1. La Greyson Corporation



- Bonsoir, s'annonça-t-il.

Il venait à peine de se placer derrière les quatre micros, qu'il se mit à maudire pour la première fois de sa vie, son Boss, son Roi et son meilleur ami : Le vampire le plus puissant d'Epsilon. Rien que ça. Celui-ci, pour le bien de tous, devait rester pour une fois dans l'ombre, alors que d'habitude, c'était plutôt son job. Mais qui donnait-on en pâture à ses requins de la presse, qui se nomment aimablement journalistes ?

Lui.

Journalistes, tss... Qu'est-ce qui ne faut pas faire... Déjà qu'il avait dû s'enfiler un costume trois pièces dans les tons bleus. Apparemment, d'après les rares stylistes morts-vivants de sa boîte, dans leur communauté extra sélect, le bleu, il cite : "donne confiance". Ouais, bah ce ne sont pas eux qui devaient le porter un jour de conférence placé sur une scène surélevée devant les grands pontes de ce monde !

- J'annonce l'ouverture, de la Greyson Corporation ! Une société qui met à l'honneur la pointe de la technologie, la révolution robotique, la recherche en nanotechnologie et la cybersécurité seront à l'honneur. Sans plus attendre, je vous laisse le soin de regarder la vidéo de nos collaborateurs.

Celle-ci créée avec le partenaire principal des vampires, les sorciers, le monde humain n'avait pas l'ombre d'une chance.

Un univers cosmopolite, intrigant, fascinant, s'enclencha, grâce technologiquement parlant à une certaine forme holographique. Que nenni, tout cela était l'œuvre de la magie. Couplé à de la robotique, certes, mais néanmoins magique.

Les mortels, ignorant du monde qui les entourait poussèrent des : « Ah ! », « Oh ! », « Splendide ! » etc.

Quand la vidéo fut finie, la société maître, autrefois secrète des vampires, ne l'était plus tant que ça, propulsée sur la scène internationale.

Matthew, qui s'était mis de côté avant la présentation, retourna avec rigidité et presque à reculons vers le promontoire à micro.

Il essaya de faire semblant de s'intéresser à la première question d'un reporter, -d'après l'étiquette collée sur sa veste noire- un spécimen particulièrement agressif, qui enchaînait les clichés : mal rasé, des cernes sous les yeux, un air passablement aimable et des lunettes à montures carrés.

Mais il ne lui laissa pas répondre, qu'il enchaîna directe sur une autre question et puis une autre et encore une... Bref, vous avez compris.

Il avait presque envie de lui dire qu'il n'avait qu'une tête, pas trente-six. Mais le mot à retenir ici est presque.

Pourquoi diable, donnerait-il des munitions gratuites à Seb, alors qu'il lui suffisait de garder son sang-froid ? Intérieurement, cela l'amusa, puisque techniquement, il avait « un sang froid ». Il esquissa un sourire moqueur, qu'il savait légèrement charismatique, et se tourna vers une autre journaliste qui s'empressa de ne pas commettre la même erreur que son collègue.

Elle posa une question tellement technique que, malgré tous ses siècles d'avance sur elle, il se sentit très con. Mais bon, son domaine de prédilection, c'était la baston.

- Alors là, j'en ai pas la moindre foutue idée, déclara le trentenaire. Moi, je suis là pour la présentation, pour faire joli.

Rires dans la salle et ricanements s'ensuivirent. La journaliste sourit pour rester polie, mais n'en pensa pas moins. Bah, Matt s'en foutait. Il avait la beauté pour lui comme tous les siens, contrairement à elle.

- De toute façon, c'est un concept breveté, vous pouvez le consulter et pour le reste, c'est ultra-confidentiel. Si je vous le dis, je devrais vous tuer, clarifia-t-il.

Phrase bateau, mais assurément vraie. Nouveaux rires, mais pas de la part de la journaliste qui, derrière le sourire de Matt, avait perçu sa sincérité. Cet homme pouvait la tuer, s'il le voulait, sans problème. Du coup, elle stoppa net ses questions et laissa sa place si chèrement acquise à un confrère.

Ouais, ils s'étaient attendus à cette question : les agents de la Com, qui l'avaient briefé en extra rapide avant le show. Ils avaient demandé de les envoyer balader, mais ils n'avaient pas dit comment.

- Où se situe le siège de la Greyson Corporation ?

- Actuellement, il n'y en a pas, mais cela ne saurait tarder, déclama-t-il intentionnellement avec arrogance.

D'après Sebastian- alias le meilleur ami en question - il fallait leur faire le grand jeu.

