La vie sans toi...c'est pas la vie. #



Léane
                     

— Maman ? Je sors me promener en ville, on se retrouve pour déjeuner chez Nosh, crié-je depuis le couloir de son appartement.

Voilà plusieurs jours, que je suis revenue à Aix en Provence accompagnée de ma mère. Le retour a été plus que difficile, déjà à l'aéroport se séparer de mon beau brun a été un déchirement, nous avions convenu la veille, qu'il valait mieux qu'il ne nous accompagne pas. C'est Raphaël qui devait s'en charger. Tout se passait comme prévu, nous avions fait enregistrer nos bagages, et nous attendions tous les trois l'appel de notre vol. Sauf qu'à quelques minutes d'embarquer, nous avons vu arriver en courant mon Aaron avec le reste de mes amis. Même si j'ai été heureuse et soulagée de le voir une dernière fois, la séparation n'en a été que plus dure.

— Ok, j'ai réservé pour treize heures ma chérie, à tout à l'heure.

Je quitte l'appartement où vit ma mère avec Samuel, pour aller errer dans les rues d'Aix. Errer, est le verbe qui convient. Je marche sans but précis, mais à plusieurs reprise je me suis retrouvée devant l'immeuble où habitait Aaron et les mecs, comme si mon subconscient voulait me faire passer un message, celui de me rappeler les bons moments que nous avons passé ici, pour qu'ils prennent le dessus sur le film de l'agression qui passe en continue dans ma tête. Alors, je reste là, devant ce bâtiment à me remémorer, à me repasser le fil de notre histoire, et quand je sens que je vais un peu mieux, je reprends ma promenade dans les rues du centre ville. Puis je retourne à l'appartement de ma mère, pour m'enfermer dans ma chambre, avec un livre, ou pour regarder un film, et je finis toujours par téléphoner à Aaron ou à mes amis.

Aujourd'hui, je me sens un peu mieux, cela vient peut-être du fait que mon braqueur sera avec moi dans quelques jours, surement aussi grâce à ma mère qui a fait preuve de patience, durant les nuits où je me réveillais en hurlant, où les jours que je passais prostré sur mon lit. Elle n'a jamais cherché à me forcer à parler, elle m'écoutait quand je décidais de lui raconter des bribes de mon agression, elle m'encourageait quand elle voyait que j'avais envie de sortir, d'affronter la foule en me forçant de ne pas regarder systématiquement derrière moi. Et quand elle n'était pas disponible, c'est Louise la maman d'Aaron qui m'accompagnait. Ma mère m'a proposé d'aller consulter une psy de sa connaissance si le besoin s'en faisait sentir. Je ne lui ai pas dit non catégoriquement, je lui ai fait comprendre que je voulais, et que j'avais besoin de m'en sortir par moi même. J'ai lu des livres, cherché des blogs où des victimes et des spécialistes témoignent des agressions. Mais ce qui m'a le plus aidé, ce sont les conversations que nous avons eu Aaron et moi tous les soirs par skype. On se raconte nos journées, on arrive à mettre des mots sur ce que l'on a vécu, on se parle de nos peurs, de nos angoisses, sans aucune gêne ou culpabilité, on retrouve petit à petit cette confiance en chacun de nous qui s'était effondrée après l'attaque de mon demi-frère.

Quand je passe devant notre ancienne fac, je ne peux pas empêcher un sourire d'apparaître sur mes lèvres en me rappelant ma rencontre percutante avec mon beau brun. Je décide, poussée par une main invisible, de pénétrer dans l'université pour rejoindre le couloir où Aaron et moi avons échangé nos premiers mots, pas doux, j'en conviens ! Je le prends en photo, puis je fais un selfie et les envois à mon beau brun avec une légende.

> A mon Beau Brun:
Retour sur le lieu du crime...
Tu me manques.
Ton ange

Je ressors de la fac, avec une légèreté toute nouvelle. Je range mon portable, je n'attends pas de réponse de mon amoureux dans l'immédiat, car il n'est que quatre heures du matin à New-York, c'est pourquoi je suis étonnée quand l'annonce d'un message fait vibrer mon téléphone.

> De mon Beau Brun :
Et ce jour-là, la victime ce n'était pas toi, mais moi...
Tu me manques aussi mon amour.

> A mon Beau Brun :
Je crois que ce jour-là, il n'y avait qu'une victime... Nous.
Comment ça ce fait que tu sois réveillé ? Il est encore tôt à N-Y.

> De mon Beau Brun :
J'aime ta réponse...
Je n'ai pas pensé à éteindre mon portable hier soir, il a vibré sur la table de nuit.

Je lui envoie un dernier message, pour lui dire qu'il se rendorme, et qu'on s'appelle ce soir en facetime, sans oublier de lui préciser que je l'aime. Il me répond avec un smiley cœur.

En revenant vers le centre ville, j'avise de l'heure, puis je me dirige directement place Mirabeau pour attendre ma mère directement au restaurant.

—  Bonjour Léane, m'accueille Marie la propriétaire de chez Nosh. Comment vas-tu ?
—  Bonjour Marie, très bien je te remercie.

Décidément, mentir sur ma condition devient une habitude, mais comme elle n'est pas au courant de ce qu'il m'est arrivé, ce n'est qu'un demi mensonge.
Elle me conduit à la table qu'à réservé ma mère, en continuant de me parler pour me demander des nouvelles des New-yorkais, comme elle aime les appeler. Elle nous connaît tous, car quand nous étions encore étudiants ici, nous venions souvent y prendre un brunch le dimanche matin.

