Il y a des erreurs de jeunesse, de simples mauvais choix, qui peuvent influencer et changer définitivement votre vie. Cette réalité, quatre jeunes cubains l'ont appris à leurs dépens alors qu'ils vivaient encore à Cuba.

Ernesto Cabrera et Silvio Morales se connaissaient depuis qu'ils étaient enfants. Ils ont grandi à Cuba où ils ont eu une enfance simple. Ils n'avaient pas grand-chose mais ne s'en plaignaient pas vraiment pourtant, depuis très jeunes, ils savaient que leur avenir n'était pas sur leur île natale. Ils avaient en eux cet "American Dream" qui leur faisait miroiter l'aventure américaine. Les USA étaient pour eux une terre promise où ils pourraient faire ce qu'ils veulent et ne plus jamais manquer de rien. Ils voulaient y construire une famille et y élever leurs enfants.

Ils étaient comme des frères et avaient déjà, du haut de leurs 16 ans une sacrée réputation sur leur île natale: ils étaient prêts à tout pour accomplir leur rêve, même au pire. Lors de leur exil ils ont pris avec eux celles qui deviendraient plus tard leurs épouses respectives: Gabriela Delgado et Carolina Ortega.

Les deux jeunes femmes se connaissaient également depuis leur plus jeune âge et ont eu une enfance similaire à celle de leurs compagnons. Elles les ont rencontré au collège et alors que presque tout le monde les prenait pour des fous, elles les ont cru et ont partagé leur rêve. Ils sont tous les quatre devenus rapidement inséparables et au fil du temps leurs relations ont évolué. Evidemment ils n'étaient pas que tout les quatre. Ils avaient une petite bande d'amis partageant leur rêve.

Pour atteindre leur but ils n'ont pas hésité à s'associer avec des gens peu recommandables et ils l'ont regretté. Alors qu'ils venaient d'obtenir leur diplôme au lycée et qu'ils revenaient d'une soirée pour fêter la fin de leurs études tout a basculé et ils ont dû avancer leur départ de Cuba. Ils sont parti après une nuit de cauchemar, sans dire aurevoir à leurs familles,  sans le reste de leur bande, avec presque aucune affaire et sans se retourner.

À vingt-quatre ans ils avaient tous les quatre obtenus leurs diplômes dans le domaine du management et marketing. Un riche homme voulant faire bonne figure les avaient pris sous son aile et leur avait offert des études. Les quatre cubains s'étaient donc retrouvés, bien malgré eux, sous les feux des projecteurs de Miami une fois leur diplôme en poche. En effet tout le monde voulait savoir s'ils allaient réussir ou si l'aide qui leur avait été accordé était inutile et que cet homme, autrefois si influent, était simplement devenu sénile.

Six ans après alors que leur entreprise "Cabrales" commençait à intimider les grandes entreprises déjà présentes depuis des décennies, un différend entre les deux couples mit fin à cette aventure sous les yeux de la jeune Selena Cabrera alors âgée de six ans et de la jeune Helia Morales qui n'avait à l'époque que cinq ans.

Si d'un côté les Cabrera voulaient à tout prix laisser derrière eux leur vie à Cuba et s'abandonner à la culture américaine, les Morales eux étaient fières de leurs origines latines ce qui posait souvent problème dans la direction de l'entreprise. Aujourd'hui "Cabrera Industry" et "Morales Corp" sont considérées comme les deux plus puissantes entreprises de Miami et sont connues à travers tous les États-Unis.

