10. Récidivistes

La journée s'annonçait plutôt mal pour Chloé. Elle s'était levée tard, pas trop pour être en retard, mais suffisamment pour ne pas avoir eu le temps de s'arrêter prendre un croissant à la boulangerie. Elle avait mal dormi. Et elle n'était pas la seule à manquer de sommeil ces temps-ci. Une soudaine vague de chaleur avait envahi les foyers franciliens durant la nuit. Il avait fait vingt-deux degrés en cette nuit de novembre, c'était bien trop chaud pour les moyennes de saison. À peine arrivée au travail, la brune regretta de ne pas avoir pris une journée de congés. Elle observa les papiers qui, éparpillés sur son bureau, lui rappelaient combien de dossiers elle avait à terminer. Un de ses collègues passa devant son bureau à toute vitesse, faisant voler quelques feuilles au passage. Chloé tenta de le rappeler à l'ordre, mais ce dernier avait déjà emprunté les escaliers et disparu de l'étage.

-Plutôt pressé celui-là, ne put-elle s'empêcher de penser.

Le major écarta les dossiers bouclés pour terminer ceux donc la pochette était encore ouverte, elle avait de la paperasse à finir. La première affaire fut assez simple à remplir. C'était une vieille affaire de vol à l'étalage. Le suspect n'avait pas réussi à s'enfuir. Le deuxième dossier concernait une affaire de viol. Chloé s'en souvenait comme si c'était hier. Cela datait de l'époque où elle était encore à apprendre le métier à l'école de police, c'est-à-dire un peu plus de six ans. Si la brune se rappelait particulièrement de cette affaire, c'était parce que la victime était âgée du même âge qu'elle : vingt-deux ans à l'époque. Chloé avait été la première sur les lieux avec son responsable de formation, une horreur.

-Que faites-vous chef ? Demanda une voix derrière elle.

Chloé se retourna pour voir un de ses brigadiers. C'était le dernier sous-officier promu et, comme atteint du "syndrome du bleu", il cherchait à se rendre partout utile. Chloé jeta un coup d'œil sur le bureau. Les papiers étaient soigneusement rangés sur le côté du bureau. Le pauvre devait attendre la prochaine affaire avec impatience.

-Je ne fais que rédiger les rapports de mes affaires, répondit le major.

-Je peux vous aider ? Quel est ce dossier ? Demanda-t-il en voyant la liasse de feuilles que tenait Chloé.

-C'est un dossier lié à l'affaire Wick.

-Le violeur en série éventreur ? Oh, mais on dirait le dossier de la première victime. Vous vous êtes occupée de l'affaire ?

-Si on veut...

-Incroyable, souffla le brigadier. Mais alors, comment vous...

-Je ne veux pas en parler brigadier, trancha Chloé. Allez vous prendre un café si vous n'avez rien à faire.

Le policier repartit penaud vers la cafétéria tandis que Chloé en profitait pour souffler. Elle ne sentait plus très bien désormais. Tous les souvenirs liés à ce tragique événement lui revenaient en tête. De la pièce parfumée à l'état du sol, sans parler de la victime qui baignait dans une mare de sang, son propre sang, qui s'écoulait suite au rapport sexuel trop brutal et aux différents coups de couteau portés au ventre de la jeune victime. C'était un miracle que la fille ait pu survivre. C'était d'ailleurs la seule miraculée parmi la trentaine de victimes. C'est dur et éprouvant émotionnellement. Les larmes commençaient à sortir naturellement.

-Non, c'est pour ça que je suis restée dans la police. Pour Luna, pour Kyle...

-Pas le temps de parler toute seule, Chloé. Suis-moi.

La brune se retourna, surprise, avant de voir Emaël qui venait d'arriver au bureau. Ce dernier ne s'arrêta pas même pas devant sa table et continua jusqu'à la cage vitrée, antre du sévère capitane Rayd. Ce dernier ne se priva pas de rappeler le lieutenant à l'ordre. Chloé parvint à fermer la porte avant que les cris ne se fassent trop entendre de l'extérieur.

-Lorima ! Encore en retard ! La prochaine fois, vous êtes...

