Depuis ce jour là, je suis retourné régulièrement au pont de l'autoroute.
Mais j'l'ai pas revu.

J'suis retourné au jardin d'enfant pour me baigner dans la fontaine.
Mais c'était pas pareil.

Tout a repris son cours, les squat, l'appart, la supérette de nuit, les joints fumés du bout des lèvres sur le toit de l'usine.

J'me sentais seul.

Cette nuit là, je bossais à la supérette, seul à la caisse, mon tablier bleu et mes yeux se fermant tout seul malgré moi.
Le tic tac de l'horloge et le carillon résonnaient par intermittence entre les rayons vides de monde.
De temps en temps, quelqu'un venait acheter un café, une bouteille d'eau, une boîte de céréales ou un paquet de chips.

Mon esprit commençait à somnoler, bercé entre le grésillement de la radio et le vent passant sous la porte.

Et une petite voix m'a réveillé ;

"Bonsoir, vous avez de la limonade ?"