Chapitre 4 ➸Manoir hanté

N'hésitez pas à commenter au fil de votre lecture afin que je puisse connaître vos réactions face à certains passages ou dialogues :)

Bonne lecture !

— Tu te moques de moi, c'est ça ?

— Naomi, je te jure que non !

La métisse me scrute du regard, à la recherche de la moindre faille qui lui prouverait que je joue la comédie, mais elle ne trouve rien. Rien de plus que de la sincérité. Rien de plus que de la peur. Rien de plus que de l'insécurité. Elle tire une de ses mèches roses en arrière et ferme les yeux quelques instants. Désormais, elle est tout aussi perdue que moi et je le comprends bien. Il y a encore une semaine, si on m'avait dit que je verrai en couleur après un simple rêve d'une rencontre avec un homme, j'aurais pensé qu'on se moquait de moi. Sauf que je n'ai aucun intérêt à faire ça et elle le sait pertinemment, elle me connait assez bien pour desceller mes mensonges.

Avoir une âme-sœur ? Avec ma chance, la nature m'a oublié. Si à mon âge, déjà tous mes amis avaient rencontré leur moitié, la mienne n'existe pas. Pire encore, j'attends toujours le fameux tatouage sur la clavicule gauche qui donne la date de naissance de la personne avec qui je ferai ma vie. Le fameux tatouage qui brûle et devient doré lorsque l'on pose son regard sur cet individu alors que l'on découvre les couleurs. Je fais partie des quelques exceptions peuplant la Terre.

— Fais chier... souffle-t-elle. T'es au courant que c'est tout sauf normal et naturel ?

— Peut-être que je me suis pris un coup sur la tête et que je m'en souviens pas ? Je veux dire, le moindre choc peut produire des choses étranges dans le cerveau humain. Tiens ! L'autre fois, j'ai lu un article où un gars a eu un accident de voiture et quand il est sorti du coma, il ne parlait qu'espagnol alors qu'il n'avait jamais appris la langue !

J'essaye de me rassurer du mieux que je peux. J'hésite à me rendre à la ville la plus proche, à quelques kilomètres du manoir, pour consulter un médecin. Ce n'est que la seule explication rationnelle que j'ai, bien que cela n'explique pas tout à fait mon hallucination dans la salle d'art et de musique...

— Quand je te dis que c'est « pas naturel », je parle de phénomènes surnaturels, précise-t-elle en se massant les tempes.

— De fantômes, d'esprits, ce genre de choses ?

— Tout ce qui est du ressort du métier de Mama Miller, Sparrow.

Je n'aime pas quand elle utilise mon nom de famille. Cela signifie deux choses : soit elle est en colère, soit elle est très sérieuse et dans mon cas, je penche plutôt pour la deuxième option. Ayant en partie grandi avec sa grand-mère, elle m'a avoué avoir été témoin de certains éléments pouvant défrayer la chronique et elle croit aux entités qui vivent, parfois, parmi nous. Je me laisse tomber en arrière sur notre lit et ferme les yeux, j'ai la sensation d'être condamnée, sans raison particulière.

— Je vais appeler Mama Miller. Il n'y a qu'elle qui peut nous aider sans faire flipper tes parents et les gosses.

— Nao-

— Il n'y a pas de « Naomi, laisse tomber, c'est pas grand-chose » parce que cette fois-ci ça ne marchera pas. Je sais très bien que tu n'es pas folle, mais le fait que tu vois en couleur depuis ce matin et que tu as vu une statue pleurer du sang ne me rassure pas ! enchaîne-t-elle en haussant le ton.

L'index devant la bouche et en lui faisant les gros yeux, je lui fais comprendre de baisser d'un ton afin qu'Holly ne nous entende pas, persuadée que l'autre rousse de la famille ne dormait pas à cette heure-ci : 22 h. Les murs ne sont pas suffisamment épais au point de taire des cris. Elle me rejoint sur le lit avec son téléphone en main, pianote sur l'écran tactile et colle l'appareil à son oreille. Je pousse un long soupir. Seulement après quelques minutes de conversation avec Mama Miller, ma meilleure amie me tend son portable que j'attrape avec un faible sourire.

— Bonjour Mama Miller ! Comment allez-vous ?

— Oh mon enfant ! Doux Jésus ! Tu dois me raconter dans les moindres détails ce que tu as vécu !

