Alpes - Décembre 2021

— Math... murmure Océane doucement, son souffle chaud contre ma peau.

— Quoi ? je réponds, toujours perdu dans les sensations de notre étreinte.

— On n'a pas mis de capote, dit-elle, d'une voix à peine audible.

Mon corps se fige instantanément. La passion laisse place à la prise de conscience en une fraction de seconde. Je suis terrifié par ses paroles.

— Merde... je souffle en me reculant légèrement. Putain Océane !

Les pensées se bousculent dans ma tête, une vague de panique monte en moi. Je cherche ses yeux, espérant y trouver une solution, une assurance.

— Je veux pas être daron putain fais chier, je me tire les cheveux.

— Je prends la pilule, elle me rassure tout de suite.

Ouf, je sens ma tension redescendre d'un coup. Je prends une profonde inspiration, essayant de me calmer. Je suis vraiment pas passé loin de la crise cardiaque.

— Et... j'ai rien fait sans me protéger depuis la dernière fois que je me suis fait dépister, ajoute-t-elle, d'une voix douce et rassurante. Donc de mon côté aucun risque.

— Ouais moi non plus, c'est ok. J'arrive pas à en dire plus.

— Mais faut qu'on fasse attention, on n'y a absolument pas penser.

— Ouais ouais ça aurait été une catastrophe.

— Je suis désolé, j'oublie jamais d'habitude mais là, j'sais pas ce qui c'est passé...

On sort du jacuzzi, la vapeur s'échappant en volutes autour de nous. L'air froid nous saisit instantanément. On se dirige vers la douche, nos corps encore tremblants de l'intensité de ce moment. Je laisse Océane prendre la première douche et j'attends, appuyé contre le mur, essayant de reprendre mes esprits.

J'en reviens pas d'avoir zappé la capote. J'suis comme un dingue dans ma tête et j'essaye de me souvenir si je me suis bien protégé avec les raclis que j'ai ken récemment. Avec la meuf de l'autre jour c'est ok, avec Océane c'est bon aussi sauf pour cette fois et avec l'autre folle de Valentine normalement j'ai toujours fait gaffe.

Mais entre l'alcool et la beuh que je m'envoie, je peux parfois avoir des oublis et j'espère vraiment que pour une fois dans ma vie, j'ai pas merdé.

Quand Océane sort de la douche, ses cheveux encore humides et sa peau rosie par la chaleur de l'eau, je suis encore en train de ruminer dans mon coin. Je file sous la douche et la sensation de l'eau chaude sur ma peau aide à apaiser mes pensées tourbillonnantes mais à peine. Pourquoi je peux pas profiter sereinement d'un moment avec elle ? C'est trop demandé ?

On se sèche rapidement et Océane file dans le salon pour ramasser nos vêtements avant de remonter.

— On se pose sur le canap en les attendant ?

— Vas-y, je te rejoins en bas.

Je sors de la salle de bain, une serviette autour de la taille et j'attrape les premières sapes qui me passe sous la main. T-shirt noir et short gris, ça fera l'affaire.

Je m'habille rapidement, encore un peu nerveux, puis je descends rejoindre Océane dans le salon. Elle a déjà allumé la télé et s'est installée confortablement sur le canapé. Je m'assois à côté d'elle, posant mon bras autour de ses épaules. Elle se blottit contre moi, et je sens une vague de chaleur et de réconfort m'envahir.

— Tu veux mettre quoi ?

— Scarface, ça fait longtemps que je l'ai pas vu, elle répond.

— Tu m'étonneras toujours toi.

— Faut jamais juger un livre à sa couverture.

— Bouge de là avec tes vieilles expressions, je rigole.

Je lance le film et je me détends. Avec tout ce qu'il s'est passé, j'ai presque à oublier qu'elle m'a dit je t'aime. Mais ces mots résonnent dans ma tête. Je souris bêtement de la sentir contre moi, de l'avoir dans mes bras. J'ai envie que ce moment ne s'arrête jamais.

— Dors avec moi ce soir ! Je demande spontanément.

Elle tourne la tête vers moi.

— Ok, elle répond simplement.

