SIX
« You taste like a Fourth of july,
Malt liquor on your breath »
- Je n'ai pas mes chaussures... je souffle, plus pour moi-même que pour James qui me précède dans le hall de son Penthouse.
Mon délicieux, mais néanmoins hautement pernicieux, fantasme se retourne vers moi, un petit sourire contrit sur les lèvres. Je me sens ridicule, affublée des vêtements de son fils, sans chaussures à mes pieds et je ne m'imagine pas réclamer à Mylan mes escarpins. Je serais d'autant plus grotesque en les portant avec cette tenue, sans compter le fait que se serait encore donné matière à Dirty Baby pour se foutre de moi.
Le karma n'a aucune limite en ce qui me concerne, il s'acharne ni plus ni moins et avec une certaine fantaisie qui ne m'échappe pas.
- Moi non plus.
James hausse les épaules nonchalamment et coule son regard vers ses pieds toujours nus, eux aussi. Je le dévisage sans comprendre où il veut en venir. Je me dis qu'il se moque de moi, jusqu'à ce qu'il me tourne le dos pour déverrouiller, à l'aide d'une carte magnétique, l'imposante porte d'entrée blindée. Je le suis des yeux, abasourdis, sortir de son appartement. Il se retourne, constatant que je ne bouge pas d'un iotas, et m'encourage à le suivre d'un geste de la main et d'un énième sourire, qui cette fois, atteint ses yeux. Ce rictus sincère adoucit ses traits pourtant marqués et lui donne un air juvénile et insouciant en totale contradiction avec son âge.
Comment ne pas craquer pour cette belle gueule, à la fois mature et paradoxalement enfantine ? Impossible !
Puis-je résister à ses jolies rides pattes d'oies qui se forment autour de ses deux billes bleues ? La réponse est non.
La maturité d'un visage ne m'a jamais paru aussi belle, élégante et harmonieuse.
Suis-je déjà entrain de ruiner le boxer Calvin Klein de Mylan ? Ici, la réponse est oui. Je me désespère.
- La moquette est plutôt agréable, viens en juger par toi-même, me dit-il avec tant douceur qu'il donne l'impression de s'adresser à un petit animal effrayé qu'il tenterait d'amadouer.
Je n'hésite plus et avance - pour un peu, je cours -, puis pose un pied à l'extérieur de l'appartement. Il referme la porte derrière nous et m'invite d'un signe de tête à avancer vers la droite. Nous longeons un long couloir, lui aussi offrant une vue époustouflante, donnant de ce côté sur la ville qui s'étend à l'infini. Nous marchons côte à côte en silence. Malgré la distance entre nous, les quelques centimètres qui nous séparent, j'ai l'impression que son aura me touche, me frôle avec délicatesse. Il y a quelque chose de fort qui se dégage de lui et qui s'imprègne en moi, seulement je ne saurais définir quoi. Mes bras sont secoués d'imperceptibles tremblements. Ma peau frissonne, couverte d'une légère chair de poule. Un filet de sueurs coule le long de ma colonne vertébrale. Mon corps me trahit. Je me sens autant déstabilisées, voir stressée, par cette proximité qu'excitée. Ça me coûte de ne pas pouvoir me jeter sur lui.
Vilaine fille que je suis !
- Alors ? demande-t-il en désignant le sol moelleux sur lequel nous marchons.
- Pas désagréable, c'est vrai.
Je lui souris, certainement avec un air béat. Ça peut vous paraître bête, même complètement stupide et insensé, mais je crois n'avoir jamais eu droit à une attention aussi touchante et attendrissante de la part de qui que ce soit. Encore moins d'un homme, puisque je me résigne à n'être qu'un objet pour eux, et ne cherche rarement à être plus que ça à leurs yeux.
Je me sens soudainement comme une petite fille qui se contente de peu pour combler son manque d'affection, loin de la dépravée aux pensées obscènes et lubriques que j'étais encore il y a quelques secondes à peine. Sa prévenance me touche au-delà des mots. Sa gentillesse, sa bonté, sa bienveillance, dont je n'ai qu'une ébauche, un avant-goût, me broie le cœur, me retourne les entrailles. Cet homme est un véritable gentleman qui m'allège de mon embarras. C'est bien plus que je n'en mérite.
