2 - Les pancakes du feu de dieu

J'émerge doucement de ma léthargie, puis je prends le temps d'étirer chacun de mes membres en poussant un petit gémissement plaintif. Je ne veux pas quitter la chaleur agréable de mon lit... Mais je dois aller voir Todoroki, il faut que j'en aie le cœur net ! Mais était-ce une raison de se lever si tôt.. ? Je regrette presque. Je quitte avec tristesse mon lit si confortable, et m'habille avec rapidité. Il commence à faire définitivement trop froid, les matins. Un long frisson me parcourt l'échine, alors que je songe à ce que je vais faire. Jamais je ne me croyais si audacieux. Je me surprends, parfois !

Je descends les escaliers, et je tombe sur ma mère qui fait les fameux pancakes du matin. Elle me regarde avec des yeux ronds, et ne sachant que dire, je lui réponds avec un sourire gêné.

« Mon petit Izuku, tu es malade.. ? »

Elle abandonne carrément la cuisson des pancakes pour venir poser sa main sur mon front.

« Mais non maman, ne t'inquiètes pas ! Je dois me lever plus tôt pour rejoindre... un ami. »

Elle me lance un regard perplexe, et j'essaie de la convaincre avec un de mes plus beaux sourires. Elle craque, soupire, et retourne surveiller notre petit déjeuner. Je m'installe et par la même occasion, dispose la garniture sur la table. Elle me parle de ce qu'elle va faire aujourd'hui, et me demande ce que je souhaite manger ce soir. Je réfléchis pendant qu'elle apporte les pancakes.

« On n'a pas mangé de saumon depuis un petit moment, non ?

- Mmh, c'est vrai... Je vais essayer de faire quelque chose avec ça alors ! »

Comme tous les matins, elle rayonne de bonheur. Heureusement, son humeur est contagieuse, et j'entame mes pancakes avec le cœur léger. Le goût de la petite crêpe mélangé à celui de la confiture... C'est le combo qui annonce une bonne journée ! Je termine rapidement mon petit-déjeuner, embrasse ma mère qui remarque mon empressement, et je sors de chez moi en lui souhaitant une bonne journée.

L'air frais du matin me frappe le visage. Il fait encore nuit, mais le soleil à l'horizon éclaire tout de même la ville. En y réfléchissant, je ne sais même pas où il habite... Je tape la seule adresse qu'il m'avait évoqué il y a longtemps dans le GPS de mon portable. Je soupire de soulagement lorsque je remarque qu'il n'habite pas tout à l'opposé de moi. Je suis les indications de mon téléphone en observant les rues par lesquelles je passe. Je traverse un parc désert, quelques ruelles étroites, je passe devant une supérette, puis je finis dans une rue plus grande. Je ne suis plus très loin, d'après mon guide électronique. Plus j'avance, et plus la boule d'angoisse qui rongeait mon ventre hier monte le long de ma gorge. Je m'arrête devant une petite maison, et vu le nom écrit sur la boîte aux lettres, je suis bien arrivé. Je passe le portail, mes doigts commencent à trembloter. Arrivé devant la porte, je prends une grande inspiration et toque à la porte.

Je crois que si j'avais retenu ma respiration jusqu'à ce qu'il m'ouvre, je serais mort. Je retente une seconde fois. L'attente nourrit l'angoisse que je ressens, et les questions qui fusent dans mon crâne. Il est peut-être vraiment mort ? Cela m'étonnerait qu'il ne soit pas chez lui. Il dort encore, peut-être ? Après avoir attendu au moins cinq bonnes minutes, je fais le tour de la maison. Je n'aperçois qu'une fenêtre avec le volet fermé, c'est probablement sa chambre. Je prends appui sur le buisson en contrebas pour grimper. Argh, qu'est-ce que je fais ? Si un de ses voisins me surprend, je fais quoi ? Je lui dis que je pense que mon ami est mort ? Il me prendrait pour un voleur, c'est certain. J'arrive devant son volet, je m'accroupis devant et donne des petits coups répétés. Ne décelant aucun bruit, je recommence, jusqu'à ce que j'entende quelque chose. Il n'est pas mort ! Ou alors je me suis trompé de maison.

