Chapitre 6 - Jay

Une nouvelle piste démarre et résonne dans la salle de musculation. Je souris, satisfait que ce morceau passe maintenant. Il me booste toujours et j'en ai bien besoin. La fatigue commence à se faire sentir bien que j'ai moins travaillé que d'habitude.

Même si je devrais garder un bon rythme respiratoire, je commence à fredonner les paroles. Mes bras se déplient une nouvelle fois. Je répète encore les gestes. Une légère douleur se réveille et me fait grimacer mais je dois finir ma série de développés couchés. La dernière. Je me promets de rentrer à l'appartement juste après.

Je serre les dents et compte à rebours. Six, cinq, quatre, trois, deux, un... Je me redresse et repose les haltères par terre, de chaque côté du banc. Je soupire de bien-être et débute quelques étirements mais certains mouvements me font mal. J'éprouve une sensation bizarre dans mon épaule mais c'est différent de la fatigue musculaire que j'ai en temps normal.

Blasé, je me lève. J'ai soulevé deux fois moins que d'habitude et mon bras me fait mal. C'est comme si je l'avais fait travailler pendant des heures alors que cela ne fait qu'une petite demi-heure que j'ai débarqué à la salle de muscu de mon immeuble. N'ayant rien à faire, je m'ennuyais trop chez moi mais force est de constater que ce n'est clairement pas mieux.

Je me dirige vers les grands miroirs qui envahissent un mur entier. Je me positionne bien droit et observe mon reflet avec attention. Je penche la tête sur le côté et fronce les sourcils. Ma posture n'est pas bonne. Mon épaule droite est plus basse que la gauche. Je n'aime pas ça !

Aussitôt, j'enfonce ma casquette sur la tête et récupère mes affaires. Je sors de la salle et me dépêche de rejoindre les ascenseurs. Mes mains tremblent alors que je m'engouffre dans la cabine. Même si je tente de la réprimer, l'angoisse commence à monter en moi. Les étages défilent et mes exercices de respiration n'ont aucun effet sur moi.

Lorsque les portes s'ouvrent, je me précipite dans le couloir. Je n'adresse aucun regard à ma voisine en déverrouillant mon appartement et entre aussitôt. La porte claque derrière moi et mes baskets sont abandonnées au pied du meuble à chaussures. Je récupère mon téléphone, laisse de côté les messages que j'ai pu recevoir et lance l'appel.

— Hey, Jay !

— Namjoon hyung ! l'appelé-je, d'une voix un peu trop désespérée.

— Qu'est-ce qui t'arrive ?

J'entends les pleurs d'un bébé au loin, la voix de Hwasa aussi, une musique douce. Malgré tous ces indices qui m'indiquent clairement que mon ami a autre chose à faire qu'à me parler, je lui déclare :

— J'ai un truc pas normal à l'épaule !

— Quoi ? Comment ça un truc pas normal ?

— J'ai mal et je n'ai plus de force dans le bras... puis mon épaule droite est... affaissée.

— Tu as mal la nuit ?

— Je... Je sais pas... Je me souviens pas...

— Si tu avais eu mal, tu t'en souviendrais !

— Mais si c'était... une tumeur ou une...

— Ce n'est pas une tumeur !

— Tu n'en sais rien, tu...

— Calme-toi ! m'ordonne-t-il.

Cependant, j'en suis incapable. Comment pourrais-je l'être alors que j'ai peut-être quelque chose de grave ?

— C'est mon épaule droite, Nam ! Mon épaule !

Ma vie entière repose sur elle. Et je n'exagère même pas.

— J'ai bien compris, souffle-t-il, comme si j'étais un enfant.

Dans la situation actuelle, j'agis peut-être comme tel mais j'ai peur et je suis perdu. J'ai une excuse pour paniquer ainsi.

— Qu'est-ce que je deviendrai si c'est incurable ?

— Arrête ça tout de suite !

Son ton m'indique qu'il perd patience. Mon corps se recroqueville sur lui-même.

— Tu as mal à une épaule, tu n'es pas sur ton lit de mort. L'autre jour, tu as trop forcé dessus. Je te l'ai dit, rappelle-toi !

