Avance rapide*
Novembre a abandonné sa place à Décembre et je ne vais pas m'en plaindre.
Les quinze derniers jours ont été intenses. Entre les révisions, plutôt motivantes en compagnie d'Aaron qui s'est avéré être un professeur particulier des plus sérieux le rendant, comme si c'était possible, encore plus sexy et tentateur. Contrairement à moi qui n'était pas contre des pauses coquines entre deux articles de lois à ingurgiter. Le dalloz n'a plus de secret pour moi ! Et mes cours de soutien en informatique. Mon mec a convaincu Raphaël et contrairement à mes aprioriqui le pensaient froid et ne m'appréciant pas, j'ai découvert un garçon, attentif, avec de l'humour, et surtout d'une patience à toute épreuve. Et il en faut avec moi. La partie legaltech qui associe de manière très étroite le service juridique et les technologies informatiques me donne des sueurs froides. Mais grâce à ses exercices pratiques j'avance et comprend mieux.
Aujourd'hui se termine ma semaine d'examens. Je suis en pleine relecture de ma copie, pourtant mes pensées s'envolent vers les jours passés...
Aaron a été présent tous les jours, j'ai cru comprendre, qu'il mettait en stand bye durant les examens et les vacances sa seconde activité. Ce qui n'est pas pour me déplaire, car il y a toujours des risques et je n'en ai mesuré les conséquences que le lendemain de nos retrouvailles.
Il m'attendait à la sortie des cours, quand son emploi du temps le permettait, soit nous nous rendions à la salle de sport, soit nous rentrions directement chez moi, où Naël et Maxine faisaient acte de présence de temps à autre, et le libanais était consigné aux fourneaux. Un Dieu en cuisine ce mec. Et ailleurs d'après ma meilleure amie, mais je n'ai pas voulu de détails. Sinon c'était traiteur, car ni Aaron, ni moi n'avons pris le risque de cuisiner.
Et puis comme un enfant sage, Aaron retrouve son appartement, car d'après lui :
— La tentation de t'empêcher de dormir est trop forte, mon ange. Et tu as besoin de sommeil pour tout éclater.
Ce à quoi je lui ai rétorqué :
— J'arrive à concilier plusieurs choses en même temps.
Il a marqué un temps d'arrêt mais n'a pas cédé. Sauf hier soir. Je suis trop fière de moi.
Nous étions seuls et j'en ai profité pour le séduire à mort. Uniquement vêtue de ma serviette riquiqui après un bain relaxant, je l'ai rejointe dans le salon où il m'attendait sagement en relisant ses cours. Quand il a relevé son regard incandescent sur ma silhouette, le bout de tissu glisse malencontreusement. Oups. Ses yeux se sont alors enflammés et j'ai su que j'avais attisé la bête. Pour mon plus grand plaisir.
Aaron m'a baisée une première fois sur le plan de travail, et ensuite, il m'a fait l'amour dans mon lit.
— Tu es une sorcière, m'a-t-il accusé avant de s'endormir. Et j'ai souri satisfaite.
Du mouvement sur ma droite me reconnecte aux autres étudiants qui commencent à sortir de la salle d'examens. Je finis ma relecture, dépose ma copie sur le bureau du professeur et je quitte la pièce, les joues certainement rouges d'avoir repasse le film de ma nuit.
Impatiente de retrouver l'extérieur, je me précipite dans le couloir quand j'entends mon nom par-dessus le bruit ambiant. Je me retourne et découvre Maxine et Alma marchant vers moi.
— Ça y est les meufs ! Terminé ces putains d'examens. A nous les vacances ! Crie presque Max, une fois à ma hauteur.
Je ris de la voir si euphorique.
— Et pour les fêter dignement fiesta ce soir à l'appart, rappelé-je à Alma, qui n'a pas ouvert la bouche.
Toujours muette, j'insiste :
— Tu viens toujours ?
— Non, je suis désolée mais mes plans ont changé. Mon père nous a fait la surprise, à Khaleb et à moi, de réserver une semaine à la montagne, et nous partons demain matin.
— Passe au moins faire un tour, c'est juste une fête entre nous, et tu es libre de partir quand tu le souhaites ! plaisanté-je
— C'est sympa, mais j'ai encore ma valise à faire, et ensuite rouler jusqu'à chez mes parents. Mon frère passe me récupérer.
Je tente le tout pour le tout, mais Alma reste catégorique.
— Khaleb est le bienvenu. Les mecs seront contents de le revoir.
