QUINZE
« And someone will love you
Someone will love you »
Mais qu'est-ce qui m'a pris, putain ?!
Je descends en trombe du Uber telle une furie - là, j'ai plus des airs de Daenerys, pour le coup - après avoir fuit le Hard Rock Stadium. Je suis une grande malade mentale, je vous le dis ! Tellement atteinte, que je suis forcément incurable. Je vais à l'encontre de ce que je me répète de ne pas faire. Qu'à Mylan de plus que les autres pour provoquer tant de confusions en moi ? Pourquoi fallait-il que je croise le chemin de James et son fils ? D'où vient ce pouvoir, cet ascendant qu'il semble avoir tout les deux sur moi ? Qu'est-ce que...
- Nos voix sont impénétrables, souffle ma mini-moi auréolée, les mains jointes en signe de prière, en se prenant visiblement pour le créateur tout puissant.
- Oh, pas si impénétrable que ça, intervient la traîtresse en jouant de sa fourche. Si tu vois ce que je veux dire...
A deux doigts - il faut que je bannisse cette expression de mon vocabulaire - de m'étriper moi-même, à cause de ma stupidité, de ma faiblesse et mes consciences détraqués, je pousse dans un grand fracas la porte du bungalow de Spanish Baby. En arrivant dans son salon, je le découvre, avec une grande blonde décolorée tout en jambes interminablement longues et en courbes trop prononcées, affalé sur le canapé à moitié dénudé.
- Salut stranger, je m'exclame en attrapant la petite robe noire à sequins au sol, tiens rhabille-toi, toi.
J'envoie le vêtement en pleine figure de la fausse blondinette effarée, toujours à califourchon sur Shaw qui n'en mène pas large non plus. De ses jolies yeux couleur miel, il suit mes déplacements.
- Euh... salut ?
Sur la table basse, j'attrape un pochon de pilules qui traîne et le balance à la nana complètement médusée.
- Cadeau de la maison, barre-toi !
- Mais c'est qui, elle ?! s'écrie-t-elle indignée, en serrant sa robe sur sa poitrine opulente, qui déborde de tous les côtés de son microscopique soutien-gorge.
- Pas la peine de faire les présentations, tu restes pas.
J'ai tellement les nerfs contre ma propre personne, que je suis obligé de me défouler sur quelqu'un. La haine déferle dans mes veines, je dois la recracher. C'est bête pour elle, du coup... je m'installe dans le futon en cuir, juste à côté d'eux. Shawn me fixe, les yeux ronds, ses petites fossettes relevées dans une moue d'incompréhension. Il est trop mignon, ça m'attendrirait presque. Quant à la copie pulpeuse de Barbie, elle finit par se lever en cherchant du regard Spanish Baby qui lui adresse un geste du menton vers la sortie.
- Connard... murmure-t-elle en quittant le salon en direction de la sortie, après avoir jeté le pacs contenant la drogue entre les mains de Shawn.
- Un peu de respect, bitch ! je m'écris, c'était qui celle-là, putain, Shawn, une prostitué bénévole ?
Le beau brun ris sous cape, et son sourire s'étire jusqu'à ses yeux rieurs. Spanish Baby passe une main dans ses jolies boucles, puis s'empare de son t-shirt coincé entre nous. Je l'arrête, m'empare du tissus noir. Ses sourcils se froncent.
- Il t'arrive quoi, en fait ? demande-t-il finalement, en pinçant les lèvres.
- Il m'arrive qu'on va faire bon usage du restant de cette trique, je réponds en lorgnant rapidement sur le renflement de son jogging.
- Attends, quoi ?
Shawn est un peu abasourdi, et je le comprends, il n'est pas de nos uses et coutumes de forniquer en dehors des paiements en natures. Mais là, je suis en situation d'urgences. L'Ivy cornues, qui règne actuellement en maîtresse absolue dans ma tête, a appuyé sur le bouton rouge.
Je crois que je deviens barge, merde.
- Tu m'as très bien compris. Je vais écarter les jambes à 180 degrés et tu feras le reste.