D'habitude, c'est elle qui fascine les autres avec ces récits et non le contraire. À contre cœur, je lui dévoile mon expérience au cours de laquelle elle fait preuve d'une grande écoute, ce qui m'angoisse de plus en plus. Lorsque je me tais, ce n'est qu'après quelques secondes de silence que j'entends sa langue claquer contre son palais.

— Littlewood Residence est hantée, ma petite.

Mon cœur s'arrête en une fraction de seconde.

Ma respiration s'accélère.

Mes mains tremblent.

Hantée.

— Pardon ?

— Tu m'as bien entendu, répond-elle de sa voix prosaïque. Il ne vous arrivera rien tant que vous ne ferez rien pour énerver les entités qui vivent au sein du manoir. En revanche, un esprit malin se dissimule parmi les autres entités et si des phénomènes surnaturels se reproduisent, une prière aidera sûrement. Les autres moyens sont la fumigation, l'utilisation du sel naturel non raffiné ou contacter ton ange gardien. Si les choses se détériorent, tu devras faire appel à un professionnel.

J'enregistre dans mon cerveau toutes les informations divulguées par Whoopi, la remercie et la repasse à sa petite-fille. Cette dernière poursuit la discussion une dizaine de minutes, sans que j'y prête attention, absorbée par mes propres pensées. Du moins, jusqu'à ce que je sente la brune me donner une tape sur l'épaule.

— Je sais que t'es pas très croyante, mais tu peux toujours tenter une prière.

Parfois, il m'arrive de me dire qu'il y a quelque chose de supérieur au-dessus de nos têtes, qui nous méprise et d'autres jours, je me dis que les gens sont si ignares à l'époque qu'avec l'oppression religieuse, toutes ces idées de forces supérieures persistent. J'avais déjà entendu quelque part que les gens ressentent le besoin d'expliquer l'inexplicable en construisant une image. Peut-être mon professeur de philosophie à l'université disait la vérité.

J'attrape mon ordinateur portable qui est jusqu'alors posé sur ma table de nuit, ouvre une page sur mon moteur de recherche et fouille sur les sites pour trouver la prière la plus adaptée. Lorsque je déniche la meilleure, je me concentre, joins les mains et commence à réciter ces quelques phrases en essayant d'y mettre de la conviction.

— Saint Michel Archange, défendez-nous dans le combat, soyez notre secours contre la malice et les embûches du démon. Que Dieu exerce sur lui son empire, nous vous demandons en le suppliant. Et vous, Prince de la Milice Céleste, par la force divine, repoussez en enfer Satan et les autres esprits mauvais qui rôdent dans le monde en vue de perdre les âmes. Ainsi soit-il.

Un silence s'installe, mais Naomi le brise rapidement.

— C'était pas Gabriel que tu devais prier ? C'est ce que le gars dans ton rêve a dit, non ?

— Je fais avec les moyens du bord et il a précisé que je devais le faire en cas de besoin...

La réalisation me percute de plein fouet. Une gifle monumentale.

— Attends... Et si c'était lui, l'ange Gabriel ?! m'exclamé-je en poussant sur le côté mon ordinateur.

— Honnêtement, ça m'étonnerait qu'un ange te contacte. Je veux dire, il y a tellement de détresse dans ce monde alors pourquoi toi ? Peut-être que c'est ton subconscient qui est entré en action pour cette partie de l'histoire.

Elle n'a pas tort, je le reconnais bien, mais tout de façon... Rien n'est logique. Je retins un soupir.

— Maintenant, il serait peut-être préférable que l'on dorme... me conseilla-t-elle avec un sourire bienveillant.

J'opine de la tête, complètement épuisée, comme si mes batteries se vidaient. À peine allongée, les yeux fermés, que je tombe dans les bras de Morphée.

*

CLAC.

Je sursaute et me frotte le bras, les yeux encore collés, mal réveillée.

— Putain, mais qu'est-ce que tu fiches, Nao ? grogné-je en me frottant les yeux.

Aucune réponse.

Je me retourne lentement et fais face au dos de la jeune femme, aux pays des rêves. Je fronce les sourcils et regarde autour de moi, sans rien distinguer de probant dans la pénombre de la chambre. J'allume ma lampe de chevet pour mieux voir. Tout est normal et d'un grand calme.

— OK, Maple. Tu vas te rendormir tranquillement, il n'y a rien, me rassuré-je.

