CHAPITRE 29
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PARTIE 1 : Liam, anagramme de « l'ami »
HARRY
En rentrant chez moi, je trouve la propriété totalement éteinte. Je tourne la clé dans la serrure, et ferme machinalement la porte derrière moi, non sans appuyer sur l'interrupteur. Je sursaute en me retournant et en voyant que Liam est là.
- Tu es flippant, je souffle. Qu'est-ce que tu fais là ?
- J'ai les clés, tu sais.
- Je voulais dire pourquoi tu es là.
Je pose mon sac dans l'entrée et me débarrasse également de mes baskets. Je m'avance jusqu'à mon frigo pour prendre quelque chose à boire. Je constate que Liam s'est mis à l'aise, s'est servi des chips et à boire.
- En plus tu m'attendais dans le noir, je note. C'est flippant mec.
- Je voulais conserver l'effet dramatique.
Je roule des yeux, amusé.
Liam prend place sur un haut tabouret et s'installe ainsi face à moi.
- Louis a très bien joué, me dit-il. Il s'est enfin réveillé.
- Il a juste eu un moment de passage à vide. Ça arrive. J'étais sûr qu'il allait finir par se reprendre.
- Tu crois vraiment en lui.
Croire en quelqu'un est terrifiant, mais oui. Je crois en Louis. Et plus fou encore ; il croit en moi en retour.
- Oui, je rétorque à mon meilleur ami. On est bien ensemble. On fonctionne bien je crois.
- Je trouve aussi, bien que mon avis n'ait pas vraiment d'importance.
- Tu rigoles ? Tu es mon meilleur ami. Évidemment que ton avis importe.
- Donc si je te disais d'arrêter et de le quitter sur le champ, tu le ferais ?
Je réfléchis un court instant.
- Non, carrément pas, je parle.
Le brun rigole et je le rejoins. Mon visage est rapidement modifié par une grimace.
- Judith sait, pour lui et moi.
- Oh ? S'étonne Liam. Il lui a dit, si tôt ?
- Non, elle l'a appris seule. Le cousin de Louis nous a vus je crois, en a parlé... Quelque chose comme ça.
Liam arque un sourcil l'air de dire sérieux ? et j'acquiesce en silence, comme pour répondre je sais, ça craint.
- Elle l'a pris comment ? Tente mon ami.
- Mal. Très mal.
- Son égo doit être attaqué. Imagine que Xander se mette avec une fille demain, tu te sentirais mal.
- Pas du tout. Il fait ce qu'il veut.
- Ok, c'est peut-être pas le bon exemple pour toi et ton coeur de pierre.
Un léger rire me quitte et j'hausse les épaules.
- Si ça s'arrêtait avec Louis, et qu'il se remettait avec quelqu'un vite, oui, je pense que je serai en colère.
- Et c'est la réaction normale, quand on aime quelqu'un.
Je lève les yeux vers Liam qui me fixe. Ces mots sont vraiment terribles. Tout ce qui touche à l'amour, le vrai, avec une personne que nous chérissons, c'est casse gueule pour moi.
- Judith s'y fera, me rassure le brun. Elle n'était peut-être pas totalement passée à autre chose.
- Je sais, je sais, c'est juste... Je n'ai pas envie que Louis se referme à cause de ça.
- Vous avez passé ce cap, non ?
- Je crois, oui. Mais je ne sais pas. Je ne suis pas le meilleur exemple quand il en vient à se confier, à rester quoi qu'il arrive. Je n'ai jamais fait ça.
J'apprends, avec Louis. Et même si l'intention est là, dans chaque apprentissage, il y a des loupers, des erreurs. Et je m'adresse à mon meilleur ami comme s'il était le professionnel de l'amour, de toute évidence ce n'est pas le cas - mais sa simple présence m'aide.
- Il n'a pas fait de coming-out, son cousin et son ex l'ont appris d'eux-mêmes. C'est horrible, de se faire outer sans son consentement.
- J'imagine, souffle Liam.
- Si ça m'arrivait - honnêtement, je crois que ça me tuerait.
Avec Lucia, c'est un peu différent car je pense qu'elle le sait, sans que je n'ai besoin de lui dire. Dans l'équipe, les gens le savent, n'en parlent pas, car l'homosexualité est tabou dans le sport de haut niveau et la politique. Mais si mon père l'apprenait par le biais d'un tiers, s'il apprenait ça, un jour - c'est sûr, je suis un homme mort.
J'ignore le frisson glacial qui me parcourt, terrorisé à cette simple pensée. Elle n'est qu'imaginaire et heureusement.
- Les proches de Louis ne sont pas comme ton père, tente Liam. C'est dur, et il va peut-être se sentir mal, mais ça n'a rien à voir avec ce que ton père ferait s'il découvrait ça.
- Et heureusement.
Triste, Liam acquiesce.
- Il ne t'a pas contacté d'ailleurs ? Reprend ce dernier. Suite aux questions indiscrètes de la presse au match de la dernière fois.
- Non. Je pense qu'il a ignoré. Il a sûrement un peu étouffé le truc, comme ils ont rapidement arrêtés d'en parler.
- Et tu sais s'il va revenir bientôt ?
Je ne sais jamais quand il revient. Il est comme un chat errant, dans une rue sombre et inconnue. Il surgit quand il le veut, quand il l'a décidé. Ici, c'est chez lui - ce terrain, ma personne, c'est à lui. Il le fait très bien ressentir.
Il reviendra, à un moment. Je n'ai qu'à espérer que je serai capable de garder Louis éloigné au maximum, afin qu'il ne souffre aucunement.
Par moment, je me sens égoïste de garder ce garçon près de moi alors que tout ce qui m'entoure n'est qu'une bombe à retardement, qui le touchera en explosant. Et à d'autres moments, je le regarde, je l'embrasse, et je me dis que cela ne pourrait juste pas être autrement.
Aimer quelqu'un, c'est peut-être cela, dans la finalité.
Je relève les yeux vers mon meilleur ami. Il n'attend pas de réponse à sa précédente question, il sait bien que tout ce qui concerne mon paternel est délicat. Et ce soir, comme de plus en plus souvent, je n'ai pas envie de penser à sa prochaine venue et à ce qu'elle impliquera.
- Tu ne m'as pas dit pourquoi tu m'attendais dans le noir à 23h du coup, je reprends.
- Oh, oui. Attends.