Soudain, le volet s'ouvre. Je me le prends en pleine tête, et je me sens tomber. Hein ?! Arghhh je vais mourir ! Je ne peux pas m'empêcher de pousser un cri, puis je sens que ma chute est amortie par le buisson qui m'avait aidé à grimper, tout à l'heure. Toujours là pour moi, merci bien ! C'est un chic type. J'aperçois une touffe de cheveux décoiffée, rouge et blanche, et mon cœur fait un bond dans ma poitrine.

« Je suis heureux de voir que tu es en forme Todoroki ! »

Je relève la tête en lui offrant mon plus beau sourire, mais la vue de son visage me coupe dans mon élan. Sa peau est horriblement blafarde, et on dirait que ses cernes veulent atteindre les commissures de ses lèvres griffées, tant elles sont gigantesques. Je peux lire dans son regard de la fatigue, une immense tristesse, mais également de l'appréhension et de l'interrogation. Je le vois trembler légèrement.

« Enfin, je le croyais... »

Je le vois se retirer dans la pénombre de sa chambre, et cela me tord douloureusement le cœur. Bon, au moins, il n'est pas mort. Mais il ne va pas bien du tout. Voyant qu'il ne semble pas vouloir me répondre, je prends l'initiative de justifier ma raison d'être ici, dans son buisson.

« Tu n'es pas venu en cours hier, et ce n'est pas ton genre... Je me souviens de la fois où tu étais tellement malade que tu avais passé plus de temps aux toilettes que dans la salle de classe. Tu avais même pris une grande bassine au cas où ! Alors je me suis inquiété... Et apparemment, j'ai eu raison.

- Pas de quoi s'inquiéter tu sais, j'ai juste un peu trop dormi, j'allais me préparer pour venir là. »

Sa voix me paraît bien trop enrouée et cassante, et cela ne fait qu'exacerber mon inquiétude. J'essaie d'attraper un de ses regards, mais il semble vouloir éviter de me regarder. Ce constat me blesse un peu, alors que je continue de fixer son visage fatigué.

« Tu peux entrer en attendant si tu veux, j'ai besoin d'aller prendre une douche. »

Sa demande me fait sourire sans même que je le veille, et je crois qu'il a vu à quel point cela me rassurait. Il s'enfuit de la fenêtre alors que je me dirige vers la porte d'entrée en essayant d'enlever le plus de feuilles possibles de ma chemise. Lorsque j'arrive devant la porte, je suis étonné qu'elle soit déjà déverrouillée. J'entre, et observe la pièce dans laquelle je suis actuellement. C'est sobre, la cuisine est ouverte sur le salon. Il y a le nécessaire, mais l'on dirait ces maisons exposées à la télévision. Il n'y a pas une seule trace d'individualité. Pas une photo, pas un album. Je fais le tour de sa bibliothèque alors que j'entends l'eau couler. Je lis quelques noms d'auteur que je ne connais pas, puis je jette un coup d'œil à la cuisine. Il y a encore de la vaisselle dans l'évier, et il y a un verre cassé devant. Sur le meuble, il y a une corbeille de fruits.

Alors que j'analyse l'endroit dans lequel il vit (pourquoi cela m'intéresse tant ?), une envie d'uriner me surprend. Gêné, je regarde autour de moi. C'est peut-être au fond du couloir ? J'évite la porte par laquelle je perçois le bruit de l'eau, j'essaie la porte d'en face. Je tombe probablement dans sa chambre, et la fenêtre est ouverte. Oups. Je referme la porte, essaie celle du fond du couloir. Bingo !

