VI - Océane
Paris - Septembre 2021
Deux longs mois se sont écoulés depuis cette soirée mouvementée en boîte de nuit avec les filles, et ma rencontre tumultueuse avec le blond. Deux interminables mois pendant lesquels j'ai tenté, en vain, d'occulter cet épisode de ma mémoire. Mais c'est peine perdue. Mes rendez-vous réguliers avec Fanny, ma chargée d'édition chez Hugo Publishing, ne font que raviver sans cesse ces souvenirs que je voudrais tant oublier. L'image de PLK, arrogant et méprisant, ne cesse de me hanter et ça commence à m'épuiser.
Je sais que les filles ont gardé contact avec certains des gars ce soir-là, surtout Margot qui semble beaucoup discuter avec Lesram. Ils se sont d'ailleurs revus à plusieurs reprises depuis, d'après ce que j'ai cru comprendre. Mais je n'ai jamais eu le courage de les accompagner, ne voulant surtout pas me retrouver en compagnie de l'autre.
Le point positif dans tout ça reste la sortie de mon livre. Celui-ci a rencontré un véritable succès, dépassant largement mes espérances les plus folles en termes de ventes. J'ai d'ailleurs rendez-vous avec Fanny pour planifier une séance de dédicaces dans une des Fnac partenaires.
[...]
J'arrive au siège d'Hugo Publishing d'un pas léger, un sourire flottant sur mes lèvres. Malgré les tourments qui m'assaillent, je suis impatiente d'aller à la rencontre de mes lecteurs.
Au début, je ne voulais pas apparaître en public de peur qu'on ai reconnu Mathieu dans le personnage principal et je ne veux surtout pas que l'on sache que j'ai écrit une fanfiction sur lui. Seule Margot et Thaïs sont au courant et je sais qu'elles ne me trahiront jamais. Ce sont elles d'ailleurs qui m'ont conseillé d'aller à la rencontre de mes lecteurs pour tisser des liens avec eux et pour savoir ce qu'il aimerait voir dans mon prochain livre.
J'arrive devant le bureau de ma chargée d'édition, où nous commençons par parler stratégie pendant de longues minutes. Fanny m'explique que la Fnac des Ternes a accepté d'accueillir une séance de dédicaces dans deux jours. Cela tombe un samedi après-midi, ce qui est l'occasion rêvée de me faire connaître davantage et de promouvoir mon roman auprès du grand public.
Fanny me salue chaleureusement et lorsque je sors de son bureau, je tombe nez à nez avec le type que j'avais déjà croisé le premier jour dans l'ascenseur. La poisse.
— Hé, comment ça va ? me lance-t-il
— Bien, je réponds d'un ton bref.
— T'es pas très bavarde pour une écrivaine, remarque-t-il avec un sourire narquois.
— Non en effet, pas trop, je rétorque, glaciale.
— Ça te dirait d'aller boire un verre ce soir ?
— Non merci, j'ai déjà quelque chose de prévu, je décline fermement.
— Ah merde, mais t'es sûre que tu peux pas ? insiste-t-il avec une lueur d'insistance désagréable dans le regard.
Je sens l'agacement poindre en moi face à son manque de savoir-vivre.
— Bordel mais qu'est-ce que tu ne comprends pas dans "non, j'ai déjà quelque chose de prévu" ? je lâche d'un ton sec.
— Oh ça va, t'énerve pas, réplique-t-il.
Je ne prends pas la peine de répondre et tourne les talons, bien décidée à m'éloigner de cet individu aussi vite que possible. Que ce qu'il est lourd ! Je ne sais pas pourquoi, mais ce type me hérisse.
[...]
Une fois rentrée chez moi, je m'effondre sur le canapé, épuisée mais l'esprit serein. Pêche vient aussitôt me rejoindre en trottinant et je la hisse sur mes genoux pour la câliner.
— Maman elle t'aime tu sais je dis en frottant mon nez contre sa tête. Tu crois que je vais y arriver samedi ? Ça me fait un peu peur.
Pour toute réponse, Pêche me lèche affectueusement le visage, comme pour m'encourager. Cela fait seulement deux ans que cette boule de poils est entrée dans ma vie, mais je ne m'imagine pas sans sa présence réconfortante à mes côtés, c'est mon petit bébé à moi. Je l'ai appelé Pêche parce que sa peau toute pelucheuse me rappelait la texture du fruit préféré de moi père. Alors, quand je la regarde, c'est un peu comme s'il était toujours là avec moi.
J'espère que tu es fier de moi Papa !
Je caresse le ventre de Pêche avant de me lever pour préparer mon repas du soir.
— Tu as raison ma belle, je n'ai pas à m'en faire. Tout va bien se passer, je souffle avec une nouvelle assurance.