— Ta proposition est très gentille Léane, mais vraiment je...
— Cela a un rapport avec notre beau blond taciturne ? la coupe ma meilleure amie.
Bon ben au moins, elle prend le chemin le plus court !
Pas sûr que ce soit une bonne idée. Alma est du genre discrète sur sa vie amoureuse, d'ailleurs elle ne manque pas de la fustiger du regard, mais Maxine, c'est comme un bulldozer, elle défonce tout, même les portes ouvertes.
— Raphaël et moi ne sommes pas en super termes en ce moment, c'est vrai, et je ne voudrais pas gâcher votre fête.
— Vous êtes des adultes, Alma, vous pouvez vous ignorer sans déclencher la troisième guerre mondiale.
Mon humour tombe à plat.
— Laisse tomber Léa. Ce sera pour une autre fois.
— Bon, c'est dommage, mais on se retrouve à l'aéroport.
Plus que trois jours, et on décolle pour la Norvège passer les vacances chez les parents de William ayant la gentillesse de nous accueillir.
— À ce propos, commence Alma, je voulais vous en parler, mais j'ai annulé mon séjour à Oslo. J'ai prévenu William.
La stupéfaction doit se lire sur nos visages.
— Quoi ? mais pourquoi ?
Notre amie hausse les épaules.
— Je viens de vous l'expliquer, Raphaël et moi c'est compliqué donc je ne me sens pas de passer des vacances en sa compagnie.
Maxine ne trouve rien à dire, chose assez étrange pour être soulignée, et moi je ne sais quoi penser.
Lui en vouloir de donner plus d'importance à éviter Raphaël ? au détriment de notre amitié ?
Après tout qui suis-je pour la juger ?
— Bon, je dois vraiment y aller les filles. Khaleb n'est pas du genre patient quand je le mets en retard. Il serait capable de remplir lui-même ma valise et je n'ose pas imaginer ce qu'il y mettrait dedans. On se revoit en janvier.
On se serre dans les bras.
— Bonnes vacances et bonnes fêtes de fin d'année Alma.
— Merci à vous aussi les filles, éclatez vous bien et partagez des photos.
— Avec ou sans Raph dessus ? la provoque Maxine.
Je savais bien que son mutisme n'allait pas durer.
Maxine a enclenché le mode bitch.
Alma la gratifie d'un doigt d'honneur en précisant qu'elle lui laisse le choix.
— T'étais pas obligée Max, Alma ne s'épanche jamais sur ses problèmes... on ne peut pas savoir si elle est vraiment malheureuse ou pas !
Maxine de son index fait pivoter ma tête dans la direction que vient prendre notre amie.
— Si tu veux mon avis, Raph n'est qu'un prétexte.
Alma est en train de serrer dans ses bras un inconnu qui lui rend son geste en déposant ses lèvres sur son front.
— Ça ne...
— A d'autres Léane. Arrête d'être si naïve et compréhensive.
Est-ce que je le suis ? d'un coup ma réflexion s'oriente vers une autre discussion. Aaron m'aurait-il menti lui aussi ? et s'il ne faisait pas qu' aider son père dans la logistique ? pourquoi je pense à ça maintenant ?
Je décide d'envoyer valdinguer cette pensée.
— Mais Alma est ton amie, renchéris-je.
— A croire qu'elle ne me réserve pas le même échelon, crache ma meilleure amie.
Sans plus nous attarder, nous quittons l'université à pied, je jette un dernier coup d'œil par-dessus mon épaule et Alma surprend mon regard au moment où elle monte dans la voiture du gars. Elle pince les lèvres mais détourne immédiatement son attention de moi.
Maxine et moi quittons la fac à pied. Ni Naël, ni Aaron n'étaient ici aujourd'hui, ils ont terminé leurs examens hier soir, des trucs à faire, il ne sait pas étendu sur le sujet.
Alors, alors, jeune femme naïve, tu le crois toujours ?
J'envoie balader cette connasse de petite voix.
C'est Max qui me ramène à l'instant présent.
— Naël vient de m'envoyer un message, il faut que l'on passe à l'épicerie acheter de quoi compléter l'apéritif. Il a oublié des choses. Par contre, c'est lui qui gère le repas.
— Pour six ?
— Ben quoi ! il cuisine pour quatre, alors deux de plus !
Ouais enfin quand même.
— Il a des défauts ton mec ?
— Pas à ma connaissance.
— Un secret bien gardé ? une famille cachée ?
