XLI - Océane

Paris - Décembre 2021

J'ai honte de me l'avouer mais je me recoiffe en sachant que le blond débarque encore une fois dans mon appart. Je me regarde dans le miroir, arrangeant une mèche de cheveux rebelle et ajustant mon pull. Je veux être parfaite pour lui.

Il avait l'air pressé au téléphone. On s'est quitté il y a seulement quelques heures, avant qu'il n'aille récupérer Enzo, et je suis flattée de voir qu'il veut encore passer un peu de temps avec moi.

Quelques minutes plus tard, on frappe à la porte. Je me lève et vais ouvrir, accueillant Mathieu avec un sourire chaleureux. Mais dès qu'il entre, je remarque son expression tendue, ses yeux brûlants de colère.

Mathieu ? Qu'est-ce qui se passe ? je demande, soudain inquiète.

Il ne répond pas immédiatement, se contentant de me fixer avec une intensité qui me fait reculer d'un pas. Il referme la porte derrière lui, et l'atmosphère dans la pièce devient soudain lourde, oppressante.

Math, tu me fais peur...

C'est quoi ce bordel, Océane ? Tu savais pour Laura et son gamin et tu m'as rien dit ?! crache-t-il, sa voix tremblant de rage.

Je reste figée, choquée par la violence de ses mots. Mon esprit tourne à toute vitesse, essayant de comprendre ce qu'il vient de dire. Je n'avais pas du tout anticipé cette situation.

Quoi ? Qu'est-ce que tu racontes, Math ? je balbutie.

Arrête de faire l'innocente ! J'ai croisé Laura avec son gosse et elle m'a dit que tu savais. Tu savais et tu m'as rien dit alors que je t'ai confié tout le mal qu'elle m'avait fait. Comment t'as pu me faire ça ?

Je sens la panique monter en moi. Oui, j'étais au courant, mais je pensais vraiment que c'était pour son bien. Je pensais le protéger. Mais visiblement, il ne le voit pas comme ça.

Math, écoute-moi. Je voulais te protéger. Je savais que ça te ferait du mal de savoir. Je... je pensais que c'était mieux de ne rien dire, dis-je, avec une voix tremblante.

Me protéger ?! Tu te fous de moi ?! Tu m'as trahi, Océane. T'es pas mieux que les autres. T'es qu'une putain de menteuse !

Les larmes commencent à couler sur mes joues, et je tente désespérément de me défendre.

Math, je suis désolée. Je ne voulais pas te blesser. Je pensais vraiment que c'était la meilleure chose à faire... T'avais l'air d'aller mieux et je pensais que c'était mieux que tu ne l'apprennes pas, je ne voulais pas te faire du mal.

La meilleure chose à faire ?! hurle-t-il.  Comment tu veux que je te fasse confiance maintenant ? Comment je peux être sûre que t'es pas en train de me mentir ?

Son visage est déformé par la colère, et je sens mon cœur se briser en mille morceaux. Je n'ai jamais vu Mathieu aussi furieux, aussi blessé. Et savoir que c'est moi qui ai causé cette douleur est insupportable.

Je n'ai jamais voulu te faire de mal. Je... je pensais vraiment bien faire, dis-je, sanglotant.

Tu pensais bien faire ?! Et maintenant, tu vois où ça nous mène ? Je peux même plus te regarder en face, Océane.

Je recule encore, terrifiée par l'intensité de sa colère. Je ne sais pas quoi dire, quoi faire pour réparer ce qui semble maintenant irréparable.

Math, s'il te plaît... essaye-je, ma voix à peine audible.

Mais il secoue la tête, les yeux remplis de dégoût puis il se retourne brusquement et se dirige vers la porte, me laissant seule dans l'appartement, les larmes coulant librement sur mon visage. Je me laisse tomber sur le canapé, le cœur brisé, incapable de réaliser ce qu'il vient de se passer.

Comment tout a-t-il pu dégénérer à ce point ? La douleur est insupportable, chacun de ses mots résonne dans ma tête comme une condamnation. Comment peut-il m'accuser de la sorte après tout ce que je lui ai confié moi aussi.

Je ne sais pas combien de temps je reste ainsi, recroquevillée sur le canapé, secouée de sanglots. Finalement, je me lève, titubant presque, et je sors de l'appartement attrapant mon manteau en laine. La nuit est glaciale, le vent mordant de décembre fouette mon visage, mais je m'en fiche. Je marche, la vision brouillée par les larmes, me dirigeant instinctivement vers le cimetière où repose mon père.

Les rues sont désertes à cette heure tardive, seules quelques lumières de Noël scintillent dans l'obscurité, contrastant cruellement avec mon désespoir. J'atteins finalement le cimetière, luttant contre la douleur qui m'étreint.

Je pousse le portail lourd du cimetière, chaque pas me rapprochant de la tombe de mon père. En arrivant devant la pierre tombale, je m'effondre à genoux, incapable de retenir mes pleurs. Le froid pénétrant du sol traverse mes vêtements, mais je ne ressens plus rien d'autre que cette douleur lancinante.

Papa, murmurai-je, ma voix brisée. J'ai tout gâché, encore une fois. Pourquoi tout le monde finit-il par me trahir ? Pourquoi je fais toujours les mauvais choix ? Pourquoi je me retrouve toujours seule ?

