Chapitre 3 - Ligne de conduite


Blessé

Chapitre 3 : Ligne de conduite

Iwaizumi partit tard ce soir-là. Oikawa s'était endormi dans ses bras et le jeune homme avait décidé de partir, ne voulant pas s'imposer et surtout éviter tout soupçon de la part de sa famille. Naïvement, il avait espéré que cette explication, et le baiser qui s'en était suivi, clarifierait la situation. Mais au fond, cela ne clarifiait pas grand chose. Il était perdu et malheureux avant de le voir, il l'était tout autant après, avec toutefois des papillons dans le ventre qu'il lui était bien difficile d'expliquer.

Ce soir, malgré lui, Oikawa avait été son premier baiser. Pendant des années, il s'était imaginé son premier baiser. Il aurait invité une jeune fille dans un beau restaurant, ils se seraient ensemble promenés dans un parc, puis ils seraient allés dans une salle d'arcade pour lui offrir la plus belle des peluches, et enfin, devant chez elle, il l'aurait embrassé. Cela devait être doux et tendre, juste ce qu'il fallait pour se sentir merveilleusement bien. Il aurait senti ces milliers de papillons dans le ventre. Et cela se serait expliqué parce qu'il était éperdument amoureux de cette jeune fille et qu'il n'envisageait pas sa vie sans elle.

Il s'était figuré tellement de scénarii pour arriver à celui-ci, si parfait. Mais jamais au grand jamais, il ne lui était venu à l'idée qu'il pourrait s'agir non pas d'une femme mais d'un homme. Pour tout avouer, il l'avait embrassé de manière impulsive, sans se poser de questions. Pour le faire taire, mais aussi parce que ses paroles l'avaient touché. Ils feraient tout ensemble, sans lui, Oikawa n'avancerait pas. Il y avait toujours eu une sorte d'accord tacite sur ce sujet jusqu'à présent. Mais tout était tellement différent lorsque l'on mettait des mots sur les choses. Et, il l'avait embrassé.

Est-ce qu'il le regrettait ? Non, pas vraiment. C'était tendre, désespéré mais si doux. Cela avait éveillé en lui des sensations qu'il ne pensait pas pouvoir ressentir vis-à-vis d'un homme. Alors, s'il ne le regrettait pas, pourquoi avait-il peur ? Peut-être parce qu'il pensait malgré lui que c'était peine perdue ? Peut-être Oikawa l'avait-il laissé faire parce qu'il ne s'y attendait pas ? Mais dans ce cas, pourquoi étaient-ils restés enlacés une bonne partie de la soirée sans rien dire ? Iwaizumi devait bien se l'avouer, il était bien dans les bras musclés de son capitaine. Il se sentait en sécurité, comme protégé du monde extérieur et de ce que les gens pouvaient penser ou dire de lui. Mais voilà, n'était-ce pas égoïste de songer à son propre bonheur en excluant celui de sa famille et des personnes qu'il aimait ?

Le jeune homme était tout à ses pensées lorsqu'il arriva chez lui. Il ne prit pas la peine d'aller voir ses parents et se dirigea immédiatement dans sa chambre où, après s'être dévêtu, il s'allongea dans son lit. Sa lèvre le faisait encore souffrir, elle le tiraillait un peu. Cette douleur contrastait tellement avec la douceur des lèvres d'Oikawa, avec cette chaleur qui l'avait envahi. C'est l'esprit totalement embrouillé que le pointu s'endormit, épuisé.

Le lendemain matin, Iwaizumi se promit, après avoir posé le pied au sol, qu'il aurait une explication avec son meilleur ami. Lui-même ne savait pas comment ils allaient aborder cela, mais une chose était certaine : ils ne pouvaient pas rester sans se parler. Déjà parce qu'Oikawa n'en avait pas l'air comme cela, mais il frappait fort, et aussi parce qu'il avait besoin qu'on lui dise ce que signifiait ces papillons qui lui dérangeaient l'estomac depuis la veille. C'était quelque chose à la fois d'agréable mais aussi de déplaisant car il avait l'horrible impression que cela se reflétait sur son visage et que tout le monde pouvait savoir ce qu'il pensait.

