11 - Une cheville de moins
Il court vite, le salaud. Il se faufile entre les buissons de la forêt adjacente au festival, je peux entendre son souffle court et paniqué, le bruit des feuilles mortes qu'il écrase dans sa course, le son des branches qui se tordent et claquent dans l'air. J'essaie d'éviter les ramures acérées des arbres, mais cela ralentit ma course, alors je décide de foncer dans le tas. Tant pis pour mon kimono. Soudain, il change de direction et l'on revient à la civilisation, à la ville sans verdure sauvage et désordonnée. Je prends le virage d'une manière un peu trop violente, alors je sens ma cheville vriller et je tombe sur le sol. Merde, quel boulet ! Quand je relève les yeux, il disparaît dans une ruelle en face de moi.
Je soupire, me relève en ignorant la douleur que je ressens à cause de cette chute, et je m'avance dans la ruelle. Qui sait, peut-être qu'il s'y est arrêté pour reprendre son souffle ? Il n'y a personne aux alentours, je suppose que tout le monde est au festival. Je m'avance prudemment. Il est définitivement louche.
Malgré la luminosité de l'après-midi, la ruelle m'a l'air d'une sibylline obscurité. Je n'aime pas le sentiment d'angoisse qui me prend par la gorge, et mon cœur qui bat un peu trop vite trahit l'épisode de stress qui me submerge. Pourquoi, d'ailleurs ? Ai-je peur de ne pas avoir réussi à le rattraper ? Peur de le retrouver ? Peur de ce que je pourrais trouver ? J'avance avec prudence, et me concentre sur chaque teinte des murs qui m'encerclent, chaque bruit, chaque flagrance. Je ne crois pas qu'il soit ici.
Après avoir avancé de quelques mètres, je me résigne et continue ma route avec une démarche plus relâchée. Or, quelques mètres plus loin, quelque chose d'étrange sur le mur attire mon attention, et je fais un bond en arrière à cause de mon inattention et ma surprise. Puis, j'ai l'impression que mon cœur s'arrête, que mes poumons partent faire la grève, et que mon estomac se retourne en guise d'ultime révolution. De ma gorge, sort un bruit étrange et rauque, alors que les nausées m'assaillent.
Sur le mur, il y a un chaton, accroché à celui-ci par un couteau lui traversant le crâne. L'odeur du sang frais me donne envie de vomir, je porte ma main à ma bouche en reculant devant cette horreur. Merde, je pourrais presque entendre son petit cœur battre encore, tellement le sang ruisselle sur le mur gris. Je ne peux pas m'empêcher de me répéter « pourquoi ? ». Quel genre de malade ferait ça à un chaton ? Putain, c'est qui ce mec ? J'ai un don pour tomber sur des types dérangés, décidemment. J'essaie de contrôler ma respiration erratique et de ne pas vomir. Devant moi, le cadavre du petit animal au pelage tâché de sang glisse et tombe au sol, alors qu'un bout de sa cervelle reste accroché avec le couteau. Quand j'aperçois le bout de chair encore palpitant, je ne peux plus contenir cette rébellion que mon appareil digestif semble vouloir mener à terme, et le contenu de mon estomac me brûle l'œsophage et la gorge alors que je régurgite tout ce que j'ai mangé récemment. Le bruit du liquide qui s'écrase contre le sol me dégoûte, et je m'assois dès que mon corps se calme. Je tremble, et je ne peux pas fixer autre chose que ce petit corps qui, il y a quelques minutes, contenait une vie. Putain, si je n'étais pas tombé, je l'aurais sauvé. Un sanglot explose dans ma gorge, et je commence à pleurer. Putain, pourquoi je pleure ? Pourquoi je me sens si mal, si vide ? Je suis pitoyable, incapable de sauver ne serait-ce qu'un chaton.
