes mouvements. Plus de rôdeurs, plus de morts, plus d'odeur de putréfaction...seuls le parfum de la magnésie et la sensation du parquet sous mes pointes existaient.

Le visage de mon père m'apparut, et tandis que je le revoyais me frapper encore et encore, je poursuivis mon ballet comme une forcenée. Insensible à la douleur dans mes pieds, dans mes muscles, dans mon épaule qui s'était remise à saigner, plus rien n'avait d'importance. Amy, Jim, Jackie, Sophia, Dale, Hana. Je dansais pour eux. Pour pouvoir oublier.

La sueur collait à mon front pendant qu'inlassablement, j'enchaînais la variation de plus en plus rapidement, au rythme de mon cœur qui souffrait à en crever. Toute ma rage, toute ma haine, toute ma souffrance, je déversais tout ce que j'avais de plus noir dans ma danse, enragée par l'horreur quotidienne de ce monde atroce.

Je n'avais aucune idée du temps écoulé. Je recommençai ce ballet de plus de 17 minutes, une fois, deux fois, dix fois. Je ne savais plus. Je tournais encore et encore lorsque je fus stoppée par deux bras puissants.

- Lola, murmura Daryl tandis que je tremblais de tous mes membres.

- T'es là depuis quand ? demandai-je à bout de souffle en réalisant que j'étais en larmes.

- Suffisamment longtemps pour que t'arrêtes, répliqua-t-il. Ça fait des heures que t'es là dedans.

Je constatai que le jour s'était levé lorsque mes jambes cédèrent sous mon poids. Mon ami me souleva de terre et j'enroulai mes bras autour de son cou avant de poser ma tête sur son épaule.

- J'ai mal, murmurai-je.

- Je sais, dit-il en m'embrassant sur le front.

Il me porta en silence jusqu'à la maison.

- Qu'est-ce-qu'elle a ? s'exclama Carol, visiblement inquiète.

- Rien, grogna Daryl en entrant dans le salon pour me déposer sur le canapé.

Il dénoua avec douceur les rubans rouges et retira mes ballerines avec des gestes lents. Le contact de ses mains sur mes jambes dénudées m'arracha un frisson que je fus incapable de réprimer.

- Je vais chercher Hershel, annonça la mère de famille.

- Pas la peine, répliquai-je en tentant de me redresser, j'ai l'habitude.

- Dis pas d'conneries, marmonna mon ami. T'as fait sauter tes points de suture.

Je me mordis la lèvre inférieure en constatant qu'un filet de sang s'écoulait de mon épaule. Le patriarche arriva et m'ausculta une seconde avant de sortir son matériel de sa trousse. Une fois encore, je n'avais pas fait les choses à moitié.

- Faites-moi le plaisir de rester tranquille aujourd'hui, indiqua Hershel d'un ton sévère.

- Promis, dis-je en avalant les antalgiques qu'il venait de me donner.

- Mais enfin, qu'est-ce-qui vous a pris de vous mettre dans cet état ?

- J'avais besoin...d'oublier, répondis-je tristement. Je suis désolée.

- Ne le soyez pas, se radoucit-il en se levant. Mettez là dans ma chambre, reprit-il à l'attention de Daryl. Avec les calmants que je lui ai donné, elle devrait réussir à dormir.

***

Quelques minutes plus tard, le chasseur m'installa au premier étage. Je posai ma tête sur l'oreiller avec un soupir de soulagement. J'avais dansé près de cinq heures, le ventre vide, sans échauffement, sans aucune préparation et mon corps me le faisait payer.

- Comment tu t'sens ? grommela l'archer, appuyé contre le chambranle de la porte.

- Bien, dis-je en étouffant un bâillement. J'ai réussi, ajoutai-je avec un sourire.

- Quoi ?

- Les chaussons rouges, la variation de Victoria, répliquai-je épuisée, je l'ai fait. J'ai réussi.

- J'ai vu, grogna-t-il, troublé. Si je t'avais pas arrêté, t'y s'rais encore.