Mon ami se lève, et se dirige vers la kitchenette. Il revient une bouteille de jus de fruit en main, qu'il engloutit avant de la broyer puis de la jeter sur la table basse.
- T'as pas des plans culs, pour ça ?
- J'en ai plus depuis un bail... je soupire en pensant furtivement à ma période pré-désintox. Enlève ton pantalon.
Un rire faux s'échappe des lèvres de Spanish Baby, et je lève un sourcil à son attention.
- J'ai un coeur, tu sais.
- Et un pénis aussi !
Shawn revient s'assoir à côté de moi, mais garde ses distances. Il secoue la tête, et ses bouclettes balaient son front.
- Toi et moi, ça fonctionne pas comme ça.
- Pourquoi tu fais soudainement le difficile ? je lui demande, interloquée.
Le beau gosse à la peau dorée soupire bruyamment et détourne son regard du mien.
- Parce que tu n'as pas envie de moi, soupire Shawn, c'est jamais parce que tu as envie de moi.
Aïe. Le ton qu'il emploie me fait redescendre d'un coup de mon nuage tout gris et orageux, l'atterrissage fait mal. J'oublie de penser uniquement à ma petite personne instantanément. Je me sers de lui, et concrètement c'est juste dégueulasse. Je me dégoûte. Oui, on a nos petits arrangements et chacun de nous y trouve son compte, mais ce que je suis entrain de faire là, ça sort du cadre. Je m'en veux immédiatement. J'adore Shawn, je l'aime comme on aime son meilleur ami. Et je vois bien que je lui fais de la peine, ça fait longtemps que je lui en fais, en vérité. Je ne m'en rends compte que maintenant. Bordel, qu'est-ce que je peux être conne !
- Shawn... je suis, merde... je suis désolé. C'était pas mon intention de t'utiliser.
- Ouais, t'inquiète, répond le brun en posant une main sur mon épaule. Tu sais que que tu comptes vraiment pour moi, et je crois que je ferais n'importe quoi pour toi, Ivy... je débarquerai en pleine nuit chez toi avec une pizza, si t'as faim, ou je parcourrai des centaines de kilomètres, pour t'emmener dans un endroit qui te ferait du bien, si tu me dis que ça va pas... mais j'ai réfléchi depuis la dernière soirée, faut que je me préserve aussi un peu, tu vois ? On s'était pas revu depuis six mois, et je sais que t'as vécu des sales moments, je me doutais d'où t'avais atterrit, que t'étais revenue de l'enfer... j'ai connus ça, tu le sais... mais t'es pas venu me voir à ton retours de désintox, t'as attendu trois mois de plus. T'es revenue par intérêt.
Je baisse la tête, honteuse, car Shawn a raison. J'aurais pu venir le voir bien avant d'avoir replonger. J'aurais dû. En sortant de cure, je me suis enfermée dans une bulle - fragile qui menaçait d'éclater à tout moment. Ma meilleure amie était à des milliers kilomètres d'ici, en Angleterre. J'étais seule, coincé avec ma mère qui s'acoquinait avec son addiction tandis que je luttais contre les miennes, et pas une seule fois je n'ai pensé à venir voir mon seul ami. Peut-être parce que, inconsciemment, j'avais peur de flancher, et pourtant le résultat est le même aujourd'hui.
Je suis une putain d'égoïste.
- Et, continue Spanish Baby, en relevant mon menton pour m'obliger à le regarder dans les yeux, je pensais vraiment pouvoir reprendre là où on s'était arrêté. Je croyais sincèrement être passé à autre chose depuis tout ce temps, mais c'est pas vraiment le cas. Alors, je préférerais vraiment qu'on laisse tout ça derrière nous et qu'on soit amis. Parce que je tiens à toi, Ivy. Vraiment.
Ce garçon, est un garçon bien. Je le sais depuis que je le connais, tout comme j'ai toujours eu connaissance de ses sentiments pour moi. C'est moi qui ai instauré cet échange de bons procédés entre nous, alors qu'au fond de moi j'ai toujours su que c'était mal. Seulement avant, j'étais toujours bien trop défoncée pour m'en rendre compte. Trop influencée par les psychotrope pour voir que je lui faisais plus de mal que de bien, pour voir à quel point il était désespéré pour accepter le peu que je lui donnais.