Une pensée vient me réveiller de cet état de léthargie et d'immense tristesse qui me paralyse jusqu'alors. Merde, Izuku est seul. Je suis certain que ce malade veut s'en prendre à lui, j'ignore pourquoi. Je me lève, mais la douleur que je ressens à ma cheville calme mon désir de sprinter. Je jette un dernier regard à ce pauvre chat, contourne les traces de vomi, et commence à trottiner en direction du festival dont j'entends encore les rumeurs, en essayant d'ignorer cette foutue cheville. J'ai peur. J'ai peur de ne pas le trouver. J'ai peur de le retrouver comme ce chat. J'ai peur de ne plus jamais voir son sourire. C'est la première fois que j'ai peur pour quelqu'un d'autre, autre que ma mère. Ce foutu festival me semble être à des kilomètres, et le trajet est terriblement long. Enfin, j'arrive devant la foule dense qui me paralyse quelques secondes. Je n'aime pas la foule, je n'aime pas les gens. Mais je dois retrouver Izuku. J'essaie de faire abstraction de tous ces gens qui peuvent me toucher, de toutes ces odeurs immondes qui se mélangent. J'ai mal au crâne, et certains me regardent étrangement. Peu importe, j'ai l'habitude d'être regardé comme un animal, ou comme un monstre. Il n'est plus là où l'on s'était quitté. Un profond désespoir vient de prendre mon cœur en otage, je crois que je commence à paniquer. Non, non, non. Pas lui. Mon mal de crâne s'amplifie, le bruit de la foule m'est insupportable. Je savais que c'était une mauvaise idée.
Je ne sais pas combien de temps s'est écoulé. Je crois que ça fait plus d'un quart d'heure que je le cherche partout. Épuisé, je décide de m'éloigner un peu de cette foule qui commence à m'angoisser, et j'essaie de retenir les larmes qui inondent mes yeux. Pourquoi je ne le trouve pas ? Peut-être est-il parti à ma recherche ? J'essaie de l'appeler, mais il ne décroche pas. Soudain, j'entends comme le bruit d'une explosion, et instinctivement, je me dirige vers celle-ci. On dirait le bruit que fait l'alter de Katsuki. Pourquoi serait-il avec cette enflure ? Bon, au moins, je le retrouverai, mais l'idée de le trouver avec lui me dérange. Je ne sais pas si je dois espérer le voir, ou le contraire. Et si l'autre débile a activé son alter dans un lieu public, soit il est profondément abruti, soit il se passe quelque chose.
J'arrive derrière un des stands du festival, et mon cœur semble libéré quand je vois la tignasse aux reflets opalins de mon petit-ami. Mais dès que je vois Katsuki, au-dessus de lui et sa main sur son visage qui semble déjà abimé, mon sang ne fait qu'un tour. Soudainement, ma cheville ne me fait plus mal, je cours vers eux et donne un coup de pied dans les côtes du blond, de toutes mes forces. Celui-ci tombe sur le côté et pousse un petit cri de surprise, alors que je me précipite sur Izuku pour le redresser.
« Shou... Todoroki ?
- Tu vas bien ?! »
Il semble surpris de me voir, et quand il m'observe un peu plus, je peux voir de l'inquiétude naître sur son visage. Malgré ça, on dirait qu'il peut se déplacer normalement. Son kimono est brûlé au niveau du torse et de la jambe droite, mais je ne peux pas le détailler davantage : j'aperçois l'autre con se redresser.
« Putain double-face, tu veux que je te pète les genoux à toi aussi ?!
- Bah je t'attends, tronche de fausse couche. »
Son visage se décompose sous la surprise de ma réponse, et j'ai l'impression que la tension que je ressens depuis la vue du type louche veut sortir dès à présent. Je lui lance un sourire moqueur, fier de voir que mon insulte vient d'ébranler son amour-propre.