Liam se lève et part chercher mon Mac. Je rigole en voyant qu'il est allumé, qu'il a vraiment fait comme chez lui.
- Je voulais te montrer des photos de mon appartement, à Cambridge.
- Quoi ? Je rigole. C'est pour ça que tu es là ?
- Viens, regarde.
Je contourne l'îlot central pour venir à côté de mon meilleur ami. Il fait défiler quelques photos, de son loft. Il est très lumineux, très bien placé. Le blanc est la couleur dominante, mais il y a aussi beaucoup de briques, ce qui apporte un côté rustique à l'endroit. Son salon est immense, sa cuisine est ouverte, et il a deux chambres à l'étage. C'est propre, c'est spacieux, et je ne peux pas mentir : cela vend du rêve.
- C'est très beau. Tu vas beaucoup t'y plaire.
- Il y aurait de la place pour deux, tu as vu.
- Liam, je souris en me tournant vers lui, ça fait un peu stalker d'attendre chez quelqu'un qu'il rentre pour lui dire de venir emménager chez lui.
- Oh, allez, je ne suis pas venu que pour ça. Je suis venu pour passer du temps avec toi.
- Et si j'étais rentré avec Louis ?
- Bah, j'aurais passé du temps avec vous deux. Louis est cool, je l'aime bien. On aurait genre, je sais pas, regardé un film ? Bu des bières dans la piscine ? Vous vous seriez retenus de vous sauter dessus en ma présence et ça aurait été une soirée entre potes, il sourit.
Son sourire est contagieux. Cette idée de scénario ne me déplait pas, et j'espère avoir l'occasion de passer du temps avec mon meilleur ami et mon petit-ami. Chaque fois que j'utilise ce mot, même mentalement, je me sens étrange. Cela parait si incorrect, et pourtant si juste.
- Et au passage, poursuit Liam, si je peux faire ma propagande pour embarquer mon meilleur ami à Harvard, je prends.
- Tu auras Judith à Harvard, je rétorque. Il y a des chances qu'elle y aille, de ce que Louis m'a dit.
- Mais Judith n'est pas mon meilleur pote.
- Encore mieux, ça pourrait devenir ta conquête. Et les conquêtes ça dépasse les amis.
Le brun affiche une mine outrée, et je ne peux m'empêcher de rire.
- Qu'essaies-tu de me dire ? Parle Liam avec une voix dramatique. Le mec aux yeux bleus m'a remplacé dans ton coeur ?
- Non, je rigole.
- C'est une trahison que tu me fais là, Harry. Je suis sûr que lui il te ferait genre, payer la moitié du loyer si un jour vous habitez ensemble. Moi, je suis prêt à te faire payer que 45%.
- Woah, tu es un ami si merveilleux.
- Je sais, il sourit en mimant un air de diva.
Et ainsi, je réalise que ça va. Que ma journée a été bonne, que la fin de celle-ci, actuellement, est agréable.
Au fil des secondes, mon sourire retombe doucement, mais je me sens toujours aussi léger. Je lève les yeux vers Liam.
- J'y réfléchis tu sais, dis-je plus calme. A toute cette histoire, à Harvard. Peu importe avec qui, toi, ou Louis, c'est pas ça le plus important. J'y réfléchis sincèrement, pour moi.
- Vraiment ? Rétorque tendrement mon ami.
- Oui. Tu m'en as parlé, Louis m'en a parlé, m'a dit qu'on pourrait peut-être... voir plus loin. Et je ne veux pas le faire pour quiconque, c'est beaucoup trop délicat, et ça me concerne moi, et moi tout seul.
Liam acquiesce pour m'encourager à continuer, ce que je fais :
- Mais j'y pense. Et je veux que tu le saches. Je ne fais pas semblant, ou je ne sais pas quoi. Je ne garantis rien, je ne sais rien, mais crois-moi, j'y réfléchis bien plus que je l'ai jamais fait.
Cela paraitrait anodin pour tellement de gens, dramatique pour d'autres, et même pathétique pour certains en plus. Mais pour le brun en face de moi, cela vaut tout l'or du monde. Car même si rien n'est fait, même s'il est possible que rien ne se fasse, je m'autorise ne serait-ce que la possibilité d'y penser. Et cela n'aurait jamais été possible avant.
Avant qu'un joli garçon aux yeux bleus me montre que parfois, les choses ne sont pas comme on croit qu'elles doivent être.
- C'est super H.
- Merci Li.
- Mais si tu finis par y aller, t'as intérêt à choisir mon appartement pour vivre, il surpasse tout.
La légèreté de son ton plaisantin me fait rire et me fait du bien. Liam ferme mon ordinateur et se lève du tabouret sur lequel il était assis.
- Alors, piscine et bière ou film tranquille dans le canapé ? Il demande.
- Film, je rétorque. Le match et la paperasse m'ont crevés.
- Ok, très bien. Promis, je dirais rien à ton mec si tu t'endors avec ta tête sur mon épaule.
Mon rire se mélange à celui de Liam tandis que nous rejoignons le canapé.
*
PARTIE 2 : Tension
LOUIS
Comme convenu, Harry me dépose au grand parc à quelques minutes à pied de la maison. Pour des raisons évidentes, il ne me dépose pas directement devant. Je le quitte en l'embrassant tendrement, non sans me mordre la lèvre à la pensée que j'adore ça.
J'ouvre discrètement la porte d'entrée, et trouve directement Nick assis dans le canapé, en train de regarder la télé.
- Hey, je dis doucement. Tu n'es pas au lit ?
- Il est 23 heures, je sais que je suis tout le temps fourré ici mais j'ai pas encore 90 ans.
- Où sont les autres ? Je demande en voyant la salle de séjour vide.
- Ils travaillent dans le bureau, et Mike et Andrea regardent un film dans leur chambre je crois.
- Et Nick et Judith ?
- Pas rentrés. Je pensais qu'ils allaient rentrer avec toi, comme ils sont venus te voir jouer.
Je soupire et le brun semble comprendre que quelque chose ne va pas, m'encourage à raconter. Je relève les yeux vers lui.
- J'ai mon équipement, ça te dit qu'on aille se faire des lancers dans le parc ? Je propose.
- Oh, ouais, carrément, souffle Nick.
Ni une ni deux, nous quittons la résidence pour rejoindre l'espace public totalement désert. Denver n'est pas une ville morte, mais à cette heure-là, les gens sont au restaurant, ou dans les bars, pas dans cet espèce de petit parc où les vieilles promènent leur chien l'après-midi.
