XVI - Mathieu

Paris - Novembre 2021

Je reste un instant interdit en voyant le petit "vu" s'afficher sous mon message. Cette petite garce ose me laisser sur ma faim ! Bien, tant pis pour elle. Je vais pas lui courir après...

Frustré de cette conversation, je file sous la douche pour me soulager, des images de la brune plein la tête. Putain Math, mais tu va apprendre à penser avec autre chose que ta queue un jour... résonne la petite voix dans ma tête.

Je chasse ces pensées d'un geste agacé et m'allume un joint. C'est pas encore ce soir que je vais réussir à dormir.

[...]

Le lendemain, je me lève, me roule une clope et me prépare pour rejoindre Saddam au studio. Arrivé sur place, je le salue d'une accolade avant de m'installer au micro. On passe un moment à régler les niveaux avant de pouvoir attaquer l'enregistrement.

Mais j'suis pas concentré alors on arrive à rien. Fait chier.

Tu m'dis ce que t'as ? me lance Saddam, excédé par mon manque de focus.

Je pousse un profond soupir.

Y'a r frère.

Tu casses trop la tête, rétorque-t-il, pas dupe.

J'ai pas le temps de lui répondre et ça me va très bien parce que son bigo se met à sonner.

Ouais allo !

J'écoute d'une oreille distraite, essayant de poser un couplet pendant ce temps.

Pour samedi soir ? j'entends Saddam demander.

Il marque une pause, semblant réfléchir.

Normalement j'accepte pas trop en dernière minute mais tu peux dire à ton patron que c'est ok.

Je relève la tête, intrigué.

T'as de la chance que ça soit toi. Vas-y, à plus.

Il raccroche et je fronce les sourcils.

C'était qui ?

Thaïs, la rousse qui bosse au Balajo. Son patron l'emmerde pour qu'elle fasse venir un rappeur alors elle m'a appelé. Et vas-y t'as vu j'allais pas la laisser dans la merde !

Chanmé.

Ouais en vrai c'est cool.

Tu va pouvoir annoncer en direct la réédition de ton album.

T'en ai où avec Océane ?

Je me raidis à l'entente de ce nom.

Pourquoi tu me demandes ça, tu veux t'la faire ? La galoche de l'autre jour et le commentaire ça t'as pas suffi ?

Saddam lève les mains en signe d'apaisement.

Ok ok, j'ai compris, on parle pas d'elle, sujet sensible.

Sujet sensible ta race !

Je remet mon casque sur mes oreilles et balance un couplet.

Toutes ces meufs qui veulent mon corps
Mais j'les vois d'abord, j'les kiffe en sport
Elles veulent l'jackpot, moi j'veux l'record
Elles veulent l'gros lot, j'les laisse en rade sur le port

Ah bah tu vois quand tu veux.

Je hausse les épaules, feignant l'indifférence.

C'est mon métier, j'te rappelle.

C'est pas la modestie qui t'étouffe, rétorque-t-il dans un rire.

Je lui adresse un clin d'œil complice.

Sale batard, je lui dis en rigolant. Et désolé pour tout à l'heure j'aurais pas dû t'parler comme ça. J'sais pas cque j'ai, on dirait un gamin qui sait pas s'controler.

Saddam balaye mes excuses d'un geste de la main.

T'inquiète, mon pote.

T'as le champ libre avec elle si tu veux, je lâche soudain.

J'suis con ou quoi, pourquoi je lui dis ça ? Dès qu'on évoque c'te meuf, je bégaye et je raconte d'la merde.

C'est ma pote chef !

Laisse tomber, vieux. J'vais y aller, on se capte plus tard.

Je quitte le studio d'un pas rapide, bien décidé à m'éloigner de cette conversation qui m'échappe complètement. Je soupire en me roulant un bédo.

[...]

Je regarde Mamie faire ses mots croisés d'un air absent, perdu dans mes pensées. Les cris d'Enzo résonnent depuis sa chambre, où il doit être en train de jouer à la play. Certaines choses ne changeront jamais...

Poussin !

La voix forte de mamie me tire de ma rêverie.

M'appelle pas comme ça, mamie..., je grogne en levant les yeux au ciel.

Elle me gratifie d'un clin d'œil malicieux.

Quand t'arrêteras de te teindre les cheveux, j'arrêterai peut-être !

Jamais.

Calme ta colère, mon grand, rétorque-t-elle.

Un léger silence s'installe, seulement troublé par les hurlements d'Enzo. Mamie me fixe de son regard perçant, comme si elle lisait en moi comme dans un livre ouvert.

Je peux te parler d'un truc ? je finis par lâcher.

Mais oui, tu sais que tu peux tout me dire.

Elle retire ses lunettes et vient s'asseoir à côté de moi sur le canapé défraîchi. Je pousse un profond soupir avant de me lancer.

