Son souffle brûlant s'écrasait contre mes lèvres qui semblaient décidément en vouloir plus. Tout mon corps en voulait plus. Et j'avais cette sensation.. cette sensation que je ne connaissais pas et qui semblait pourtant me dire quelque chose.

Sa peau frissonnait sous mes doigts et je ne ressentais bizarrement plus l'effet de l'alcool ou de la drogue. Je ne voyais plus, n'entendais plus. Je sentais simplement son contact contre le miens et cette étrangement sensation qui brulait ma gorge.

Peut être ne vaudrait-il mieux ne pas y penser..

Alors c'est ce que je fis.

Je laissai mon esprit torturé s'évader, laissant ainsi place à l'enivrant corps de mon meilleur ami contre le mien.

Ma main remonta lentement dans son cou et se glissa ensuite contre sa joue   J'ouvris les yeux, croisant alors ses iris bruns qui me dévisageaient. Elles me regardaient d'une manière..

Mes sourcils se froncèrent puis je le vis. Un souvenir.

Je le voyais, lui et ses même iris couleur noisette. Il était proche de moi et pourtant, ce n'était plus ce doux et chaleureux contact que je ressentais.

L'ambiance était froide, écorchée et lourde. Seulement, tout ça venait de moi, et uniquement de moi.

Les cris et les encouragements autour de nous résonnaient dans ma tête. Il ne me fallut pas plus pour asséner un violent coup de poing à mon meilleur ami. Je ne comprenais plus vraiment où je me trouvais. Mes souvenirs prenaient toute la place dans ma tête.

Le garçon que je venais de frapper se recula difficilement, les larmes aux yeux. Ses joues étaient aussi rouge que ses cheveux et ses lèvres étaient mordues et tâchées de sang.

Après l'avoir attrapé par le col, c'était mon genoux que je lui enfonçais dans le ventre. Crachant sur le sol, Josh continuait de me fixer et de se laisser faire. Je me souvenais de cette non-réaction qui m'avait agacé, et ce fut pour cette raison que j'avais continué à le frapper, encore et encore sous les rires des abrutis qui me servaient d'amis.

Ces abrutis d'homophobes pour qui j'avais délibérément détruit mon meilleur ami.

- Sale tafiole, jurai-je en envoyant une dernière fois mon pieds dans les côtes de Joshua.

Nos regards s'attardèrent l'un sur l'autre avant que je ne tourne les talons. Je ne supportais plus cette chose dans ses yeux.

Je n'ai jamais su ce que c'était..
De la haine ? de la déception ? de la tristesse ? Ça pouvait bien être un mélange de tout ça.

J'avais été l'ami le plus horrible au monde à ce moment-là. Et pourtant.. j'avais complètement oublié ce souvenir jusqu'à présent. C'était en croisant à nouveau ses yeux remplis de cette émotion étrange que c'était revenu. Je n'avais aucune idée de tout ce qui avait suivi cette partie de ma vie. Il l'avait sûrement pardonné puisqu'on était là, tout les deux en sueur dans ma chambre.

Soudain mes oreilles sifflèrent et mon crâne sembla se contracter sur lui-même.

J'avais mal.

Ce jour là, il y a un an, après avoir tourné le dos à mon meilleur ami, j'avais ravalé les larmes qui brûlaient mes yeux. Je n'entendais plus que les gémissements de douleur de Josh et les coups que lui affligeaient les autres garçons.

Ma cage thoracique devint oppressante contre ma poitrine, mes tripes menaçaient de s'échapper de ma bouche et mon regard brûlé, brumeux était grisâtre. Tout allait exploser.

Et pourtant.. aussi étrange que cela puisse me paraître, tout s'adoucit.

Lentement, la vision de cette journée disparut. Ce souvenir qui avait quitté ma mémoire il y a quelques années était encore bien là, mais je me trouvais à nouveau dans ma chambre, Josh contre moi.

Je ne savais pas si c'était la tristesse ou la colère envers moi-même qui avait gagné mais l'insupportable conflit tourbillonnant dans mon crâne s'était arrêté. 

Je fixais toujours Josh, qui lui aussi me regardait sans rien dire.

Il y avait toujours quelques choses dans ses yeux. La même chose qui y était quand je l'ai frappé et humilié.

Il finit par murmurer faiblement d'un ton hésitant tout en se redressant:

- Ty je voulais pas.. Je suis désolé, ne me..

Sans lui laisser une seule seconde, je glissai ma main dans son cou et plaquai mes lèvres contre les siennes.

Cette fois, je ferai disparaitre à jamais ce putain de souvenir et cette chose des yeux de mon Josh.

Et c'est seulement quand je sentis ses lèvres contre les miennes que mon esprit décrocha.