CHAPITRE 7: Douleurs

Emilia ne sut pas combien de temps elle gît sur le sol quand elle revint à elle mais quand elle rouvrit les yeux il était toujours là,assis en silence sur le canapé.

Il contemplait le corps nu et meurtri de sa belle fille avec un œil éteint, la lèvre inférieure pendante, il avait l'air déconnecté du réel.

Il revint immédiatement à lui quand il perçut les premiers mouvements d'Émilia, ses pupilles reprirent leur éclat et il se leva lentement.

Il ne la frappa pas cette fois, pourtant la douleur fut atroce quand il la souleva dans ses bras pour la reposer sur le canapé-lit, son corps était cassé, elle n'était plus que souffrance et même les coussins moelleux du canapé lui faisaient mal.

Son beau-père couvrit la nudité d'Émilia avec une des couvertures qui étaient toujours disposées sur le canapé et il dit d'une voix étrangement douce, mais brisée:

— Écoute- moi bien Emiliaaa, je suis désolé de t'avoir grondée. Sa voie était morne, éteinte, comme lointaine et détachée et il prononça le mot "grondé" d'une façon si enfantine et déplacée que ça en était absurde.

Son corps était peut-être brisé, mais son esprit ne put s'empêcher de le remarquer avec une certaine ironie.

Grondé ? Oui c'était bien le mot qu'il avait utilisé comme quand on gronde un enfant qui a pris un cookie avant l'heure du goûter... elle s'était fait « grondée ».

Elle s'était fait violemment casser la gueule, mais son beau-père et probablement le reste de la famille avait déjà digéré les événements et ramené ça à une petite engueulade où on avait grondé la vilaine fille.

Plus rien n'avait de sens, son monde déjà vacillant avait basculé dans la folie.

Elle entendit son beau-père qui murmurait des mots, mais ne comprit rien, il soliloquait pour lui-même dans son propre monde de taré...

Il continua son monologue puis se tut, se leva et sortit de la pièce.

Rien de plus, c'était fin, comme on passe du jour à la nuit en un clic d'interrupteurs en plastique merdique et jauni.

Wow elle s'était faite « grondée » et on dirait bien qu'on venait de lui présenter ensuite ce qui ressemblait le plus a des excuses? Peu être? Pourquoi? Merde c'était quoi ce cinéma?

Elle sourit malgré elle, mais le regretta aussitôt, le moindre mouvement de son visage tuméfié lui procurait une douleur intense.

Elle palpa son corps meurtri, n'osant se relever, ne sachant même plus quoi faire, elle replongea dans un sommeil quasi comateux sans rêve et la douleur s'estompa.

Quand elle se réveilla, Midi était loin, l'heure du goûter aussi, et bien que son ventre gargouillait de faim elle n'en avait cure.

Recroquevillée sur le canapé-lit en dessous de son lit superposé, recouverte d'une couverture, elle ne pleurait pas, elle avait toujours mal, mal partout, son corps et son âme étaient dans une peine insondable.

Elle se releva aussi doucement que possible, mais un éclair de douleur traversa tout son corps, elle fit quelques petits pas hésitants et chacun d'eux était un nouvel éclair de vive douleur.

Elle finit par atteindre son téléphone tombé non loin de son bureau.

Elle le ramassa machinalement avant de s'asseoir sur sa chaise de bureau avec mille précautions.

« Emilia a un mec ! Emilia a un mec ! Emilia est une salope !! »

La voix de son demi-frère dansait dans son esprit, ou ce petit fils de pute était-il allé fouiner?

Elle tomba sur ses derniers SMS, sa douleur sembla disparaître pendant une fraction de seconde et son cœur oublia un instant de battre quand elle vit le message de Flo.

"Moi j'habite a New Cobruzon et toi tu es d'où ?"

Il y avait donc en ce monde une personne qui pensait à elle et qui habitait à côté de chez elle, une partie d'elle-même avait du mal a y croire, mais en même temps on lui aurait dit qu'elle allait être battue par son père elle l'aurait jamais cru...

"Les trucs dingues arrivent en fait, les meilleurs comme les pires... Flo, tu veux vraiment exister dans ma vie? je t'ai dit que ma vie c'était de la merde... à présent c'est encore pire, comment peu tu vouloir de moi?"

Des larmes tombèrent sur l'écran du téléphone, ses doigts voulurent tapé une réponse, mais sa vision embuée de larmes se troubla, elle tapa quelques lettres, sa tête se mit à tourner, elle dû lutter pour ne pas tomber dans les pommes.

Quand elle put de nouveau jeter un œil à son portable elle se rendit compte qu'elle avait envoyé une réponse à Flo : « Fl o je va dlùpdd dmzlk^pf »

« Ok Emilia à présent il va te prendre pour une cinglée » murmura-t-elle avant de s'affaler sur son bureau la tête dans ses bras pour pleurer à chaudes larmes.

Elle pleura tant et tant qu'elle n'eut plus de larmes à faire couler.

Elle finit par se relever et clopina vers le miroir fixé sur la porte de son placard servant de dressing.

L'image que ce dernier lui rendit la fit reculer de stupeur, qui était cette fille horriblement amochée dans le miroir? Mince, c'était elle.