Je baisse la tête, bien obligé de reconnaître qu'il m'a prévenu ce jour-là que j'en faisais trop. Il m'a répété à plusieurs reprises d'y aller doucement mais nous étions avec les mecs et je voulais un peu me la péter. Montrer que j'étais toujours bon.

— Ce n'est sans doute pas grand-chose. Tu lui en as trop demandé d'un seul coup et elle te le fait payer.

— Tu es sûr ?

— Oui ! affirme-t-il, déterminé.

Je soupire. J'ai toujours une petite boule dans le creux de mon estomac mais Namjoon a réussi à désamorcer mon angoisse.

— Alors tu vas rester calme, prendre un paracétamol et mettre du froid dessus, OK ?

— OK...

— Et demain, tu iras voir le médecin de l'équipe.

— Mais... mais... pourquoi ?

Mes yeux s'écarquillent. Il me dit que ce n'est rien et là, il me conseille d'aller voir le toubib ? C'est un peu contradictoire tout ça, non ?

— Parce que c'est la règle, tu le sais bien. À la moindre douleur, même la plus petite, il faut aller le voir. Il te fera un check up complet pour être sûr.

Je sens mon visage se déformer par la peur.

— En plus, ça te rassurera de voir que tu n'as rien, d'accord ?

— Hum...

Il a raison. Me connaissant, si je n'ai pas la preuve sous le nez que je n'ai pas une tumeur ou un truc du genre, je continuerai de m'inquiéter. Pendant un moment, je me laisse bercer par la mélodie qui me parvient toujours. J'inspire à fond par le nez et expire par la bouche.

— Ça va aller maintenant ?

— Oui... je crois.

— Je peux te laisser ?

— Oui, oui. Je suis désolé, Nam.

— Tu n'as pas à l'être. Tu as eu raison de m'appeler. Mon numéro est toujours opérationnel pour toi !

Je souris avant de le remercier chaleureusement. Je raccroche et reste un instant immobile, tentant d'éloigner mes mauvaises pensées. Ce n'est pas facile, je suis du genre à me donner à fond dans tout ce que j'entreprends mais de n'être plus qu'un pantin quand ma santé est mise en péril. Mon physique et ma santé... c'est tout ce que j'ai !

C'est en me répétant ces mots que je réalise que je dois me soigner. Je ne perds plus une seconde et m'exécute. Comme mon ami me l'a conseillé, j'avale un comprimé avec de l'eau et pose une poche de froid sur mon épaule. Mon portable à la main, je vais m'asseoir sur mon fauteuil. J'allume la télévision et zappe sur une chaine de reportages.

Alors qu'une publicité démarre, je me souviens que j'ai reçu des messages. J'ouvre le fil et suis surpris de voir qu'ils proviennent d'un numéro inconnu :

De : Inconnu
Je sais que j'ai mal géré les choses
à l'époque et je m'en suis excusé
plusieurs fois. Je ne pensais pas
que connaître cette facette de moi
te ferait autant de mal et surtout
te ferait couper les ponts. Avec
Tae, vous êtes les personnes les
plus importantes de ma vie. Je ne
veux pas te perdre juste pour une
histoire de sexe. Tu comptes toujours
pour moi. On pourrait essayer de
réparer les choses, non ?

De : Inconnu
Tu me manques Ji-Ji...

J'ai déjà reçu un sms de lui, il y a un ou deux jours et je pensais qu'en n'y répondant pas, il comprendrait son erreur mais bien obligé de constater qu'il n'a rien capté. Ou alors... Ou alors il sait très bien à qui il écrit. Cette personne ne serait pas la première à me jouer un tour, abusant de ma naïveté.

Cependant, je ne suis plus cet idiot qui croit tout ce qu'on lui dit. Je suis peut-être encore un gamin quand je suis malade mais je suis devenu un adulte qui a appris de ses erreurs. Je remonte un peu la poche sur l'endroit qui me fait mal et réponds :

A : Inconnu
Je pense que vous vous êtes
trompé de numéro...

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