Arrivé au lycée, le jeune homme alla s'installer à sa place et attendit que son meilleur ami entre enfin en classe. Bien sûr, il n'allait pas en parler devant tout le monde, il fallait donc prendre son mal en patience et faire un effort de concentration considérable afin de ne pas lui sauter dessus quand il serait là. Oikawa arriva à la sonnerie ; il lui adressa un signe de tête et un sourire, avant de se mettre au travail comme si de rien n'était. Les autres élèves, eux, les observaient de temps à autre. Oikawa et Iwaizumi avaient le visage tuméfié tous les deux et les rumeurs étaient sans doute allées bon train : bref, le monde entier savait qu'ils s'étaient battus. Chacun semblait prendre parti dans sa manière de regarder l'un ou l'autre alors que les deux intéressés, eux, ne se faisaient déjà plus la tête.

Que la matinée lui parut longue ! Qu'il lui fut difficile de ne pas regarder le passeur en espérant tomber parfois dans son regard ! Il ne s'était jamais rendu compte qu'Oikawa était plutôt beau garçon. Bien sûr, toutes les filles le disaient et il l'entendait à longueur de journée, mais jamais, jusqu'à maintenant, il ne s'était lui-même fait la réflexion. Oui. Oikawa était beau. Sentant que ses joues commençaient à s'empourprer, il détourna le regard et se remit sur ses exercices de mathématiques qui eux, au moins, ne lui provoquait pas un sentiment persistant de gêne.

Ce n'est qu'à la pause méridienne, lorsque tous les élèves quittèrent la salle qu'Oikawa se tourna finalement vers le pointu et lui dit :

« Je suis rassuré de voir que tu ne me fais plus la tête. Je pense qu'on était quitte de toute façon hier. Même si je pourrais t'en vouloir d'être parti comme un voleur... »

Comment pouvait-il dire cela avec autant de désinvolture ? Il lui parlait comme si tous deux étaient ensemble et qu'Iwaizumi était parti immédiatement après avoir fait l'amour. A cette idée même, ses joues devinrent écarlates, la couleur montant jusqu'à ses oreilles.

« Je ne pouvais pas rester : mes parents m'attendaient....Oikawa kun, il faut qu'on discute. »

« Sans se frapper cette fois alors. » S'empressa d'ajouter le passeur en lui adressant un sourire des plus charmeurs.

Le Oikawa souriant était de retour. Pour lui, tout était un jeu. Etait-ce une manière pour le jeune homme de se libérer de la gêne, cette même gêne qui étouffait le champion ?

« Je... Ce qu'il s'est passé hier, euh... Je suis désolé, je n'aurais pas dû. »

Iwaizumi avait baissé d'un ton en prononçant ces paroles, comme s'il avait peur que quelqu'un ne les écoute dans le couloir pour ensuite tout répéter. Le sourire du passeur s'élargit. Il posa alors sa main sur son épaule et lui fit un clin d'œil tout en ajoutant :

« On s'est embrassé hier. J'ai trouvé cela très agréable moi. Et... » à son tour, il baissa la voix et murmura dans un souffle « j'espère que cela recommencera encore. »

« Arrête de me parler comme si j'étais une de tes nombreuses conquêtes Oikawa kun ! »

Ses paroles le blessèrent sans doute car le numéro un d'Aoba Jôsai eut un mouvement de recul et fit la moue. Il ne semblait pas apprécier que son ami le rembarre de cette manière alors qu'ils parlaient tous deux de leurs sentiments respectifs. Ou du moins, ils essayaient tant bien que mal. Ou plutôt, Oikawa parlait et Iwaizumi se noyait littéralement dans la foule de sentiments qu'il pouvait ressentir, tous à la fois et qui était d'une violence innée.