- Possible...

- Je vais t'laisser te reposer.

- Non ! m'exclamai-je un peu plus fort que je ne l'aurais souhaité.

- ...

- Reste, balbutiai-je.

Daryl me fixa intensément, semblant hésiter un instant.

- S'il te plaît...jusqu'à ce que je m'endorme.

- Ok, marmonna-t-il en fermant la porte.

Il tira les rideaux, plongeant la pièce dans une pénombre apaisante et s'allongea sur le flanc près de moi. Je me perdis un instant dans son regard bleu, sentant le sommeil qui commençait à gagner son combat contre mon esprit torturé.

Mon corps tout entier me faisait souffrir, mais pas suffisamment pour oublier le trouble que j'éprouvais. La perte de Dale avait été une nouvelle épreuve. Pour nous tous. Daryl, qui avait dû l'achever, restait muet sur ce qu'il ressentait. Comme toujours dès qu'il s'agissait d'exposer ses sentiments. Mon ami souffrait. Je le savais. Et j'ignorais quoi faire pour alléger sa peine.

Je me blottis contre lui, refoulant les sanglots qui affluaient à nouveau dans ma gorge. Je ne pouvais pas me remettre à pleurer, c'était hors de question. Je refusais de devenir le sponsor officiel d'une marque de mouchoirs en papier. Il m'enveloppa de ses bras tandis que je laissai ma tête reposer sur son épaule.

- Ça faisait longtemps que je t'avais pas vu danser, finit-il par dire à voix basse.

- Tu m'as vu au CDC, remarquai-je.

- Non, j'voulais dire, vraiment danser.

- Mon audition pour l'opéra de New York y a 10 ans, murmurai-je avec nostalgie.

- Ouais, t'avais la trouille, répliqua-t-il un brin moqueur.

- Tu l'as dit, m'esclaffai-je. Je jouais le début de ma carrière de ballerine.

- C'que t'as fait tout à l'heure...dans la grange...Tu...m'as scotché.

Je levai lentement la tête vers lui, surprise. Les battements de mon cœur s'intensifièrent tandis qu'il me dévisageait de ses yeux brûlants. Avant que je n'ai le temps de réaliser ce que j'étais en train de faire, mes lèvres étaient sur les siennes.

- D...Désolée, bafouillai-je avant de m'écarter, hébétée par mon geste.

Insondable, il me regarda de longues secondes intensifiant mon trouble. Putain, mais qu'est-ce-qui ne tournait pas rond chez moi ?!

- C'est rien, hésita-t-il en se tournant sur le dos.

Totalement perdue, je finis par sombrer imperceptiblement dans le sommeil.

***

Lorsque j'ouvris les yeux en fin d'après-midi, Daryl avait disparu. Pas étonnant, songeai-je en me flagellant mentalement. Il avait raison. J'étais une véritable catastrophe ambulante. La douleur de la mort de Dale m'avait fait perdre le peu de contrôle que j'avais encore sur moi...et je l'avais embrassé. Un baiser chaste, certes, mais putain j'avais vraiment merdé ! Qu'est-ce-qui m'avait pris de me laisser aller comme ça ? Il avait suffit qu'il se montre tendre et vulnérable pour que je craque totalement. Ma vie était entrain de se transformer en un roman d'horreur à l'eau de rose, dont la principale protagoniste, autrement dit, moi, ne cessait d'enchaîner les conneries.

Je grimaçai en tentant de m'étirer. Mes muscles douloureux m'en voulaient encore de les avoir malmenés. Comment les blâmer ? En tant que danseuse, je devais prendre soin de mon corps, le respecter. Mais avec ce que nous vivions depuis des mois, était-ce encore nécessaire ? Mon corps n'était plus un instrument au service de la danse. Il était devenu un instrument dans ma lutte pour rester en vie.