Voilà pourquoi c'était également sa personne qui avait été sollicitée sur place et non sa femme. Nausicaa n'était pas une femme très complaisante malgré sa beauté. Elle aussi préférait de loin tout dégommer sur son passage.

Passons.

C'est pour cela aussi que la conférence avait lieu à une heure aussi tardive. Ils étaient prêts et parés depuis des mois. Mais Sebastian avait eu la confirmation seulement maintenant de sa prochaine acquisition qui devrait arriver sous peu.

- Votre patron, Monsieur Greyson est-il présent aujourd'hui ? Pourrions-nous le rencontrer ?

Il jeta un coup d'œil à la dénommée Suzy, dont le badge spécifiait qu'elle appartenait à la C.One. Qui d'autre à part une femme aurait pu demander pareille chose ? Il lui servit son plus beau sourire, haut en canines. Nouveaux flashs.

Il réprima soudain une grimace, tout en essayant de ne pas cligner des yeux. Pas sûr que ses rétines sensibles à la lumière supportent une autre dose massive... Malgré la gêne, il se devait de se montrer charmant au possible.

Et lui, qui avait désespéré de s'ennuyer et de n'avoir réellement aucune question pour le moins intéressante... Le voilà servi. À la boîte, les paris faisaient bon chemin : Le Chef de la Garde arrivera-t-il à se tenir correctement le temps de cette comédie ?

- Comme vous le savez sans nul doute, mon patron est un philanthrope qui tient à sa discrétion. J'ai bien peur qu'il nous fera faux bond, vous et moi.

Encore quelques rires. Décidément, c'était un grand comique ce soir.
Matthew Ivashkov accessoirement Le Chef de la Garde du Roi Vampire s'autofélicita pour sa performance forte utile.

Pour ses débuts à la télé, il trouva qu'il s'en sortait plutôt bien. Il se permit même un sourire radieux à toute la salle. Alors que d'ordinaire, il ne supportait pas l'hypocrisie...

Mais un ordre, c'est un ordre. Bien qu'officieusement, son bon vieux Seb non plus n'avait pas eu son mot à dire : un geek avait diffusé une vidéo compromettante sur un metamorphe en pleine transformation, se faisant abattre par un groupe de chasseur.

Le gamin n'avait pas plus de treize ans, et il s'était fait massacrer comme un chien. Quoique maintenant, les bêtes étaient bien plus en sécurité qu'eux, avec toutes les nouvelles organisations pour la protection des animaux. De plus, le gosse était le fils du Bêta de la Meute Des États du Nord d'Epsilon. Du coup, ils étaient tous tombés sur le coup de la loi Séculaire : les Outres protégeaient les leurs.

La vidéo avait fait le buzz avant que la Greyson Corporation se charge de la démentir. Un canular. Rien de plus... Quoi d'autre, sinon ?

La population humaine avait été terrorisée quelques heures de croire ouvertement que les loups garou existaient. Ce qui montra à quel point dans la communauté magique, l'ensemble du monde d'Epsilon, n'était pas près. Pas encore.

Voilà pourquoi une entreprise qui leur permettrait d'assurer la sécurité en limitant les informations humaines avait vu le jour.

- Depuis l'intervention de votre Compagnie, on ne parle plus que de vous, mais avant cela, rien. D'où venez-vous ?

- Qui sait ? D'un autre monde, peut-être ?

Matt sourit, la conférence devait durer grand max dix minutes. C'était tout ce qu'avait accepté d'accorder son gouvernement aux leurs et il venait d'en entamer la moitié. Certains humains haut placés savaient. Rien de mieux que d'avoir des taupes de son côté.

Mais la technologie évoluait. Bientôt, ils ne pourraient bientôt plus se cacher. En attendant ce jour, prendre le contrôle des médias était nécessaire. Ainsi que celui des générations futures avec des jeux vidéo et les réseaux sociaux étaient l'idéal.

Il espérait gagner du temps en tentant un trait d'humour supplémentaire, comme lui avait conseillé son boss. Enfin, il lui avait juste donné une tape dans le dos, en lui disant : "Fais comme d'habitude, soit toi-même". Plus facile à dire qu'à faire.

- Connaissez-vous la G-Soft ? La société de jeux vidéo ? Enchaîna Matthew. Et bien, c'était l'ancien nom de la Greyson Corporation.

L'annonce fit l'effet d'une bombe.

Cette société avait fermé ses portes après une mauvaise pub, une polémique. Leurs jeux ne respectaient pas les normes du marché, bien trop avancé et aussi addictif qu'une drogue. Malgré tout, ils avaient brassé des milliards. Assez pour revenir en force.

Est-ce que le monde était prêt à leur laisser une seconde chance ? Les mois qui allaient venir seraient significatifs.

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