« Je... Je l'ai fait de manière impulsive, sans réfléchir. Je voulais que tu te taises, c'est tout. Je... Je ne suis pas prêt. Et... Je me sens perdu. »

Oikawa hocha la tête. Le chemin lui permettant de se rendre compte qu'il aimait les hommes, le passeur l'avait déjà effectué, des années auparavant. Alors certes, il était sorti avec toutes sortes de jeunes filles, mais c'était plutôt pour passer le temps que par goût réel pour les midinettes. De plus, il avait eu besoin de faire cette expérience pour se rendre compte qu'il n'aimait que les hommes. Depuis le collège déjà, il avait bien senti qu'il était différent, lorsque, malgré lui, ses yeux se portaient sur ses amis en train de se changer. Cela ne l'empêchait pas de faire toujours une remarque idiote à leur propos, mais c'était surtout une manière de noyer le poisson car il était bien difficile de faire comprendre à des élèves de collège que le sexe opposé n'est pas celui qui nous attire de prime abord.

« Et bien j'attendrais le temps nécessaire. Après, on peut aussi continuer à se voir et toi, ça te permettra d'y voir plus clair et de savoir ce que tu veux vraiment. Qu'en penses-tu ? »

Il était bien là le problème. Iwaizumi ne savait pas quoi en penser. Bien sûr qu'il avait envie de sentir encore une fois les lèvres si chaudes et si douces d'Oikawa sur les siennes. Mais à côté de cela, il y avait tant de paramètres à prendre en compte.

« J'ajouterais juste une chose Iwa chan. La société n'a pas à te forcer à faire quoi que ce soit. Ta vie sentimentale t'appartient. Ne laisse jamais quelqu'un d'autre que toi te dicter ta ligne de conduite. Si tu as envie de faire quelque chose, fais-le. Ton bonheur avant tout. Celui des autres viendra ensuite. »

Ces paroles eurent un drôle d'écho avec les pensées qu'il avait eues ce matin. Fallait-il choisir son propre bonheur ou plutôt celui du plus grand nombre afin de ne faire souffrir personne ? Mais s'il se détournait de l'homme qui l'attirait pour aller vers une jeune fille, ne se rendrait-il pas lui-même malheureux ? Et puis, est-ce que cela serait honnête pour ladite jeune fille ?

« Ce soir, mes parents ne sont pas là, je te propose de venir dormir à la maison, après le volley. Comme ça, on pourra passer la soirée ensemble et discuter si tu le souhaites. D'accord ? »

Comment lui dire non ? Comment faire pour détacher son regard du sien et ne pas se mettre à rougir comme une jeune fille le jour de son premier rendez-vous ? Jamais Iwaizumi ne s'était senti aussi faible et troublé. Oikawa reprenait le dessus et il voyait bien dans les prunelles de son ami qu'il y prenait un malin plaisir.

« Tu ne joues pas hein ? » demanda le pointu d'une voix presque implorante.

« Avec toi ? Non. Pas à ce propos. »

D'un geste tendre, Oikawa caressa la joue de son camarade de classe. Par réflexe plus qu'autre chose, Iwaizumi se recula, mal à l'aise comme jamais. Il n'y avait personne autour d'eux. Mais pourrait-il vivre ainsi en se demandant tous les jours si quelqu'un ne les regardait pas ?

Lorsque les cours reprirent après avoir mangé, tous deux se mirent au travail et ne s'adressèrent plus la parole de l'après-midi. Ce silence les apaisa. Il y avait le moment où l'on parle, mais aussi le moment où il fallait se poser et réfléchir à la situation. Situation qui par ailleurs demeurait assez complexe, il fallait l'avouer et surtout à cet âge-là.