Après s'être engouffrés dans un ascenseur privé qui ne dessert apparemment que le sublime, admirable, splendide, somptueux, olympien - Oups, je m'emballe, pas vrai ? -, James et son séduisant chérubin diabolique, nous atterrissons dans les sous-sols du building. Je m'apprête à quitter le cube de métal, quand mon bellâtre grisonnant me demande de l'attendre là en maintenant les portes ouverte grâce à un bouton prévu à cet effet. Je l'observe s'éloigner à petites foulées, ses pieds nus martelant le sol en béton, pour disparaître derrière une rangée de véhicules. Le bruit d'une portière qui claque, celui d'un moteur qui vrombit et mon fantasme ambulant, cette fois en voiture, revient vers moi.
Il se penche vers le côté passager et m'ouvre la portière avant que je ne l'atteigne. Je grimpe à bord du SUV, bafouillant un « merci » certainement incompréhensible, les joues sans aucun doute rougissantes. Encore une fois, je me sens toute petite, comme une fillette devant son premier béguin. Le pouvoir de James sur moi est déjà sans bornes. Je passe de la jeune femme licensieuse et concupiscente à la petite vierge prude qui vit ses premiers émois amoureux et sexuels. Et vice-versa ! Personne n'a jamais eu cet emprise, cette influence, sur moi.
Je crois que j'ai des troubles du comportement, c'est grave Docteur ?
Les premières minutes sur la route défilent au ralentis, si bien que j'ai l'impression que nous n'avons en réalité pas encore quitté les entrailles du bâtiment où réside mon chauffeur. Je n'ose à peine le regarder et ne me risque qu'à quelques œillades en biais. James semble être de ces hommes qui sont à l'aise en tout circonstance, que rien ne peut affecter. Ses traits ne traduisent aucune émotion particulière. Cependant, ses doigts qui tapotent le volant trahissent une certaine nervosité contrairement à l'ensemble de son corps détendu et de son visage impassible.
J'aimerais briser la glace, avec des paroles bien pensantes, dire quelques choses, n'importe quoi. Enfin, non, pas n'importe quoi, c'est justement ce qui me retient. Dire quelque chose qu'il ne faudrait pas. Je me contente alors de regarder le paysage défiler, en me laissant entraîner par la douce musique jazz qui s'échappe de la sono et nous enveloppe dans l'habitacle.
Je laisse mes pensées divaguer vers l'élévateur dans lequel James et moi nous trouvions avant de quitter sa tour de verres. Je ne peux m'empêcher de l'imaginer se jeter sur moi et ramener mes poignets, fermement maintenus par ses mains, au dessus de ma tête. Comme dans ce fameux bouquin, vous voyez lequel ? Cinquante nuance de sadomasochisme ! Les fouets et les cravaches, très peu pour moi... En revanche une petite fessée si la situation s'y prête, pourquoi pas ?
Je ne suis pas une adepte de la lecture, mais voyez-vous, lorsqu'on se fait interner pour désintox, en plus d'être privé de drogue on est évidemment privé de sexe ! L'horreur ! J'ai donc fait la connaissance d'une nana sympa très portée sur la lecture érotique et comme je n'avais rien d'autre à faire de mes interminables journées de sevrages, je me suis laissée initiée... Bref, je divague... et, entre vous et moi, je m'apprête à divaguer encore plus.
Je nous imagine étant les protagonistes de cette scène relatée dans ce roman. Quand le beau gosse multimilliardaire envoie bouler dans les airs leur contrat et se rue sur la petite vierge effarouchée pour la plaquer contre le métal froid. Je peux sentir les mains de James sur moi, ses pouces dessiner des demis cercles sur l'intérieur de mes poignets pendant que sa bouche se plaque avec virulence sur la mienne. Sentir son corps masculin et viril se tendre contre le mien, avide du sien, à sa merci.
J'essaie de deviner le goût de sa langue, l'odeur de son parfum dont j'ai entraperçu les effluves en partageant cet espace confiné avec lui. Des effluves de mer et d'embruns, associés à l'acidité des agrumes. Un parfum, qui je le sens, se diffuse de plus en plus dans le véhicule. Je ferme les yeux, savourant les arômes qui émanent de son corps, serrant les cuisses en imaginant ses doigts courir sur moi, mordant ma lèvre inférieure en visualisant sans aucun mal sa dentition parfaite s'en prendre à elle... Je ressens, sous le poids de mon imagination torride, une délicieuse mais violente décharge dans mon bas ventre, qui me déchire de bas en haut.