Aujourd'hui les jeunes Helia et Selena sont agées de 16 et 17 ans et sont en dernière année au lycée avec leurs meilleures amies. Elles étaient la seule raison pour laquelle leurs mères sont restées en contact pendant un temps. Leurs filles se ressemblaient et étaient différentes des autres enfants ce qui a longtemps inquiété leurs parents. Elles étaient calmes, ne parlaient presque pas voir pas du tout pour l'une des deux. Très observatrices elles ont toujours semblé analyser dans les moindres détails le monde qui les entourait en toute discrétion mais en le comprenant parfaitement et à leur manière. Ce comportement totalement effacé entraînait certaines situations plus ou moins cocasses. Un jour alors qu'Ernesto et Gabriela avaient décidé d'avoir un autre enfant en espérant que Selena soit plus sociable et enjouée, ils avaient alors vu la petite fille, sur le canapé concentrée sur un coloriage, presque au dernier moment. Ils étaient sur le point de concevoir Esteban en pensant que la nourrice avait mis au lit la petite Selena depuis au moins une heure. Du côté d'Helia, ses parents avaient, un jour, fait venir la police dans un centre commercial en pensant avoir perdu leur fille: ils l'avaient juste oublié dans la voiture où elle les attendaient en dessinant.

Les deux mères se sont rendues compte de la différence de leurs filles lors d'un Noël. À cette époque Selena avait quatre ans et Helia trois. L'entreprise de leurs parents commençait à se faire un certain nom. Les adultes avaient fait venir un acteur pour jouer le rôle du père Noël mais seul Esteban alors âgé de deux ans semblait heureux. Les deux pères avaient donc, pour la énième fois, expliqué l'histoire de Noël et le mythe qui l'entoure aux deux fillettes. Helia et Selena les ont juste fixé droit dans les yeux avec ce regard qui disait "ne nous mentez pas". La seule différence à ce moment-là entre les petites brunes était le fait qu'Helia avait levé un sourcil et Selena, quant à elle, les avait froncé. En grandissant elles avaient gardé ces mimiques quand on leur ment.

Les quatre cubains s'inquiétaient pour leurs deux aînées même si de nombreux psychologues, psychiatres et autres "psy" leur avaient assuré qu'elles allaient bien. Ils savaient qu'ils étaient très certainement en partie responsables leur comportement si différent. À la naissance des filles l'entreprise existait à peine et aucun des quatre parents n'avait de temps pour elles. Ils voulaient tous des enfants et avaient décidé de les avoir à ce moment-là car ils étaient encore jeunes et avaient peur de se réveiller un jour à soixante ans sans enfants car bien trop pris par leurs carrières.

C'est à l'époque de ce Noël que les deux enfants s'étaient fait des amies à l'école pour la première fois. Leurs parents ont tenu à les mettre dans des écoles séparées pour qu'elles s'ouvrent aux autres enfants surtout que leur relation semblait bizarre. Elles ne se parlaient jamais et semblaient se comprendre juste grâce à des regards et des gestes.

Flashback - Selena:

Elle observait, comme à son habitude, les autres enfants pendant la récréation. Sa concentration était surtout portée sur le match de foot que se disputaient des garçons d'au moins six ans de plus qu'elles. C'est alors qu'une jeune métisse s'approcha d'elle en lui disant "on dirait que tu as des yeux magiques ! Avec le soleil ils sont tout oranges!". Selena l'avait alors dévisagé assez perplexe tandis que l'autre petite fille continuait "Moi c'est Shanley et toi Selena non?". La petite cubaine avait simplement hoché la tête avant de reporter son attention sur le match. Normalement les enfants la laissent tranquille quand ils voient qu'elle ne veut pas leur parler. Il n'y a qu'avec une seule personne qu'elle est à l'aise. Elle n'aime pas parler et seulement une fillette de son âge le comprend. Avec elle, elle n'a pas besoin de s'exprimer verbalement pour que l'autre petite la comprenne. Les autres enfants sont bruyants et passent leur temps à chahuter et se toucher. Elle a horreur de ça c'est pourquoi elle refuse de se mélanger aux autres.

-" Tu veux jouer au foot?" Continua Shanley qui ne se laissa pas impressionner par l'indifférence de son interlocutrice.

Selena dévisagea à nouveau la fillette. Elle savait qui elle était. Tout le monde le savait. Elle danse depuis toute petite et faisait des démonstrations à la récré, elle parlait à tout le monde et mettait souvent le bazar en cours. Une jolie petite Barbadienne toujours en robe, aux yeux verts-bleus époustouflants et avec de longs et sublimes cheveux ondulés.