Nick et moi nous installons à la distance nécessaire. Je lui laisse ma batte, pour qu'il ressente à nouveau la sensation de taper dans la balle. Cela fait des semaines qu'il n'a pas pu ressentir cela, et je ne peux qu'imaginer le manque ressenti.
Une passion, ça prend aux tripes. Nick et moi partageons celle du baseball.
- Je t'ai regardé jouer aujourd'hui, dit-il en pliant les genoux pour prendre la position. À la télé.
- C'est vrai que je passe à la télé...
- Ouais. C'est carrément fou.
Un rêve devenu réalité, que je ne réalise toujours pas.
Je tiens fermement la balle et la lance vers Nick. Je ne fais pas de lancer particulier, afin qu'il la frappe sans soucis. Il le fait, sans y mettre trop de violence afin de ne pas envoyer la balle je ne sais où.
- Tu as fait un hors-limite, dit-il.
- J'ai fait un hors limite, je répète avec fierté.
- C'est génial. Ça doit être fou, l'euphorie dans le stade...
- C'est génial oui. Mais c'est en dent de scie avec moi. Je n'ai pas leur niveau, alors un coup je suis super nul, un coup j'ai de la chance et fait un truc de fou.
- Tu as leur niveau, m'assure le brun. Sinon tu ferais que du nul, pas de trucs de fou. Tu as moins d'expérience et ça se ressent, mais tu as clairement leur niveau.
Face aux encouragements de Nick, qui se veut sincère, alors qu'il est enfermé toute la journée dans une maison à probablement s'ennuyer, je me dis que je comprends ce que Zayn pouvait lui trouver. Jamais je ne verrai le garçon de la sorte, mais il sait se montrer présent, et bien plus sympathique que cette espèce de facette qu'il abordait au lycée.
Je lance à nouveau la balle ; Nick la touche encore. Il souffle d'aise après chaque frappe, et cela fait plaisir à voir. Nous poursuivons l'occupation quelques fois avant que je ne me pince les lèvres.
- Est-ce que tu es au courant ?
Je ne précise pas de quoi je parle, je suppose que je n'en ai pas besoin. Mon soupçon se confirme quand Nick parle :
- Oui, rétorque t-il, calme. Ça a rapidement fait le tour de la maison hier.
- Pire que Secret Story, je soupire.
- Ouais, enfin vu ton secret, tu aurais clairement gagné l'aventure.
Je ne sais pas où je puise la force de sourire à cette vanne, mais je le fais. Cela retombe bien vite.
- Tu n'es pas en colère contre moi ?
- Je ne sais pas trop ce que j'en pense. Je ne sais pas si c'est une bonne idée, toutes ces conneries. Je ne pense pas, même. Mais...
Il soupire, se frotte les yeux, rajoute :
- Qui je suis pour te dire qu'il est impensable de tomber amoureux d'un mec que tu es censé mépriser ?
Zayn et lui n'était pas l'histoire la plus évidente et « normale », c'est sûr. Je n'aurais jamais parié dessus, même pas un pauvre centime.
- Judith l'a appris du coup. Elle a pété les plombs, je soupire. Elle est venue me voir après le match - j'ai cru qu'elle allait m'en mettre une.
Je lâche ma frustration en envoyant la balle un peu plus violemment. Nick réussit tout de même la frappe.
- Wow, pouffe Nick. Elle en envoie, c'est sûr.
- Je pensais simplement, je sais pas, j'hausse les épaules en marquant une pause dans mes mots. Que tu le prendrais mal, que Mike le prendrait mal. Surtout toi peut-être. Pas qu'elle serait celle qui réagirait comme ça.
- Mike vit une histoire d'amour un peu particulière aussi, et pour passer mes journées avec lui, crois-moi, il est comparable à un adolescent plein d'hormones qui découvre la vie.
Je mime le dégout, ce qui fait rire mon ami situé à quelques mètres plus loin.
- Il va penser à l'enquête, mais pour le moment, le fait que tu sortes avec Harry ne met pas de barrière. Ça se compliquera si ça change par contre.
- Ça ne changera pas, j'assure.
- J'espère. Mais je suppose qu'il résonne comme ça. Et moi, je te dis, je l'ai clairement pas vu venir. Mais je pense que tu l'avais pas vu venir non plus, pour moi et Zayn.
J'ai un flashback de cet sorte d'interrogatoire, avec Mike et Andrea. Ils n'étaient que de simples inconnus à l'époque, je n'avais aucune idée des proportions qui m'attendaient. Ce moment où on m'a annoncé que Nick était le petit-ami mystère. J'en ai ressenti bien des choses, ce jour-là.
Je soupire. J'envoie à nouveau la balle, cette fois, Nick loupe et me la renvoie pour que je recommence.
- Judith a mal réagi parce qu'elle est folle de toi, ajoute le brun.
- C'est du passé entre nous, je dis.
- Oui, oui, peut-être, mais ça fait mal quand même quand tu as tenu à quelqu'un. Et les sentiments ça part pas en une seule seconde. Si on t'avait demandé d'arrêter avec Harry dans la seconde, tes sentiments seraient pas partis d'un coup.
Je me pince les lèvres, lui donne raison en demeurant silencieux. Difficile même de me dire que mes sentiments pour lui partiront un jour - si on me promettait l'éternité avec lui, je n'y verrais pas d'objection. Ah, je suis ce genre de mec niais, c'est clair.
- Je n'avais pas l'intention de la blesser. C'est mon amie.
- Je pense qu'elle ressent un peu de tout... mal au coeur parce que tu es avec quelqu'un d'autre, mal à l'égo parce que ce n'est pas elle, peut-être tout simplement mal parce qu'elle est la dernière à l'avoir appris et que tu ne nous as rien annoncés.
- Je pensais que ça allait créer de la discorde et vu sa réaction j'avais raison, je me défends, blessé.
- Je sais Louis, et tu n'étais peut-être pas prêt à assumer être avec un homme. Crois-moi, je comprends.
Et parce que je sais qu'il comprend vraiment, cela me rassure un peu.
- Vous en parlerez calmement quand elle voudra je suppose, ajoute mon ami. Ça peut prendre un peu de temps et on ne peut pas lui en vouloir pour ça.
