7 - Education sentimentale


J'émerge de mon inconscience lorsque je me sens chuter. Mes fesses atterrissent doucement sur quelque chose de dur, et j'entrouvre les yeux. En face de moi, je retrouve les prunelles adoucies et les traits fins d'Izuku, et cette vue m'arrache un petit sourire. Il m'annonce que l'on est arrivés, je lui donne les clés et on entre dans mon domicile vide. Je perçois l'angoisse qui arrive lentement à l'horizon, j'essaie de la bloquer au niveau de mon estomac mais elle arrive à escalader mon œsophage. Il est avec moi, cette nuit. C'est tellement génial, et angoissant, et terrifiant. Et si je parle pendant mon sommeil ? Et si je lâche un énorme pet et que ça le réveille ? Pire encore : si je bave ? Il m'observe me triturer les doigts en souriant.

« À quoi tu penses, Todoroki ? »

Je me retourne vers lui. Je ne peux pas lui dire que j'angoisse par rapport à cette nuit – il va me prendre pour un pervers. Je ne peux pas lui dire que j'ai peur de péter ou de baver dans mon sommeil. Je vais essayer de dévier le sujet tant bien que mal. Je lui lance un petit sourire, et lui rétorque :

« Tu m'appelles Todoroki maintenant ? »

Son visage prend la teinte d'une pivoine, et il balbutie quelques mots incompréhensibles. Mon cœur entame un concert de hard rock – il est tellement adorable lorsqu'il est troublé... Il baisse la tête, probablement dans l'optique de camoufler ses joues rouges et ses yeux gênés. Il ne sait pas quoi répondre, je suppose qu'au moment où il a prononcé mon prénom, il n'avait pas pensé que cela me marquerait. Je lui ébouriffe les cheveux, et me dirige vers la cuisine. Je ne sais même pas ce qu'il aime manger, ou ce qu'il reste dans mon frigo. Je ne mange presque jamais quand je suis ici...

« Tu as des allergies particulières ou j'ai le champ libre ?

- Pas du tout, fais ce que tu veux ! »

Je pousse un petit soupir. A-t-il conscience que je suis aussi compétent en cuisine que Katsuki ne l'est en diplomatie ? Il ne me reste que des pâtes. Je me sens un peu ridicule, et je ne sais absolument pas quoi faire. Je relève la tête et le vois m'observer, un petit rictus décorant fièrement son visage fin.

« Ne me dites pas que le grand Shouto Todoroki ne sait pas faire cuire des pâtes ? »

Sa remarque me déstabilise, et je lui lance un regard vexé. Puis, faisant semblant de bouder, je croise mes bras, lui tourne le dos et grogne dans mon coin. Je l'entends rire derrière moi, et le son de sa voix amusée fait écho aux battements désorganisés de mon cœur. J'adore sa voix. J'adore son rire.

Il passe devant moi en me riant au nez, et m'explique que pour faire cuire des pâtes, c'est plus pratique avec une casserole. Je lui en donne une, toujours en gardant mon éternel air boudeur, et il met de l'eau dedans qu'il met sur le feu. En attendant que celle-ci n'entre en ébullition, il s'appuie sur le plan de travail et me regarde avec malice.

Qui a fait de ce jeune homme quelqu'un d'aussi sexy ? Non mais parce que ça devrait être interdit de l'être à ce point...

Alors que je me perds à la contemplation de ses yeux verts, une myriade de questions vient perturber mes songes. Que suis-je pour lui, en définitive ? Il ne m'a pas dit clairement qu'il m'aimait, lui. Il l'a sous-entendu, mais pas affirmé, comme je l'ai fait. Par conséquent, je ne sais pas si j'ai le droit de le rejoindre contre le plan de travail et de l'embrasser comme j'en rêve depuis des mois. Ai-je le droit de l'enlacer à l'en étouffer, de le garder contre moi pour l'éternité ? Dois-je l'appeler Midoriya, ou Izuku ? Puis-je lui caresser le visage en passant, ou juste l'effleurer ? Je l'observe prendre le paquet de pâtes et en verser dans l'eau bouillante, puis il me sourit d'un air victorieux.