J'ai rencontré une fille y'a quelques mois... Je l'aime bien je crois.

Mamie hoche pensivement la tête, un léger sourire aux lèvres.

Où est le problème alors ? T'as peur ?

Non c'est pas ça, je rétorque en secouant la tête. Mais j'me comporte différemment avec elle, j'sais pas pourquoi, elle est pas comme les autres, elle me résiste elle et je sais pas comment agir. Et dès que les gars parlent d'elle ou que je la vois, bah... je deviens bête.

Le sourire de mamie s'élargit un peu plus.

C'est bien mon garçon, tu grandis.

Je lève les yeux au ciel d'un air exaspéré.

J'suis pas amoureux ou quoi hein, retire ce sourire de ton visage ! je grimace. Et commence pas à t'imaginer arrière grand-mère.

Mamie laisse échapper un petit rire amusé.

Je sais, Mathieu. Je sais...

Elle me gratifie d'un regard attendri, comme si elle lisait en moi comme dans un livre ouvert. Puis, posant une main rassurante sur mon bras, elle ajoute :

Ne gâche pas tout avec elle, si tu penses qu'elle le mérite.

[...]

Qu'est-ce qu'elle disait mamie déjà ? "Gâche pas tout avec elle."

Bah c'est trop tard, alors foutu pour foutu, j'ai plus rien à perdre ce soir ! Dans un geste brusque, j'attrape Valentine par la nuque et je scelle violemment mes lèvres aux siennes. Sa langue joue avec la mienne tandis que j'empoigne ses fesses avec mes mains pour la rapprocher de moi.

Quand je m'écarte enfin, je jette un regard par-dessus son épaule. Océane n'a pas perdu une miette de ce baiser enflammé. Assise dans le fauteuil d'en face, je ne peux détacher mes yeux de son corps tandis que je fais courir mes mains sur celui de Valentine d'un geste provocateur.

Océane est tellement bonne dans sa petite tenue que c'en est indécent. Sa jupe courte ne laisse aucune place à l'imagination et son haut noir échancré m'a offert une vue dégagée sur son dos toute la soirée.

J'ai passé la journée à me défoncer, à enchaîner les joints pour essayer de l'oublier. Depuis qu'on s'est parlé (chauffé) sur Insta, Océane est en permanence dans ma tête et c'est un problème que je pensais régler grâce à la verte. Malheureusement, ça n'a pas marché et je suis vraiment dans un sale état.

Saddam me fait la gueule et je m'en veux un peu de m'être mis minable pour son showcase. Mais ce soir mon cerveau est off et je ne contrôle plus rien. Alors je continue de provoquer Océane du regard, tout en embrassant fougueusement Valentine à pleine bouche. J'essaie de voir une réaction chez elle mais elle reste impassible.

Son visage est fermé, indéchiffrable. Pourtant, je peux sentir son regard brûlant me détailler tandis que mes mains parcourent le corps de Valentine avec avidité.

Je pousse les choses encore plus loin, glissant une main baladeuse sous le haut de Valentine. Mais Océane ne cille pas.

Frustré par son manque de réaction, je finis par repousser violemment Valentine et me lève d'un bond. Dans un geste brusque, j'attrape Océane par le bras pour la deuxième fois de la soirée et la traîne à ma suite jusqu'aux toilettes.

Putain, mais qu'est-ce qui te prend encore ?! s'insurge-t-elle en se dégageant.

Je plaque mes deux mains contre le mur, l'encadrant de mon corps musclé. Mon visage n'est qu'à quelques centimètres du sien.

Ça te fait bander de me voir avec d'autres nanas, c'est ça ? je crache d'une voix rauque.

Océane soutient mon regard.

Mais t'es vraiment malade hein. T'es tellement pathétique dans ton comportement ! Tu me dégoûtes...

Un rictus mauvais se dessine sur mes lèvres. Cette fille me rend complètement dingue !

Ah ouais ? Alors pourquoi t'arrêtes pas de me mater depuis tout à l'heure ? Tu m'a pourtant dis d'aller me faire foutre tout à l'heure.

Elle ouvre la bouche pour répliquer mais aucun son n'en sort. Ses joues rosissent légèrement tandis que son souffle s'accélère.

Un sourire satisfait étire mes lèvres. J'adore quand elle perd ses moyens comme ça...

Lentement, très lentement, je rapproche mon visage du sien jusqu'à ce que nos souffles se mêlent. Océane ne bouge pas, comme tétanisée. Nos lèvres ne sont plus qu'à quelques millimètres l'une de l'autre. Il ne tient qu'à moi de franchir ces derniers centimètres pour l'embrasser fougueusement... J'ai tellement envie de recommencer...

Mais je n'en fais rien. A la place, je me détache brusquement d'elle et tourne les talons, la laissant pantelante et frustrée.

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