J'attrape son menton et je l'embrasse doucement. C'est le seul moyen que j'ai pour l'instant de lui montrer l'amour que j'ai pour elle.

Le film continue de défiler à l'écran, mais je suis à peine concentré. Tout ce que je sens, c'est la chaleur de son corps contre le mien, sa respiration régulière et apaisante. Peu à peu, je la sens s'endormir, son souffle devenant plus profond et plus régulier.

Je baisse le son de la télé, la tenant délicatement dans mes bras. Alors qu'elle dort paisiblement, je ne peux m'empêcher de la regarder, je suis aimanté par la beauté de son visage.

— Je t'aime, je murmure, sachant qu'elle ne peut pas m'entendre.

Je ne suis pas encore prêt à ce qu'elle entende ces mots mais le dire à voix haute me fait réaliser beaucoup de choses.

Je ne suis plus rien sans elle.

Je finis par m'endormir à mon tour, bercé par le son de sa respiration.

[...]

— Youhou, les amoureux, on est là !

Je me réveille en sursaut, encore légèrement désorienté.

— Mais comment ils font pour dormir devant Scarface, rigole Saddam.

— J'sais pas mec, ils devaient être morts, lance Lisko depuis la porte d'entrée.

Océane se réveille aussi, se frottant les yeux en souriant.

— Bien dormi ? demande Margot en riant.

— Comme un bébé, répond Océane en se redressant légèrement.

— Vous avez raté pleins de trucs, annonce Thaïs en s'asseyant sur le canapé en face de nous.

— Ma cheville va mieux, demain je vous laisse pas partir sans moi.

— Les garçons veulent aller à la folie douce demain, y'a une soirée spéciale, vous êtes chauds ?

— Ouais carrément, on répond en même temps avec Océane.

— On a ramené l'apéro, lance Ormaz en s'asseyant à côté de Thaïs, un paquet de chips à la main.

Lesram pose tout le reste sur la table basse avant de s'affaler dans le fauteuil. Les conversations fusent de tous côtés, chacun racontant des anecdotes de la journée passée sur les pistes. Thaïs décrit une chute spectaculaire de Zeu qui fait éclater de rire tout le monde.

— Moi au moins, je sais retomber sans me faire mal, il lance une pique à Océane.

— Je me demande vraiment de quoi vous parlez quand je suis pas là...

— Et vous, vous avez fait quoi ? demande Lesram.

— Rien de particulier, Math a bossé sur son ordi et moi j'ai réussi à écrire deux chapitres. Après on s'est posé devant la télé et on a fait la sieste comme des gosses.

Deux chapitres, tu parles. J'espère qu'on a vraiment ramasser toutes nos affaires et que y'a plus rien qui traine sinon on n'a pas fini d'en entendre parler.

— Au fait Océ, c'est bon, j'ai trouvé le jeu de ce soir, dit Zeu en se tournant vers elle.

— Ok, vas-y, je t'écoute, répond-elle, intriguée.

— La coinche, annonce-t-il avec un grand sourire.

— Tu te fous de ma gueule ? rétorque-t-elle en riant.

— Ouais !

— Pff, je suis entourée de gamins.

— Nan, plus sérieusement, tout le monde pose son tel sur la table et on lit à voix haute toutes les notifs.

— Oh mais il est hardcore ton truc ! Je lâche.

— Sérieusement ? demande Thaïs, les yeux écarquillés. Vous êtes vraiment sûrs de vouloir faire ça ?

— T'as des trucs à me cacher bébé ? lui demande Ormaz

— Bah j'attends un message de mon amant... elle lui fait un clin d'oeil et il lui tape l'épaule.

— Ça peut être marrant, répond Yvick en haussant les épaules.

On pose tous nos téléphones sur la table et je capte le regard de Saddam, dépité.

— Fais pas cette tête, t'as peur de quoi toi ?

— J'suis dans la merde, vous allez griller tout mes plans.

— Vous avez besoin de quelque chose dans la cuisine, tant que j'y suis ? demande Océane en se levant.

— Ramène moi la vodka chouchou, lui dit Margot.

— Et ma sacoche, j'ajoute.

— Toxico, je l'entends chuchoter.