- Mais je n'ai pas choisi. J'aurais aimé voir Judith comme ça - ne pas tomber amoureux d'Harry. Ça aurait été plus simple, que tout soit juste... simple.
Je lance la balle, Nick tape dedans. Je soupire et me passe une main sur le visage.
- Amoureux, carrément ? Demande Nick.
- Tu ne l'étais pas toi, de Zayn ?
- Si. Et je regrette de ne pas lui avoir dit à chaque moment qu'on a échangé.
Mon coeur se serre et je souffle. Encore.
- Tu savais qu'ils étaient amis ? Je dis. Harry et Zayn. Harry savait qu'il avait un copain, apparemment.
- Je ne savais pas le moins du monde. Je l'aurais dit, sinon.
- Ouais... Bien-sûr.
Au tour de Nick de souffler, aussi dépassé que moi je suppose. Nous n'avons pas besoin d'échanger de mot pour faire comprendre à l'autre que tout ça, ça craint. Zayn avait une place différente dans nos coeurs, mais tout aussi importante - et il est déstabilisant d'avancer dans toute cette histoire. Les choses deviennent de plus en plus clair oui, mais nous avons hâte que la partie floue qui demeure s'efface totalement.
- Qu'est-ce qu'il lui trouvait, je me demande, parle Nick qui semble réfléchir un instant. D'ailleurs, toi, qu'est-ce que tu lui trouves ?
Sans que je ne le contrôle, un petit sourire étire mes lèvres. Mon ami ne le voit pas à cause de la distance et l'obscurité, mais je sais que c'est là. Ouais, je suis définitivement le genre de mec niais. Harry rigolerait s'il pouvait me voir.
- Il est très différent de ce qu'on pensait, de ce que je pensais. Il est drôle, il est très... tendre. Je pensais au début que c'était un connard prétentieux, ça se voit qu'il est très fragile. Et pourtant il semble prendre soin des choses, des gens. Je ne sais, je me sens juste, en sécurité.
- Je vois ce que tu veux dire je crois, rétorque Nick et je jurerais entendre un petit sourire dans sa voix aussi. Zayn avait un peu cette énergie.
- Voilà, c'est ça... Je ne pouvais pas connaitre ce côté de Zayn, comme ce n'était que mon meilleur ami. Et vous vous ne pouvez pas connaître cette partie d'Harry, parce qu'il n'est... rien pour vous. J'ai découvert quelqu'un de super, de très torturé aussi, et je sais pas. J'ai envie de l'aider.
Nous aider, tous. Résoudre cette enquête, apporter la justice. Et au passage, sauver quelqu'un en plus. Si Zayn est tombé en essayant de sauver ces beaux yeux verts, je vais finir le travail.
Dans cet élan de motivation, je lance la balle à Nick qui tape dedans. Je me consacre à enchaîner les lancers pendant une minute, afin de le faire pratiquer le sport au maximum.
- Alors c'est ton premier ? Demande Nick entre deux lancers. Ton premier copain ?
- Mon premier tout. Je n'ai jamais embrassé quelqu'un avant lui.
- Et tu sais ce que tu es ?
- Tu veux dire si je suis gay ou ce genre de choses? J'interroge et Nick acquiesce. Non, je sais pas. J'aime voir des mecs, les femmes ça me fait pas ça... mais j'en sais rien. Je n'ai eu envie d'être avec personne avant lui - je sais pas. Ça a vraiment une importance ?
- Pas du tout. On s'en fout.
Ce discours autour des étiquettes qui ne sont pas nécessaire me fait du bien. Quand il vient d'Harry, de Nick aussi. Je sais que je ne suis pas du tout le seul à être passé par ce genre d'épreuves, que beaucoup dans le monde entier sont en plein dedans à ce moment précis, mais se sentir moins seul fait du bien.
- Je suis sûr que tu l'apprécierais, je souffle. Peut-être qu'après tout ça... Peut-être que vous pourrez être amis, je tente.
- Je ne sais pas. Mais qui sait. J'ai appris ces derniers temps que se faire des amis insoupçonnés ça existe.
Le sourire amical qu'il m'adresse me réchauffe le coeur, alors je lui rends.
- Tu sais, je parle. Je regrette de ne pas l'avoir fait avant.
- De quoi ? Qu'on joue au baseball en secret en pleine nuit ?
- Non, pas ça. Voir que tu es un mec bien. On aurait été un super trio, Zayn toi et moi.
Le sourire de Nick change en quelque chose de plus émotif. Je devine que cette pensée ne lui est pas désagréable, mais que le fait qu'elle n'appartient qu'à de la fiction pure doit lui faire un peu mal au coeur. Je partage cette douleur.
- Ton mec te rend chèvre, c'est clair, il rigole. Pour que tu te mettes à me faire des compliments.
- Ouais, contre toute attente il est assez romantique, je note.
- Eurk, n'abuse pas, je tolère mais ne veux rien savoir.
Je rigole et me pince les lèvres en lançant à nouveau la balle.
- Mais je n'en étais pas un, reprend le brun alors que son sourire est retombé. Je n'en étais pas spécialement un, un mec bien.
- Qu'est-ce que tu veux dire ?
- J'étais dur avec toi, avec les autres, c'était plus simple d'être le plus fort pour cacher qu'à l'intérieur j'étais différent et plus faible. J'étais pas bien, il y a quelques mois - pas un mec bien. Dans l'intimité avec Zayn oui, mais à l'extérieur, avec les autres, avec toi, non. Alors ne regrette pas de ne pas l'avoir vu avant - il n'y avait pas grand chose à voir.
J'hoche la tête, je comprends où il veut en venir et ne peut pas vraiment le contredire.
- Tout ça, poursuit-il, ça m'a changé. Mon coming-out forcé, le deuil, toute cette mission. Je ne sais pas si j'ai envie d'être content ou pas d'être devenu bien - parce que mon premier amour est mort.
Il soupire, et même s'il est à quelques mètres, je ressens l'aura de peine qu'il dégage. Ses yeux semblent même briller et mon cœur se serre à cette vue.
- Mais je sais que je suis devenu une meilleure personne, je crois... je sais pas. Et ça serait peut-être jamais arrivé sans ça - j'en sais rien.
- Ne te sens pas fautif, je rétorque. D'être devenu une meilleure personne après ce qu'il s'est passé. On n'y est pour rien dans ce qui lui est arrivé. On n'aurait pas pu prévoir, et à l'heure actuelle on peut rien faire pour changer ça. On en fait déjà beaucoup plus qu'on pourrait avec cette mission.
