28
Devis avait le sourire amer. Il venait de raccrocher le téléphone. Il devait être l'homme le plus heureux de la terre, mais il ne pouvait s'empêcher de ressentir de la tristesse. Christian Martin était une équation complexe dont il n'avait pas la solution. Dès fois il pouvait se montrer charmant, taquin comme l'appréciait Mattéo et même lascif — ce qui ne manquait pas de lui plaire. Et d'autres fois, il semblait distant dans ses réponses, froid. Le plus dur pour Mattéo était de lui dire qu'il l'aimait sans recevoir la même chose de lui. Christian ne lui avait jamais dit : « je t'aime. » , et cela l'attristait quelque peu. Dès fois il en venait même à se demander si Christian Martin l'appréciait vraiment comme il le prétendait.
Lorsque six heures avait sonné, Mattéo courait sur le trottoir. Il n'avait que très peu dormi. Son esprit avait été tourmenté par Christian Martin. Devis n'avait cessé de se demander s'il l'aimait. Peut-être ce dernier avait un amant ? Il ne souhaitait pas penser cela, mais il n'avait pas d'autres explications. Car se disait-il, Christian ne pouvait pas aimer Cézanne.
Il restait quelques mètres à Devis pour lui permettre de terminer son jogging. Il lui fallait passer devant la maison des Martin, puis longer quelques habitations pour regagner la sienne. Tiens, s'agissant des Martin, il y avait du monde a leur perron remarqua-t-il. Il reconnu Christian, son beau Christian. Il ne souriait pas, toujours aussi placide, mais cela suffisait à réchauffer – d'une manière qui lui était déjà coutumière – le cœur de Devis. Près de lui, se trouvait sa mère, toute souriante aux côtés d'une jeune fille. C'était Cézanne. La jeune Delavallée n'arrêtait pas de rire et Mattéo ne sût pourquoi cela l'irritait.
Le moment où ses nerfs furent les plus excités c'est lorsque Cézanne s'approcha de Christian et l'embrassa à la bouche sous le regard fier de madame Martin qui s'était empressée de les prendre en photos. Mattéo sentit à l'instant son intérieur bouillir. Sa mâchoire se resserra seul tout comme ses poings.
D'un pas déterminé, Mattéo reprit sa course. Il tira sur la visière de sa casquette et se remit à courir. Courir... courir... courir... courir. Il voulait oublier ces images. Elles hantaient son esprit.
♧
Christian Martin savait que sa journée se résumait à prendre un petit-déjeuner, vider les poubelles, ranger sa chambre, et se rendre au rendez-vous que lui avait donné Mattéo. Il ne s'attendait pas à revoir Cézanne de si bon matin. Elle avait le chic pour se pointer lorsqu'on ne l'attendait pas, se dit le jeune adolescent. Ce fut en soupirant qu'il ouvrit la porte à sa petite-amie.
— Cézanne ! grommela-t-il avec condescendance.
— Bonjour mon chéri.
Cézanne voulut embrasser Christian, mais il esquiva son geste et préféra la prendre dans ses bras. La jeune fille eut un pincement au cœur. Malgré sa déception, elle se força à sourire.
— Je me disais que l'on pourrait sortir ce samedi et essayer de récupérer de cette longue semaine, reprit-elle en souriant exagérément.
— J'ai déjà quelque chose de prévu, donc ce sera pour une autre fois.
Cézanne à nouveau lui sourit alors qu'elle avait l'impression que son cœur était asphyxié. Il y avait cette piqûre persistante que lui causait le refus de Christian. Toutefois, avec le plus de calme elle lui dit :
— Tu dis toujours ça Christian. Mais il n'y a jamais de prochaine fois. Le week-end avant les examens blancs, je t'ai proposé une sortie, tu as désisté à la dernière minute, me laissant seule au restaurant. On dirais que tu as peur de passer du temps avec moi. Je suis censé être ta copine Christian. Ta copine ! Je ne devrais pas te supplier pour que l'on puisse passer du temps ensemble. Tu ne fais jamais d'effort Christian. Si ce n'est pas moi qui me rends chez-toi pour te voir, alors on ne se verrait jamais hors mis à l'école !