Après quelques minutes intenses d'auto-flagellation, je me levai péniblement et constatai qu'on avait déposé mes rangers près du lit. Je me crispai en regardant l'état de mes orteils. Ma mère m'aurait tué en les voyant, mais quelle importance ça avait à présent ? Et pourquoi fallait-il que je me mette à penser à elle ? De toute façon, vu ce qu'était devenu le monde, elle était sûrement morte. J'enfilai mes Doc Martens en ignorant les protestations douloureuses de ma peau à vif au contact du cuir et sortis de la chambre.

Par la fenêtre du salon, j'aperçus mes amis qui se tenaient près de la remise. Compte tenu de leur agitation, j'en déduisis que quelque chose s'était passé...encore, soupirai-je en quittant la maison.

- Comment est-ce-qu'il a pu sortir ? demandait T-Dog tandis que j'approchais du groupe.

- Il a dû faire glisser les menottes, constata Andrea en ramassant sur le sol les liens qui avaient maintenu Randall prisonnier.

- C'est possible ? s'enquit Carol.

- Quand on a plus rien à perdre, tout est possible, répondit l'avocate.

- C'était fermé de l'extérieur, remarqua Hershel en désignant le cadenas sur la porte.

Lori m'accueillit avec un sourire crispé.

- Qu'est-ce-qui se passe ?

- Randall s'est échappé, m'informa Glenn, qui se tenait bras croisés près de Maggie.

- Si c'type est dans la nature, va falloir le trouver avant qu'il revienne avec ses potes, marmonna le chasseur en posant ses yeux sur moi avant de les détourner vivement.

- Daryl a raison, approuva Rick. Il faut qu'on le retrouve avant qu'il ne soit trop tard.

- Rick !! hurla Shane en sortant subitement de la forêt qui bordait la ferme de la famille Greene. Rick !

L'ancien flic approcha en titubant. Il avait le nez en sang et semblait encore plus perturbé que d'habitude.

- Qu'est-ce-qui s'est passé ? cria Lori.

- Cet enfoiré s'est barré ! beugla-t-il en arrivant à notre hauteur. Il m'a pris mon flingue et il s'est tiré !

Quelque chose clochait. Comment Randall avait-il pu maîtriser quelqu'un de la carrure de Shane ? D'autant plus qu'entre sa blessure à la jambe et les coups qu'il avait reçu, le jeune homme était plutôt amoché.

- Tu vas bien ? s'enquit Andrea en désignant son visage tuméfié.

- Ce salopard m'a pris par surprise et m'a collé un pain, répliqua-t-il en arrivant à notre hauteur.

- Attends, ce mec est taillé comme un as de pique et tu dis qu'il t'a foutu une raclée ? tiqua Daryl en lisant dans mes pensées.

- Il s'est servi d'une pierre, ça te va !

- Ok, on se calme, ordonna Rick. Herhel, T-Dog emmenez tout le monde dans la maison et verrouillez toutes les portes ! Daryl, Glenn vous venez avec Shane et moi.

Le chasseur redressa son arbalète sur son épaule et m'attrapa par le bras pour m'emmener un peu à l'écart. Je me sentais terriblement nerveuse. L'estomac noué, je ne cessai de repenser à mon moment d'égarement.

- Tu restes à l'abri, décréta-t-il froidement en me tendant son couteau de chasse, tu prends aucun risque et tu sors sous aucun prétexte.

- Mais...

- Discute pas ! aboya-t-il.

- Ok, déglutis-je, mal à l'aise en glissant son arme dans la ceinture de mon short en jean.

Il s'éloigna un instant avant de revenir sur ses pas pour me serrer brusquement dans ses bras.

- Quand j'reviens, on pourra pt'être...tu sais ?

- Quoi ? me crispai-je contre lui.

En guise de réponse, il se contenta de me fixer intensément.

- Tu sais, répéta-t-il, nerveux en haussant les épaules, parler et...tu sais...

- Daryl ! lança Rick. On y va !

- Faut que j'y aille, reprit-il.

- Fais attention à toi.

