Sentiments

                     

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— Pourquoi tu nous as emmenés chez moi ? posé-je, tout en enlevant le casque posé sur ma tête.

— Parce que je n'avais pas envie d'aller ailleurs.

                       

Il éteint ensuite le moteur de sa moto, se retire de celle-ci, et s'éloigne vers le bâtiment, sans plus de cérémonies.

Légèrement nerveux, je le suis, casque à la main.

                                   

— Qu'est-ce que tu veux manger ?

— On peut commander des pizzas, si ça te tente. Comme ça, pas de prise de tête, et tu peux profiter au mieux de la soirée.

— Oui, pourquoi pas. Faisons ça, souris-je.

— On se regarde un film en même temps ?

— On peut, oui.

                          

Le temps que le repas soit livré, nous avons sélectionné ensemble ce qu'on allait regarder. Je ne suis pas très film d'action, mais celui qu'il voulait voir n'avait pas l'air si mal, alors j'ai accepté.

Autant qu'il soit réellement attiré par le film. Je ne tiens pas à ce qu'il s'ennuie et me taquine encore juste pour passer le temps.

                             

— Mmh.

                 

Le petit ricanement que j'entends au loin me permet de comprendre que je viens à peine de me réveiller d'une sieste.

Après avoir terminé notre repas, l'estomac plein, je me suis appuyé correctement contre le dossier du canapé, et me suis sûrement endormi en plein milieu du film.

L'esprit encore légèrement embrouillé, j'ouvre les yeux avec difficulté et me rends compte de la situation.

Byunwoo est assis, comme tout à l'heure, alors que je suis allongé. Ma tête est posée sur ses cuisses et ses doigts sont glissés dans mes cheveux. Il grattouille mon cuir chevelu et je comprends maintenant pourquoi je grognais ainsi dans mon sommeil. Cette sensation est très agréable. Elle l'est tellement, que je ne veux pas me redresser.

Je suis encore bien trop ensommeillé pour penser de manière sensée.

Dans l'immédiat, tout ce que j'arrive à faire, c'est sourire bêtement, tout en ronronnant sous les attentions qu'il m'offre.

                                 

— Tu aimes ? entends murmurer, d'une voix douce et masculine.

                 

Je me contente de hocher la tête, ce qui le fait à nouveau pouffer d'amusement.

                   

— Je vais y aller. Tu sembles avoir besoin de repos.

— Non, attends ! m'affolé-je, en me redressant.

                                   

Je crois l'avoir un peu effrayé. Il a sursauté et me regarde à présent avec de grands yeux interrogatifs.

Il est trop mignon.

Mais ce n'est pas ce à quoi je dois penser !

Et je ne peux pas le laisser partir, alors qu'on n'a pas encore discuté de ce qui me tracasse.

J'ai besoin de réponse...

                                  

— Tu veux que je reste encore un peu ? place-t-il, presque timidement.

                   

Sa grande main se pose alors sur ma cuisse, d'un geste bien trop tendre.

Ses paroles suintent l'espoir et ce constat affole mon coeur et mon esprit plus qu'ils ne l'étaient déjà.

                                

— Oui, je... On n'a pas eu l'occasion de beaucoup discuter, ce soir, soufflé-je, le visage en feu.

                            

Son regard qui se baisse, me permet de comprendre que ma main tient la sienne. Je la retire donc brusquement et ses yeux passent de l'espoir, à la peine.

Je déteste ce sentiment qui m'inonde lorsque je le vois agir de la sorte. Je préfère nettement lorsqu'il est taquin.

Mais je dois avoir cette discussion avec lui. Il le faut. Pour mon bien et pour le bien de tout le monde.

                               

— Discutons dans ce cas, conclut-il, d'une voix basse, presque inaudible.

                     

Par pitié, faite que je me trompe et que ce soir, personne ne sera blessé.

Je vous en conjure, faite que j'ai tort.

Sans savoir me contrôler, nerveux et inquiet, je glisse à nouveau sa main dans la mienne, et plonge mon regard dans le sien.

Ma respiration s'accélère et mon organe vital bat à toute vitesse.

Il faut que je me lance, mais ça me terrifie.

                                

— Tu ne sembles pas vouloir parler de la pluie et du beau temps, souffle-t-il du nez, pour détendre l'atmosphère.

— Byunwoo...

— Dis-moi...

— Est-ce que... Est-ce que tu tiens à moi ?

                                   

Ses sourcils froncés et sa moue perdue me rendent à mon tour confus.