La lumière allumée, refusant de l'éteindre telle une enfant, je me recouche sur le dos et ferme les yeux.

Une main caresse ma cuisse.

— Naomi, j'aime pas ce genre de blague alors t'arrêtes maintenant, pesté-je.

Je sens des doigts courir sur mon ventre.

Je sursaute et ouvre les yeux.

Rien. Que du vide.

Mon cœur loupe un battement.

Je tressaille et me recroqueville sur moi-même, contre la tête du lit. Mon rythme cardiaque s'accélère. J'ai la sensation d'être observée, sauf que je suis seule avec ma meilleure amie, elle qui dort profondément. C'est alors que ma lampe de chevet se met à clignoter frénétiquement.

— Non, non, non... Je dois rêver là... murmuré-je en sentant mon estomac se nouer.

Le crissement désagréable d'un doigt sur une vitre attire mon attention. Une buée se forme dans le reflet du miroir sur pied. Une feuille d'érable se dessine sous mes yeux. Le symbole même de mon prénom. J'avale difficilement ma salive.

— Naomi... chuchoté-je en fixant du regard le miroir.

Pas de réponse.

— Naomi, insisté-je en levant le ton.

Rien.

— Na...

Je suis brusquement coupée. Je ne parviens plus à émettre un son cohérent. J'ai beau forcer, mes lèvres sont figées. Impossible de les mouvoir. Seuls de faibles gémissements passent leur barrière lorsque je hurle. Je tente de donner un coup dans le dos de la jeune femme, mais bientôt je perds l'usage de mes bras et une vive douleur assaille mon dos, au centre de ma colonne vertébrale. La panique me gagne. Me débattre ne sert à rien, mes membres ne répondent plus à mon cerveau. Paralysée, mais pas anesthésiée, je sens les doigts parcourir de nouveau mon corps, de mes jambes ankylosées à mon thorax agité.

— Bonjour, Maple.

Cette voix, je la connais. Mes doutes se confirment lorsque mon regard se pose sur la petite fille assise au bout du lit. Diana. Son visage reste caché derrière sa crinière de blé.

— Tu penses que Megan et Caspian voudront être mes amis ? me demande-t-elle de sa voix cristalline.

« Moi j'en ai pas envie, pour leur santé mentale. » ai-je envie de répliquer du tac au tac, empêchée par mes lèvres scellées.

— Je pourrais leur demander, tu ne crois pas ?

Certainement pas. Laisse-nous tranquilles !

— Pas ce soir. Papa et maman m'attendent... chuchote-t-elle.

Maman ? Papa ?

— Bonne nuit et surtout... PROTEGE-TOI ! hurle-t-elle.

Son corps se métamorphose. Exactement comme la nuit précédente. Je comprends à cet instant que l'endroit est sûrement infesté d'esprits et qu'elle ne fait pas partie du camp des mauvais... Elle parait tourmentée. Pourtant, cette horrible emprise ne me quitte pas, j'ai toujours la chair de poule et je continue à discerner un toucher sur mes bras.

Ma respiration se fait plus bruyante. Plus rapide. Plus douloureuse. Au bord de la crise d'angoisse et me sentant terriblement en danger, je prie avec la plus grande des sincérités comme ça ne m'était encore jamais arrivée. Les larmes montent ; ma vision se brouille.

Ange Gabriel, si tu m'écoutes, sache que j'ai besoin de toi. Je t'en supplie d'intervenir. Je ne pensais pas te prier, mais je réclame ta protection divine dans le plus grand des respects.

C'est alors que je sens une caresse chaude et apaisante sur mon front, mes yeux se ferment d'eux-mêmes et toutes les sensations désagréables s'évanouissent. Je retrouve enfin la fonctionnalité de chacun de mes membres. Apaisée, un sourire étire mes lèvres et quand je m'éveille, je découvre l'homme de mon rêve, assis, sur mon lit.

Gabriel ? supposé-je, naïvement.

— Je suis là pour t'aider, Maple Sparrow.

Hey !

Que pensez-vous de ce chapitre ?

Qu'imaginez-vous pour la suite ?

Comment s'est passé votre rentrée ? Si vous ne l'avez pas encore faite comme moi, avez-vous autant le seum que moi ? :(

J'ai zappé de publier la partie casting, faut vraiment que j'y pense prochainement :')

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Caroline 

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