« C'est pas si compliqué, tu vois ! »

Je lui lance un petit sourire qui ne fait qu'illuminer le précédent. Ce garçon va faire exploser mon cœur, un jour. Je ne trouve pas le courage de lui parler de la pléthore d'interrogations incessantes qui m'inonde depuis tout à l'heure. Rien que de m'imaginer me rapprocher de lui pour lui voler un baiser met mon cœur dans un état de panique totale. Mais sentir ses lèvres contre les miennes, mince, ça doit être tellement agréable...

Je pense qu'il a deviné mon trouble, et l'on se fixe de longues minutes, face à face, avec seulement le bruit des pâtes dans l'eau qui vient briser le silence qui nous entoure. La seule chose qui m'empêche de franchir la distance qui nous sépare, c'est bel et bien son silence à lui. Car concrètement, il ne m'a pas dit les mots que je rêve d'entendre. Il ne m'a pas très clairement dit qu'il m'aimait. Ainsi, même si je pense avoir compris que c'est réciproque, cette incertitude survit encore et toujours, et me bouffe insidieusement. Je me gratte nerveusement la nuque, et lorsqu'il baisse les yeux sur mon poignet décoré de fils noirs, son regard s'assombrit.

Je crois avoir entendu mon cœur se déchirer lentement. Ce son aiguë et désagréable d'un tissu qui lentement se scinde en deux résonne dans mes oreilles, et la douleur apparaît. Elle se propage le long de mes côtes et après avoir vaincu mon cœur, prend en otage mes poumons comprimés par mon thorax. Mon souffle se coupe, j'ai mal et j'ai l'impression qu'elle a retourné mon estomac par la même occasion. Ses petits yeux tristes me tordent les entrailles et me donnent envie de le prendre dans mes bras, de caresser sa petite tête et de rester contre lui, de lui faire oublier cette journée épouvantable.

J'essaie de rassembler le peu de courage qu'il me reste et me dirige vers lui, alors que ses yeux fixent toujours le vide. Ou plutôt le néant, tant son désespoir est visible sur ses traits fatigués. Je m'arrête devant lui, à quelques centimètres de son torse, et il redresse son regard vers le mien – il a l'air surpris, c'est comme si pendant quelques secondes il n'avait pas été là et qu'il ne m'avait pas vu me mouvoir. Je me trouve un peu stupide, à me tenir devant lui sans rien faire. Je suis un peu troublé aussi – déjà qu'il me déstabilise à trois cents mètres, alors à quelques centimètres de moi.... J'essaie de ne pas lui faire voir à quel point il me bouleverse, et je pose ma main sur sa joue doucement, appréhendant probablement un refus de sa part. Mais il n'en est rien, et il presse sa joue contre ma main comme le ferait un chat en manque de caresses. Face à sa réaction, je lui lance un sourire.

« Ne sois pas triste par ma faute, s'il-te-plaît...

- Désolé, je n'ai pas pu m'empêcher d'y penser... »

Je lui caresse la joue avec mon pouce. Sa peau est incroyablement douce, encore plus que dans mes rêves ou dans mon imagination. Je pensais que ses tâches de rousseur changeraient la texture de celle-ci, mais pas du tout. Je ne peux pas me détacher de ses prunelles vertes qui me fixent et qui m'hypnotisent – il est proche, si proche de moi. Je sens sa respiration contre mes lèvres – et j'ai tellement envie de l'embrasser que mes propres lèvres me brûlent. Son regard d'abord troublé, puis énivré, bouscule mon cœur dans ma poitrine et je suis persuadé qu'il a changé de place dans mon anatomie tant il bat vite. Je ne serais pas étonné de le retrouver à droite plutôt qu'à gauche. La crainte qu'il n'entende mes battements cardiaques incessants me saisit. Inconsciemment, je me suis rapproché un peu plus de lui – si bien qu'à présent, il est contre le plan de travail, et je suis presque contre lui.

Son visage dégage tellement de chaleur que j'ai l'impression qu'il va faire fondre ma main. Il pose la sienne derrière ma nuque et caresse ma peau avec le dos de sa main, et un long frisson vient parcourir ma colonne vertébrale, vertèbre après vertèbre.