Maxine éclate de rire, en imaginant Naël avoir une double vie.
Mouais, peut-être devrait-elle avoir une conversation avec lui.
Tu peux parler vilaine hypocrite.
Saleté de conscience.
— Ça m'étonnerai qu'il lui reste de l'énergie pour satisfaire une autre femme, quand il part de l'appart ! C'est un Dieu, mais quand-même, lui aussi a ses limites ! me rit-elle, alors que nous arrivons à l'épicerie.
— Il t'a déjà parlé du passé de son père dans l'armée ?
— Oui, il était démineur. Pourquoi ?
Bon apparemment, ils ne font pas que baiser !
— Non comme ça.
— Aaron ne t'a pas raconté leur histoire ? demande-t-elle avant de saluer le caissier.
— Si, si. le soir où il m'a invitée au restaurant. Enfin c'était pour justifier son absence.
Maxine me fixe étrangement.
— Quoi ?
— Jusqu'où est-il allé dans ses explications ?
Tout en remplissant le panier, je lui relate notre conversation dans les moindres détails. Max n'a pas l'air étonnée ce qui me fait dire que Naël lui a aussi avoué certaines choses.
— Depuis quand es-tu au courant ?
— Le lendemain de leur retour quand le Libanais m'a invitée à boire un café.
Je me souviens effectivement de ce matin-là, c'est celui où Aaron m'attendait en bas de mon immeuble.
— Tu penses qu'ils nous disent la vérité, Max ?
Elle stoppe son geste de saisir une bouteille de rhum puis écarquille les yeux comme si je m'étais transformée en personnage honorifique.
— Et toi ? Léane, tu lui as donné le nom de ton géniteur ?
Je baisse mon regard sur mes chaussures.
— Non, mais...
— Alors n'exige pas des autres des réponses que tu refuses de donner, toi.
Maxine n'a pas tort.
— C'est vrai. Je compte sur nos vacances pour qu'il ait l'honneur de connaître le nom du connard qui me sert de banque, mon ton est sarcastique en disant cela.
J'ai pris la décision cette semaine, après tout Aaron s'est ouvert à moi, et il est temps qu'il sache qui me sert de père fictif. Je crains sa réaction, mais j'ai confiance en lui. Mon géniteur pourrait être le président des Etats-Unis que Aaron ne changerait pas son comportement envers moi.
— C'est bien ma pétasse, affirme Maxine en m'enlaçant. Laissons de côté cette discussion et concentrons nous plutôt sur cette première soirée de vacances.
— Yes ! A nous les grasses mat', et la Norvège...
— Et la baise à n'importe qu'elle heure du jour ou de la nuit, ajoute ma folle de meilleure amie, si peu discrète que l'employé nous jette un regard curieux et libidineux.
Berk !
Une fois la liste remplie nous nous dirigeons vers l'appartement où il nous reste peu de temps avant l'arrivée des trois garçons.
Quand nous ouvrons la porte d'entrée, des rires que l'on reconnaît comme ceux d'Aaron et de Naël arrivent jusqu'à nous.
— C'est quoi ce bordel ?
— On va vite le découvrir, affirmé-je en avançant vers le salon.
Maxine et moi laissons tomber les sacs de courses au sol en découvrant la pièce transformée. Le bruit a alerté nos petits amis qui se sont retournés d'un même mouvement vif. Naël décore un sapin immense, alors que mon mec est perché sur une échelle en train d'accrocher contre les murs des ballons de baudruches garnis de guirlandes lumineuses.
— Nos étudiantes sont là ! s'exclame le libanais.
Aaron a ce sourire qu'il ne réserve qu'à moi. Nos regards s'arriment et en parfaite symbiose nous avançons pour se retrouver à quelques centimètres l'un de l'autre. Sans attendre plus, tellement il m'a manqué aujourd'hui, je me blottie tout contre lui. Ses bras s'enroulent autour de ma taille et ses lèvres n'attendent pas et butinent mon cou. Je penche la tête sur le côté, je sens le sourire d'Aaron contre ma peau, mais il recule trop rapidement à mon goût.
— Bonjour belle étudiante. Tes derniers examens se sont bien passés ?
Toujours en ses bras, je réponds malicieuse :
— Salut beau lutin, oui ça a été. J'ai eu un bon professeur.
Un ricanement se fait entendre dans mon dos.
— Lutin ? Je suis navré de te l'apprendre, mais il n'y a rien de petit chez moi ! s'offusque-t-il, avec son sourire faisant mouiller les petites culottes.
