l'Attaque

Le jeune prince se figea un instant d'effroi, tandis que les tuiles craquaient de manière sonore et qu'il en entendait plusieurs tomber de la toiture et s'écraser sur le sol. Des sueurs froides dans le dos, il se redressa et bascula de sa paillasse, il recula jusqu'à la sortie du grenier et se laissa glisser silencieusement le long de l'échelle jusqu'en bas.

- Très courageux... Le railla Ire, juste derrière lui.

Il n'y prit pas garde, remarquant simplement que la jeune femme s'était armée d'une épée courte. Matrone et Lunaire étaient également levées, et Discrète, assise sur son lit, tira un poignard de sous son oreiller. D'une secousse vigoureuse, l'austère Cultivée réveilla Joyeuse et Souffrante.

Le toit explosa au dessus d'eux, un nuage de poussière s'engouffra dans la pièce par l'ouverture que menait au comble. Souffrante poussa un hurlement de terreur, Ire et Matrone se dressèrent près de l'entrée et Blanc les imita après avoir saisi un bâton qui traînait dans le coin. Malheureusement, ses armes étaient restées dans la salle du bas.

Soudain, une tête d'oiseau repoussante apparut par la trappe du grenier, Blanc la vit fuser sur lui après une brève hésitation. Il roula sur le côté pour l'éviter et percuta Joyeuse qui bondissait à sa rescousse. La tisserande s'étala au dessus de lui dans une cohue magistrale, Blanc entendit un sifflement curieux et tenta de se redresser.

Lorsqu'il put le faire, il resta muet de stupeur: Ire et matrone tenaient en respect un oiseau plus grand qu'elles et visiblement dangereux, au long cou caparaçonné. Ou plutôt, c'était son cavalier qu'elles menaçaient de leur arme.

Ire discutait d'ailleurs vivement avec le guerrier qu'elle pointait de son épée, jamais encore Blanc ne l'avait vue aussi en colère:

- Qu'en est-il des Forêtsombre? Grondait-elle. Et que fais-tu sur ce territoire?

- Méa et Ningo ont été arrêtés ce soir par la reine Sylvestrine IV, la reine des Amazones les accuse de trahison et a promis leur terre à quiconque lui livrera.

Le guerrier désigna Blanc qui avait pâli, Sylvestrine IV et la reine Rashi avaient donc agi de concert pour planifier son assassinat? Bien que cela ne lui semble pas illogique il sentit son cœur tomber à l'idée que la jeune femme se soit ainsi jouée de lui.

Mais pourquoi ne pas simplement l'éconduire alors? Pourquoi avait-il fallu qu'elle tende ce piège complètement pervers?

Sûrement voulait-elle se dédouaner de sa mort en faisant mine de le traiter amicalement, Blanc savait cependant qu'une telle attitude ne faisait que renforcer les soupçons en temps normal.

Mais déjà Ire continuait:

- Et le monstre?

- Tué Astrid, par les hommes de la reine. Maintenant si tu veux bien me laisser.

Ainsi c'était elle la mystérieuse Astrid. L'épée d'Ire percuta celle de son adversaire avec tant de force que des étincelles jaillirent, le combat s'engagea, féroce et sans pitié. La jeune femme semblait une solide combattante, mais elle devait sans cesse se battre sur deux fronts: contre le guerrier et contre sa créature qui tentait de la mordre.

- La reine Rashi a tout pouvoir sur ta famille, ne l'oublie pas! Dit soudain l'homme à Ire. Si elle veut la mettre à mort, rien ne l'en empêche, crois-moi.

Ire n'afficha aucune émotion à cette annonce, redoublant simplement d'ardeur au combat. Elle parvint à déséquilibrer le guerrier sur son oiseau, mais soudain ce dernier fonça dans une ouverture qu'elle n'avait laissée qu'une demi-seconde. La jeune femme hurla quand le bec du monstre la percuta au flanc.

L'instant d'après, Discrète retirait son poignard ensanglanté du poitrail de l'oiseau qui s'effondra. Le cavalier évita de justesse une charge de Matrone et bondit sur le côté en direction de Blanc qui l'accueillit d'un coup de bâton tandis que les tisserandes lui fonçaient dessus.

Il fit mine de battre en retraite, tenta une botte contre Blanc qui ne l'évita qu'à moitié et reçut un coup d'épée au niveau du bras gauche, para un coup de Joyeuse et, sentant la partie perdue, s'enfuit par le toit et disparut dans la nuit.

Blanc contempla le désastre tout en tenant son bras blessé, tandis que Matrone et Joyeuse soulevaient Ire et l'allongeaient sur un lit au fond de la pièce. Blanc détourna les yeux lorsque Cultivée entreprit de lui ôter sa robe, arrachant à la blessée plusieurs cris de douleur.

- Deux côtes cassées de ce côté, annonça la tisserande. Et deux estafilades à recoudre, ça va aller mais elle est immobilisée pour plusieurs jours.

Les cris d'Ire se transformèrent en pleurs et soudain le ton de Cultivée se fit plus grave:

- Trois côtes de plus de l'autre côté, elles viennent de bouger.... Flute! L'épaule est au moins démise.

- Ce n'est pas pour moi qu'il faut s'inquiéter, gémit Ire. Agostin du Pic empoisonne régulièrement son épée. Le gamin est en danger de mort si on ne lui donne pas l'antidote au plus vite.

- Quel antidote, Astrid? Demanda Matrone.

- Il s'agit d'un sérum que nous les Amazones possédons, répondit la femme tandis que Blanc commençait à ressentir les effets du poison.

Il eut d'abord des fourmis dans les membres, puis sa tête se mit à tinter désagréablement, ce qui lui fit manquer une partie des explications. L'équilibre l'avait quitté autant que l'ouïe, il trébucha puis s'écroula, à moitié aveugle.

Il sentit vaguement qu'on lui versait dans la bouche un liquide qu'il eut de la peine à avaler, puis il sombra.

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