- Tu fais, il me corrige.
- On fait, je reprends. Sans vous, tous, je serai incapable d'avancer comme ça. Sans toi non plus. Je suis sincère, Nick.
Ce dernier hésite un instant, comme s'il avait besoin de se répéter mes mots. Lui aussi, fait preuve d'une force extraordinaire, peu reconnue.
- Quand ma mère est morte, dis-je, j'étais plus jeune mais, j'ai eu toute cette période où je me sentais mal de commencer à aller mieux à nouveau. Et c'est stupide en fait - c'est bête. Parce que la vie continue malgré tout et... c'est encore super récent pour Zayn et j'ai même pas encore réalisé, et je pense que toi non plus mais juste, ne t'en veux pas de devenir une meilleure personne maintenant qu'il n'est plus là. C'est parfois les événements les plus tragiques qui nous font nous révéler et... je crois, je sais pas - j'hausse les épaules - il t'aimait et je comprenais pas, parfois je comprends toujours pas - nous échangeons un bref rire - mais je pense qu'il le faisait parce que cette personne que tu deviens, il savait qu'elle existait quelque part. Et ça ne doit pas excuser comment tu étais avec moi, comment on se traitait mais...
À nouveau, j'hausse les épaules. Je baisse brièvement les yeux avant de les remettre dans ceux du brun.
- Je te pardonne, moi. Et je ne sais pas si ça devrait venir de moi, si ça a de l'importance si ça vient de moi - mais je le fais. Je te pardonne, et je vois le mec bien que tu es devenu.
Nick reste stoïque, dans le silence total. Je me demande au bout d'un moment si j'ai dit quelque chose qu'il ne fallait pas, si je l'ai vexé d'une quelconque manière. Il a la tête baissée vers le sol, et je ne parviens pas à lire son visage à cause de la distance et du manque de lumière. Lorsqu'il relève la tête, je peux voir que ses joues portent l'émotion.
- Ça a de l'importance venant de toi. Merci Louis.
Je lui adresse un signe de tête amical, sincère. Car c'est ce que nous sommes devenus dans toute cette tragédie, c'est ce que nous avons gagnés malgré tout - une amitié, sincère.
J'avais besoin de parler, lui aussi. Et c'est marrant de réaliser que nous sommes pour l'un et l'autre la personne vers qui nous nous tournons.
- Mais, eh, Tomlinson, reprend-il. Ne te plante pas avec Styles. N'oublie pas ce qu'il y a en jeu, ne le fais pas passer en premier quite à nous sacrifier à côté. Je veux te faire confiance là-dessus, montre-moi que j'ai raison et que tu vas mieux gérer que moi j'ai su le faire. Sinon je te botterais le cul.
Je me contente d'acquiescer, non sans lâcher un petit rire, mais ses mots s'ancrent dans mon esprit.
Nick me fait signe de lui envoyer la balle à nouveau, ce que je fais, puis il vient frapper dedans, de toutes ses forces. Je souris à cette vue. Nous avons tous les deux extériorisés ce soir.
× × ×
Le matin qui suit, je suis le premier à me réveiller pour rejoindre l'entrainement matinal que le coach a mis en place. Comme la fin de l'année permet un emploi du temps plus libre pour ceux qui sont encore en étude, il en profite pour booster la saison, et c'est normal.
Je fais le trajet avec de la musique dans mes oreilles, comme d'habitude. Je n'ai toujours pas croisé Judith, mais j'essaie de ne pas y penser. Je pense que l'on est largement capables de passer au-dessus de cette épreuve, mais pour le moment ce n'est pas le cas et cela me pèse sur le coeur. Elle aussi, j'imagine. Nick a raison, nos deux points de vue se défendent.
J'arrive à Coors Field avec un peu d'avance. J'entre par derrière dans les vestiaires, et enlève mes écouteurs.
- Salut, je lance à l'attention des joueurs déjà présents.
Le capitaine n'est pas encore là. Je vois Tommy, ainsi que d'autres joueurs à qui je ne parle pas trop. Xander est là aussi, assis sur le banc, déjà en tenue. Je trace jusqu'à mon casier où j'y dépose mon sac à dos.
J'enlève mon haut pour enfiler un vieux t-shirt, et étant donné que j'ai mis un jogging directement en partant ce matin, je suis prêt. Nous ne nous entrainons pas avec les tenues de l'équipe, pour ce genre d'entrainement. Et c'est mieux.
Je ferme le casier et regarde mon téléphone pour consulter si j'ai des nouvelles d'Harry. Rien. Il n'est pas très téléphone, à ce que j'ai remarqué. En relevant les yeux de l'écran, je vois que Xander s'est levé et s'approche de moi.
- Salut Louis, soupire t-il. Je voulais te féliciter pour ta performance, lors du dernier match.
- Me féliciter ? Je m'étonne.
- Peu importe nos différends, je sais reconnaitre quand un joueur joue bien. Alors, bravo.
L'espace d'une seconde, je reste sur la défensive, peu sûr de ma réaction. Puis face au brun qui ne bouge pas, j'acquiesce poliment.
- Merci je suppose, je rétorque.
- J'ai pas envie de te combattre à chaque fois qu'on doit s'adresser la parole.
- Moi non plus Xander. Je n'ai rien contre toi, en soit.
Car là aussi, si on prend un peu de recul, on comprend nos deux points de vue. Il a ressenti de la jalousie quand j'ai débarqué, et dans la finalité, c'était justifié. Il a eu peur de mes intentions - peur également compréhensible.
Mais lui aussi, veut aider Harry, dans l'ombre. Comme moi. Alors, peut-être que j'ai été un peu dur avec lui. Même si je ne le porte tout de même pas dans mon coeur, et je ne pense pas que cela changera vraiment.
- Je voulais juste te féliciter, dit-il. Rien de plus.
- Alors merci. J'apprécie.
Dans mon ton, j'essaie de lui faire percevoir ma sincérité. Il m'adresse un signe de tête et repart avec les joueurs plus loin. Notre conversation n'avait pas de raison d'aller plus loin.
Quelques secondes après, la porte du vestiaire s'ouvre et je me tourne directement pour voir si ce n'est pas Harry. Je vois d'abord Liam, mais ensuite suivi du bouclé. Un petit sourire timide prend place sur mon visage. Il est absolument banal, dans son survêtement gris, avec sa veste sur l'épaule et sa casquette qu'il retire dès qu'il entre. Il a l'air si sérieux aussi, mais il m'adresse également un sourire quand il me voit et mon coeur réagit à cela.