« Shouto... »

Il plante son regard fébrile dans le mien, et mes entrailles se tordent sous l'angoisse. Que suis-je sensé faire ? L'embrasser ou le faire languir ? Rah, pourquoi n'y-a-t-il pas de manuel qui nous dise quoi faire dans ces cas là ? Sa voix est fluette et hésitante, mais terriblement douce et attirante.

« Les pâtes vont être trop cuites... »

Je me sens bête. Je m'écarte en balbutiant, rouge comme mes cheveux. J'aimerais me cacher sous la table et ne jamais réapparaître. Ma réaction provoque l'un de ses doux rires qui bercent mes oreilles de délicieuses illusions, et mon cœur d'une joie palpable. Il vide la casserole pour enlever l'excès d'eau, et on commence à manger. Je ne quitte pas des yeux ces trucs jaunes qui reposent dans mon assiette, ayant trop honte pour jeter un seul regard à l'homme en face de moi, qui déguste son repas comme s'il ne s'était rien passé.

Après avoir enfin avalé le contenu de mon assiette, je commence à débarrasser en silence. Il m'observe faire la navette entre la table et mon évier, et j'essaie de ne pas croiser son regard. Mon angoisse me tord les tripes. Va-t-il vouloir dormir avec moi ? Ou préfère-t-il le canapé ? Va-t-il vouloir me faire un câlin ou dormir dos à moi ?

« Shouto ? »

Je me fige dans mes actions, et me retourne lentement vers lui. Assis sur une chaise, il m'observe d'un air serein.

« Oui ?

- Je veux un câlin. »

Sa demande fige mon cœur pendant deux secondes, puis le lance dans un sprint endiablé. Il me fixe, guettant avidement les rougeurs qui s'installent peu à peu sur mon visage. Comment ça, il veut un câlin ? Mais je sais pas faire moi... Il étudie ma gêne comme si j'étais un animal rare, je crois qu'il ne comprend pas pourquoi j'hésite.

« Ehm... Comment dire... Montre-moi...

- Te montrer quoi ? Comment faire un câlin ? »

Il étouffe un rire face à ma demande plus qu'inconventionnelle, et je détourne le regard en marmonnant. Il se lève, s'approche et s'arrête devant moi en souriant.

« C'est simple, il te suffit de m'entourer de tes bras et de me serrer contre toi... »

Il s'exécute pendant la description qu'il m'énonce, collant son torse contre le mien. Je me fige en sentant toute la chaleur qu'il dégage. Ses bras viennent entourer ma taille, il pose son visage contre mes clavicules. Je peux sentir l'odeur d'amande que dégagent ses cheveux, et je pose doucement mes bras contre son dos. Mon cœur bat beaucoup trop vite – c'est sûr, il va l'entendre vu où est son visage ! Je me permets de glisser ma main dans ses cheveux, qui sont aussi doux que je l'avais imaginé... Je sens sa poitrine se soulever à cause de son souffle, et je pose mon front sur son cuir chevelu.

« Tu vois ? C'est simple non ? »

Un petit sourire se dessine sur mon visage. On reste longtemps comme ça, je ne pensais pas que sa chaleur serait aussi agréable à sentir. Il pourrait faire ce qu'il veut de moi. Il pourrait me planter une lame en plein cœur. Il pourrait me tuer. Je trouve ça incroyable de faire confiance à ce point en une personne. Il a confiance en moi. Je pourrais lui trancher la gorge, lui tirer les cheveux, le brûler, le geler pour le garder avec moi pour toujours. Mais il me fait aveuglément confiance. Je ne peux pas m'empêcher de sourire bêtement à cette pensée.

Au bout de quelques minutes, il s'écarte de moi et je sens un grand vide entre mes bras. Je n'irai pas jusqu'à dire que j'ai froid, mais c'est à peu près l'impression que je ressens actuellement. Reviens, j'ai froid sans tes bras...

« C'est l'heure d'aller au lit ! Même s'il est tôt, je sais que je ne pourrai pas m'empêcher de parler, alors il vaut mieux y aller tout de suite. »

Il me lance ce sourire qui me fait craquer et qui emballe mon petit cœur déjà bien trop rapide.