Je crois que je me suis assoupi quelques minutes, après l'orgames discret - je l'espère ! - mais ravageur que je me suis infligée, bercée par les vibrations du véhicule qui évoluait avec fluidité sur le bitume. Le silence qui me berce et m'entoure me fait tiquer. L'autoradio est à présent coupé. Je n'entends plus rien d'autre que la respiration apaisante de James sur laquelle je cale instinctivement et inconsciemment la mienne. Le moteur ne tourne plus, le paysage ne défile plus non plus.
Je réalise seulement au bout d'un court instant que nous sommes à l'arrêt. A travers la vitre, j'aperçois le bord de plage, l'Océan qui lèche le sable.
Un gracieux raclement de gorge m'arrache à la contemplation de ce merveilleux paysage digne d'une carte postale. Je me tourne, lentement et quelque peu désorientée, vers James.
- Je me rends compte, Ivy, que j'ai négligé tout mon devoir d'hôte en te faisant quitter mon appartement le ventre vide, annonce-t-il, en me faisant face. Je n'ai même pas eu la décence de t'offrir un café avant de partir.
- Je n'aime pas le café.
Le bruit assourdissant d'un buzzer, que seule moi peut entendre, raisonne dans ma tête. Réponse nulle ! Tourner la langue sept fois dans ma bouche avant de parler.
- Pourquoi pas dans la sienne ? suggère ma conscience perverse.
- PLOT TWIST : PARCE QUE C'EST LE MEC DE SA MÈRE ! hurle en retour ma bonne conscience, en déployant ses ailes d'anges, l'air outrée.
- SPOILER ALERT : MOI, ÇA NE ME POSE AUCUN PROBLÈME ! S'écrit la petite Ivy cornues sur mon épaule, en tirant la langue, le nez et les sourcils froncés.
Mes deux consciences débattent et ont l'air de finalement trouver un terrain d'entente, depuis que la pétasse à fourche en moi a commencé à énumérer tout ce qui nous fait fondre chez James. A l'heure où je vous parle, elle est encore entrain de dresser la liste du pourquoi je dois fourrer ma langue, de force si nécessaire, au fond de la gorge de Sexy Daddy.
- Je veux dire, ce n'est pas grave. Vous n'êtes pas obligé de... je bafouille avant qu'il ne me coupe.
- Non, je ne suis pas obligé mais j'y tiens. Tu aimes les pancakes ?
Question purement rhétorique, il n'attend pas de réponse et quitte le SUV, avant de venir m'ouvrir la portière. Mes pieds rencontrent le sable au bout de seulement quelques mètres. Je suis mon fantasme interdit jusqu'à une charmante petite bicoques, presque au bord de l'eau, où quelques lève-tôt profitent d'un petit déjeuner sous le soleil.
Vite, nous sommes installés en terrasse, à une table déjà dressée. La serveuse nous refourgue avec un sourire chaleureux les menus, nous conseillant de nous tourner vers leurs spécialités : les fameuses crêpes à pâtes épaisses dont raffolent les américains. J'essaie de me concentrer sur les possibilités qui me sont offerte - un large, trop large choix d'accompagnement. Je n'y parviens pas vraiment, trop occupée à jeter un œil - où deux, tant qu'à faire-, par dessus mon menu pour lorgner sur mon apollon aux yeux océans.
Finalement, après de longues minutes passées en silence, James interpelle la serveuse et commande deux assiettes de pancakes surmontées de chocolat fondue, coulis de framboises et fruits assortis. Je ne rétorque rien, parce je meurs de faim en réalité et que son choix me fait saliver d'avance.
- L'Europe, alors ? demande soudainement Sexy Daddy.
Prise de court, pas spécialement préparée à cette heure à matinale à lui balancer des cracks, je hoche la tête timidement.
- Où es-tu allé ?
Ma tête me fais mal tant je réfléchis à vive allure. Je n'ai jamais, jamais quitté les États-Unis et mes cours de géographie me semble soudain à des années lumières. Au secours !
- La France, je bredouille, à Paris, pour commencer.
- Très beau pays, admet-il. J'ai toujours été fasciné par la langue de Molière. Tu as visité un autre coin de la France ?
