Bleu Poison

Olivia, de son souffle fatigué,
Recouvre la vitre d'une légère buée
Elle y trace une esquisse, ni absurde ni belle,
L'allégorie de rien, d'une flamme mourrante dans ses prunelles,
Dont elle se sert pour s'allumer ses cigarettes,
L'air absent, la maigreur pour seule silhouette,
Elle éteint le vacarme de ses soucis,
Les cache derrière une vapeur de goudron, de nicotine,
Ses pieds ancrés sur le béton, l'œil explosé jusqu'à la rétine,
Contre le mur de la pharmacie

Et l'esquisse s'évapore, s'efface, disparaît sans bruit
Comme un enfant au fond de la nuit,
Comme une ado avec du Laroxyl et du whisky
Le paysage de sa campagne continue de se dérouler et qui,
Telles les images d'un film dont la bobine se serait rayée,
À force de répéter, matinée après matinée,
La même journée aux images délavées,
Se noie dans son propre décor,
La broie face à son sort

Le vent emporte les feuilles de l'automne,
Mortes, à la beauté sotte et monotone
Un spectacle déjà vu mille fois, cette poussée sarcastique
Qu'Olivia a d'y voir quelque chose de mystique
Un sous-entendu bien bruyant,
Un secret que tout le monde a entendu,
C'est ainsi, en se croyant brillant,
Que l'on écrit des poèmes superflus

"C'est inspirant", pense t-elle,
"Le vent emporte tout,
Ceux qui n'ont pas d'ailes,
Et bientôt, nous."
Ses mots, que l'on avait déjà entendu ailleurs,
Se perdaient entre les cadavres emportés par la brise,
Le souffle résonnant comme un rire moqueur
À son cœur, se croyant incomprise

Parce qu'Olivia voyait le temps passer,
Puisque qu'elle savait que ses mots ne pourraient plus rien dire,
Elle préféra s'enfuir,
Partir se réfugier dans un lieu tenu sacré,
Entre les paragraphes d'une autre histoire
Elle s'y laisse choir,
Elle s'y laisse porter,
Le rythme des phrases reste figé,
Pas comme un stupide dessin gribouillé sur de la buée,
Sortant de l'imagination d'une vieille enfant paumée,
Qui jongle entre imperfections, erreurs et ratés

Non, il faut la laisser se reposer
Laissez-la rêver,
Elle ne dérange personne
Bonne à rien, brûlant ce que la vie lui donne,
Avec ses clopes, plus loin d'humaine que de loque
À espérer que les récits des romans lui rendent
Ce qu'elle a laissé au milieu des lignes de coke,
De ces plaintes qui n'auront jamais de réponse à leur demande

Ah, qu'elle dort ! Loin de ce monde fou
À s'imaginer des récits déjà-vu
Des clichés entassés, mit bout-à-bout,
Pendant qu'elle transforme sa rue
En théâtre d'affaires de disparition
En commençant par la sienne, puis celle d'un papillon.

Bleu Poison.

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