Chloé pensait qu'Emaël se laisserait passer un savon avant de répliquer. Elle se trompait lourdement. Lui, qui était toujours aussi calme d'habitude, frappa le bureau de ses poings. Le bruit stoppa net le capitaine Rayd dans son sermon. Chloé observa le visage nerveux d'Emaël. Ses yeux semblaient lancer des éclairs, et ses bras tremblaient tellement il serrait ses deux mains. Le visage empourpré, le lieutenant parvint à assez desserer les dents pour parler.

-Pourquoi vous ne m'avez pas dit que le Convoyeur était sorti de prison ?!

-Je n'en voyais pas l'intérêt, répondit Fabien Rayd.

-Ne faites pas l'ignorant. Vous savez que c'est important pour moi.

-Peut-être bien, mais il est en liberté. Qu'allez-vous faire ? L'arrêter sans preuves de quoi que ce soit ?

-Cet homme a participé à un massacre ces dernières années. J'ai tout fait qu'il soit derrière les barreaux et maintenant, vous me dites que je ne peux rien y faire ?

-Désolé, Lorima.

Emaël ne parlait plus désormais. Il avait le souffle coupé. Comment ça, il ne pourrait pas appréhender le Convoyeur ? Cela faisait des années qu'il était à la recherche de preuves pour l'emprisonner. Il avait rassemblé les éléments nécessaires, un par un, de manière méthodique. Il avait patiemment attendu le procès, et maintenant, son travail avait été réduit à néant. Tout cela à cause de quoi ? Le discours d'Hanna lui revenait en tête.

-Il y a eu vice de procédure. Certaines des preuves n'ont pas été jugées recevables. De fait, n'ayant plus aucun moyen de prouver une quelconque implication dans les attentats du 19 juin 2026, il a été acquitté.

-On l'a libéré ? Comme ça ? Et maintenant, il est libre de vadrouiller où il veut ? Non, tu plaisantes.

-C'est ainsi, Emy. Le parquet ne pouvait rien faire d'autre que de le relâcher.

-Tu es en train de me dire que j'ai perdu deux ans de ma vie, là ! D'ailleurs, comment ça se fait que les preuves n'étaient pas recevables ? J'ai appliqué la procédure à la lettre. C'est pas normal, il y a un complot ou quoi ?!

Hanna avait hésité avant de déclarer :

-C'est possible. Quelqu'un a fait exprès de fausser les signatures des dossiers, les dates ne sont pas cohérentes. Je menerai une enquête en interne pour savoir si certaines personnes ont reçu des pots-de-vin. En attendant, évite de faire des bêtises. D'accord, Emaël ?

Des bêtises... Emaël voulait en faire le moins possible. Mais lorsqu'on semble perdre le controle, lorsque l'impulsivité naturelle reprend le dessus, c'est alors qu'on fait nos plus grandes erreurs.

-Très bien... Puisqu'être à la judiciaire ne m'amène rien, je vais me débrouiller par mes propres moyens.

Le lieutenant partit en hâte du bureau du capitaine et prit son smartphone en main. Composant rapidement un numéro, il entendit une voix féminine au bout du fil.

-Vous vous trouvez bien au restaurant Le chat luthier. Vous réservez pour comb...

-Pas besoin de couverture, Agent Plantequel. C'est le lieutenant Lorima à l'appareil. J'aimerais m'entretenir d'urgence avec le capitaine Diurne.

La voix mit quelques instants avant de se faire de nouveau entendre.

-Très bien. Je ne sais pas s'il pourra vous accueillir aussi vite que vous le souhaiter. C'est à quel sujet ?

Emaël laissa passer un court instant, le temps de souffler un bon coup. Puis, il se laissa emporter par sa détermination.

-Je souhaite intégrer l'AntiCrime.

-Oh... Je vois. Il est libre jusqu'à midi. Vous pouvez passer maintenant.

----

Tadaa ! Un chapitre ! Désolé encore pour le retard, j'essaie d'écrire plus vite mais que voulez-vous, manque de temps :/

Qu'avez-vous pensé de ce chapitre ? Emaël va t'il changer de service ? Les doutes de Chloé prendront ils le pas sur elle ?

Les réponses bientôt, dans le chapitre intitulé : Une mort de trop !

Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top