Les larmes coulent sur mes joues, se mêlant à la neige fondue. Je m'allonge sur la tombe, le marbre froid contre ma joue, cherchant un réconfort impossible à trouver. Je reste ainsi, paralysée par les événements, le froid engourdissant peu à peu mon corps.

Le temps passe, et je sens peu à peu la chaleur quitter mon corps. Mes pensées deviennent floues, ma vision se trouble. Je ferme les yeux, épuisée, et je finis par sombrer dans l'inconscience.

[...]

Je me réveille lentement, les paupières lourdes et les muscles engourdis. La première chose que je perçois est une chaleur réconfortante, suivie par les voix familières de Margot, Thaïs, et... Saddam ? Je cligne des yeux, réalisant que je suis dans le lit de Margot, entourée de couvertures moelleuses.

Elle se réveille, chuchote Margot, visiblement soulagée.

Je tourne lentement la tête et croise les regards inquiets de mes amis. Thaïs est assise à côté de moi, les yeux rougis par les larmes. Margot, à l'autre bout du lit, a un air soulagé mais encore tendu. Saddam se tient debout près de la porte, les bras croisés, l'inquiétude visible sur son visage habituellement impassible.

Océane, comment tu te sens ? demande Thaïs doucement.

Fatiguée... et gelée, murmurai-je d'une voix faible.

On a eu tellement peur, Océ, dit Margot en prenant ma main. Quand on t'a trouvée au cimetière, tu étais en hypothermie. On a cru que tu n'allais pas te réveiller.

Les souvenirs de la nuit précédente reviennent par vagues confuses. Mathieu en colère contre moi, mes pas dans le froid, le cimetière, la tombe de mon père. Les larmes commencent à couler de nouveau, silencieuses, et je sens la main de Thaïs serrer la mienne avec réconfort.

Pourquoi t'as fait ça ? demande doucement Saddam, sa voix grave pleine de préoccupation.

C'est Math, il a appris pour le fils de Laura...

Seul Saddam comprend l'horreur que représente ses simples mots. Margot et Thaïs échangent des regards perplexes, ne saisissant pas pleinement la gravité de la situation.

Saddam se penche vers moi, son regard sérieux.

Océane, explique-moi vite fait ce qui s'est passé, j'crois que je vais avoir besoin de causer avec lui.

Comme je te l'ai dit l'autre fois, Laura lui a caché Esteban pendant toute la durée de leur relation et je ne sais pas comment il l'a appris aujourd'hui mais maintenant il sait que moi aussi j'étais au courant. Il a débarqué en furie chez moi et il a rien voulu savoir. Il m'a accusée de lui avoir menti et qu'il ne pourrait plus jamais me faire confiance, que finalement j'étais comme les autres.

Les yeux de Saddam s'emplissent de compréhension et de détermination. Il se tourne vers Margot et Thaïs.

Putain mais il commence à me gonfler. Il a toujours l'impression d'être le seul à souffrir. Bref, Océ reste là, avec les filles, j'vais aller lui parler !

Il sort rapidement de la pièce et Margot l'accompagne jusqu'à la porte d'entrée avant de revenir dans sa chambre où je suis toujours allongée.

Tu veux faire comment pour les vacances chouchou ? me demande Thaïs d'une voix douce.

J'sais pas trop, je crois que je vais pas venir et que je vais en profiter pour bosser, je réponds, ma voix teintée de lassitude.

Non, je suis pas d'accord. Tu devrais pas rester toute seule, surtout pas à cause de blondinette et sa crise. C'est pas à toi de te punir, t'avais raison de pas lui dire merde ! insiste Margot, son ton autoritaire adoucit par l'inquiétude.

Merci Margot, je vais réfléchir et je vous préviendrai le 25, dis-je avec un léger sourire.

Viens manger à la maison, ajoute-t-elle.

Ça dérangera pas tes parents ? Ou ton frère ?

Meuf, ils te connaissent depuis que t'as dix ans, tu seras jamais en trop chez moi, répond-elle en riant.

C'est vrai que j'ai rapidement été acceptée par les familles des filles, et ils m'ont tous beaucoup aidée quand j'en ai eu besoin. J'ai déjà fêté Noël plusieurs fois chez l'une ou chez l'autre, alors sa proposition ne m'étonne pas.

Allez Océane, je te jure que t'as pas le choix de venir. En plus, je suis sûre que Saddam va réussir à faire entendre raison à l'autre idiot, dit Thaïs avec un sourire rassurant.

Ouais. Vous avez de la chance, vous avez choisi les bons mecs vous, dis-je en soupirant.

— Faut jamais choisir un mec qui fait des teintures, tu le sait pourtant, se moque Margot

Bahaha, et puis si tu voyais Ormaz quand on est solo tu dirais pas la même chose, rétorque Thaïs avec un sourire en coin.

Mais comment tu peux dire ça Thaïs, c'est un sucre ton mec, ajoute Margot en riant.

Faut bien que je le vanne un peu, répond Thaïs en haussant les épaules. Mais sérieusement, il est adorable. Il me traite comme une princesse, j'peux rien dire.

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