Seize heures sonna enfin dans le lycée d'Aoba Jôsai et tous les élèves furent autorisés à quitter la salle de classe pour rejoindre les différentes activités extrascolaires. Iwaizumi avait pris le sac d'Oikawa et marchait avec lui en discutant. Qu'il était bon, l'espace d'un instant, de se comporter comme avant et de ne pas se poser de questions.

Arrivé au gymnase, Oikawa s'assit sur un des bancs et observa ses camarades pendant la majeure partie de l'entraînement. Dès que le jeune homme prenait une balle, il se faisait immédiatement houspiller par l'intégralité de l'équipe et l'entraîneur inclus. Qu'il détestait rester là à ne rien faire ! Heureusement que la soirée serait un peu plus intéressante car c'était un coup à devenir fou. Ainsi, n'ayant pas la possibilité de jouer, il décida de reporter son attention sur Iwaizumi.

Bien sûr qu'il avait déjà pensé à lui depuis le temps qu'ils se connaissaient. Et bien sûr qu'hier, ça avait été une énorme vague de soulagement qui l'avait submergé lorsqu'il l'avait embrassé. Toutefois, derrière cet air désinvolte et assuré, le passeur s'inquiétait. Il avait peur que cette relation ne lui en coûte trop, qu'Iwa chan ne se lasse et qu'il le laisse seul, totalement anéanti. Un baiser est un baiser. On peut s'expliquer et se dire qu'il n'était pas important. Mais si tous deux passaient du temps ensemble, Oikawa savait qu'il en voudrait plus, qu'il ne pourrait plus se passer de son vice capitaine. Et c'était ça qui l'effrayait par-dessus tout. Parce que voilà, il aimait son regard franc et colérique, il aimait ses jambes fines et musclées, son torse bien sculpté, le sourire qui étirait ses lèvres les rares fois où Oikawa le faisait rire. Tout cela, il l'aimait d'amour. Et il était prêt à l'attendre. Mais si l'attente ne menait à rien, serait-il capable de tenir le choc ? Il n'en était pas tout à fait sûr.

A vingt heures, tous les joueurs sortirent finalement du gymnase. Le passeur attendit donc son pointu sur le seuil de la porte et ne tarda pas à le voir arriver. Iwaizumi semblait toujours aussi embarrassé mais ses joues n'étaient plus aussi rouges. Ses cheveux étaient trempés et quelques gouttes perlaient sur sa joue. Oikawa dut se mordre la lèvre inférieure pour ne pas les essuyer du bout des doigts, se doutant que ce contact ferait frémir son camarade et le gênerait davantage.

« Je te propose que l'on passe au combini avant de rentrer, on prendra un plat rapide, cela te convient ? »

« Oui, c'est une bonne idée, cela nous évitera de faire la cuisine. En plus, j'ai envie d'udon. Ce sera l'occasion. »

La proposition d'Oikawa sembla rassurer l'attaquant qui afficha un léger sourire, plus décontracté. L'amitié reprenait le dessus, ils se comportaient comme deux amis et oubliaient un peu ce malaise qui n'existait pas autrefois. Néanmoins, Iwaizumi ne se rendait pas compte des efforts du plus grand pour ne pas aller droit au but et lui demander de mettre des mots sur ses sentiments. Oikawa était bien plus impulsif que lui en règle générale et se maîtriser ainsi tenait tout de même du miracle.

Après être passé s'acheter à manger, ils allèrent chez le capitaine et s'assirent tranquillement sur le futon du jeune homme, dans sa chambre, la télévision allumée afin de servir de fond sonore. Finalement, quand ils étaient occupés, aucun embarras ne se faisait sentir puisqu'ils n'avaient pas le temps d'y penser. A la télévision passait une émission idiote où des hommes déguisés en poissons devaient servir des clients dans un petit snack en bordure d'une rue animée de Tôkyô. C'était très bien, cela ne leur demandait pas de réfléchir, vraiment pas.