— C'est sûr, que je ne parlais pas de ton ego !
— Tu vas voir mon ego, ce qu'il va te faire.
Sans que je n'ai le temps de réagir, il me soulève en mode princesse, et prend la direction de ma chambre.
Il lance à Naël avant de claquer le battant d'un coup de talon.
— Mec tu continues tout seul, j'ai une démonstration à faire à Léane.
Sans attendre la réponse de son pote, il me jette sur le lit.
— Aaron ! je dois me doucher avant.
En grognant, il me porte à nouveau pour me déposer dans la douche toute habillée. Il commence à me déshabiller frénétiquement et une fois sa tâche accomplie, il en fait de même sans détourner ses yeux de ma silhouette nue.
— Tu fais quoi ? demandé-je alors qu'il s'apprête à enlever sa dernière barrière de tissus.
Je suis tout à fait consciente de ce qu'il va se dérouler sous la douche, mais j'aime le provoquer.
— Je vais te démontrer, qu'il n'y a rien de petit chez moi... Crane-t-il en approchant ses lèvres des miennes.
Et effectivement, Aaron a pris à cœur de me convaincre.
Nos corps rassasiés, douchés et habillés, nous rejoignons Maxine et Naël.
Maxine est dans la cuisine avec Naël et Aaron, quand on sonne à la porte.
— J'y vais ! je les informe abandonnant le plateau de verres sur la table.
Quand j'ouvre la porte, c'est un monticule de paquets qui me fait face. Raphaël passe la tête sur le côté afin de me saluer.
— Salut Léane ! Tu vas bien ?
— Hey ! Oui, merci. Et toi ? donne je vais t'aider, fais-je en lui prenant des paquets des bras.
— Merci. Impec.
— Tu en a pris pour tout un régiment !
— On est jamais trop prévoyant avec les deux morfales.
On éclate de rire en se dirigeant vers la cuisine.
Naël s'affaire à préparer le repas sous les regards de Maxine et Aaron.
— Putain, vous avez assuré les mecs, les nargue Raph en les saluant. Si ça marche pas en droit, vous pourrez postuler comme lutin du père Noël.
Naël fait mine de lui balancer une cuillère et Aaron lui tend son médius.
— J'avoue que c'est magnifique, s'extasie Maxine, assise dans le canapé une coupe de champagne dans une main et l'autre sur la cuisse de Naël.
— Quand avez vous eu l'idée ? j'interroge Aaron.
— Nous en avons discuté ce matin avec Naël, et comme nous ne passons pas les fêtes ensemble, on voulait que cette soirée y ressemble, dit Aaron.
C'est possible de tomber encore plus amoureuse ?
Les discussions dévient sur notre séjour à Oslo, sur le vol que nous devons prendre vendredi matin. Nous décollons de Marseille à huit heures du matin. Et nous arrivons vers douze heures trente.
Le repas préparé par Naël est une tuerie. Tout le monde le félicite, Aaron et Raph le chambrent sur le fait qu'il est meilleur en cuisine qu'en droit ou même qu'en pétards.
Je ne comprends pas vraiment la référence aux mortiers, mais je laisse tomber pour les explications.
Le champagne sûrement !
Raphaël m'aide à débarrasser la table alors que les autres se dirigent vers le salon.
— Tu as des nouvelles d'Alma ?
Bouh ! vilaine.
— Pas récemment. Pourquoi ?
— Parce qu'on a discuté ensemble à la sortie et qu'elle nous a prévenuesqu'elle a annulé son voyage...
— Je pense que c'est mieux comme ça, me coupe-t-il.
— C'est à peu prêt ce qu'elle nous a dit. Mais je pense que c'est dommage aussi.
— Je lui ai aussi fait comprendre qu'elle et moi ça devait s'arrêter là, mais que ce n'est pas pour autant qu'elle devait se priver de ses vacances entre potes.
Maxine a donc raison. Alma ne nous a pas donné la bonne raison de son refus, le mec qui l'attendait doit en être la cause. Je me tais, ne voulant pas créer de malaise entre Raph et elle plus important. Même si je constate que mon ami n'est pas épris d'Alma.
— D'accord. Tu n'as pas besoin de me donner d'explications.
— Merci Léa, mais tu ne veux pas savoir ? me questionne-t-il d'un ton badin. Tu sais que n'importe quelle autre meuf m'aurait suppliée pour satisfaire sa curiosité.
— Peut-être, mais je ne suis pas n'importe quelle meuf ! lui fais-je remarquer, avec un clin d'œil.
