Chapitre 4 - L'interrogatoire

Gavin se trouvait dans la salle des interrogations de la police, en compagnie de Connor, Hank et Richard. La fièvre du brun avait baissé et il allait beaucoup mieux. Cependant, il devait marcher avec des béquilles pendant quelques jours, ce qui l'agaçait énormément car le brun voulait continuer l'enquête et avancer, et non pas rester chez lui en convalescence pour une vulgaire blessure au genou.

Il regardait avec haine l'androïde responsable de son handicap qui se trouvait derrière l'immense miroir sans tain de la salle d'interrogatoire. La pièce était très éclairée contrairement à celle où se tenaient les agents de police.

« Qui l'interroge ? » finit par demander Hank en soupirant, montrant clairement qu'il n'était pas motivé pour poser les questions.

« J'y vais. » répondit Gavin en quittant sa chaise.

Il avait du mal à marcher avec ses béquilles. Il se sentait impuissant ainsi, et totalement vulnérable. Il détestait sa situation et maudissait pour la millième fois sa journée.

« Je viens avec vous, fit Richard en s'approchant du brun. Vous pourriez vous blesser par mégarde. »

« Fiche-moi la paix, Terminator ! »

Gavin s'était mis à grincer des dents. Les humains étaient beaucoup plus fragiles par rapport aux androïdes et il détestait ce fait. Il devait désormais rester en béquilles pour une durée indéterminée et cela l'énervait. Le pire pour Gavin, c'était de voir l'androïde le suivre avec un regard plein de pitié. Le RK900 semblait se soucier du détective mais le brun n'y croyait pas du tout. C'était juste un des programmes de la machine qui le faisait agir ainsi. Gavin le détestait.

Le détective ouvrit la porte qui menait à l'autre pièce, là où le suspect se trouvait. L'androïde était menotté et assis en face d'une table en acier. Ses cheveux blonds et bouclés masquaient en partie son visage déjà caché dans l'ombre. Gavin se dirigea avec difficulté jusqu'à la table où reposait le rapport de police. Il se mit à pester en constatant qu'il ne pouvait pas ouvrir le dossier dû à ses béquilles.

Il aperçut rapidement Richard ouvrir le porte-document et parcourir les éléments présents. Il y'avait les photographies de Thomas et Arthur, ainsi que celle du suspect en leur compagnie.

« Tu t'appelles Newton, n'est-ce pas ? fit Richard en s'asseyant en face du suspect, et surprenant Gavin par ce qu'il venait de dire, se demandant comment il pouvait connaître son nom. Je me nomme Richard. Nous sommes ici pour te poser des questions. »

« Et t'as intérêt à nous dire la vérité, tas de ferraille ! » ajouta Gavin qui s'était installé à une autre chaise, à côté du RK900.

Le prénommé Newton releva la tête et sa led avait tourné au rouge.

« Pourquoi avoir supprimé Thomas et Arthur ? Pourquoi avoir désactivé tes semblables ? » continua Richard.

« Je n'ai rien fait. » répondit le suspect d'une voix faible.

« C'pas le moment de nous raconter des conneries ! s'écria Gavin en frappant la table du poing. T'étais le seul à te trouver sur les lieux du crime et tu t'es enfui ! Tu m'as même tiré dessus enculé !! »

« J'avais peur, s'exprima Newton en plongeant ses yeux sombres dans ceux du détective. J'étais effrayé car je croyais que j'allais mourir ! »

Gavin leva les yeux en soupirant d'agacement. Il avait à faire à un déviant complètement fou à lier.

« Avoue tes crimes AP700 ! » fit Richard d'une voix plus froide et autoritaire, ce qui fit sursauter Gavin qui ne s'y était pas attendu.

L'androïde semblait devenir impatient et sa led était devenue jaune. Les yeux de Gavin se posèrent sur les mèches de Richard qui révélaient de belles boucles brunes. Ses cheveux ne tenaient plus en place décidément. Le détective se surprit à aimer les regarder. Qu'est-ce qu'il lui prenait au juste ? Il devait se concentrer sur l'interrogatoire, non pas sur son coéquipier ! Il secoua la tête en grognant, tandis que Richard lui avait lancé un bref regard curieux.

