Chapitre 30 - Jay

Mon corps se penche en avant et j'inspecte les différentes possibilités qui se présentent à moi. La dernière fois, des canettes de limonades m'avaient attiré l'œil. Un sourire en coin, j'insère un billet de cinq mille wons dans le distributeur et sélectionne celle à la pêche. Je la récupère, tout comme la monnaie et retourne m'accouder à la table qui se trouve dans l'accueil de la clinique.

Cela fait déjà une trentaine de minutes que j'attends comme un imbécile. Pas mal de patients et même praticiens ont défilé devant moi. Même la femme de l'accueil est venue me demander si j'avais besoin d'aide. Je crois que je lui ai un peu fait pitié. Elle m'a salué un peu trop de fois avant de quitter son poste.

Le pire dans tout ça, c'est que j'ignore ce que j'attends. Enfin si, j'ai donné un semblant de rendez-vous à ce jeune kiné qui m'a donné des conseils mardi soir mais pourquoi ? Pour qu'il accepte de prendre ma casquette qui a dû à peine le protéger. Vraiment, ça n'a pas de sens.

Je décapsule ma limonade, en prends une gorgée et jette un œil à mon portable. Depuis ce matin, je n'ai eu aucune nouvelle de Jimin. Comme chaque fichu jour où il travaille. Sans lui écrire, mes journées me paraissent deux fois plus longues ce qui me prouvent que je me suis bien attaché à lui en moins d'un mois.

Comment est-ce possible ?

Pourtant, j'étais méfiant. Distant. Et je n'avais aucune envie de rencontrer qui que ce soit et encore moins en virtuel. Mais il a su déjouer mes attaques et abaisser mes défenses. Avec une facilité incroyable.

Je soupire, mon regard dans le vague. Mes doigts font tourner ma canette. Je ne suis plus quoi faire. Ou plutôt, je sais trop bien ce que je devrais faire. Lui dire qui je suis réellement et lui envoyer une photo de moi. Une vraie cette fois, avec ma tête. Une partie de moi est persuadée que ça ne changerait rien entre nous.

Ou peut-être que si... Mon estomac se contracte à cette idée. J'exhale un soupir de désespoir alors que mon portable vibre dans ma poche. Je le sors et souris en voyant le nom de Jimin inscrit. Il m'a écrit. Je pianote sur l'écran et nos messages s'affichent.

De : Jimin
Journée terminée ;)
Semaine finie :D

Mon rictus s'agrandit à cette nouvelle. Jimin va à nouveau avoir du temps à me consacrer. Je n'ai pas le temps de faire attention à mon égoïsme que je reçois un second sms.

De : Jimin
J'ai oublié de te dire hier
mais je passe le weekend
dans ma famille !! Je suis
trop heureux ! Mes parents
ne sont pas au courant, ça
va être une grosse surprise
pour eux !

Bon... Il n'aura peut-être pas tant de temps que ça à me consacrer. Mais ça me donne une bonne raison pour retarder le moment de mes aveux. Après tout, je ne vais pas le déranger pendant ses moments en famille et il voudra sûrement profiter d'eux, loin de son portable.

A : Jimin
Je suis content pour toi !

A : Jimin
Ils habitent loin ?

Je sais qu'il m'a dit qu'ils avaient déménagé quand il était jeune mais s'il passe le weekend avec eux, ça signifie que ses parents n'habitent pas dans le quartier à côté du sien. Non ?

Je bois une nouvelle gorgée. Le temps passe tellement lentement. En plus, maintenant que je sais que Jimin va être occupé ce weekend, je suis super déçu. Et il ne me répond même pas. Il est peut-être déjà sur la route pour s'y rendre. Je glisse mon mobile dans une poche pour m'empêcher de le fixer comme un fou.

Une fois ma boisson terminée, je la jette dans la poubelle mise à disposition et décide d'enfin partir. Cela va bientôt faire trois quarts d'heure que je poireaute. Ce kiné ne viendra plus. De toute façon, je m'en fiche de cette casquette, qu'il la garde. Je reboutonne ma veste en cuir et me dirige vers la porte.

— Attendez !

Le cri est sorti de nulle part. Après avoir légèrement sursauté, je me retourne et vois sa petite course sur les derniers mètres. Ses cheveux noirs lui retombent devant les yeux mais il les ramène en arrière d'un geste si fluide qu'il semble faire partie intégrante de lui. Encore une fois, il porte un masque noir, me cachant la majorité de son visage.

Son corps mince est déjà emmitouflé dans un beau manteau noir. Il porte un pantalon fluide, type costume, d'un joli gris perle. Ses bottines noires ont un léger talon mais il reste malgré tout plus petit que moi. Je ne le connais pas mais il semble être un bel homme.

Une autre personne le suit plus calmement, un sourire amusé aux lèvres. Je le reconnais aussitôt comme étant le médecin qui m'a diagnostiqué un début de tendinite et m'a prescrit des séances de kiné. Dr Kim SeokJin.