— Tu désires boire quelque chose ou tu préfères attendre Jeanne ?

— Non, je te remercie, je vais attendre, elle ne devrait plus tarder.

En entendant la sonnette de la porte, mes yeux se portent sur l'entrée, et je vois ma mère se diriger vers nous. Elles se saluent, puis Marie part préparer la citronnade que nous avons commandée, à base de gingembre et de sirop de coco.

— Alors ma chérie, où es-tu allée ?

— Du côté de notre ancienne fac, et je n'ai pas pu résister à l'envie d'y entrer, précisé-je avec un sourire, en me rappelant pourquoi j'y suis retournée.

— Que signifie ce sourire jeune demoiselle ? me demande-t-elle tendrement.
— Disons que certains souvenirs me sont revenus...

— Des beaux, apparemment, à voir tes yeux qui pétillent, serait-ce en rapport avec un beau brun ? Je suis contente ma chérie de te voir comme ça.

— Merci maman, je vais mieux, et oui tu as deviné, il y a bien un rapport avec Aaron.

Nous sommes interrompus par la serveuse qui nous demande si nous avons fait notre choix. A la façon dont elle me regarde, sa jalousie envers moi ne s'est pas atténuée. Je sais que mon braqueur à coucher avec elle, bien avant que l'on ne sorte ensemble, Will aussi je crois, il ne m'a jamais rien caché sur les filles avec qui il a eu des aventures, et chaque fois que l'on venait, il était obligé de la remettre à sa place en lui demandant de se contenter de faire ce pour quoi elle était payé.

— Je vais prendre la salade du moment, aux lentilles et légumes, puis en dessert le duo de pancakes aux fruits frais et granola.

— Et moi, les tagliatelles de courgettes sauce tomate basilic au pignon et falafel, en dessert la salade de fruits frais. Tu veux continuer avec la citronnade ? questionne maman.

— Oui.

— Et ben dis-moi, je ne sais pas ce que tu lui as fait, mais elle t'en veux d'un truc !

— En faisant court, Aaron a couché une fois avec elle, et elle croyait que c'était pour la vie ! Enfin ça ne l'a pas empêché de bai... De ramener Will dans son lit ! dis-je avec un air écoeuré.

— Je vois tout à fait le style de fille que c'est ! Et elle est jalouse parce qu'Aaron est tombé amoureux de toi ?

— C'est bien résumé. Bon parlons d'autre chose, on s'en fout de cette nana ! Comment se passe la mise en place de la future expo de Samuel ?

Au prénom de son petit ami, le regard de ma mère s'illumine. Je suis contente pour elle, qu'elle ait enfin trouvé un homme qui l'aime vraiment et qui prenne soin d'elle. Elle a assez souffert pendant toutes ses années où elle croyait aux mensonges de mon géniteur.

— Tout se met en place petit à petit, d'ailleurs à ce sujet ma chérie, comme je vais reprendre des horaires de dingues, j'ai pensé, si tu es d'accord bien sûr, que tu pourrais aller passer le reste des jours qu'il te reste avant qu' Aaron n'arrive, chez Pierre et Louise.

— Hum, pourquoi pas ! Je suppose que si tu m'en parles, c'est qu'ils sont au ok !

— Pour tout te dire, c'est Louise qui me l'a proposée, pensant que cela te ferait du bien aussi, de te retrouver dans un autre environnement, et puis ils ont tellement eu peur pour vous, que de t'avoir près d'eux avant que leur fils arrive, vont les rassurer; ils t'aiment vraiment tu sais !?

En entendant ces mots, je réalise que nous avons failli ne plus revoir les gens qui nous aiment et qui comptent énormément pour nous. Je sais de par les mecs que notre agression a terrifié Swein et Sofie, mais aussi Elias et Isabelle, et Paul le père de Raphaël. Une larme solitaire coule sur ma joue, que ma mère arrête avec un baiser.

— Excuse-moi Léane, je ne voulais pas remuer...
— C'est bon maman, je la coupe, tout va bien, il faut que je m'habitue à entendre ce genre de chose, pour prendre conscience que je suis plus vivante que jamais, et profiter encore plus des gens que j'aime. J'appellerai Isabelle tout à l'heure pour lui dire que sa proposition me touche beaucoup et que j'accepte.

Ma mère bouge sa tête pour approuver, et quand nos plats arrivent, aucune de nous deux ne reprend la conversation. Nous mangeons dans un silence qui n'est pas pesant, chacune dans ses pensées.

— Bon assez déprimés, Léa, tu es partante pour faire un peu de shopping, mère-fille ?
— Plus que partante, oui ! Je t'aime maman dis-je émue.
— Moi aussi ma chérie.

Il est tard lorsque nous arrivons chez ma mère. Fatiguées, mais heureuses d'avoir partagé ce moment ensemble. Samuel nous attend dans le salon où il a préparé un apéritif, pour nous a-t-il dit : fêter mon début de renaissance. Je ne l'ai pas contredit, et j'ai trinqué en pensant, qu'aujourd'hui, une grosse part de culpabilité s'en est allée, que même si je sais qu'elle ne partira jamais entièrement, j'ai décidé de vivre avec...
Parce que la vie sans lui... Ce n'est pas ma vie.

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