« Ecoutez... s'exprima Newton après un long silence. Je vois bien que vous pensiez que je suis coupable. Thomas et Arthur étaient mes amis et... J'aimais Thomas. Je l'aimais plus que tout. Je n'ai pas voulu faire ça, je ne les ai pas tués ! »

« Je t'ai vu les mettre en pièces, répondit froidement Richard, ce qui attira rapidement l'attention de Gavin. J'ai sondé la mémoire de Thomas. Je t'ai vu, complètement enragé, en train d'arracher leurs pompes de régulation à thirium. Tu as tout mis en scène par la suite : les roses, les larmes dessinées avec leur sang, les pompes broyées dans le lavabo. Je détiens la preuve que tu es coupable, Newton. Je souhaite avoir tes aveux maintenant. »

Gavin devait avouer que son partenaire pouvait se montrer très intimidant. Sa carrure impressionnante ainsi que ses yeux bleu pâle sur un regard perçant jouaient beaucoup en sa faveur.

« Puisque j'vous dis que je ne les ai pas tués !! s'écria le suspect d'une voix tremblante, ce qui déstabilisa Gavin. Tout ceci n'est qu'un coup monté ! Je ne sais pas comment je me suis retrouvé à faire cela, mais ce n'était clairement pas moi ! Jamais je n'aurais pu faire une chose pareille !! Vous devez me croire ! »

Richard restait sceptique. Il était sûr de ce qu'il avait vu, à travers les derniers souvenirs de Thomas. Il avait vu Newton commettre un meurtre envers ses semblables, pour une raison encore inconnue.

« Pourquoi les avoir détruits, Newton ? » insista l'androïde détective en fronçant les sourcils.

Le blond baissa les yeux. Il savait que c'était peine perdue et qu'il était condamné. C'est alors qu'il se mit à frapper violemment son visage contre la table d'acier. Du sang bleu s'échappa de ses nouvelles plaies.

« Merde, il s'auto-détruit ! » s'écria Gavin qui lança ensuite un regard au miroir sans tain, sachant que derrière, le lieutenant Anderson réagirait rapidement.

Hank et Connor entrèrent précipitamment dans la salle et attrapèrent le suspect par les épaules pour l'empêcher de se faire plus de dégâts. Ses plaies ouvertes laissaient échapper quelques câbles électriques et du sang bleu. Comme le flux de thirium était insuffisant au niveau des blessures de l'androïde, la peau qui entourait ses plaies était devenue blanche, la couleur initiale de tout androïde.

Newton lança un regard désespéré à Richard.

« Il faut arrêter le Pirate. » dit-il avant de réussir à attraper le pistolet de Hank et de se tirer une balle dans la tête.

« Bah super, il est complètement fichu maintenant ! » pesta Gavin en levant les yeux au ciel.

« Que voulait-il dire par le Pirate ? » demanda Connor inquiet.

Hank haussa les épaules, n'en sachant rien du tout, puis ramassa le corps de Newton.

*

Richard accompagnait le détective jusqu'à son véhicule. Comme le brun était en béquilles, l'androïde s'était porté garant pour l'aider. Gavin n'aimait pas cette situation mais il n'avait pas dit non. Il entra dans sa jeep et s'installa sur le siège passager, toujours épaulé par le grand androïde. Le RK900 déposa les béquilles sur la banquette arrière puis il s'installa au poste de conduite. Le brun avait remarqué que Richard semblait ailleurs, depuis qu'ils avaient quitté la salle d'interrogatoire.

« Tu repenses à c'qu'il a dit, hein ? Te prend pas la tête. Si les humains peuvent devenir fous, alors pourquoi pas les déviants ? »

« La folie est une maladie mentale, détective, répondit Richard en démarrant la voiture. Les androïdes ne deviennent pas fous mais les déviants... peut-être bien, qui sait ? »

« L'autre tas de ferraille qui sert de partenaire à Hank a trouvé un androïde cinglé une fois. Un certain Ralph, qui avait hébergé une déviante et un gosse, avant la rébellion de Markus. Ce truc est un vrai malade ! »

Richard tenta d'imaginer un androïde fou. C'était assez surprenant à croire. Il s'engagea à la prochaine intersection tandis que Gavin augmenta légèrement le volume de la radio qui diffusait How you remind me de Nickelback. Il se laissa bercer par la musique et appuya son front contre sa fenêtre, parcourant son regard morne sur la ville illuminée de Detroit. De jour comme de nuit, cette ville brillait de mille feux. Elle ne dormait jamais.

Arrivés à leur destination, Richard aida Gavin à sortir du véhicule avec ses béquilles. Le brun continuait de grogner et d'insulter toute la planète entière mais il n'avait pas d'autres choix que d'accepter l'aide de l'androïde. Il était le seul à s'être proposé pour l'aider de toute façon. Le brun pouvait s'estimer heureux de compter sur Richard mais l'avouer l'horripilait plus que tout. Il détestait compter sur quelqu'un, et surtout sur un androïde !