Directement, Liam va vers son casier et Harry vient vers moi.
- Hey, dit-il doucement. Tu es arrivé il y a longtemps ?
- Il y a cinq minutes. Je me suis juste changé, j'explique. Est-ce qu'on s'embrasse pour se dire bonjour ici ? J'ajoute plus bas.
- Bien-sûr. Je me fiche de ce qu'ils pensent.
Se faisant, je me dresse pour combler les petits centimètres qui nous séparent et lui vole un bécot. C'est bref, vraiment un signe de salutations pur mais j'apprécie que nous le fassions. Ce n'est qu'un espace clos, et personne ne nous regarde, mais c'est déjà très bien pour moi. J'ai besoin de ces petites choses, pour prendre confiance en moi et en notre relation je pense.
Bien que j'y crois déjà beaucoup. Bien que je me suis déjà bien battu pour celle-ci. Le bouclé ne le sait pas, mais j'y ai déjà mis beaucoup d'énergie, et continuerais sur cette voie.
Harry ouvre son casier et y dépose son sac. Je l'observe faire, être. Lorsqu'il a fini, il se retourne vers moi :
- Tu as pu parler à Judith ?
- Non. Elle n'est pas rentrée hier soir.
Il acquiesce avant de poursuivre :
- Tu veux qu'on se voit bientôt ?
- Ce soir, je vais manger chez moi au moins. Avec mes proches. Ça risque d'être ambiance glaciale mais, je veux essayer. Je passe beaucoup moins de temps avec eux, ça doit jouer avec la mauvaise réaction qu'elle a eu.
- C'est parce que tu es fan de moi ça, il sourit.
- Il faut croire, je réponds timide, mais sincère.
Harry s'appuie contre les casiers sur son épaule, et passe un bras autour de ma taille. Je trouve sa confiance fascinante. Lui qui s'assume à 100%, mais qui est à la fois si secret, si caché. Harry n'est qu'un monde entier de différentes dualités.
- Xander est venu me voir, je dis. Pour me féliciter pour mon match.
- Vraiment ? S'étonne le bouclé.
- Oui. J'étais étonné aussi.
- C'est gentil de sa part.
- Hm-hm. Dans la finalité, il n'est peut-être pas si mal, je soupire. Ton ex réagit mieux à notre relation que la mienne en tout cas.
Je pouffe ironiquement et Harry sourit.
- Ça lui passera Louis, me rassure t-il tout de même. Pas en un jour, c'est clair. Mais elle s'y fera.
- Je sais...
- Et si elle ne s'y fait pas, tu ne dois pas t'empêcher de vivre.
Pensif, je me mordille la lèvre. Je n'ai vraiment pas envie de m'imaginer un tel scénario où je perdrais Judith pour toujours parce qu'elle n'accepte pas ma relation. Mais en même temps - est-ce réellement impensable ?
Je balaie ses pensées en me concentrant sur les yeux passionnés qui se trouvent devant moi.
- Je n'ai pas envie de parler de ça, je souris. Tu as fait quoi hier ?
- Liam était chez moi. Il m'attendait, dans l'obscurité, c'était flippant.
- Ce n'était pas comme ça, intervient le brun plus loin.
- Et en plus tu écoutes aux portes ! Rit Harry. Tu es flippant.
Liam et Harry échangent un rire, que je rejoins.
- Tu as passé une bonne soirée alors ? Je souris.
- C'était super oui. Liam m'a dit qu'il aurait aimé que tu sois là, en fait. Pour se faire une soirée bière et piscine.
- C'est une bonne idée. On devrait s'organiser ça.
- Je suis pour ! Rajoute Liam.
- Si ça se passe mal ton repas, tu me dis, dit doucement le bouclé pour que la conversation n'appartienne qu'à nous. Je viendrais te chercher.
- T'en fais pas, je souris. Par contre, je suis pour le fait que tu viennes me chercher en voiture demain.
- En tant que capitaine, je dois te dire que faire un footing pour venir jusqu'à chez moi serait bon pour ton endurance.
Je me mords la lèvre et rétorque en parlant tout doucement :
- On peut entrainer mon endurance autrement, tu sais.
Mon coeur s'accélère en disant cela, car je ne suis clairement pas habitué à aller sur ce terrain-là. Mais les yeux d'Harry changent, je peux direct y lire du désir et il faut reconnaitre que cela booste mon égo. Et me donne des envies, aussi. Mes hormones sont un peu en bordel ces derniers temps.
- Je serai là demain matin à huit heure pétante, dit-il sérieux.
- Non, je rétorque en rigolant. Disons midi. On mangera ensemble, ça te va ?
- Tu parles de nourriture, là ?
- J'ai entendu ça mon pote, grimace Liam.
- Ça t'apprendra à écouter, rétorque le bouclé.
Les amis échangent un nouveau rire.
- On pourrait le faire ce week-end ? Je propose. Vendredi soir. Se voir tous les trois, chez toi.
- Bonne idée, sourit Harry avant de se tourner vers Liam. T'es partant ?
- Pour ?
- Fais pas genre que t'as pas écouté, il rigole.
- Ouais, je suis partant, sourit Liam, enfin en tenue de sport.
Je souris à Harry comme pour lui dire que ouais, même si c'est banal, j'ai hâte. Les moments les plus banals entre nous sont les meilleurs je crois.
Les vestiaires se remplissent petit à petit jusqu'à ce que le coach entre, et nous fasse un débrief habituel. Harry se recule de moi et prend place à ses côtés, endossant ainsi le rôle de capitaine qu'il prend très au sérieux. Dans ces moments-là, il ne fait aucune différence et j'avoue que même si j'aime notre lien, j'aime aussi cette partie du travail. Nous partageons une histoire personnelle, mais professionnelle aussi. Les enjeux sont différents, mais tout aussi importants.
Et ainsi, nous prenons place sur le terrain pour démarrer un entrainement intensif.
*
PARTIE 3 : Tension partie 2
MIKE
Je termine d'aider à mettre la table et sourit à cette vue. Sans tarder, nous nous installons tous à nos places. Je suis entre Andrea et Niall, ce dernier est à côté de Judith, elle-même à côté du duo d'Ernie et Todd. Louis et Nick sont face à moi, côte à côte.