                    

— Bien sûr que je tiens à toi.

— Byun...

— Cesse de tourner autour du pot, Seok.

                        

Il semble tout aussi anxieux que moi, à présent.

Ça ne m'aide pas du tout à me calmer, au contraire. Mais il faut que je le fasse.

Oui, il le faut.

                             

— Est-ce que tu as des sentiments pour moi ?

                   

Il ne sait quoi répondre. Il semble réfléchir.

Oui, il réfléchit, durant de longues, très longues secondes.

Son regard est ancré dans le mien. Sa prise sur ma main se resserre, certainement inconsciemment, alors qu'il reste toujours muet.

À quoi pense-t-il ?

Est-ce qu'il se demande s'il doit dire la vérité, ou bien mentir ?

Est-ce qu'il pense à son frère ?

Que va-t-il finir par répondre ? Ça m'angoisse tellement !

S'il te plaît, ne traîne pas à me répondre !

Ce silence est bien trop oppressant !

                         

— Si tu te poses la question, c'est qu'au fond, tu as déjà la réponse, non ?

                              

Son expression est calme, sa voix aussi. Il semble si sérieux. Pourtant, je peux voir sa poitrine se soulever un peu plus vite.

                             

— Je n'en sais rien, Byun... J'aimerais juste que tu me répondes, avec sincérité.

                     

Je crois qu'il cherche quelque chose en moi... Il essaye de lire quelque chose qui pourrait peut-être l'aider à répondre, mais je ne sais pas s'il trouve ce qu'il cherche si désespérément.

Je n'aime pas du tout cet instant. J'aimerais qu'il soit déjà fini. Pourtant, j'ai l'impression que ce n'est que le début.

                            

— Tu es sûr de vouloir de la sincérité ?

— Bien évidemment. Sinon, je ne te poserais pas la question, murmuré-je, de plus en plus nerveux.

                              

Il ne me répond pas, ne répond rien. À la place, la pression que sa main exerce sur la mienne se fait plus forte, tandis que de l'autre, il vient caresser ma joue.

Il me regarde avec une expression si douce, que mon coeur ne peut que s'affoler un peu plus.

Il est si beau et ses prunelles n'expriment que de la tendresse et de la douceur. J'ai l'impression d'être le plus beau des trésors, à travers ses iris. Cette sensation est intense, impressionnante.

Je ne suis plus capable de bouger, de parler, ou même de penser. Je me laisse simplement bercer par ses caresses contre ma peau.

                                

— Tu n'es pas idiot, Hoseok. Tu sais que la réponse est oui, avoue-t-il.

                 

Mes yeux se closent par instinct à l'entente de ces paroles. Ma tête tournerait presque, tant mes pensées fusent de toutes parts. Ses doigts glissent toujours contre ma pommette et je ne suis toujours pas capable de bouger.

Une tempête gronde à l'intérieur de ma poitrine.

Je suis noyé sous une dizaine d'émotions différentes. Je ne sais ni quoi dire, ni quoi faire...

Il est amoureux de moi...

Le jumeau de mon petit ami est amoureux de moi.

Mes larmes s'échappent d'elles-mêmes, alors que mes paupières sont toujours baissées. Ses douces attentions s'arrêtent et ses deux mains sont à présent dans les miennes.

Je n'ose pas ouvrir les yeux.

La culpabilité me ronge entièrement.

Je suis terrifié à l'idée de le voir. J'ai si peur de tomber dans son regard.

Et surtout, je suis très effrayé à l'idée de ce que je pourrais faire, en le voyant.

Malgré moi, le fait de savoir que j'avais raison, emplit mon coeur d'un sentiment que je ne devrais pas avoir.

Je suis... Je suis touché, de savoir qu'il m'aime. Je suis un être immonde.

Quoi que j'essaye de faire, je ne peux m'empêcher d'imaginer ce que serait ma vie avec cet homme à mes côtés. Je sors avec un homme formidable, parfait, et pourtant, je n'arrive pas à m'empêcher de penser aux lèvres et aux bras de quelqu'un d'autre. De la personne qui lui est le plus proche.

Je ne peux que me détester pour ça. Pourtant, je n'arrive pas à m'en empêcher. Et c'est ce qui me dégoûte le plus.

Je n'ai rien fait avec Byunwoo et pourtant, j'ai l'impression d'avoir trompé mon petit ami.

Comment puis-je faire ça ? Comment puis-je trouver quelqu'un de plus merveilleux que Hyunwoo ?

Oui, mais... Ils sont jumeaux...