Au bout d'un moment, ils se mirent finalement devant un film, chacun de son côté sur le futon, sans oser s'approcher l'un de l'autre. Depuis la caresse d'Oikawa, ils n'avaient plus été du tout en contact. Le passeur ne regardait l'écran que d'un œil, s'occupant de sa cheville, la massant avec une crème qui lui avait été prescrite. Malgré lui, son ami ne put s'empêcher de regarder ses mains, si fines, si douces, si... Il détourna finalement ses prunelles et tenta de reprendre ses esprits face à un Captain America qu'il n'avait jamais trouvé aussi mignon. Passé minuit, les lumières furent éteintes et tous deux se couchèrent, en boxer, de part et d'autre du lit. Ce n'était pas la première fois qu'il dormait ensemble. Oikawa était fainéant. Il avait toujours détesté préparer les chambres d'ami alors bien souvent, depuis qu'ils étaient enfants, Iwaizumi dormait avec lui. Les espaces étaient bien délimités et personne ne pouvait ainsi se déranger.

Oikawa, comme à son habitude, s'endormit particulièrement vite. Mais ce n'était pas le cas de son meilleur ami. Quelques rayons de lune passaient au travers des rideaux transparents de la chambre du jeune homme, éclairant doucement son visage. Il s'était promis de ne pas penser, de ne pas réfléchir, mais c'était trop difficile. Comment ne pas réfléchir quand l'homme que l'on a embrassé la veille est couché à quelques centimètres de soi ? C'était peine perdue.

Poussant un léger soupir, il finit par se lever en tâchant de ne pas faire de bruit et s'assit face à la fenêtre, levant les yeux au ciel pour apprécier cette belle clarté lunaire et les millions d'étoiles qui se dévoilaient peu à peu dans ce ciel sans nuage. Il se sentait bien là, comme bercé par ces astres qui veillaient sur lui et semblaient le protéger. Peu à peu, il ramena ses genoux contre son torse et demeura ainsi, sans bouger pendant de longues minutes, léthargique.

Il était environ deux heures du matin lorsque le passeur ouvrit les yeux, s'étonnant de ne plus sentir son champion favori à ses côtés. Il le vit quelques mètres plus loin, près de la fenêtre. Les rayons de lune éclairaient sa chevelure noire corbeau ainsi qu'une partie de son corps. Il ne put s'empêcher de le trouver envoûtant ainsi, tentateur même. Iwaizumi avait toujours été la pomme qu'il avait eu envie de croquer, le pêcher originel qu'il désirait plus que tout posséder. Il y avait sincèrement cru la veille. Mais maintenant qu'il devait le convaincre...

Essayant de se lever sans trop prendre appui sur sa cheville douloureuse, il vint jusqu'à son compagnon de chambrée qui ne l'entendit même pas, trop absorbé par ses pensées. Alors, lentement, Oikawa s'assit derrière lui, écartant doucement les jambes afin de le prendre contre lui. Sur le moment, surpris, Iwaizumi se crispa et tenta de se dégager.

« Je ne te ferais rien, ne t'en fais pas. » murmura le passeur en posant nonchalamment sa tête contre son cou, appréciant la chaleur de sa peau et cette odeur si agréable qu'il pouvait respirer à plein poumon grâce à cette délicieuse proximité.

Bien sûr, le passeur se doutait que si peu vêtu, corps contre corps, peau contre peau, Iwaizumi devait ressentir une foule de sentiments contradictoires allant de l'envie de rester à celle de prendre ses jambes à son cou. Qu'il lui fut agréable de voir qu'il cessa de bouger et ne dit plus rien, comme si, lui aussi, sans oser le dire, appréciait ce moment. Le torse d'Oikawa était chaud et rassurant. Afin d'être toujours plus proche, il avait passé ses bras autour du ventre du pointu sans pour autant faire quoi que ce soit d'autre. Il y allait par étape. Et ne serait-ce que celle-ci le rendait heureux.