« Bah qu'est-ce qu'il y a, Kacchan ? T'es aussi paumé qu'un fils de pute le jour de la fête des pères. »
Ohla, on dirait un tigre tellement ses traits d'expression sont tirés dans une grimace de haine. Je me permets de rigoler en guise de provocation, et quand il se jette sur moi, j'érige un mur de glace entre nous qu'il brise facilement, et j'en profite pour m'éloigner en m'assurant qu'Izuku est en sécurité. Celui-ci nous hurle d'arrêter, mais l'autre semble vraiment énervé.
« Putain Todoroki, ramène ton cul ici espèce de tapette !
- Pourquoi, je t'intéresse ?
- Arrête tes conneries ! Je chie dans la pute qui t'a mise au monde ! »
Mes sourcils se froncent malgré moi, et mon sourire s'efface. Une blague sur les mères, quelle originalité. Quoique, si je prends ce raisonnement, je ne suis pas très extravagant non plus... Il arrive tellement près de moi que je reçois un coup de poing dans le ventre, alors que je lui brûle le bras avec ma main. Il pousse un cri de douleur, alors que j'essaie de respirer convenablement. Il m'attrape par les cheveux, me les tire pour me regarder dans les yeux, et me lance un sourire sardonique.
« Appelle donc ta mère que je te recommence. »
Mon poing part tout seul et s'encastre dans sa mâchoire, puis je lui mets un coup de pied dans le ventre pour mettre de la distance entre nous. J'allais m'avancer pour lui brûler la gueule quand soudain, Midoriya se met entre nous.
« Putain ça suffit, bande de gamins ! On est dans un lieu public, vous l'avez oublié ?! »
Je jette un regard autour de moi et remarque que plusieurs personnes observent la scène avec attention. Certains ont même acheté du pop-corn. Katsuki ne semble pas vouloir arrêter, quand soudain, Izuku se tourne vers lui.
« Et toi, tu ferais mieux de ne pas te faire remarquer, si tu as si peur que ça.
- Qu... Je n'ai pas peur, arrête tes conneries, Deku ! »
Il en profite pour tourner les talons et s'éloigner, les mains dans les poches, en grommelant. Izuku me lance un regard colérique.
« Viens, on s'en va. »
D'accord, il m'en veut. Il commence à marcher devant moi, sans même me regarder, et sa réaction met à l'épreuve mon cœur qui a déjà beaucoup donné aujourd'hui. Je me sens attristé par la vue de son dos qui ne se retournera pas. Que pouvais-je faire d'autre ? Le laisser le frapper, le brûler, lui exploser le visage ? Ma cheville recommence à me faire mal, et je ne peux même plus tenir sa cadence. Putain, pourquoi ça me fait tellement mal ? Peut-être que c'était le coup de pied de trop.. ? J'essaie de retenir mes râles de douleur. Je crois que si je continue, je serai incapable de marcher.
« Izuku... »
Il continue de marcher sans même se retourner, alors que je ne peux plus continuer et que je m'arrête contre un mur. Je prononce son prénom une deuxième fois, alors qu'il est à une dizaine de mètres de moi. Il continue de marcher sans se retourner. Ne m'abandonne pas, pas maintenant...
« Izuku, je ne peux plus marcher ! »
Je viens de me casser la voix, mais au moins, il s'est retourné. Il vient de remarquer qu'une vingtaine de mètres nous séparait à présent, et il s'approche de moi d'un air que je ne saurais pas décrire. Dubitatif, surpris, en colère, vexé ? Quand il arrive à ma hauteur, il se plante devant moi, ses yeux orageux sondant mes pupilles tristes.
« Où as-tu mal ?
- Cheville. »
Il enlève ma chaussure et examine la source de ma douleur, et le fait de le voir à genoux devant moi fait battre un peu trop mon cœur. Il relève la tête, le visage décomposé.