— Je suis désolé, souffle-t-il en se penchant en avant.

— C'est moi qui devrais m'excuser, intervient mon médecin. Nous avions à parler d'un patient et je vous ai retardés.

Je secoue la tête en agitant les mains automatiquement. Trop d'excuses en si peu de temps. Certes, j'ai failli prendre racine mais je n'ai pas souffert le martyr non plus.

— Aucun souci, je n'ai pas tant attendu que ça, affirmé-je sans ciller.

— Vous m'en voyez ravi. Je vais vous laisser. Encore merci, Park, pour votre aide.

— De rien, docteur.

Je regarde le kiné se pencher devant son supérieur qui nous adresse un magnifique sourire avant de partir de la clinique.

— Je suis vraiment désolé, répète le dénommé Park tout en fouillant dans son sac. J'étais prêt depuis un moment mais je n'ai pas pu échapper au docteur. Je dois voir le patient lundi matin et je ne travaille pas demain donc...

— Respirez un grand coup ! le coupé-je.

Il sort ma casquette et me la présente, victorieux. Il sourit. Même avec le masque, je ne peux pas le louper, ses yeux se plissent tellement dans la démarche qu'ils disparaissent. C'est mignon. Je l'imite malgré moi.

— Je vais bien. Vous attendre n'est pas un problème. Ça avait un petit côté distrayant de voir toutes ces personnes passer ici.

Je repense à Jimin qui ne m'a toujours pas répondu. Je souffle alors :

— De toute façon, je n'avais pas mieux à faire.

Il tique à ma phrase mais ne fait aucun commentaire. Il se contente de me tendre l'objet qui nous a menés là en m'annonçant :

— Elle m'a été très utile ! Grâce à elle, ma tête est restée au sec !

Je la récupère et m'étonne :

— Vraiment ?

Je la tourne dans tous les sens comme si j'allais découvrir un bouton ou une capacité magique à ce simple objet.

— Oui, un vrai miracle. Encore merci.

— De rien. Mais vous auriez pu la garder !

— Je n'aime pas abuser de la gentillesse des gens.

Je hausse les épaules avant de caler mon chapeau sur le crâne.

— Votre épaule semble moins douloureuse, je me trompe ?

— Vous avez l'œil...

— C'est mon métier, me rappelle-t-il en redressant son sac.

— C'est vrai. Et vous êtes doué. J'ai fait vos exercices que j'ai préféré à ceux de votre collègue, d'ailleurs. J'ai encore mal mais je sens que toute ma mobilité revient doucement. C'est agréable.

— Vous n'avez toujours pas mal la nuit ?

Je ricane. Je passe la majorité de mes nuits à parler avec Jimin, bien allongé dans mon lit puis la fatigue étant trop forte, je m'endors comme un bébé. J'aime bien cette routine. Même si pour lui, ça doit être moins sympathique puisqu'il travaille le lendemain. Il faudra d'ailleurs que je lui en parle un de ces jours.

— Toujours pas.

— Parfait. Votre...

La sonnerie d'un téléphone nous interrompt. Park cherche frénétiquement dans ses poches après s'être excusé pour la énième fois de la soirée et trouve le Saint-Graal. Il refuse l'appel et relève le visage vers moi.

— Je vais devoir vous quitter. Un ami doit venir me chercher et il vient d'arriver.

Il fait un signe vers les portes automatiques derrière moi.

— Oh ! Très bien. J'ai retrouvé ma casquette de toute manière, lui dis-je sur un ton que j'espère blagueur.

— Encore merci.

Je hoche la tête et nous nous saluons alors qu'il s'éloigne déjà. Je le suis du regard. Il se dépêche de rejoindre une belle voiture noire de laquelle un jeune homme magnifique sort. De son béret noir sur le crâne à ses chaussures en cuir en passant par son pantalon ample et son gilet en laine dignes d'un premier de la classe, tout transpire la beauté et la classe chez lui.

Tel un vulgaire voyeur, je les regarde se prendre dans les bras. Park lui passe même une main sur la joue en rapprochant son visage de celui de l'arrivant. J'ai la sensation qu'ils vont s'embrasser mais au dernier moment, Park lui donne un semblant de claque qui fait râler l'autre. Sur le coup, je le comprends totalement.

— Tu peux pas me faire ça, geint le beau gosse qui soudain perd de sa prestance pour moi.

Park hausse les épaules avant d'ouvrir la portière arrière pour y mettre son sac. Il retire son manteau noir, me laissant une vision sublime sur ses fesses.

— Je t'avais prévenu alors maintenant, tu montes ! ordonne-t-il d'un ton qui n'appelle pas à discuter.

Après s'être débarrassé de son vêtement, il referme la porte et contourne le véhicule. Ils montent finalement tous les deux et quelques secondes plus tard, ils ont disparu de ma vue.

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