Devant les escaliers de l'immeuble, le détective avait légèrement blêmi à l'idée de gravir des centaines de marches avant d'arriver à son pallier.

« Et il a fallu que j'habite au deuxième étage. » lâcha le brun en soupirant.

Gavin commença son ascension mais il s'arrêta après avoir franchi quatre marches. Monter ne serait-ce qu'un étage avec des béquilles lui semblait insurmontable. Il pesta en silence, resserrant un peu plus sa prise sur ses maudites béquilles. Il haïssait sa journée. Il était tellement épuisé et furieux qu'il aurait pu pleurer de fatigue et de frustration si l'androïde n'était pas avec lui. Il souffla avant d'observer toutes les marches qu'il lui restait encore à gravir.

Mais soudainement, il sentit les bras de Richard se resserrer sur lui et il se retrouva rapidement dans les airs. L'androïde le portait de nouveau comme une princesse. Gavin préféra ne rien dire et attrapa ses béquilles pour ne pas les abandonner dans les escaliers, même s'il souhaitait plus que tout les jeter dans une benne à ordures.

Richard monta rapidement les escaliers. Gavin ne put s'empêcher de l'observer de temps en temps, détournant rapidement les yeux quand Richard croisait son regard. Il se trouvait dans une situation embarrassante.

Devant l'appartement du brun, le détective sortit sa clé de sa poche et la tendit à Richard qui ouvrit la porte.

« Tu peux me laisser maintenant. » fit Gavin d'une voix épuisée.

Il prit ses béquilles et se rendit jusqu'au salon où il s'affala rapidement sur le canapé. Il alluma rapidement une cigarette, son manque de nicotine refaisant surface. Il en avait bien besoin après cette dure journée. Il observa du coin de l'œil son partenaire qui n'osait pas bouger d'un pouce. Il leva les yeux au ciel avant de grogner.

« Fais comme chez toi mais reste pas planté là, tu m'perturbes ! »

« Faire comme chez moi ? fit l'androïde en fronçant les sourcils, tandis que sa diode avait clignoté en rouge avant de redevenir bleue. Détective, j'attends de vous des ordres. »

« Ben j't'ai donné un ordre, là ? » fit remarquer le brun avec un léger sourire.

Pris au piège, l'androïde s'était mis à bafouiller des excuses avant de se diriger vers la cuisine. Il ouvrit le frigo et analysa les différents éléments présents. Il n'y avait pas grand-chose mais il trouva tout de même quel plat il pouvait cuisiner.

« Je vais vous faire une omelette, proposa l'androïde. Aimez-vous les omelettes ? »

« Attends, tu sais cuisiner, toi ? lança Gavin un peu surpris. T'es pas programmé juste pour faire des trucs de flic ? »

« J'ai été programmé pour ne jamais échouer. » répondit Richard en plongeant son regard déstabilisateur dans les yeux de Gavin.

Le brun ne put s'empêcher de rougir en entendant ses mots et en observant ses yeux bleus qui lui donnaient l'impression de pénétrer son âme. Il pesta en silence tout en détournant le regard. Il tira avec énervement une longue taffe de sa cigarette, tentant désespérément de penser à autre chose qu'à l'androïde qui était entré subitement dans sa vie.

Richard s'était mis aux fourneaux. Ses gestes étaient d'une élégance impressionnante. Il portait une simple chemise noire que Connor lui avait donnée pour le couvrir, car l'androïde n'allait pas rester torse nu durant toute la journée même s'il n'était pas du tout pudique.

Whiskey, le chat roux, était monté sur la table de cuisine et observait d'un regard amoureux le RK900 qui cuisinait. Gavin observait également son partenaire. Il se demandait pourquoi tout le monde voyait les androïdes comme des humains. Les déviants leurs ressemblaient certes, ça, il ne pouvait pas le nier. Mais son partenaire lui prouvait que les androïdes étaient avant tout des machines. Gavin se remémora la façon violente dont Richard avait fait preuve pour sonder la mémoire d'un androïde. Il avait plaqué Thomas contre le sol pour l'empêcher de fuir, et s'était introduit dans ses souvenirs. Le détective avait vu le visage impassible de Richard. Son coéquipier n'avait vraiment peur de rien.

Gavin finit par écraser sa cigarette contre un cendrier. Il se leva et se rendit à la salle de bain. Il sortit le linge propre de la machine à laver. Tout était déjà sec. Il posa ses béquilles contre le mur et s'assit à une chaise. Il se changea rapidement et opta pour un simple T-shirt gris au col en V et un pantalon en toile de couleur noir. Il attrapa ensuite la veste de Richard et quitta la salle de bain pour se rendre à la cuisine. Il déposa la veste du RK900 sur le comptoir puis il s'installa sur un des sièges-tabourets du bar.