Ah la garce. Elle en loupe pas une. Elle revient rapidement avec une bouteille de vodka, ma sacoche, et un verre de Jäger bomb à la main.

Elle ne s'assied pas à côté de moi cette fois. Non, elle s'installe directement sur mes genoux. Au secours. Elle se penche pour donner la bouteille de Vodka à Margot et son mouvement déclenche une réaction dans mon bas ventre.

— Arrête de bouger, murmuré-je à son oreille, si tu veux pas réveiller une certaine partie de mon anatomie.

Elle me jette un regard espiègle par-dessus son épaule et me fait un clin d'œil.

— Oh, bah c'est trop tard je crois, chuchote-t-elle en riant doucement.

Le premier téléphone qui s'allume est celui de Thaïs.

— C'est ma mère qui me demande de mes nouvelles, vous affolez pas.

Celui d'Yvick sonne au même moment et je suis le premier à l'attraper.

— Wesh gros, arrête de foutre la mort comme ça, la prochaine fois, je viens avec vous, je lis sans préciser de qui il s'agit.

— C'est Karmen, je lui ai envoyé une photo tout à l'heure et il pu le seum.

— Tu prends le pari ?

— Ouais, si c'est lui, tu finis ton verre.

— Putain, tu fais chier, je râle avant de finir mon verre cul sec.

Le téléphone de Saddam vibre soudainement, attirant notre attention. Thaïs l'attrape et commence à lire :

— Y'a une meuf qui vient de liker toutes tes photos sur Insta, annonce-t-elle en riant.

— Wesh, fais voir !

Il prend son téléphone et stalke le profil de la meuf en haussant les sourcils.

— Mais elle est giga fraîche, s'écrit Lisko

— Pas touche toi, elle est pour moi celle-là.

— Vous parlez trop mal, dit Margot.

— Eho, hier on vous a écouté parler du prof, on a rien dit, lui répond Saddam.

C'est au tour de celui d'Océane de s'allumer et je suis soudain très curieux. C'est Zeu qui attrape son téléphone en premier et je retiens mon souffle quand je vois exploser de rire.

— Bahaha, Polak, ton frère c'est un tueur.

— C'est Enzo qui t'envoie un message ? je demande à Océane.

— Ouais, c'est possible, il m'a appelé avant que je parte pour savoir comment j'allais, répond Océane, tournant son regard vers moi.

Zeu sourit et commence à lire le message à voix haute :

— "Coucou Océ, avec Mamie on est passés nourrir Pêche cet aprem et on l'a ramené à l'appart. Elle a un peu peur de Nala mais elle va bien. Si jamais Math il t'emmerde, dis-lui d'aller se faire foutre, ça lui fera du bien."

Tout le monde éclate de rire.

— Mais quelle enflure !

— Parle mieux de ton petit frère, toi, rétorque Océane en riant.

— Ah ouais, nan mais à deux contre moi, j'ai plus aucune chance.

Les autres rient de bon cœur en voyant ma tête. La soirée passe tranquille et pour l'instant, je m'en sors pas trop mal. Même si j'ai des dizaines et des dizaines de notifications insta qui s'enchaine sur mon téléphone.

— T'as toujours autant de demandes sur insta, me demande Océane.

— Ouais, j'acquiesce.

Elle se décale légèrement, comme pour quitter mes genoux mais je l'attrape par la taille pour la replacer contre moi, collant son dos contre mon torse.

— Reste là, je m'en tape des autres, c'est toi que je veux.

Au même moment, mes yeux sont attirés par mon téléphone qui s'allume sur la table. J'ai à peine le temps de lire le nom de Solène que Margot attrape mon téléphone.

Et merde ! Il fallait qu'elle m'envoie un message maintenant. Le seul moment de la semaine où je peux pas gérer mes messages.  

— Solène, c'est qui ça ?

Je sens Océane se raidir contre moi. Le pire c'est que je viens de lui dire qu'elle est la seule qui compte.

— Une vieille meuf que je voyais à l'ancienne, je tente le tout pour le tout.

Margot se racle la gorge avant de lire le message et jette un regard peiné vers Océane.

Putain je suis dans la merde.

Allez stream Ledger, c'est une folie !