— Et elle a raison ! proclame une voix grave dans mon dos me collant des frissons. Ce n'est pas n'importe quelle meuf, c'est la mienne.
— Merci pour cette intervention percutante, Aaron.
Raph sourit de voir son ami m'enlacer par derrière et poser sa tête contre ma clavicule.
— Je lui ai dit que je l'aimais bien, poursuit le génie en informatique, mais pas suffisamment pour envisager un plus. Et j'ai été soulagé, quand elle m'a répondu la même chose. J'ai souffert il y a environ deux ans d'une rupture qui s'est mal passée, et je ne souhaite pas infliger ça à quelqu'un.
Son regard se perd par delà la fenêtre et je devine ses pensées moroses d'avoir ouvert la boîte à souvenirs.
Aaron lui pressa l'épaule sans toutefois s'éloigner de moi. Ils ont un dialogue muet et je comprends que tous les trois ont été là pour lui.
— Merci de me faire confiance, Raphaël. Si tu as besoin d'en parler, je suis là.
L'étudiant se contente de me donner un baiser sur le crâne, faisant râler mon petit ami, puis quitte la cuisine.
Aaron me fait pivoter et nos regards s'infiltrent dans celui de l'autre.
— Comment arrives-tu à être aussi emphatique chaton ?
Je hausse les épaules ne sachant pas quoi rétorquer. Peut-être qu'inconsciemment ne pas avoir eu, involontairement de ma part, de père présent augmente ma sensibilité vis à vis des autres, sans pour autant tomber dans le pathos et qu'ils le ressentent.
— Allons rejoindre les autres avant qu'ils ne pensent que l'on baise sur le plan de travail.
Je lève les yeux au ciel en riant.
— Je croyais que tu t'en foutais de l'avis des autres...
— Pas quand tu es concernée mon ange.
— C'est très gentleman de ta part.
— Arrête la provocation Léane, ou je vais vraiment te prendre ici et qu'importe que nos potes soient à cinq mètres pour t'entendre hurler mon nom.
Je rougis et déserte la cuisine sous le rire de mon mec.
Nous sommes le vingt cinq décembre.
La veille pour le réveillon, je l'ai passé chez ma mère avec Maxine et Annie sa maman. Mon géniteur s'est contenté d'un coup de téléphone à minuit et d'un virement en guise de cadeau.
Je ne suis plus déçue de son comportement, seulement en colère et dans l'incompréhension totale du pourquoi ma mère s'inflige cette situation. Je commence à croire qu'effectivement l'amour est une maladie dont on ne guérit jamais.
Allongée sur le canapé, recouverte d'un plaid, je végète en regardant un téléfilm de Noël. Je ris seule devant certaines scènes. Comme la neige qui tombe au moment opportun quand les amoureux s'embrassent après trois dates alors qu'ils ont la trentaine, le gars qui sauve la fille de la glissade, forcément en talon aiguille sur la glace c'est Holiday on Ice sans patin, et le repas en famille sans aucun scandale.
Je passe le temps en attendant Aaron. Il a insisté pour venir m'offrir mon cadeau, alors que nous partons demain pour la Norvège. Inutile d'insister. Il est aussi têtu que moi.
La sonnette retentit et d'un bon je suis dans le couloir qui mène à la porte d'entrée.
A peine le battant ouvert que je suis propulsée contre le mur adjacent. Aaron saisit ma nuque d'une main pendant que l'autre protège mon dos de l'impact. Sans attendre ses lèvres capturent les miennes dans un baiser impatient où nos langues ne tardent pas à danser ensemble. Mes doigts s'entrelacent dans sa tignasse, les siens quittent leur place et s'aventurent sous mon haut. Et puis, tout s'arrête.
— Joyeux Noël, me souhaite-t-il en reculant, me laissant à bout de souffle et frustrée.
— Joyeux Noël à toi aussi, j'arrive à articuler.
Aaron sourit de me voir renfrognee Je lui tire la langue de façon puérile.
— Attention chaton, je pourrais bien la mordre.
— Attention beau brun, je pourrais te prendre aux mots.
— Encore et toujours cette provocation.
Sans un mot de plus, il me pousse vers le salon où le téléviseur encore allumé diffuse un autre film.
— Je ne te connaissais pas... si... romantique...
Il se moque clairement de moi, car son regard est focalisé sur l'écran. L'acteur est en train de sonner à la porte de sa dulcinée, je présume, un bouquet de fleurs et une boîte de chocolat dans ses mains. J'appuie sur la télécommande et éteint la télé.