« Tu dors avec moi.. ? »

Ma question le fait rougir, alors que je l'observe avec appréhension. Il semble un peu troublé, puis un petit sourire se dessine sur ses traits juvéniles. Il se gratte nerveusement le dos de son crâne, un petit rire s'échappe de sa gorge. Il est tellement mignon lorsque je lui fais cet effet là. J'ai envie de le câliner pendant des heures lorsqu'il me fait une tête comme celle-ci...

« Bien sûr ! Sinon je ne pourrai pas te protéger du monstre qu'il y a sous ton lit ! »

J'effectue un mouvement de recul, et je le regarde avec aberration. Quoi ? Comment ça il y a un monstre sous mon lit ? Lorsqu'il explose de rire en voyant ma réaction, je comprends qu'il plaisantait, et je me détends en esquissant un petit rictus. Il saisit la manche de mon haut et m'entraîne dans le couloir, toujours en riant aux éclats. J'adore le son de son rire, il remplit mon cœur d'un sentiment que je ne connaissais pas auparavant... Cela le gonfle d'une grande chaleur. Peut-être que c'est ça, le bonheur ?

Il enlève ses chaussures et saute sur mon lit avec entrain. Je le regarde, amusé, se rouler sur mes draps comme un chaton ayant envie de jouer. Il me fait signe de venir s'allonger avec lui, j'ôte à mon tour mes chaussures pour le rejoindre. Je me retrouve face à sa moue joueuse, alors que mes cheveux blancs viennent me chatouiller les tempes. Il porte sa main à ma joue et effleure ma cicatrice qui me balafre la moitié de mon côté gauche. Je baisse les yeux. Parfois, je l'oublie vu que je ne peux pas la voir.

« Tu n'as pas à avoir honte de tes cicatrices, tu sais... »

Je plante mes yeux étonnés dans son regard attendri. Avec son autre main, il retrouve la mienne et joue avec mes doigts.

« Je trouve qu'elles te donnent un petit air de guerrier. Et puis, c'est comme si ton corps avait écrit ton histoire sur ta peau, je trouve ça assez poétique... »

Je lui lance un sourire triste.

« J'aimerais bien l'oublier moi.

- C'est ton passé, Shouto. C'est ce qui a fait de toi ce que tu es aujourd'hui. Quelqu'un de formidable, de fort, de courageux. »

Je me sens étrangement triste face à ses paroles. Elles me semblent venir d'un autre monde, tant elles sonnent étranges à mes oreilles. Je ne me reconnais pas le moins du monde lorsqu'il me décrit de cette façon.

« Tu penses probablement à quelqu'un d'autre. Ce n'est pas moi.

- Tu as une vision tellement négative de toi-même que tu ne sais même plus ce que tu es, Shouto. »

J'ai l'impression d'avoir pris une gifle tant sa dernière phrase me laisse sans voix. Je ne sais pas quoi lui répondre, je ne sais même pas s'il exagère ou si j'ai réellement cette vision biaisée. Au fond, que suis-je ? Et si le monstre n'en était pas vraiment un ?

« Mais même si ce n'était pas le cas, je trouve cela tout sauf poétique... Je trouve ça écœurant, repoussant, et ça me rend encore plus inhumain.

- Tu es tout, sauf écœurant, repoussant et inhumain. Au contraire, ça te rend tellement plus humain... C'est la preuve de ta puissance, de ta force. Tu as survécu, et tu devrais en être fier.

- Je n'ai pas à être fier d'avoir subi.

- Non, mais combien auraient survécu à ta place ? Bien peu, j'en ai peur. »

Je détourne mes yeux de son regard. Je ne veux pas l'écouter, parce que je sais qu'il a raison. Mais même en sachant cela, je ne peux pas m'empêcher de les trouver affreusement laides. Il me caresse la joue, me lance un petit sourire et se lève. Je le regarde se redresser, puis, sans crier gare, il ôte son haut devant moi. Mon souffle se coupe sous la surprise, et je crois que jamais je n'ai été aussi rouge. J'ai très chaud, et je suis incapable de le quitter des yeux. Il se retourne vers moi avec un petit sourire, je crois apercevoir une once de sadisme dans son regard.