***

L'agitation qui régnait dans la maison des Greene était à son comble. J'aidais Hershel, Maggie et Beth à barricader les fenêtres du rez de chaussée, pendant que Carol et Lori transformaient le salon en dortoir. Avec la menace des rôdeurs et du groupe de Randall, le fermier avait insisté pour que nous nous installions tous chez lui. Nous avions donc éparpillés nos affaires dans la pièce principale qui s'était peu à peu muée en une sorte de camp de survie.

Je clouai une dernière planche avant de jeter un œil inquiet vers la lisière de la forêt. La nuit était tombée depuis près d'une heure. Daryl, Glenn, Rick et Shane n'étaient toujours pas rentrés. Mes entrailles se contractèrent en songeant à mon ami. J'avais désespérément besoin de le voir.

Je retournai à l'intérieur et me laissai tomber sur le divan à côté d'Andrea.

- Je vais les chercher, déclara-t-elle en se levant.

- C'est pas une bonne idée, répliqua Lori. Ils peuvent être n'importe où, et si Randall revient, on va avoir besoin de toi ici.

De son côté Carol faisait les cents pas, bras croisés attendant comme nous tous le retour de nos amis. Hershel, Maggie et Beth rentrèrent à leur tour. Nerveuse, la jeune fille blonde posa ses outils dans un coin avant de se rendre à l'étage.

- Et si tu nous faisais du thé, Maggie ? demanda son père.

- Je vais l'aider, proposa Carol.

Avant qu'elles n'aient eu le temps de se rendre dans la cuisine, Glenn arriva, suivi de près par Daryl. Les deux hommes semblaient très agités.

- Rick et Shane sont rentrés ? s'inquiéta l'asiatique avant d'embrasser Maggie.

- On pensait qu'ils étaient avec vous ! répliqua Lori, tendue.

- On a entendu un coup de feu, lança Daryl.

- Peut-être qu'ils ont trouvé Randall ? suggérai-je en me rongeant les ongles.

- Nous, on l'a trouvé, marmonna le chasseur.

- Vous l'avez enfermé dans la remise ? s'enquit T-Dog.

- C'est un rôdeur, répondit mon ami.

- Et celui qui l'a mordu, vous l'avez trouvé ? demanda Carol qui avait cessé son va et vient.

- Non, le truc c'est...qu'il s'est pas fait mordre, annonça Glenn, le visage crispé par la tension.

- Son cou était cassé, reprit Daryl sombrement. C'qui est bizarre, c'est qu'les traces de Shane et Randall se suivaient de très près. Shane n'est pas un pisteur. Pour moi, il le suivait pas. Ils étaient ensemble.

- Est-ce que tu pourrais y retourner et essayer de les trouver ? supplia Lori, morte d'inquiétude en s'approchant de mon ami.

- J'y vais, acquiesça-t-il d'un signe de tête avant de se diriger vers la porte d'entrée.

Je le suivis à l'extérieur lorsqu'il se retourna.

- Reste ici, ordonna-t-il en remettant son arbalète sur son dos.

- Daryl, murmurai-je en fixant horrifiée une horde de rôdeurs qui approchait dangereusement de la ferme.

Nous fûmes rejoints par Andrea, Hershel, Glenn et Maggie, épouvantés tout comme nous par l'apparition soudaine de nos invités surprise. Ces morts vivants n'avaient aucune éducation...se pointer comme ça à l'improviste chez les gens...Ils croyaient quoi ? Que c'était open bar et buffet à volonté ?

- Maggie, chuchota le patriarche, vas éteindre les lumières.

- Je m'occupe des armes ! lança l'ancien livreur de pizza à voix basse.

- Qu'est-ce-qu'on fait ? demanda Andrea. On se planque à l'intérieur ?

- Vu l'nombre qu'ils sont, ça sert à rien, répliqua Daryl, sombrement. Une meute comme ça pourrait réduire cette baraque en miettes. Faut s'barrer.

Accompagnée de Carol, Lori arriva brusquement, à bout de souffle, totalement paniquée.