Et moi par la tienne, de langue !
- La Suisse ! je réponds, sûr de moi.
James réprime un petit rire. Je fonds au son de ce bruit étouffé que j'aurais aimé entendre éclater, résonner.
- La Suisse est un pays à part entière, Ivy. Cependant, ils parlent français en Suisse Romande. m'explique-t-il de la même voix douce que ce matin, lorsque j'ai cru bon de reprendre Mylan avec cette histoire de Uber.
- D'accord... euh, merci pour cette précision, je balbutie, ne sachant pas si je dois me planquer sous la table.
Non pas sous la table ! Voilà que je me remets à me faire des films bien trop torride dans ma tête de petite écervelée.
- As-tu seulement vraiment été en Europe ?
J'écarquille les yeux et ne réponds pas alors que la serveuse arrive et dépose nos plats, ainsi qu'une cruche pleine d'eau, devant nous. Moi aussi, je suis une cruche. Une cruche vide ! Plus aucune matière grise ne flotte autour de mon cerveau desséché.
Pourquoi cette question, maintenant ? Ma mère est pourtant assez bonne menteuse, et il n'a pas semblé tiquer sur le sujet au restaurant, hier. Je n'ai pas envie de lui mentir, même si ça va me mettre dans la merde. Une merde aussi noir que la tignasse corbeau de Dirty Baby !
- Je... non... Comment vous...
Mon bellâtre lève sa fourchette, piquée au préalable dans un morceau de pancakes dégoulinant de sauce, m'intimant de m'interrompre. Il l'enfourne dans sa bouche et savoure son met. Moi, je ne touche pas à mon assiette, autant perturber par la situation que obnubilée par le mouvement de ses lèvres. Aux commissures de ces dernières, une petite goutte de coulis de fruit rouge retient mon attention.
- Une simple intuition, disons. Mon fils s'est-il bien comporté avec toi ? finit-il par dire.
A un ou deux doigts près, assez bien je dirais !
- Mylan est tout à fait charmant, dis-je en reprenant les mots de ma mère.
- Charmant... murmure James, un sourire à peine dissimulé. Ce n'est pas le terme que j'utiliserais pour décrire mon garçon, mais j'imagine que tu n'as plus aucune raison de me mentir maintenant, non ?
Ses yeux me sondent, guette ma réaction. Je n'en ai aucune, car j'ai du mal à saisir ce qui se passe. Ma mère et moi, enfin surtout elle, avons été démasquée. Est-il entrain de me demander de justifier ce mensonge ? S'attend-t-il à ce que je démentes mes propos sur Mylan - qui soit disant passant, ne sont pas complètement faux ?
Je n'ai strictement aucune idée de ce qu'il sous-entend, si tant est qu'il y ait un sens caché derrière sa question.
- Je ne crois pas, non.
- Bien... souffle-t-il. Je ne te demanderai pas de me révéler le pourquoi de ce mensonge, Ivy. Quant à mon fils, je le connais assez bien pour savoir comment il peut se comporter loin de ma surveillance.
C'est un truc de famille, un don de père en fils, de lire dans les pensées ?
Bouche bée, incapable de prononcer un mot, je le laisse continuer.
- J'espère que la bonne éducation que j'ai...
- Mylan s'est montré très sympathique avec moi et très prévenant, je le coupe, sans réfléchir. Sans lui hier soir, je...
« Je » quoi ? Je n'aurais pas donné cher de ma peau ? Je me serais retrouvé dans une situation inconfortable, voir dangereuses ? Nous connaissant, moi et mes déboires passés, bien sûr que oui ! J'aurais certainement traîné mes casseroles avec moi jusqu'à un squat de junkie pour me trouver une nouvelle dose ou un peu de réconfort. C'est, en tout cas, ce que j'aurais fait avant ma désintox.
J'en tire instantanément un terrible constat, le sevrage, la psychanalyse, ne m'ont pas changé. J'ai fuis, je me suis fuis moi-même, mais je suis incapable de ne pas revenir à mon point de départ. Le manque s'immisce alors dans mes veines. Je n'ai pourtant cédé qu'une fois à l'appelle de mes addictions et voilà que j'en ai déjà terriblement besoin. Ce tête à tête n'arrange pas mon cas, je suis terriblement mal à l'aise et je rêve de laisser mon esprits vagabonder hors de mon corps.