- Je... ouais, bien sûr. Je sais pas quoi te dire, je crois que j'ai trop honte de moi pour...merde, je suis vraiment flingué, non ? je bégaye avant de conclure par un rire nerveux.
Je me sens vraiment comme une merde, là. Et je vous assure que c'est un euphémisme.
- Tu sais quoi ? On va se mettre un bon film, se rouler quelques bedos, et passer à autre chose. Allez, viens là.
Shawn m'ouvre ses bras chaleureusement, un grand sourire sincère jusque derrière les oreilles, et je ne résiste pas à son étreinte, à la chaleur qu'il m'offre sans aucune ambiguïté. Je me blottis contre lui, et il m'enserre, son menton posé sur ma tête. Les battements de son cœur, tout contre mon oreille m'apaisent. J'aurais tellement aimé être une fille normale, une fille bien pour un garçon bien...
***
- SOIIIIRÉE PYJAMA, LES GARS !
L'entrée bruyante de Jily dans le bungalow, nous réveille. Totalement désorientés, Shawn et moi tournons la tête vers ma meilleure amie, qui déboule chargé de sacs. Vautrée contre Spanish Baby, je me redresse difficilement. Les quelques joints qu'on s'est fait tourner, m'ont mises dans un sale état. Quoi que j'apprécie cette léthargie, permettant aux turbines de mon cerveau de se mettre sur pause et cesser la surchauffe. Du coin de l'œil, alors que ma copine commence à déballer ses trésors de gourmandises sur la table basse, je vois Shawn éteindre la télévision sur laquelle défilait le générique de fin du film devant lequel nous nous sommes apparemment endormis.
- Il n'est que 14 heures, nous informe-t-il après avoir vérifié sur sa montre.
- Ok,après-midi pyjama, dans ce cas, réponds la jolie brunette en haussant les épaules. Allez, en slips !
Face à nos mines faussement outrées, Jily grimace, tirant la langue et fronçant son petit nez délicat. Elle contourne la table qui nous sépare et se laisse tomber entre nous, puis passe ses deux bras autours de nos nuques.
- J'ai grand besoin d'un câlin, soupire-t-elle, et, le moins discrètement du monde, elle ajoute en penchant la tête vers Spanish Baby : mais un petit cunni ferait l'affaire, en passant.
- Vous foutez de moi, c'est pas possible ? s'exclame Shawn, autant amusé qu'espéré. Vous vous êtes passé le mot, ou quoi ?
Ma copine hausse les sourcils, et se tourne vers moi.
- Mais de quoi il parle ? Il a ses règles, ou quoi ? Il a perdu son humour ? demande ma meilleure amie en nous dévisageant. Est-ce que vous êtes stone ?!
- Laisse tomber, lui disons nous à l'unisson avant de pouffer tout les deux nerveusement.
- Comme vous voulez... Bon, ça n'intéresse personne de savoir ce qu'il m'arrive ? continue Jily, la moue boudeuse, retirant ses mains pour les croiser sur sa poitrine.
- Bien sûr que si, lui dis-je, alors, qu'est-ce qu'il t'arrive, copine ?
Jily se redresse soudainement, un air sérieux, qu'elle n'affiche que rarement, fige ses jolies trait. Elle lève l'index et nous demande de patienter, puis se dirige vers le coin cuisine, farfouille dans les placards et revient avec un saladier et une énorme louche qu'elle dépose devant nous. Shawn et moi n'avons absolument pas la moindre idée de ce qu'elle fait. De son sac, elle extirpe une bouteille de vodka et de sirop à la violettes, et je comprends que soit nous avons quelques choses à fêter, soit nous allons noyer avec elle son chagrin. Une fois les bouteilles entièrement vidées dans le récipient, ma copine s'empare de sachets de bonbons. Des petits nounours en gélatine, de toutes les couleurs, flottent à présent à la surface du mixe douteux.
