8 - Bleu océan
On m'appelait. Sans cesse. Quelqu'un prononçait mon prénom en continu, sans s'arrêter.
Encore et encore.
Depuis assez longtemps maintenant pour me sortir de ma torpeur et me faire rager contre cet imbécile qui venait me déranger dans mon sommeil de façon si peu sympathique.
Sarah ! Sarah !
De plus en plus agacée, j'ouvris les yeux. Mais je devais encore être à moitié endormie et le rêve continuait. Je voyais du bleu, du bleu et encore du bleu. J'avais l'impression de voler, ou plutôt de flotter, paisiblement, dans un silence apaisant. J'étais bien. Je ne souhaitais pas me réveiller.
Sarah !
Encore ? Je voulais qu'on me laisse tranquille ! Mais je reconnus soudain la voix de mon père, teintée d'inquiétude, et je décidai de me réveiller pour de bon pour comprendre ce qui n'allait pas.
C'est à ce moment que je sentis la douleur. Partout. Brûlante. J'avais l'impression de ne pas avoir un seul morceau de mon corps non douloureux.
J'essayai de bouger, de tourner la tête pour voir autre chose que ce vide rempli de bleu, mais je n'y parvins qu'avec douleur, et commençai à paniquer.
Sarah, calme-toi. Tout va bien se passer, fit encore la voix rassurante de mon père.
Même si je ne le voyais toujours pas, l'entendre ma réconforta un peu, et j'ouvris la bouche pour lui répondre. A cet instant, de l'eau salée s'infiltra entre mes lèvres que je refermai aussitôt. Je ne comprenais pas ce qui m'arrivait et j'avais l'impression d'être encore enfermée dans un cauchemar. La voix de mon père retentit de nouveau :
N'essaye pas de parler, ma puce, ce n'est pas possible sous l'eau. Je communique avec toi par la pensée. Essaye de faire pareil. Pour l'instant, je ne ressens que tes émotions confusément. Il faut que tu penses à moi et m'envoie une pensée nette pour que j'arrive à te localiser.
Les paroles de mon père me parvenaient difficilement, comme prononcées très loin. Mes pensées n'étaient que chaos. J'avais comme un volcan en éruption dans le crâne qui m'empêchait de réfléchir. Il me parlait d'eau et d'émotions. Je devais encore être en train de rêver, ou alors j'avais de la fièvre et je délirais...
Une pensée nette, ma chérie. Concentre-toi.
Une pensée nette ? Me concentrer ? Il en avait des bonnes, lui !
C'est mieux, continue comme ça !
Qu'est-ce qu'il fallait que je continue ?
Continue à me parler dans ta tête.
Quoi ? Comme ça ?
Oui, c'est parfait, ma puce. J'arrive.
Mais tu es où ? Pourquoi je t'entends et ne te vois pas ?
C'est de la télépathie. Comment te sens-tu ?
Sa réponse à ma question étant difficilement recevable, je me concentrai sur son inquiétude.
J'ai mal partout et j'ai peur. Je n'arrive pas à bouger. Est-ce que je suis malade ?
Je pense que c'est normal. Ton corps a besoin de temps pour s'habituer. J'ai hâte de voir à quoi tu ressembles !
A quoi je ressemble ? répétai-je sans saisir le sens de ses mots.
Tu n'as toujours pas compris ? demanda-t-il d'un ton mi-étonné mi-moqueur.
Sa voix était beaucoup plus nette qu'au début, j'avais l'impression qu'il était tout près de moi maintenant. En fait, c'est à ce moment que je le vis. Il arrivait vers moi en nageant, sous sa forme de triton. Sa grande queue de poisson de couleur bleu foncé brillait sous ce que je compris être les rayons de la lune traversant la surface de l'eau. Il ondulait de façon souple et majestueuse, c'était tellement beau et hypnotisant, et aussi... assez flippant.
Mon cerveau commençait à comprendre que je devais ressembler à quelque chose de ce genre maintenant, moi aussi, mais ma raison avait du mal à imaginer cette possibilité. Et je n'avais ni la force de baisser les yeux sur mon corps, ni celle d'accepter le changement à cet instant. J'étais même peut-être encore en train de faire un rêve, comme cela m'était si souvent arrivé pendant ces dernières années.
S'étant immobilisé à mes côtés, ses cheveux flottant dans l'eau, mon père me contempla pendant un moment avant d'oser me toucher.
Tu es une magnifique sirène, souffla-t-il dans ma tête. Prête pour remonter à la surface ?
Le mot "sirène" prononcé par mon père dans mes pensées me fit l'effet d'un choc assez violent. Le souvenir des minutes qui suivirent m'échappent encore aujourd'hui. Je me revois seulement avec ma mère au regard angoissé dans une barque, des mots rassurants de mon père, et de la douleur qui partait peu à peu.
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ça y est ! On y est ! 😅
Vous êtes toujours avec moi ? 😁
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