C'est trop bien, de faire pipi. Après le grand sentiment de soulagement que je ressens lorsque je me débarrasse de tout ça, je me lave les mains et sors discrètement. J'aperçois Shouto, les cheveux mouillés, dos à moi. Je m'approche doucement, puis il se retourne vers moi. Je me sens gêné d'avoir été surpris argh.. Par réflexe, je passe ma main dans mes cheveux emmêlés (d'ailleurs j'en ai arraché un, ça fait mal !), et lui lance un grand sourire.

« Désolé Todoroki, je cherchais tes toilettes et je me suis perdu dans ta maison... Eh mais tu pleures ? »

Ses yeux larmoyants et les gouttes d'eau sur ses joues ne font aucun doute, mais à ma question il se cache son visage avec son bras. Ces larmes passagères ne font qu'amplifier mon inquiétude. Si même Todoroki pleure, ça signifie que ça ne va vraiment pas.

« Je suis juste encore un peu malade, ne t'en fais pas. »

Je fais semblant d'être convaincu par son mensonge, on sort de sa maison et l'on commence à partir en direction de Yuei. J'essaie de combler le silence qui nous entoure avec des anecdotes inintéressantes, mais il semble m'écouter avec attention malgré la banalité de mes paroles. Je parle des pancakes de ma mère, du fait qu'il fait bien trop frais pour sortir de mon lit, et que pas plus tard qu'hier j'ai vu une vidéo de phoques qui dansaient et que c'était excellent. Il ne semble pas gêné par le fait que j'essaie de combler ce silence un peu oppressant.

On arrive rapidement à Yuei. Lorsque l'on entre dans l'établissement, plusieurs personnes viennent demander à Todoroki si tout allait bien. Voyant que plusieurs personnes voulaient de ses nouvelles, je m'éloigne dans la direction de Ochaco, qui me lance un regard pervers. En voyant la mine inquiète de Momo et ses bavardages incessants vis-à-vis de lui, j'ai l'impression que mon cœur se déchire un peu. Je décide de ne plus observer cette scène, et ma meilleure amie décide ne me taquiner plus que d'accoutumée.

« Je suis juste allé voir s'il allait bien ce matin, s'il n'était pas mort...

- Oui oui, c'est ça ! »

Elle me lance un sourire sadique, et commence à nous dessiner sur son cahier, main dans la main. Je deviens aussi rouge que les cheveux de Eijirou à ma droite, qui est apparemment intéressé par la raison qui me rend dans cet état. Mon amie ricane, alors que je cache mon visage écarlate dans mes bras. Je jette un œil derrière moi, et je le vois dessiner également. Sa mine attristée m'inquiète vraiment.

La journée passe lentement, ma petite routine revient. Tenya qui écoute, Ochaco qui me taquine, mes regards envers Todoroki qui parfois me regarde également. La fin de la journée arrive rapidement, et après avoir dit au revoir à mes amis, je décide de prendre le même chemin que l'aller. Faire un détour pour l'observer, puis rentrer chez moi. Au bout de quelques mètres, je le vois s'arrêter, et je me cache de peur qu'il ne me voie et se retourne. Je reste dans ma cachette pendant de longues, jusqu'à ce que j'entende l'écho d'un sanglot. Je sors de la pénombre, et je panique lorsque je ne vois plus Todoroki. J'avance de quelques pas, et je le vois, assis dans un coin de la ruelle, la tête entre ses genoux. Je l'entends sangloter et respirer difficilement, je panique. Merde, il est mal au point d'exploser en sanglots au beau milieu d'une rue ?

« Todoroki ! »

Je le vois sursauter et il se tend, puis je l'observe enfoncer sa tête dans les plis de ses vêtements. Il ne veut peut-être pas que je le voie comme ça. Peut-être qu'il voudrait voir n'importe qui, sauf moi ? Peu m'importe, vu dans quel état il est, je me sens obligé de l'aider. Et puis, c'est ça être un héros : c'est aider son entourage !

« Todoroki, tout va bien ? Tu es blessé ?! »

Je t'en prie, Todoroki. Laisse-moi donc être ton héros.

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