- Vous vous souvenez de ce scénario que j'ai commencé à écrire l'année dernière ? demande Jily en plongeant la louche dans le saladier.
- Celui de ton grand jour ?
Ma meilleure amie roule des yeux lorsque j'évoque le scénario de son mariage, parce que, oui, elle l'a écrit. Absolument rien n'a été laissé au hasard. La seule chose qu'elle ignore pour l'instant, c'est l'identité de celui qui devra se plier à la moindre de ses exigences, aka son futur mari. Je n'ai pas encore eu l'honneur de le lire, mais je sais qu'en tant que demoiselle d'honneurs, j'ai un script. Un script pour mon toast !
- Mais non ! s'exclame Jily après avoir fredonné la marche nuptiale, celui là n'est pas encore tout à fait au point. Je suis obligé de le remettre à jour très régulièrement ! Les tendances changent, et les potentiels futurs époux aussi. Je vous ai dit que je voulais assortir la couleur des pierres de mon diadèmes à celle des yeux de mon...
- Attends ! je m'écris, l'interrompant et nous épargnant au passage un monologue d'une heure sur les dernières idées qu'elle a eu, est-ce que ça veut dire que, ça y est, t'as réussi à le vendre ?
Un petit sourire naît aux coins des lèvres de mon amie, et je tape mes mains l'une dans l'autre en criant victoire avant même qu'elle ne réponde. Shawn l'applaudit avec moi, et sans aucune prétention bien sûr, Jily accueille nos acclamations en se trémoussant. Puis toujours en se dandinant, elle lève la louche pleine d'alcool et de nounours, et engloutit une grande gorgée.
- Trêve de plaisanterie, mes amours ! dit-elle, une goutte de vodka dévalant son menton, qu'elle essuie du revers de la main. Pour faire court, ce garçon que j'ai rencontré à Londres...
- Le nain londonien ? demande Shawn, avant de se mordre la lèvre inférieure.
- Tsss ! Bois, jaloux ! Tu as de la chance que je ne défigure pas ton visage d'apollon.
Jily s'approche de Spanish Baby qui ouvre la bouche et accepte volontiers, tout en pouffant, manquant de s'étrangler, d'ingérer l'étrange boisson de ma copine qui reprend :
- Mon GÉANT londonien ! Je vous ai dit qu'il était mannequin ? Il en a pas juste le physique, il l'est. Et figurez-vous que ses parents sont dans le monde du cinéma, en tant que réalisateurs et scénaristes ! Je lui ai parlé de ce que j'avais écrit et, et, et ! Ne nous emballons pas plus, mais il m'a proposé de revenir à Londres pour me présenter, moi et mon projet ! Vous imaginez ? Je vais rencontrer ses parents ?!
Dans les yeux de ma meilleure amie, je vois que le scénario final de son Wedding day, et de tous les petits ajustements que cela implique, se concrétise. Elle est surexcitée, et pas seulement pour le côté professionnel. Je la connais, elle nous dit de ne pas nous emballer... mais elle, elle connaît la couleur des pierres de son diadème maintenant !
- Wow ! Putain, Ji' ! C'est vraiment super !
Shawn se lève et étreint notre amie qui joue des sourcils, un immense sourire fendant son visage. A mon tour, je quitte le canapé et enlace ma meilleure amie.
- C'est merveilleux, copine ! Tu le mérites tellement, t'as bossé vraiment dur sur ce projet.
- Effectivement, mais... je répète, on ne s'emballe pas, ce n'est pas la première qu'il sera lu, seulement depuis je l'ai amélioré et corrigé ! Alors, maintenant mes très chers amis, continue Jily, nous allons fêter ça comme il se doit et personne ne rentrera chez soi avant de s'être rouler par terre, et d'avoir à ramper pour se déplacer ! Parce que je décolle pour l'Angleterre dans deux jours !
« But someone isn't me »
•••
Chères lectrices, ce chapitre sera sur deux parties ! Alors rendez-vous avec Ivy, Jily et Shawn, pour prolonger leur soirée au prochain chapitre. 😘
Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top