Encore une fois, je n'ai presque pas dormi. Aylin, ma fille âgée de quelques semaines, a pleuré toute la nuit.

Je me lève, presque tristement. Ne pouvant rester enfermée dans mon studio, je prépare Aylin à sortit, la pose dans la poussette, attrape ma veste et mes clés, et on sort.

Le temps est orageux, humide, mais cela me fait du bien, beaucoup de bien.

Je marche, fait le tour du quartier, sans but. Aylin est de bonne humeur, elle rit, et je réponds à sa joie.

J'ai tellement peur qu'elle manque de quelque chose. Même si mes parents m'aident énormément, j'élève cette enfant seule. J'ai au moins la chance d'avoir un emploi. Dès que mon congé maternité touchera à sa fin, je reprendrai mon travail d'infirmière.

Avec Aylin, ce sera évidemment compliqué. Mais, malgré ma fatigue, je ne regrette pas sa présence. Elle est si précieuse à mes yeux...

Je me souviens alors d'une petite librairie, plus loin en ville. Décidant d'aller y faire un tour, je m'arrête au premier arrêt de bus que je trouve. En attendant le véhicule, je joue avec ma fille, et je lui chante des chansons sous le regard attendri d'une vieille dame.

Le bus arrive enfin, et là, un jeune homme m'aide à monter la poussette. Je le remercie en souriant.

Aujourd'hui, je me sens bien.

Dans la librairie, quelques clients sont déjà présents. Je me choisis plusieurs romans, et je prends quelques livres pour Aylin. Alors que je fouille les étagères, je trouve un livre de vieux contes. Contente de ma trouvaille, je me dirige vers la caisse.

La jeune caissière, range n'es articles dans un sac, et m'annonce le prix. A peine ai-je payé, que le client derrière moi pose son livre sur le comptoir, le regard posé sur le décolleté de l'employée. Elle lui jette un coup d'oeil rapide, et lui propose un livre plus récent alors que je sors de la boutique.

Dehors, la pluie tombe. Je protège du mieux que je peux Aylin, de peur qu'elle tombe malade. Pour ma part, la pluie ne me dérange pas, au contraire.

Je sens les gouttes d'eau froides glisser sur mon visage, et j'éclate de rire, telle une petite fille de six ans. J'ai presque envie de danser, mais je ne peux pas rester là trop longtemps avec ma fille.

Heureusement, le bus qui nous ramène au studio arrive vite.

Dès que nous arrivons, je change Aylin pour qu'elle ne reste pas dans ses vêtements humides. Puis, je fais l'une des plus belles choses sur cette planète : un chocolat chaud.

Quand j'étais gamine, lorsque la pluie tombait, ma mère m'en faisait toujours un. Petit à petit, le chocolat chaud a été remplacé par le thé, puis par le café.

Mais aujourd'hui, j'ai envie de retomber en enfance. De revivre cette période où le chocolat et la protection des fleurs étaient mes seules préoccupations. Un moment où on se laisse dépasser par ses rêves.

Aylin s'est endormie, et son visage angélique me fait sourire. Je veux que son enfance à elle aussi soit heureuse. Je veux que sa vie ait la saveur du chocolat chaud un jour de pluie.