- Carl n'est pas là ! cria-t-elle une main sur le cœur.

- Il se cache peut-être ? suggéra Hershel en gardant son calme.

- Il était supposé être à l'étage, répondit-elle au bord de la crise de nerfs, je ne pars pas sans mon fils !

- On va le trouver, tentai-je de la rassurer. On va refaire le tour de la maison, on va le trouver, viens !

***

Après de longues minutes de recherches, Carl restait introuvable. Lori, Carol et moi avions fouillé chaque recoin de la maison, en vain. Nerveuse, je sortis quelques secondes sous le porche pour constater que nos amis s'attelaient à la difficile tâche d'éliminer les morts vivants qui affluaient sur les terres d'Hershel.

Sur sa moto, j'aperçus Daryl qui tirait dans le tas, pendant qu'Andrea, T-Dog, Glenn et Maggie faisaient de même en voiture. Le patriarche, quant à lui, abattait les monstres qui s'approchaient d'un peu trop près de la maison avec son fusil de chasse. Malheureusement, force était de constater que les coups de feu semblaient n'avoir aucun effet sur le nombre de cadavres qui ne cessait d'augmenter. Je posai ma main sur le couteau de chasse de mon ami que je portais à la ceinture de mon short en jean et retournai à l'intérieur lorsque Beth dévala les escaliers.

- La grange est en feu ! Les rôdeurs se dirigent là bas !

- C'est peut-être Rick qui l'a allumé pour les attirer ? observai-je en contemplant la scène depuis la porte.

- Je ne le trouve nulle part ! cria Lori en arrivant à son tour.

- Il est peut-être sorti ? répliqua Carol qui tentait de rester calme malgré l'urgence de la situation.

- Je fais quoi ? hurla Lori, à bout de nerfs.

- Il était là ! reprit la mère de famille. Il a dû s'enfuir pour retrouver Rick.

- C'est forcément ça, approuvai-je.

Nous nous rendîmes toutes les trois sous le porche, épouvantées par la scène apocalyptique qui se déroulait devant nos yeux. Le brasier provoqué par l'incendie de la grange enflammait le ciel sombre dénué d'étoiles, pendant que les grognements sinistres de la meute nous glaçaient les entrailles. J'observai le ballet des voitures et des coups de feu, réalisant que tout ceci était inutile. Daryl avait raison. Les cadavres étaient trop nombreux.

- Pourquoi est-ce-qu'il n'écoute jamais ? se lamenta Lori en passant une main dans ses longs cheveux bruns. Ok...S'il a suivi son père, il a dû partir là bas ! indiqua-t-elle en pointant la lisière de la forêt.

- On ne peut pas y aller, s'écria Carol, on va les mener droit vers lui !

- Y en a de plus en plus ! m'exclamai-je, horrifiée. Il faut qu'on se barre !

- On ne peut pas partir !

- Lola a raison ! On ne doit pas rester ici !

- C'est mon garçon ! s'insurgea mon amie en larmes.

- Tu vas devoir être forte Lori ! ordonna la mère de famille en la prenant par les épaules. Si on le retrouve, il va avoir besoin de toi ! Il faut qu'on parte !

- Ok ok...abdiqua la grande brune.

- Je vais chercher Beth ! annonçai-je en courant à l'intérieur.

J'attrapai mon sac à dos neuf à la volée et trouvai Beth, assise sur les marches.

- On met les voiles ! déclarai-je en la prenant par la main pour l'emmener dehors.

- Ok, on y va ! lança Carol en me tendant un revolver.

Une nouvelle fois, j'avais l'impression d'avoir rallié l'enfer sur terre. L'incendie, les coups de feu, l'odeur de la mort qui flottait dans les airs...la scène était totalement surréaliste. Je cherchai Daryl des yeux, incapable de le distinguer au milieu de ce chaos gigantesque. Rick et Shane n'étaient toujours pas revenus, Carl avait disparu, quant à Hershel il ne bougeait pas. Campant sur ses positions, les pieds ancrés dans le sol, il continuait inlassablement à tirer sur les rôdeurs qui se faisaient toujours plus nombreux.