Leurs personnalités sont tellement différentes, mais pourtant, je les apprécie toutes les deux...

J'ai mal à la tête... Mon visage est inondé de larmes. Byunwoo n'ose pas bouger, du moins, je ne le sens pas bouger.

Il tient toujours fermement mes mains, comme pour m'aider à ne pas totalement m'effondrer. Il m'offre du soutien, tout en sachant qu'il est la cause de ma détresse.

                              

— Je suis tellement désolé, baragouiné-je, tout en pleurant à présent à chaudes larmes.

                     

Ses pouces caressent le dos de mes mains.

                           

— Ce n'est pas de ta faute.

                     

Mes larmes continuent de couler, alors qu'il essaye vainement de me rassurer.

Ce qu'il ne sait pas, c'est qu'il fait pire que mieux.

                      

— C'est entièrement de la mienne... Je savais pertinemment que tu étais amoureux de mon frère, mais je voulais à tout prix t'approcher. Plus je passais du temps avec toi et plus j'avais envie de ne jamais m'éloigner. Même lorsque Hyunwoo m'a expliqué sortir avec toi, je n'ai pas pu m'arrêter. Je suis désolé si cette situation te fait souffrir. Excuse-moi.

                               

Sa voix peinée ne fait que me culpabiliser un peu plus.

Faiblement, j'ouvre les yeux, et ose enfin plonger mes prunelles dans les siennes. Comme prévu, ces dernières sont inondées de peine et de culpabilité. Il n'y en a pas un pour rattraper l'autre.

                    

— Il faut dire, tu étais tellement réceptif à mes avances, que je n'ai pu me résoudre à arrêter.

— Je n'étais p-pas... Je...

— Ce n'est pas grave, Hoseok. Rien n'est de ta faute, tu n'as rien fait de mal. Cesse de culpabiliser, d'accord ?

— Je ne veux pas te faire souffrir, mais en même temps... Je n'arrive pas à te dire non.

— Stop, Seok. Tu fais pire que mieux. S'il te plaît, ne parle plus.

— Mais...

                            

Ses mains quittent les miennes, pour venir prendre mon visage en coupe. De ses pouces, il tente d'essuyer mes joues noyées de larmes, sans grand succès.

                   

— Non, s'il te plaît.

— C'est ma faute... Ma faute...

— Je vais y aller, Hoseok, dit-il alors. Tu es fatigué, je ne veux plus parler de ça avec toi. Plus ce soir, en tout cas.

— Je suis désolé.

— Moi pas.

— Mais... Ton frère... Tu ne peux pas lui faire ça. Et moi non plus. On ne peut pas.

— Tu parles comme si mes sentiments étaient réciproques.

                            

Mes larmes continuent de couler, encore et encore. Mon coeur me fait mal, ma tête aussi.

Ces sentiments que je ressens sont horribles, je veux qu'ils s'en aillent.

Comment on a pu en arriver là ? Je n'aurais jamais dû accepter de me rapprocher de lui. C'était du suicide.

                                

— Je n'ai pas besoin de réponses, Hoseok. Ne t'inquiète pas. J'y vais.

— Byun...

— Ne dis plus rien. Ce n'est pas la peine.

                   

Silencieux, je me contente de gémir sous la puissance de mes pleurs, tandis qu'il se lève, après avoir embrassé mon front. Il me tourne rapidement le dos et s'éloigne, dans une lenteur horrible.

Je le regarde partir, totalement impuissant face au déluge de sentiments qui me noie.

Il est parti...

Sans même prendre avec lui, un peu de ma détresse.

Je ne sais pas quand nous allons nous revoir, mais une chose est sûre. Plus rien ne sera comme avant.

Non. On ne pourra plus... On ne peut pas.

Il est amoureux de moi. Et moi... Moi... J'aime avant tout Hyunwoo. Et rien ne pourra me faire changer d'avis. Pas même ce que me fait ressentir son jumeau... Non, ce n'est pas possible. Je ne peux pas. Je ne dois rien faire qui puisse briser ce que nous avons, lui et moi.

Mais envisager faire souffrir Byunwoo, par mes simples faiblesses...

Je ne suis pas digne d'être à leurs côtés. J'ai l'impression d'avoir brisé la relation totalement saine et honnête que j'avais avec cet homme que j'aime tant...

Je lui cache des choses qui pourraient avoir de si grosses répercussions...

Comment ai-je pu laisser faire ça ?

Mon Dieu... Comment les choses vont se passer, maintenant ?

                  

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