« Shouto... Tu as fait quoi pendant que tu es parti ?! »
L'image de ce cadavre accroché au mur me revient en mémoire, et j'essaie de ne pas paraître trop expressif. Je déglutis, et tente de maintenir une respiration normale, mais j'ai l'impression que mon cerveau vient d'ouvrir les vannes d'un barrage, et je ne peux pas empêcher mes yeux d'être inondés. Il perd totalement son visage colérique, me prend contre lui et déclenche son alter pour courir. Je m'accroche à ses épaules, décontenancé par son attitude et surpris par la vitesse. Le fait d'être contre lui me calme un peu, et l'on est déjà devant chez lui. Il sort ses clefs, entre et l'on se retrouve dans sa chambre en un éclair. Izuku me dépose doucement sur son lit, comme si j'étais en porcelaine et que je pouvais me briser à tout moment.
« Je reviens, je vais chercher de la glace. »
Il revient tout aussi vite, et me pose une poche de glaçons sur ma cheville endolorie, et le froid soudain me fait sursauter. Puis, il vient s'asseoir à côté de moi, me prend la main, et me regarde d'un air inquiet.
« Maintenant, raconte-moi. »
Je prends quelques longues respirations. Que devrais-je lui raconter en premier ? Devrais-je lui évoquer le chaton ? Le fait que j'étais mort d'inquiétude ?
« Il y a quelques jours, j'ai vu un type étrange qui a essayé de rentrer dans Yuei, depuis le cours de Aizawa... Et ce type, il était au festival, avec le même air louche. On aurait dit qu'il cherchait quelqu'un, alors je suis allé le voir pour lui demander s'il était perdu ou s'il cherchait quelque chose... Et il a paniqué, et a fui. Alors je l'ai poursuivi. Malheureusement, je me suis tordu la cheville en sortant de la forêt, et il s'est enfui dans une ruelle. Dans le doute, j'y suis allé, au cas où il reprendrait son souffle... »
Je le regarde, et il m'indique de continuer avec un coup d'œil. Mon cœur palpite, j'ai peur d'en parler. De mettre des mots sur la réalité. J'ai toujours eu peur de ça.
« Et je suis tombé sur un chaton... Il l'avait accroché au mur, avec un couteau dans le crâne... Et je crois que je suis resté paralysé devant au moins cinq bonnes minutes... Après il est tombé à cause de la gravité, mais le haut de son crâne est resté accroché... Et soudain, j'ai eu peur que ce qu'il cherchait, c'était toi. Alors je t'ai cherché partout, pendant une vingtaine de minutes qui m'a semblé être des heures. J'étais désespéré, terrifié à l'idée de te perdre. Alors quand j'ai vu que Katsuki allait te faire du mal, j'ai craqué. Je suis désolé, je n'aurais pas dû perdre mon sang-froid, mais j'ai eu si peur... »
Je suis surpris par son visage horrifié. Enfin, pas vraiment pour ça, car je sais qu'il aime tout ce qui bouge, en particulier si c'est adorable, alors je me doutais qu'il serait dégoûté à l'idée de cet évènement. Mais il semble terrifié par autre chose, par d'autres pensées. Avais-je raison ? Peut-être qu'il connait ce type ?
« Izuku... ? Tu es presque aussi pale que le mur...
- Il faut que je te raconte quelque chose, moi aussi... »
L'expression anxieuse et effrayée sur son visage retourne mon estomac vide, et je sens l'angoisse monter insidieusement dans ma cage thoracique.
« Tu te souviens, la dernière fois que l'on a croisé Katsuki ? Avec son sac poubelle ?
- Oui... ?
- En partant de chez toi, je suis allé voir ce qu'il y avait. »
Je retiens mon souffle alors qu'il joue avec ses doigts. Il a tué quelqu'un ? Il massacre des chatons, lui aussi ? Vu le cas que c'est, ça ne m'étonnerait pas... En tout cas, il ne peut pas être le type louche. Peut-être que c'est son père, ou son frère caché ?