- J'ai l'impression que ça fait des lustres qu'on n'a pas mangé ensemble comme ça, sourit Andrea.
- Ça fait des lustres, appuie Ernie. Vous m'avez manqué ! Vous avoir tous autour de la table à déguster ma bonne cuisine.
- On sait pourquoi, souffle ma fille.
Je me pince les lèvres en comprenant le pic dirigé à Louis. Ce dernier se contente de l'ignorer même si je remarque bien qu'il n'est pas des plus à l'aise, ses bras croisés sur le bois de la table.
- Moi ça me fait plaisir, ajoute Ernie. Je n'ai pas cuisiné pour tout le monde depuis si longtemps.
- On faisait au moins des économies de nourriture, appuie ma fille en fixant le châtain.
- Allons Judith, j'interviens. On ne va quand même parler de ça tout le repas.
- Ouais, parle Louis. C'est vraiment pas le sujet là.
- Je trouve que c'est plutôt le sujet actuel, enchérit ma fille.
Je soupire tandis qu'Ernie se lève afin d'aller chercher un grand plateau qui contient le diner.
- Ça sent bon, je souris. Laisse-moi deviner - hawaïen ?
- Non, rétorque l'homme en posant au centre de la table. La gloire de notre très chère Amérique pour aujourd'hui. Burger maison !
Todd et Andrea expriment leur joie en imitant une espèce de cri de pom-pom girls et cela me fait sourire.
- Pas très bon pour ma ligne ça, pouffe ma fille.
- Arrête de te plaindre, souffle Nick.
- Tu es très bien comme tu es Judith, parle Niall.
Ernie nous sert chacun un burger, et je ne pense même pas que je serai capable de le finir. Il y a au moins trois steaks là-dedans, plus de fromage qu'en France, du bacon, des oignons, de salade, des tomates, de la sauce à ne plus en pouvoir. Le cliché à l'américaine, oui.
Il a tout de même préparé une salade à côté. Judith en prend beaucoup non sans remercier Niall pour le compliment.
- Bon appétit, sourit Andrea.
- Bon appétit, répond Louis poliment.
- Comment s'est passé votre journée ? S'intéresse Todd.
- C'était calme, répond Nick après sa première bouchée. J'ai fait un peu de sport avec Ernie ce matin, dans le jardin. Et j'ai trié mes mails, vérifié que je n'avais pas encore reçu mes réponses pour la fac.
- C'est vrai que ça approche, je note. On devra fêter ça.
Nick aquiesce.
- Et toi Louis ? Reprend Todd.
- Je me suis levé tôt, pour aller à l'entrainement. J'y ai vu Xander, on a un peu discuté... Mais j'ai fait que ça, c'était entrainement toute la journée. J'étais avec Liam, Harry. Comme d'habitude.
- C'est cool, sourit Andrea.
- C'est hypocrite de dire ça, intervient Judith. Je t'adore Andrea, rien contre toi mais - depuis quand c'est cool que Louis passe du temps avec Harry ?
Les yeux de l'adolescent change, je vois qu'il est agacé, probablement énervé. Je soupire en reposant le burger dans mon assiette et m'essuie les doigts. Cette ambiance bien étrange me coupe presque l'appétit.
- Tes remarques commencent à être chiantes, rétorque Louis.
- Je dis juste tout haut ce que tout le monde pense tout bas.
- Je pense pas moi. Que tu sois contre, d'accord - mais c'est quoi le problème ? Que je sorte avec un mec ?
- Les enfants, je tente.
- Je me fiche que ce soit un mec, se défend Judith.
- Pourtant je suis persuadé que si c'était avec une fille lambda du lycée j'aurais pas le droit à ça !
- Bien-sûr que non, s'outre ma fille. Parce qu'avec lui c'est différent.
- Si tu veux mon avis, ça ressemble à de l'homophobie, s'emporte Louis.
- Les enfants, je tente à nouveau, en vain.
- Je ne suis pas homophobe ! Souffle Judith, désemparée. Sérieusement, je suis amie avec Nick !
- Alors, parle ce dernier, je suis neutre dans ce débat mais utiliser l'excuse de l'ami gay, ça sert pas ta cause Judith.
Ma fille souffle et se passe une main sur son visage. Elle a vraiment l'air désemparée, dépassée par des émotions qu'elle gère mal. C'est la première fois que je la vois perdre le contrôle ainsi, et il est impossible de lui en vouloir, de ne pas me sentir désolé pour elle. Elle aurait dû le perdre il y a longtemps le contrôle, en portant une telle pression sur les épaules.
- Vous abusez, souffle Niall. On n'a aucune raison de se gâcher le diner comme ça.
- Surtout que j'ai cuisiné, couine Ernie en croquant encore dans son burger.
- On a juste qu'à pas en parler, suggère Andrea. On parle pas de vie perso.
- Alors on parle de quoi ? Tente Todd. On a dit qu'on parlait pas de travail à table, maintenant on parle pas de vie perso...
- C'est juste ma vie perso qui dérange, soupire Louis. Vous privez pas de parler de la vôtre.
- C'est pas comme ça Louis, je tente.
- C'est exactement comme ça. Si j'ai le malheur de dire que, je sais pas - on a prévu de se voir demain, qu'il va venir me chercher et qu'on va manger tous les deux, vous allez vous étouffer en mangeant et Judith va me lancer un sort avec ses yeux démoniaques.
Louis soupire pour marquer ses mots et passe une main dans ses cheveux. Je tourne le regard vers Judith, penaude.
- Je vais aller me doucher, et me mettre dans ma chambre, dit-il en se levant. Je vous laisse continuer à manger dans le calme et la bonne humeur.
- Tu n'as pas fini de manger, note Ernie.
- Je sais, et désolé, c'est très bon. Mais j'ai pas trop la tête à rester ici avec tout le monde.
- C'est notre moment convivial... boude Andrea, attristée.
- Là il n'a rien de convivial, intervient Todd.
Tous les regards se braquent vers lui et il arque les sourcils avant de reprendre :
- Quoi ? J'ai raison, non ?
Notre silence collectif lui montre que, oui. Je souffle et lève les yeux vers Louis. J'essaie de lui montrer ma compassion, des excuses aussi. Son petit sourire timide me fait comprendre qu'il saisit, et ne m'en veut pas.
- Bonne nuit, ajoute Louis.