-" Je ne sais pas jouer." Avait finalement répondu la cubaine de sa voix douce et légère, semblable à un murmure. Il était évident que la fillette n'allait pas la laisser tranquille alors elle était bien obligée de parler de plus le caractère têtu de Shanley l'intriguait. C'était rare que quelqu'un d'autre que son amie de toujours l'intéresse. On pouvait même dire que c'était la première fois. Beaucoup de chose sur Terre l'intéressent mais ces choses sont rarement humaines normalement. 

-" Un des garçons est mon cousin. Je peux lui dire de t'apprendre il est gentil ! Tu veux? Mon papa dit toujours qu'on doit rendre nos rêves réels pour ne pas avoir de regrets. Je sais pas trop ce que ça veut dire mais je crois que là pour toi ça serait de jouer au foot."

Shanley n'avait pas laissé le temps à Selena de répondre qu'elle avait déjà rejoint son cousin sur le terrain. Ce dernier avait accepté devant l'insistance de la petite.

-" Salut! Moi c'est Brandon. Il paraît que tu veux apprendre à jouer ?"

Il surplombait Selena d'au moins deux à trois têtes mais, toujours avec un air totalement indifférent, elle avait fixé le garçon de ses yeux ambre avant de lui répondre que oui. Shanley avait été impressionné par l'attitude de celle qui, encore aujourd'hui, est sa meilleure amie. D'habitude son cousin effraie ses copines à cause de son air bourru.

Flashback - Helia:

Elle était par terre en pleure. Deux garçons s'amusaient à la bousculer car ils la trouvaient bizarre. C'est vrai quoi? Pourquoi elle ne veut pas jouer avec les autres? Elle passe son temps à pleurer quand elle se sent salie et ignore tout le monde. Ils ne comprenaient pas que la petite avait une peur bleue de la saleté, une vraie phobie. À croire qu'il n'y avait qu'une personne sur terre capable de la comprendre alors qu'elles n'ont jamais échangé un mot. Ils allaient encore lui tirer les cheveux quand leurs pantalons descendirent d'un coup à leurs chevilles.

-" Alors les nuls vous ne rigolez plus?"

-" Taïna?" Articula difficilement l'un des deux garçonnets. Il était clair qu'ils avaient peur de la fillette alors qu'ils étaient plus âgés qu'elle.

-" Bah tu vois pas que c'est moi? Bon allez embêter quelqu'un d'autre." Avait répondu la petite Haïtienne en les fixant de ses yeux noirs  avant d'aller s'accroupir devant la petite cubaine"Toi t'es la seule qui n'a pas peur de moi."

-" Pourquoi ils ont peur de toi?" Avait alors demandé Helia en fixant la métisse face à elle. La fillette avait son âge pourtant elle faisait bien deux têtes de plus qu'elle mais ce qui l'intriguait le plus c'était son sourire. Elle n'avait jamais vu quelqu'un sourire autant et être si joyeuse. Taïna était le genre d'enfant que l'on ne pouvait ignorer. Elle était pleine d'énergie et faisait toujours le pitre.

-"Parce que je suis trop belle! Et puis je suis plus grande qu'eux d'une tête !" répondit d'un air enjoué la fillette, faisant bouger ses cheveux frisés, coupés en carré et retenus par un bandeau.

-" Comment tu sais que je n'ai pas peur de toi?"

-" En fait toi quand tu parles c'est juste des questions." Remarqua Taïna en rigolant "Tu n'as pas voulu me donner ta pêche à la cantine alors que normalement quand je demande un truc les autres me le donnent."

Depuis ce jour Taïna n'avait plus lâché Helia. Même quand la petite cubaine a sauté une classe les parents d'Helia ont fait en sorte qu'elles restent ensemble en payant des cours supplémentaires à Taïna.

Aujourd'hui les quatre jeunes femmes doivent choisir leur université. Malgré leur rêve de devenir journaliste, danseuse, mannequin et photographe elles savent qu'elles n'ont d'autres choix que de suivre le chemin tracé par leurs parents. Du moins c'est ce qu'elles pensaient.