— Dommage, j'aurais aimé voir si la neige sur l'avant toit lui tombait sur la gueule quand la meuf aurait claqué la porte un peu trop fort.
J'éclate de rire en imaginant la scène.
— Pour info, le romantisme ne me dérange pas, et ce genre de film évite de se prendre la tête.
— Je note pour le romantisme.
— Tu veux boire quelque chose ?
— Un café, s'il te plaît.
Je lui apporte sa boisson et m'apprête à m'asseoir à ses côtés sur le canapé, mais Aaron me fait basculer sur ses genoux. Il boit son café d'une seule gorgée puis sort de la poche de sa doudoune reposant sur l'accoudoir un écrin qu'il me tend. Mes yeux font des aller retour entre la boite rouge et or d'un joaillier très connu et ceux d'Aaron.
— Tu penses t'en saisir un jour ? parce que je vais avoir des crampes là.
Mon regard se lève au plafond.
— Ton côté poétique me fend le cœur.
— C'est pas vraiment ton coeur que j'ai envie de fendre la de suite... mais bon, je sais me tenir.
Effectivement la bosse que je sens me donne un indice sur les conséquences de notre proximité.
J'ouvre enfin l'écrin de chez Cartier et reste sans voix à la vue du bracelet en or blanc et les quatre charms qui le compose. Un cœur, un ange, un révolver et un masque.
Aaron le passe à mon poignet et je ne peux m'empêcher de l'admirer.
— Merci mon amour... il est magnifique, fais-je en l'auscultant.
Je suis toujours en pleine contemplation quand Aaron se gratte la gorge.
— Pardon, il est tellement beau, et on ne m'a jamais offert un cadeau si précieux et personnalisé.
— Tu n'es tombé que sur des tocards Léane.
Je m'abstiens de lui répondre car il a raison et les cadeaux que je m'offre avec l'argent de mon géniteur ne tiennent pas la comparaison avec celui d'Aaron. Parce que tout simplement l'amour en est le principal motif.
— Mais pourquoi un...
— Masque et une arme ? termine-t-il à ma place.
Je hoche le menton positivement.
— Un révolver parce que tu as opéré un braquage avec mon cœur, et un masque parce qu'avec toi, je tombe le mien.
Des larmes s'amoncellent sur mes cils.
— Mon but n'est pas de te voir pleurer mon ange en t'affirmant la vérité sur ce que tu me fais éprouver.
Je caresse son chaume de barbe de mon pouce et dépose mes lèvres sur les siennes. Elles ont un gout de sel, et je prends conscience des perles salées qui dévalent mes joues. Aaron se détache de moi et avec ses pouces les essuies.
— Moi aussi, j'ai un cadeau pour toi, me reprends-je en me levant.
Je cours presque jusqu'à ma chambre, attrape l'enveloppe sur ma table de travail et parcours le chemin inverse.
— Tu as pris des cours de pole dance ? me nargue-t-il en voyant le plis en papier.
— T'es irrécupérable, dis-je en éclatant de rire. C'est beaucoup moins personnel comme cadeau, mais on peut le faire à deux !
Son regard perçant et son air goguenard m'indiquent la suite de sa répartie.
— À deux ? comme toi et moi nus dans un endroit particulier ?
Bingo. J'en étais sûre. Aaron et son esprit mal placé sont de bons clients.
— Putain ! s'écrit-il. Un vol en parapente. Et en duo en plus ? Mais c'est génial, chaton. Toi et moi dans les airs... collés l'un à l'autre...
— T'emballe pas monsieur voiture de sport. Toi et moi sommes novices donc pas de vols sans un moniteur.
— Même pas en rêve, Léane.
— Ben t'as pas vraiment le choix.
— Si. On va prendre des cours, on ira se renseigner en rentrant. La station n'est pas loin.
Aaron resta encore quelques heures, puis il était temps d'aller préparer nos bagages pour notre voyage de demain.
Maxine m'a prévenue qu'elle reste dormir chez Annie. Quand ma valise est remplie et à deux doigts d'exploser, je vais prendre une douche, puis je me glisse sous la couette avec mon ordinateur sur les genoux. Les breloques du bracelet tintent à chacun de mes mouvements, sonnant comme un rappel à l'amour que me porte Aaron.
Je les triture, les observe, et les messages qu'ils me renvoient deviennent des portes bonheur qui ne quitteront plus mon poignet.
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