Ses deux yeux injectés de sang étaient pochés, une bosse énorme saillait d'un côté de son front, sur ses deux joues l'alliance de son beau père avait laissé des entailles qui avait saignés, le sang avait coulé sur son menton et sur son cou, son dos était couvert de bleus, son bras aussi et sa cheville était enflées... un massacre.

Elle nettoya ses blessures avec des lingettes puis ouvrit la porte dudressing et décrocha des habits de rechange et prudemment, lentement, les enfila sur son corps meurtri.

Elle boita ensuite jusqu'à l'échelle de son lit, elle ne pourrait pas monter, elle s'allongea donc en grimaçant sur le canapé-lit en dessous.

Au moment où elle fermait les yeux, la porte de sa chambre s'ouvrit et sa mère marchait lentement dans la pièce jusqu'au canapé-lit ou elle s'immobilisa, droite et bras croisés, impassible elle débuta d'une voie sèche:

—Emilia, tu as dépassé les bornes aujourd'hui, ce que t'a infligé Franck est une juste punition, ton Frère a le nez cassé et doit passer la nuit à l'hôpital, il sera opéré demain

Ce n'est pas mon frère " murmura-t-elle.

—Tais-toi ingrate, tu n'es rien de plus qu'un invité ici, tu dois apprendre le respect, dans ton état je t'interdis de sortir pendant 2 semaines, je n'ai pas envie que tu fasses encore honte à cette famille.

—Quoi ?? mais? Proteste Emilia vainement.

—Tu va aussi me remettre tes appareils, PC, phone et ta tablette, je ne veux plus entendre parler de jeux vidéo, et je n'ai pas envie que tu ailles raconter sur des réseaux sociaux les mensonges que tu dois déjà concevoir dans ton esprit d'enfant gâtée, ou que tu t'amuses trouver un salopard de mec à qui montrer des nudes de ton cul.

Elle n'attendit pas de réponse, se retourna et débrancha le PC d'Emilia avant de le glisser sous son bras.

Emilia passa la main sous son oreiller pour en déloger son portable et pendant que sa mère eut le dos tourné elle extirpa la carte SIM et la dissimulée prestement sous sa couverture.

Sa mère fouillait à présent l'étage au-dessus du bureau d'Emilia et trouva bien vite sa tablette puis elle revint d'un pas vif vers Emilia et tendit le bras.

—ton téléphone jeune fille.

Emilia déposa son mobile dans la main tendue, immédiatement sa mère tourna les talons et passa la porte de chambre.

—Tu seras seule ce soir, nous partons à l'hôpital, ne sors pas de ta chambre... sous aucun prétexte et médite sur ton sort.

Ces dernières paroles glissèrent sur Emilia alors qu'elle-même glissa dans un sommeil sans rêves à peine la porte fut refermée, elle serrait dans son poing sa carte Sim, ultime lien vers le monde extérieur.

Pendant ce temps-là, dans la banlieue de la grande ville de New Cobruzon, un jeune homme qui n'avait aucune idée du drame survenu chez sa nouvelle amie était assis sur un des tabourets de la cuisine, il avait un regard dépité tout en fixant son aquarium sans réellement le voir.

Stéphanie avait foutu le camp à peine le dîner terminé, il ne restait d'elle que de la vaisselle sale dans l'évier et ses fringues sales dans la salle de bain.

Elle avait seulement pris la peine de mettre sa petite culotte sous l'oreiller de la chambre a coucher pour rappeler à Flo qu'elle était toujours dans le coin et que s'il avait les couilles pleines il pouvait se soulager dans la culotte de sa meuf officielle plutôt que d'aller chercher une remplaçante.

Cette fois il avait pourtant bien l'intention de rompre, elle se fichait trop de sa gueule.

Il voulut lui envoyer un texto pour lui dire d'aller bien se faire foutre, mais se retint, il était à deux doigts de jeter son téléphone, il tendait déjà le bras pour le balancer sur le canapé au milieu du salon quand l'appareil vibra dans sa main.

Il stoppa son geste et débloqua le téléphone.

« Fl o je va dlùpdd dmzlk^pf »

"C'est quoi ça ? Un bug?"

Sans réfléchir, il appela Emilia et se retrouva immédiatement sur la boîte vocale.

" Son téléphone a du planté on dirait que je rappellerais plus tard"

Il rappela à 21h et n'eut pas plus de chance, puis à 22h et tomba une fois de plus sur le répondeur d'Emilia, il se sentit un peu déboussolé au début, pourquoi ne répondait-elle pas ?

Il appuya une dernière fois sur le numéro d'Emilia, mais raccrocha.

« Est-ce que j'abuse pas à l'appeler tout le temps ? je dois être un peu trop à fond là»

"Elle vit sa vie, je devrais peut être la laisser respirer, je suis sûrement passé pour un gros lourd, elle reviendra quand elle voudra elle à aucun compte a me rendre à près tout, je n'existe pas"

Il ne reçut aucune réponse dans la soirée et ne la vit pas sur Discord non plus.

Le lendemain il n'avait toujours pas de message, pas plus que le jour qui suivit.

La première semaine de juillet passa et aucune réponse n'arriva, les jours passèrent encore et une semaine se transforma en deux et toujours aucun signes de vie d'Emilia.

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