« Il faut bien que je me mette en pyjama ! Tu devrais faire de même. »

Je commence à paniquer. Il voudrait que je me déshabille, devant lui ? Et lui exposer tout ce dont j'ai de plus horrible ? J'essaie de contrôler ma respiration afin qu'elle soit la plus calme possible. Il faut que je me contrôle, je ne veux pas encore lui gâcher la journée avec une énième crise d'angoisse. Il enfile un short. Il se retourne vers moi et me lance un regard interrogatif lorsqu'il remarque que je n'ai esquissé aucun geste.

« Je ne crois pas que ce soit une bonne idée... Je vais me changer dans la salle de bain... »

Il fronce les sourcils, et me regarde comme si je venais de prêter allégeance à Satan.

« Je ne vais pas te manger tu sais... Mais c'est comme tu veux... »

Je lui lance un petit sourire et je me lève pour aller dans la salle de bain. Il m'attrape l'avant-bras, je me retourne vers lui en lui lançant un regard interrogatif. Il me sourit et se rapproche de moi doucement. Ne me dites pas qu'il veut m'aider à me déshabiller ? Ses doigts viennent s'accrocher aux miens, et il pose ses lèvres sur ma joue. Puis, il s'écarte en me souriant, me laissant tout rouge devant la porte. J'entends son rire cristallin lorsqu'il remarque à quel point je suis troublé, puis je m'enfuis dans la salle de bain.

Pourquoi est-il si adorable ? Il va faire disjoncter mon cœur.

Je me change rapidement, en faisant attention à ne pas regarder le miroir dos à moi. J'enfile un large t-shirt de sport et un jogging chaud, puis je reviens dans ma chambre. La première chose que je vois, c'est la touffe de cheveux de Izuku qui dépasse de mes draps – et cette vue m'arrache un grand sourire. Si, il y a quelques jours, vous me disiez qu'il serait torse nu dans mon lit, je pense que j'aurais ris aux éclats tant cela me semblait impossible.

Et pourtant...

Je me glisse sous la couette avec lui, le lit est déjà chaud. Il se retourne vers moi et se blottit contre moi, mon cœur explose dans ma poitrine alors que mes doigts viennent jouer avec les mèches sombres de sa chevelure. Sa chaleur corporelle me réchauffe instantanément, je me sens tellement bien... Pour la première fois de ma vie, j'ai l'impression d'être intouchable. Là, lorsqu'il se blottit contre moi, j'ai l'impression que tous mes maux sont enfermés dehors, avec toute la souffrance du monde, et que plus rien ne peut m'affecter. Il n'y a plus que lui et moi, dans cette petite bulle que forme la couette et par extension ma chambre. Je le sens bouger sous mon bras, il s'écarte un peu pour me faire face, et son regard opalin berce mon cœur dans une tendre chaleur. Pendant de longues secondes, il me fixe et je me perds dans ces prunelles animées par des vagues vertes, claires et sombres. Cette question, qui me brûle les lèvres depuis que je suis sorti de ma salle d'attente, cette question qui hante l'ombre de chacune de mes pensées, devrais-je lui poser ? Bien sûr, j'ai peur d'entendre une réponse. Mais si je ne la pose pas, je ne saurais pas comment agir, comment réagir à ses côtés. Allez Shouto, fais un petit effort.

« Izuku... À tes yeux, nous deux, qu'est-ce que l'on est ? »

Je vois la surprise passer rapidement dans le paysage de ses sombres iris, et ses doigts viennent chercher le contact des miens. Il semble réfléchir pendant quelques secondes qui me semblent interminables. Je sens l'angoisse, au fond de mon estomac, qui provoque mon imagination dans un battle de dance.

« Je ne sais pas trop... Je suppose que l'on peut dire que l'on est ensemble, non.. ? Que tu es à moi, tout comme je suis à toi... Tu en penses quoi ? »

Il vient d'interrompre les mouvements endiablés de mes songes liés à mon stress en quelques mots, et je trouve ça incroyable. Je me détends, soulagé par ces mots que je voulais tant entendre. J'essaie de lui adresser mon plus beau sourire, j'espère qu'il ne fait pas trop peur.