« Dans le sac poubelle, il y avait une espèce de poupée vaudou à l'effigie de Kacchan... Elle était transpercée de partout par des tiges de fer. »
Je déteste quand il l'appelle comme ça. Je mets ma jalousie de côté et j'arque un sourcil. Une poupée à son effigie ? Flippant. D'un côté, ça m'amuse de voir la source de sa peur, et d'un autre, tout ça m'inquiète un peu. S'il y a un type aussi taré pour s'attaquer à Katsuki et croire à ces légendes vaudou en ville... Bon, ça ne sent pas très bon quoi.
« Juste à côté, j'ai trouvé un chien démembré, les tripes à l'air... »
Ses paroles me font l'effet d'un coup de poing dans le ventre. J'ai du mal à respirer, et mon crâne me fait à nouveau mal. Je ne peux pas m'empêcher de réfléchir à toute allure.
« Tu penses que c'est ce type qui a fait ça à ce chien.. ?
- Je pense que c'est très probable... On n'a pas souvent de telles violences sur les animaux, au contraire... Et là, deux évènements comme ça en quelques jours, dans la même ville...
- Mais du coup, ce qu'il chercherait, ce serait Katsuki ? »
Je le sens se raidir, et je n'aime pas sa réaction. Je n'aime pas savoir qu'il s'inquiète pour ce connard, malgré tout ce qu'il lui a fait.
« Putain, c'est flippant...
- Pourquoi tu ne me l'as pas dit plus tôt ? »
Je le vois sursauter légèrement, et il tourne vers moi des yeux coupables. Il gratte ses cheveux emmêlés, et je vois qu'il culpabilise un peu.
« Je ne savais pas quand te le dire, comment l'aborder... Et je pensais que tu me ferais une réflexion par rapport à Kacchan.
- Arrête de l'appeler comme ça, s'il te plaît. »
Il me regarde avec des yeux écarquillés de surprise, alors que j'essaie de paraître le moins désagréable possible.
« Désolé, mais ça m'agace un peu que tu l'appelles par un surnom aussi mignon, alors qu'il est tout le contraire.
- Shouto... Tu es jaloux ? »
Un soupir exaspéré s'échappe de ma bouche. Je ne veux pas parler de ça. Il le sait, que je suis jaloux. Pourquoi demander ?
« Je peux utiliser ta douche ?
- Euh... Oui...
- D'accord, alors je reviens. »
Je me lève en restant en appui sur ma jambe valide et sors ce dont j'ai besoin lentement, et je vois bien qu'il m'observe avec tristesse. Je suis incapable de le bouder plus de dix secondes, je crois bien. Je m'approche de lui, et devant son air de chaton implorant, je le prends doucement dans mes bras. Son odeur efface toute la rancœur et la jalousie que je ressentais jusqu'à présent, et sa chaleur me fait oublier cette journée éprouvante.
« Je t'aime.
- Moi aussi Shouto... Moi aussi. »
Je l'embrasse sur le front, et m'écarte de lui en lui souriant. En voyant que je me déplace à cloche-pied, il rigole et me retient par la main. Je me retourne vers lui d'un air interrogatif. Il sait que j'ai du mal à me déplacer, pourquoi vouloir m'en empêcher d'un air si angélique ?
« Quel monstre serais-je, si je te laissais te débrouiller seul avec cette cheville..? »
La façon dont il me regarde me bouleverse, alors que je sens mon corps se réchauffer tout seul, sans raison. J'adore quand il me regarde ainsi. Je lui lance un petit sourire, ravi à l'idée de pouvoir prendre une douche avec lui, mais également effrayé pour la même raison. Je me rapproche de lui et l'embrasse tout doucement, ne lui laissant même pas le temps d'en profiter.
« Eh bien, je t'attends dans la douche alors. »
Et je me dirige vers la salle de bain, toujours avec cette classe mirobolante que confère le fameux cloche-pieds.
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