Puis, il rejoint l'escalier avant de partir s'enfermer dans sa chambre. Il se passe quelques secondes assez pesantes.
- Désolée, parle finalement Judith.
- Peu importe, je soupire. Vous règlerez ça plus tard. Mangeons sans problème maintenant.
De toute évidence, la suite du repas est tout aussi glaciale.
× × ×
Après notre diner des plus particuliers, le calme s'installe sur la maison. Todd et Ernie se mettent un feuilleton dans le salon, tandis que Judith et Nick partent dans leur chambre respectifs, ensuite imités par Niall, et Andrea qui part dans la nôtre. Je m'apprête à rejoindre la jeune femme quand je m'arrête dans le couloir.
Je souffle et, doucement, toque à la porte de chambre de Louis. Je me permets d'entrer après qu'il m'ait donné l'autorisation.
Je ferme la porte derrière moi, et m'avance jusqu'à son lit, où il est allongé, encore tout habillé, son écran d'ordinateur à côté de lui.
- Tu fais quoi ? Je demande, peu à l'aise.
- Je regardais un film. Harry me l'a conseillé. Enfin, si j'ai le droit de parler de ça sans me faire plonger dans l'acide.
Louis soupire et se redresse, venant coller son dos contre le mur à côté de son lit, sans me quitter du regard. Je me pince les lèvres et acquiesce doucement.
- Je peux ? Je demande en montrant une place libre sur son lit.
Alors qu'il me donne l'autorisation, je m'installe à côté de lui. Je laisse mes avant-bras appuyés sur mes cuisses, ma tête tournée vers le jeune. Même s'il ne le dit pas, je sais qu'il se demande clairement ce que je fais là.
- Je voulais m'excuser pour tout à l'heure, je dis.
- Ce n'est pas ta faute.
- C'est ma fille.
- Tu n'es pas responsable de ce qu'elle fait. De ce qu'elle dit.
- Elle n'est pas homophobe, je tente. On ne l'est pas, chez nous.
- Je sais, je sais, souffle Louis. Je sais que c'est autre chose, et c'est juste si énervant parce que je peux pas lui en vouloir. Et j'ai un peu de chance, en fait. Il n'y a qu'elle qui le prend vraiment mal alors que ça aurait pu être possible que personne ici n'accepte que je sois avec lui, et ça aurait été la vraie guerre.
Et dit comme ça, je me rends compte à quel point c'aurait été dur et invivable pour lui. A quel point c'aurait été dur, de le juger et le faire payer simplement parce qu'il a développé des sentiments incontrôlés. Je ne perds pas de vue le fait que cela peut nous apporter du négatif, mais je ne vois pas ça non plus comme la source ultime de nos problèmes. Et j'espère que Judith verra rapidement de cet oeil également.
- Ça lui passera, je dis.
- Je sais.
- Il ne faut pas que tu t'en fasses.
- Je sais.
J'hoche la tête, me pince les lèvres. J'ai fait des efforts, mais de toute évidence, je suis toujours aussi terrible pour rassurer. Pendant quelques secondes, un silence dure. Louis joue nerveusement avec ses écouteurs, ses yeux rivés sur les fils qu'il tord.
- Je n'ai pas trop eu l'occasion de te le dire mais... je me racle la gorge. Tu assures Louis.
Ce dernier relève les yeux vers moi. D'abord, il semble peu convaincu de ce que j'avance, moi-même maladroit dans mon intonation.
- Je ne suis pas habitué à faire ça, à dire aux gens qu'ils assurent mais il faut que tu saches que tu le fais, je reprends avec plus d'assurance. Beaucoup de gens gèreraient très mal cette situation. Tu gères très bien.
- Je suis quand même en couple avec celui que j'étais censé envoyer en prison, il rit jaune.
- Nietzsche a dit qu'il faut d'abord commencer par s'haïr, pour bien s'aimer.
Puis quelque chose change dans ses iris, comme une lueur qui lui fait du bien apparait. Il a l'air si fragile, ici, dans cette chambre lui étant attitré - il est peut-être très courageux à l'extérieur, mais le voyant ainsi, il est impossible de perdre de vue que ça ne reste qu'un gosse. Sur qui beaucoup de choses sont tombées.
- Tu essaierais pas de me dire genre, que tu es fier de moi ? Me taquine Louis.
- N'abuse pas, je rigole doucement.
Le rire que nous échangeons est léger, agréable.
- Mais tu peux l'être de toi en tout cas, j'ajoute. Ton père devrait te le dire, je le comprends maintenant. À la place, je te le dis. Tu peux être fier de toi.
- Je fais juste de mon mieux.
- Mais tu le fais bien. On avance dans l'enquête, même si ça prend des directions inattendues. Même si tout ça, c'était pas prévu, tu peux être fier de toi. Sois le, de toi-même, c'est le plus important.
Louis baisse de nouveau les yeux vers ses écouteurs, mais un petit sourire est visible sur le coin de ses lèvres. Son coeur semble un peu réchauffé pour ce soir, et le mien aussi.
- T'es pas si mal tu sais, il rétorque enfin, timide.
J'arque un sourcil mais avant que je lui demande de quoi il parle, il poursuit :
- En tant que père de substitution. T'es vraiment pas mal.
- Je fais de mon mieux.
- Et tu le fais bien, il fait écho à mes mots.
À mon tour de laisser un sourire attendri s'installer sur mon visage. Je lève le bras et sans avoir besoin de parler davantage, Louis vient me serrer dans les siens. Il en a bien besoin, je n'ose pas m'avouer que moi également.
Son père est absent, et même si je ne prétends aucunement le remplacer, je suis heureux si je peux lui apporter cette présence paternelle dont il a besoin ces derniers temps.
Cette présence paternelle que j'apprends finalement, que je redécouvre, apprivoise.
Et peut-être que moi aussi, je m'autorise à être un peu fier de moi.
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Réagissez avec #BornTDieFic
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Bonsoir, j'espère que ce chapitre vous a plu.
Principalement concentré sur ce qu'il se passe dans la maison ou dans la tête des personnages.
Nick a plutôt bien réagi, vous vous y attendiez ?
Même si de toute évidence ça ne veut pas dire que tout va être rose et lisse pour la suite pour la relation Larry...
Je me demandais mais : quelle est votre amitié préférée dans l'histoire ? Et pourquoi ?
Merci pour vos commentaires que je déguste ❤️
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