« Vu que tu ne me l'avais pas clairement dit, j'avais peur de faire une bourde et que tu ne me considères pas comme tel... Être à toi, c'est ce à quoi j'aspire le plus. »

Il pousse un petit cri de bonheur, qui me fait sursauter tant c'était inattendu, et il me prend dans ses bras avec force. Je me retrouve contre son torse, et je peux clairement entendre les battements effrénés de son cœur. J'ignore pourquoi, mais les entendre provoque en moi une étrange sensation. Je me sens vraiment bien, jamais je n'ai été aussi détendu.

« Si tu dis des trucs aussi adorables je vais jamais te lâcher, tu sais ?

- Vraiment ? Raison de plus pour que je continue. »

Ma réponse lui provoque un petit rire, et il relâche la pression qu'il avait émise sur mon corps avec ses petits bras. Il revient face à moi, à quelques centimètres seulement de mon visage, et je sens le mien chauffer de manière anormale. Mon cœur bat à m'en rompre les côtes, et je me perds à nouveau dans cette mer émeraude contenue dans ses yeux. Il vient caresser mon visage avec sa main libre, ce qui me donne envie de sentir encore plus sa chaleur corporelle. Je peux sentir son souffle court sur mes lèvres, et son haleine sent une odeur particulière, un peu sucrée j'ai l'impression. Je passe ma main une énième fois dans ses cheveux si doux, tout en caressant son crâne. J'ai tellement envie de l'embrasser. Il se rapproche de moi, il me frôle du bout de ses lèvres, avec son regard toujours figé dans le mien. Je sens qu'il sourit devant mon trouble. Cet homme me déstabilise. Je vois bien qu'il s'amuse avec moi, et ça me donne envie de jouer encore plus avec lui. Je fais glisser ma main sur sa nuque, et faisant mine de l'embrasser, mais je ne fais que caresser ses lèvres avec les miennes. Je vois son regard s'illuminer d'une lueur amusée, puis il presse mes lèvres avec les siennes.

Izuku Midoriya est en train de m'embrasser. Cet homme, cet être que j'aime de tout mon cœur, est en train de m'embrasser, MOI. J'aime bien cette sensation. Voyant qu'il ferme ses yeux, je décide de l'imiter, alors que je sens ses lèvres se mouvoir contre les miennes, plus timides et moins assurées. Je peux sentir son souffle, je peux sentir son odeur, je peux sentir la douceur de ses cheveux ou de sa peau. Je ne veux pas m'arrêter de l'embrasser, et lui non plus apparemment. J'ai l'impression qu'il va me dévorer tant les moments où je peux reprendre ma respiration sont courts.

Au bout d'un certain temps, il s'écarte de moi, et je replonge dans ses yeux verts. Il me fixe en reprenant sa respiration, le rouge aux joues, avec un long sourire qui déforme son beau visage. Sa main se pose sur ma hanche, et je me mords la langue pour ne pas frémir sous ses doigts.

« Pourquoi je ne peux pas m'empêcher de t'embrasser ? »

Sa question fait l'effet d'une bombe dans ma cage thoracique. Je pense que la couleur de ma peau vient de s'harmoniser avec le côté écarlate de ma chevelure. Je ne peux pas m'empêcher de sourire, et d'échapper un petit rire nerveux.

« Alors arrête de poser des questions, et embrasse-moi. »

Pendant des heures, on alterne les moments où l'on parle et où l'on teste plusieurs manières de s'embrasser. Doucement, comme si l'on se frôlait. Puis de manière un peu plus violente, je dirais. J'ignore à quelle heure on a décidé d'éteindre la lumière en vue d'aller dormir, mais on continuait de discuter dans le noir. Mais le meilleur moment, c'est lorsque je me suis endormi contre lui, dans ses bras. Il était sur le dos, et moi sur le côté, la tête posée contre son épaule, avec nos membres enlacés. Sa respiration calme, ses doigts dans mes cheveux, la chaleur de son corps contre le mien. Tout ça, m'a rendu excessivement heureux. Pour la première fois de ma vie, je crois que je me suis endormi avec un sourire dessiné sur mes lèvres. Un sourire qui ne s'en irait pas, même le lendemain.

Pourquoi ? Parce qu'il y a un ange dans mon lit, et qu'il est à moi. Alors que je me sens partir, je l'entends murmurer à mon oreille :

« Moi aussi je t'aime, Shouto. »

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