- Hershel !!! criai-je à m'en déchirer les cordes vocales. Hershel !!! On ne peut pas rester là !!!

- Il est temps de partir !! hurla Lori à son tour. Hershel !!!

Mais le patriarche ne nous entendait plus. Il était possédé, obsédé par la sauvegarde de la ferme familiale.

Lori, Beth et moi courûmes comme des dératées, suivies de près par les cadavres et leur odeur pestilentielle. Comme tombés du ciel, Andréa et T-Dog arrivèrent à bord du vieux pick-up de Daryl. L'avocate sortit de la voiture pour dégommer un errant qui s'était un peu trop approché de Beth.

- Grimpez ! ordonnai-je avant d'abattre deux rôdeurs d'une balle dans la tête.

Je remerciai silencieusement Rick de m'avoir appris à tirer, et dégommai encore trois autres monstres.

- Allez aider Carol ! lança Lori en montant dans le véhicule.

Je m'élançai vers la mère de famille, en mauvaise posture près de la remise. Armée d'un bâton, elle tentait désespérément de repousser les assauts de ces monstres grotesques assoiffés de chair fraîche. Complètement shootée à l'adrénaline, vêtue de mon mini short en jean, telle une Lara Croft post apocalyptique diablement sexy...Concentration Lola, me réprimandai-je en plantant mon couteau dans le crâne du geek le plus proche avant d'en abattre un second.

- Lola !!! Derrière toi !! hurla Carol.

Je me retournai brusquement, et eut à peine le temps de tirer, qu'un vieux sac de viande décharné s'écroulait sur moi de tout son poids. Tandis que je luttais pour me débarrasser de sa dépouille puante et suintante, j'entendis une voiture s'éloigner. Andrea m'aida à me relever avant d'abattre deux autres cadavres. Cette femme était une véritable machine de guerre !

- On se barre !! somma-t-elle alors qu'une nouvelle nuée de morts vivant nous encerclait.

***

Je n'avais aucune idée du temps écoulé depuis que nous avions quitté la ferme. Nous courions à en perdre haleine depuis sûrement plusieurs heures, lorsque le jour commença à se lever. Terrassée par un violent point de côté, je m'arrêtai une seconde pour reprendre mon souffle.

- Faut y aller Lola ! Ils arrivent !

Je m'élançai à nouveau à travers les arbres, ignorant la douleur qui irradiait mon flanc tandis qu'une quinzaine de rôdeurs nous suivaient, infatigables.

- Putain, jamais ça s'arrête ! maugréai-je avant de planter mon couteau dans le crâne d'un geek un peu trop entreprenant. Tu crois que les autres vont bien ?

- Là, tout de suite, je m'en tape ! T'as encore des munitions ? demanda-t-elle le souffle court.

- Je suis à sec ! Et toi ?

- Pareil ! dit-elle avant de trébucher et de s'étaler de tout son long.

A peine avait-elle touché terre, qu'un cadavre se jetait sur elle pour tenter de la dévorer. J'attrapai le monstre par le col de sa chemise et lui explosai la tête contre l'arbre le plus proche avant de le finir à coup de pieds. J'aidai l'ancienne avocate à se relever lorsque trois nouveaux rôdeurs se précipitèrent sur nous. Je reculai, la main crispée autour du manche de mon couteau.

- Putain de merde ! On va pas pouvoir courir éternellement, lança-t-elle en transperçant le cerveau de l'un de nos assaillants.

Je m'occupai du second lorsqu'une silhouette encapuchonnée arriva de nulle part. Armée d'un sabre, traînant derrière elle deux cadavres enchaînés, sans bras ni mâchoires, la samouraï massacra les derniers morts vivants en un rien de temps. Figée, je l'observai la bouche grande ouverte, les yeux écarquillés.

- Alors là...respect ! murmurai-je, ébahie.

A suivre...

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