Bercée par les petits grognements de contentement de Pêche, je me concocte une belle assiette que je dévore devant Pretty Little Liars. Cette série, je la connais par cœur.
[...]
Le samedi après-midi arrive très vite et c'est ainsi que, deux jours plus tard, je pousse la porte de la Fnac des Ternes d'un pas assuré, vêtue d'une robe fluide noire. Il fait encore chaud à Paris en cette fin d'été et je profite des derniers beaux jours pour exhiber mes tenues légères.
Un petit espace a été aménagé dans un coin du rayon littérature, avec une table et quelques chaises pour l'occasion. Plusieurs exemplaires de mon roman y sont disposés, prêts à être dédicacés.
J'ai une heure d'avance alors je m'installe derrière la table et ouvre mon ordinateur portable en attendant l'arrivée des premiers lecteurs. J'en profite pour travailler un peu sur les premières ébauches d'un nouveau roman, même si l'inspiration me fait quelque peu défaut ces derniers temps.
Dix minutes avant le début officiel de la séance, je remarque qu'une petite file d'attente se forme déjà de l'autre côté de la table. Tous ces gens sont donc vraiment venus pour moi ? C'est incroyable. Je ressens une once de culpabilité à l'idée de ne pas leur donner mon vrai nom, mais je ne veux pas qu'on puisse trop facilement m'associer à ce livre plutôt osé. Ma tête sera déjà suffisamment reconnaissable comme ça.
Fanny me lance un sourire d'encouragement avant de lancer officiellement le début des dédicaces.
— Bonjour à tous, merci d'être venus aussi nombreux pour la première séance de dédicaces de notre nouvelle plume. Faites un triomphe à Marine Esperanza !
Les personnes présentes applaudissent chaleureusement et je suis très émue par cet accueil enthousiaste.
— Merci beaucoup, je réponds d'une voix légèrement tremblante.
Au fil des heures, je prends de l'assurance, gagnée par l'enthousiasme de mes lecteurs qui me livrent leurs impressions, leurs ressentis, leurs questionnements. Je réalise à quel point mon histoire les a touchés, d'une manière ou d'une autre. C'est grisant et terrifiant à la fois. J'avais presque oublié le pouvoir puissant que peuvent avoir les livres.
Je termine ma journée avec une adolescente, 17 ans je dirais, qui s'avance timidement vers moi. Elle est sans doute un peu jeun pour lire tout ce que j'écris mais je ne vais pas faire la police.
— Bonjour, me dit-elle en me tendant son exemplaire.
— Salut, je lui réponds avec un sourire avenant. Je te le dédicace à quel nom ?
— Léna s'il te plaît.
Je tique intérieurement en entendant ce prénom mais tente de ne rien laisser paraître. Mathieu a lui aussi une sœur qui s'appelle comme ça. Le monde ne peut pas être aussi petit quand même ?
— Je peux prendre une photo avec toi ? demande timidement Léna.
— Bien sûr, avec plaisir !
Je lui indique de contourner la table et je prépare mon plus beau sourire pour l'objectif.
— Merci beaucoup, elle est parfaite. Et toi tu es magnifique, ajoute la jeune fille avec un regard admiratif en regardant son téléphone.
— Merci Léna, tu es adorable. Tu veux que je te raconte un truc en avant première ? je lui propose après avoir vérifié qu'il n'y a plus personne dans la file d'attente.
Léna hoche vivement la tête, ravie.
— Je suis actuellement en train d'écrire un nouveau livre, dans un style un peu différent cette fois, je poursuis avec un clin d'œil complice.
— C'est vrai ? s'exclame Léna, le visage illuminé par l'excitation. Oh, je suis trop impatiente de pouvoir le lire !
— Justement, j'aurais une proposition à te faire, si tu es intéressée...
Je marque une pause, savourant son air intrigué, avant de poursuivre :
— Que dirais-tu de faire partie de mon tout premier groupe de bêta-lectrices ? De pouvoir lire les chapitres au fur et à mesure que je les écris et de me donner ton avis ?
Les yeux de Léna s'écarquillent de ravissement à cette perspective.
— Oh oui, ce serait un honneur ! J'adorerais ça !
— Parfait, dans ce cas laisse-moi ton adresse mail, je t'enverrai les premières pages dès que possible.
Léna s'empresse de griffonner son adresse sur un bout de papier qu'elle me tend avec un immense sourire.
— Merci infiniment pour cette chance, je suis tellement contente !
— C'est moi qui te remercie Léna, tes retours seront précieux pour m'aider à avancer.
Nous échangeons encore quelques paroles avant qu'elle ne partent. Une fois seule, je fais retomber la pression. J'ai passé une excellente journée et je n'aurais pas pu imaginer mieux comme première rencontre. Malheureusement, je ne peux pas dire ça de tout le monde...
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