Christian ne put s'empêcher de se sentir affecté par les propos de Cézanne. Il aurait souhaité lui donner plus de lui, mais il trouvait déjà qu'il en donnait bien assez. Qui plus est, même lorsque Cézanne était son amie, il n'avait pas pour habitude de sortir constamment avec elle. Il ne se voyait pas faire cet effort, même si techniquement elle était sa petite-amie.
— Ecoute Cézanne, entama-t-il d'une voix hésitante, je...
— Christian je souhaite juste qu'on ait une relation de couple comme toutes celles des jeunes de notre âge. J'aimerai aussi que ce soit toi qui m'écrive pour me souhaiter bonne nuit ou même bonjour, tu ne l'as jamais fait. Ou même que tu me surprennes avec de petites attentions... Je...Je veux juste un petit-ami normal.
— Cézanne ça suffit, je ne veux plus en parler.
Christian ne savait plus quoi dire, alors il fit ce qu'il avait toujours l'habitude de faire, lorsqu'il devait faire face à des situations inconfortables. Le jeune Martin voulut mettre fin à la discussion, mais cela était sans compter sur la douleur de Cézanne qui la poussait à ne pas se taire.
— Tu fais toujours ça Christian, toujours ! Tu fuis la réalité. Est-ce que ce n'est pas en parlant de quelque chose qu'elle n'existe pas ? Tu vas...
— Ah ma petite Cézanne, c'est toi ?
C'était la voix de madame Martin. Depuis la cuisine elle ne faisait que se poser des questions. Lorsqu'elle arriva au niveau des deux adolescents, elle froissa les sourcils. Elle ne comprenait guère les raisons qui les poussaient à se disputer.
— Qu'est-ce qui ne vas pas ?
Martine, tout en essuyant ses mains sur son tablier à carreaux rose, regardait Cézanne.
— C'est Christian Martin, entama Delavallée, en croisant les bras.
La jeune fille expliqua par la suite les reproches qu'elles portaient contre lui. Et comme elle s'y attendait Martine prit partis en sa faveur. Cézanne en la voyant savait déjà qu'elle avait gagné. Ce que sa mère voulait, Christian le lui donnait. Et ce que Cézanne désirais, Martine le lui offrait. Cette règle elle l'avait déjà bien comprise.
— Christian, Cézanne a raison. Tu dois mieux t'occuper d'elle, je te l'ai déjà dit. Pour qu'un couple dure, il doit y avoir des concessions entre les partenaires. Alors, tu dois oublier cette sortie que tu as ce samedi et consacrer cette journée à ta copine. La sortie, elle n'est pas d'ordre professionnel, donc tu peux la reprogrammer. D'accord mon chéri ?
Madame Martin fit un grand sourire à son fils, puis regarda Cézanne qui, elle, souriait de toute ses dents. Martine, se sentit fier. Elle venait d'agir comme une bonne mère. Son fils et sa future belle-fille rencontraient déjà les premières épreuves dans une vie de couple et elle était fière de leur donner de bons conseils pour qu'ils puissent les surmonter.
— Oui, maman, répondit Christian malgré lui.
— C'est bien les enfants, les problèmes de couple ça arrive tout le temps, déclara Martine avec un petit sourire. L'essentiel c'est d'en parler. Maintenant, embrassez-vous, termina-t-elle en souriant avec bienveillance.
Littéralement, Cézanne se jeta sur Christian et pressa ses lèvres contre les siennes. Madame Martin prit une photo. Le jeune homme ne partagea pas le baiser et avait une attitude indifférente. Madame Martin, encore moins Cézanne ne firent guère attention à cela. Chacune étant bien trop fière d'avoir pu trouver une solution à cette dispute.
Les deux femmes avaient quittées la maison, laissant Christian seul ou du moins seul mais en compagnie de sa mauvaise humeur. Il était grandement irrité. Il ne se retenait plus de débiter des grossièretés de toutes sortes à l'encontre de sa copine. Le jeune adolescent avait remarqué le stratagème de Cézanne, elle se servait de sa mère contre lui. Elle l'utilisait pour l'amener à succomber à ses désirs. Et il trouvait cela amoral. Il devait avoir une conversation avec elle pour qu'elle cesse cela, songea-t-il.
On sonna à la porte. Christian fronça encore plus les sourcils. Grommelant des paroles incompréhensibles mais sauvageonnes vu la rapidité à laquelle ses lèvres remuaient.
C'est en aillant la mine grave qu'il ouvrit la porte.
Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top