Richard s'était mis à sourire en retrouvant sa veste blanche et s'habilla rapidement. Il prit ensuite une assiette et servit l'omelette au fromage à Gavin qui le regardait avec curiosité.

« J'ai suivi la recette, fit le géant brun en croisant ses bras derrière le dos. J'espère que ça vous conviendra. »

« Tu peux me tutoyer, tu sais. » répondit le brun sans s'énerver.

La led de l'androïde clignota en jaune tandis qu'il fronça les sourcils.

« Mais les formules de politesse m'obligent à... »

« Tu peux t'les coller au cul, tes formules ! » le coupa Gavin en soupirant.

Il s'attaqua à son omelette, ne se préoccupant plus de son drôle de partenaire qui semblait perturbé par les mots du détective. Sa led clignotant toujours en jaune, l'androïde avait froncé les sourcils et avait penché la tête sur le côté. Gavin remarqua rapidement son manège et arqua un sourcil.

« Quoi ? » lâcha-t-il en soupirant d'agacement.

« Comment voudriez-vous que je me colle mes formules de politesse au cul ? »

Gavin fronça les sourcils face à cette question totalement inattendue et surprenante de la part de l'androïde mais il se mit soudainement à éclater de rire. C'était un rire franc et bruyant mais mon dieu ce qu'il avait besoin de se lâcher ! Il ne pouvait plus s'arrêter et se tenait même le ventre. Whiskey avait le poil hérissé tandis que Richard avait imité un léger sourire.

« T'es vraiment pas possible ! » avait lâché le détective en reprenant son calme.

Il termina son omelette en silence, sous le regard analytique de Richard. Une fois le repas terminé, l'androïde s'occupa de faire la vaisselle tandis que le brun était de nouveau affalé sur le canapé, une tasse de chocolat chaud entre les mains. Gavin ne pouvait s'empêcher de repenser à cet interrogatoire, et plus particulièrement à ce qu'avait dit Newton avant de s'auto-détruire.

« Il faut arrêter le Pirate... marmonna-t-il en se pinçant le nez. Mais c'est qui ? Pas le capitaine Crochet quand même ! »

Richard avait rempli la gamelle du chat puis il s'était dirigé vers Gavin, les bras derrière le dos. Le brun était emmitouflé dans une couverture et sirotait tranquillement son chocolat.

« Je peux augmenter la température de la pièce, si vous voulez. » fit l'androïde en remarquant que le brun tremblait de temps en temps.

« Nan, laisse. Le chauffage coûte super cher, répondit Gavin en balayant l'air de sa main. Dis-moi plutôt. Ça te dit rien, le Pirate ? »

« Jamais entendu parler de lui, répondit Richard. Même en parcourant les archives et les recherches web, je ne trouve rien. »

« T'as Internet dans ta tête ? » lâcha le détective en arquant un sourcil.

« Oui, avec une connexion haut débit. » se félicita l'androïde en souriant légèrement.

Le brun leva les yeux au ciel avant de terminer sa boisson. Il finit ensuite par se lever et se rendit jusqu'à sa chambre, aidé de Richard. Celui-ci n'avait encore jamais vu la chambre du détective. C'était une petite pièce où se trouvait un grand lit en son centre. Il y'avait une penderie à sa gauche et une grande fenêtre aux volets ouverts sur sa droite. Une guitare classique était posée contre le mur, sous la fenêtre. La table de chevet, près du lit, était recouverte de mégots qui avaient dû tomber du cendrier bien rempli. Il y'avait aussi quelques canettes de soda écrasées et un vieux réveil qui projetait l'heure sur le plafond.

Richard aida le détective à s'allonger sur le lit. Il attrapa ensuite la couverture et couvrit le brun pour qu'il n'attrape pas froid.

« Est-ce que les androïdes dorment ? » demanda le brun sur un ton innocent.

« Non, nous ne dormons pas mais nous pouvons nous mettre en veille. »

« Hum. »

« Bonne nuit Gavin. »

« Mouais. »

Richard quitta ensuite la chambre, laissant le détective seul dans ses pensées. Celui-ci se mit soudainement à sursauter en réalisant que Richard l'avait appelé par son prénom. Ce n'était pas un ''détective Reed'' ou un ''monsieur''. Il avait clairement entendu son prénom à travers les lèvres de l'androïde. L'entendre lui procura une drôle de sensation. Il n'était pas en colère. Juste surpris, et il ne savait pas pourquoi...

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Playlist:

How do you remind me - Nickelback

L'image de couverture en entière:

A la prochaine~

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