02.
Je l'ai tué. Je vous le dis,
je vous l'affirme,
je vous le crache,
je l'ai buté.
Pan. Dans la nuque. Le tapis est foutu maintenant.
Est-ce que le fait que le tapis m'importe plus que lui ne vous choque pas ?
Il n'était pas bon, non. On peut même dire qu'il était mauvais, mauvais comme le diable. Quoique... Le diable, je ne l'ai jamais rencontré. Lui, l'autre, si. J'ai même vécu vingt ans avec lui. Alors... Partons du principe qu'il était pire que le diable lui même.
C'était le copain de ma mère, et il m'appelait « ma biche ».
Ma biche, qu'il disait, viens donc prendre un bain avec moi.
Viens.
Des ordres, toujours des ordres.
Ma biche, je vais te laver le dos. Approche, plus près, plus près.
Allez.
C'est bien.
Et puis, pan.
Plus d'ordres.
Le juge m'a dit « Mais pourquoi vous n'êtes pas allée vous faire examiner, pour justifier, pour avoir des preuves ? ».
J'avais douze ans. La première fois je veux dire. C'est peu, douze ans. J'étais une gosse, une gamine. J'étais encore une toute, toute petite fille... Moi, à douze piges, je rêvais toujours du prince charmant.
Sauf que, shit, le prince s'est noyé dans la baignoire...
Après, ma mère est morte. Lui, il a eu la garde.
Il a continué, bien sûr. Tous les soirs. Il avait une endurance d'enfer, un vrai marathonien. Je vais pas détailler, pas pour que vous puissiez vous délecter des détails sordides. La curiosité morbide, c'est comme ça que ça s'appelle. Ça, plus un carambolage sur l'A80, ça vous donne des vacanciers en colère et de la ferraille qui n'avance plus.
J'ai eu trois gosses. Eux, je les aime. C'est un drôle de sentiment, l'amour. Un truc que j'avais jamais connu jusqu'à ce que la sage femme me mette un paquet gluant et braillard sur le torse.
« Félicitations, c'est une fille ! ».
Oh putain... C'est quoi, cette chaleur dans la poitrine ?!
Le 3 février 2003 à 00h04, je me suis réveillée en sursaut. Il n'y avait plus que moi dans le lit froid. Je me suis levée, tout doucement, et j'ai piqué le flingue qu'il planque dans une boîte à chaussure sous le lit.
Je me suis sentie forte. Pour la première fois depuis vingt putain d'années, je me suis sentie puissante.
A cet instant, je ne savais pas tellement ce que j'allais faire avec ce truc lourd et menaçant. Je ne voulais pas spécialement sa mort, mais...
En fait, je ne sais pas ce que je voulais.
J'ai avancé dans le couloir
mes pieds nus sur le parquet glacé
et il était là, l'immonde porc.
Il regardait ma fille dormir.
Pan !
Certains diront que j'ai bien fait. D'autres ajouteront même que j'aurais du le faire plus tôt. Que je suis la victime de cette histoire. Ce n'est pas ce que dit la loi.
Alors, qui croire ?
Moi, je ne regrette rien. J'attends. Mon corps serré contre moi, pelotonnée le cœur au froid dans la baignoire de mes rêves, j'attends.
Pan !
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