- Tu n'as pas besoin de m'en dire plus, dit-il, une drôle de lueur dans son regard, posé sur mes mains tremblantes.
- Merci.
C'est moins qu'un murmure, plus qu'un souffle. Ç'aurait été au-dessus de mes forces de lui révéler quel genre de fille je suis, quel genre de belle-fille je serais. Ce serait même pire que de lui avouer ma fixete, à la limite de l'incestueux, envers lui. S'il savait, s'il savait tout de moi, il ne s'encombrerait plus de moi ou de ma mère. J'ai soudainement peur de le perdre, un sentiment complètement insensé. J'ai envie de le garder dans ma vie, même si je ne le connais pas, même si il partage celle de ma génitrice. Suis-je barge à ce point ? Il semblerait.
- Gardons ce petit écart pour nous, tu es d'accord ?
- Je... oui...
Que dire de plus ? Ma mère m'arracherait sûrement les yeux de la tête si elle découvrait que James est au courant pour son mensonge monté de toutes pièces sur ma « découverte de l'Europe ». Que je n'en sois pas à l'origine ou qu'il n'en connaisse pas les raisons, n'y changerait pour elle. Elle verrait rouge et en perdrait ses extensions capillaires !
Notre petit déjeuner s'achève en silence. Pas un qui soit pesant mais plutôt, contre toutes attentes, apaisant. Plus de question, pas de secret déterré. Juste le bruit des vagues qui s'échouent sur le sable à quelques pas de nous. C'est donc maintenant, à contre cœur pour ma part, que nous rejoignons la voiture de James. Pas un mot pendant le trajet, pas de malaise non plus. J'en ai presque oublié mes membres qui tremblent et ma peau qui a commencé à me démanger un peu plus tôt. Je me sens sereine et en sécurité.
Enfin, jusqu'à ce que ma villa apparaisse. L'image de ma mère me vient. Je ne lui ai pas donné de nouvelle depuis que nous nous sommes quitté après le restaurant. Je n'ai plus mon portable et j'imagine que ma boite vocale est en saturation. J'aurais dû penser à demander à Mylan ou même à James de la prévenir que j'étais chez eux. Comment l'aurait-elle pris ? Se serait-elle fait un film, remplaçant Derrek par James, sous moi ? Ou est-elle déjà dans cette bulle romantique ou j'existe à peine ?
- Ta mère sait que tu étais chez nous, me dit James lorsqu'il arrête le véhicule devant chez moi. Rassure toi, j'ai omis de lui préciser que toi et Mylan n'étiez « plus en état ». Elle était rassurée.
Rassurée ? Tout peut arriver visiblement. Elle doit déjà être dans sa bulle ou joue parfaitement la comédie, parce que, ça aurait dû la rendre complètement folle. Je ne lui en aurait voulu qu'à moitié, vu l'histoire avec son ex-mari et...
Et ce que je ressens indéniablement pour James. Des sensations, des émotions, qui vont au-delà d'une simple attirance. Rien qu'en me plongeant, là, dans ses yeux, je le sens. Ce n'est pas seulement du désir. Quelque chose de plus profond, de plus abyssale, m'attire chez cet homme. L'océan que contient son regard m'engloutit à chaque fois, me submerge, à raison de moi.
- Je vous remercie, James.
- Ce n'est rien, Ivy. On se revoit très vite.
Main sur la poignée, je m'apprête à le quitter, après avoir peiné à me détacher de ses deux billes bleues qui transpercent mon âme esseulée.
- Vous ne venez pas ? je demande, timidement.
J'ai envie de prolonger ce moment avec lui. Que ma mère soit là ou pas, qu'elle soit entre nous ou non. Honnêtement, je n'en ai rien faire. J'aimerais juste... qu'il soit là avec moi. Même sans un mot, sans un regard. Je m'en contenterais.
- Je n'ai pas le temps pour ça, lâche-t-il avant de faire vrombir le moteur de son SUV.
Je comprends que c'est le signal pour le laisser s'en aller et à regret, je quitte l'habitacle et m'éloigne. Plantée sur le trottoir, je regarde mon bellâtre s'enfoncer dans le quartier jusqu'à entièrement disparaître.
« You taste like a keg party,
Back on the sauce
I like u a lot »
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