Si Iwaizumi n'était pas sûr à l'heure actuelle, Oikawa, lui, maintenant, en avait la certitude. Il était fou de son numéro quatre et il n'avait pas l'intention de le laisser partir. Quoiqu'il arrive.

« Tu vois Iwa chan, il n'y a rien de sale ou de déshonorant, le principal, c'est de se sentir bien. C'est tout. »

« Depuis quand tu le sais pour toi... je veux dire, que tu préfères les hommes ? »

« Cela va faire cinq ans maintenant. Je ne t'en ai pas parlé parce que c'était délicat de le dire au collège. Maintenant c'est différent. On a vieilli et puis tu as fait le premier pas. Je n'y croyais plus pour tout t'avouer. »

Un petit rire prit le passeur. Ce n'était pas un rire moqueur, il montrait plutôt sa gêne en réalité.

« Pourtant, je ne sais pas moi-même ce que je préfère... »

« Oui, sans doute. Mais tu ne t'es jamais soucié des filles jusqu'à présent. Et ton premier réflexe a été de m'embrasser moi et non de me frapper pour me faire taire. Avoue que ce n'est pas banal. »

Iwaizumi resta un long moment interdit. En fait, il ne s'était jamais vraiment posé la question jusqu'à ce soir. Quand il pensait aux filles, c'était plutôt par habitude, et non parce que l'anatomie féminine l'intéressait particulièrement. D'ailleurs, il n'avait jamais compris l'intérêt de certains de ses amis pour leur poitrine notamment. On parlait de filles autour de lui, c'était donc logique que son esprit ait cherché la femme idéale et non un homme. De plus, ces sensations ressenties là, maintenant, dans les bras d'Oikawa alors qu'il était juste en boxer, collé à lui : c'était indescriptible.

Il ne se sentait toujours pas prêt, pour autant, il voyait bien que le passeur gagnait du terrain sur lui et que, peu à peu, il se laissait faire car c'était si agréable d'être juste bien. Sa peau était bouillante et ses bras protecteurs. Il aurait tant aimé s'y blottir jusqu'à la fin de sa vie afin de ne plus avoir à réfléchir. Oikawa, de temps à autre, ne résistait pas à l'envie de déposer doucement un baiser dans son cou, éveillant en lui ces milliers de papillons qui s'étaient calmés une partie de la journée.

« C'est comme si... ça grouillait dans mon ventre. C'est dû à quoi ? » Finit-il par demander naïvement.

« La gêne mais aussi l'envie. Tu te sens bien et ces sensations sont nouvelles. Souvent, quand je ressens tous ces papillons c'est parce que... mon désir s'éveille. »

Il n'osa ajouter quoi que ce soit, craignant d'effrayer son ami qui déjà semblait se crisper un peu plus. Ils restèrent longtemps, comme cela, dans les bras l'un de l'autre sans parler, Oikawa déposant des baisers dans son cou, se laissant enivrer par la peau chaude et douce de son vis-à-vis.

Alors que la pendule était déjà bien avancée, ils finirent par se lever tous deux et retournèrent se coucher. Cette fois-ci cependant, le passeur n'avait pas l'intention de le garder loin de lui. Il l'attira donc contre son torse, comme il l'avait fait tout à l'heure et entremêla ses jambes avec les siennes en prenant bien garde de ne pas se faire mal.

« Je te promets que je ne te ferais rien. Profitons juste de l'instant présent. »

Et cet instant présent, c'était la chose la plus précieuse qui soit. Oikawa avait l'impression d'être enfin en vie. Son meilleur ami était comme un enfant qu'il fallait éduquer, qu'il fallait rassurer à chaque fois afin, qu'étape par étape, tous deux puissent vivre quelque chose d'exceptionnel qui s'appelait l'amour. Ses lèvres lui manquaient déjà, mais il savait qu'il ne pourrait pas les recapturer immédiatement et que la patience, aussi vertueuse soit-elle, était aussi une bien méchante amie.


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