08 | Le jour où les pressentiments devinrent véridiques

*ahem*
mon retard est une illusion–

je suis désolée de mon retard mais notez qu'on est toujours en septembre–
bref j'espère que vous avez passé une bonne rentrée et que tout va bien pour vous :3

~

Le printemps touche à sa fin et l'été va commencer.
— Je ne suis pas d'accord.
Pardon ?
— Je ne suis pas d'accord. Mai vient à peine d'arriver.
C'est le début de la fin.
— Pourquoi ?
Parce qu'on devient tous fous.

~

La première fois qu'Akutagawa avait posé les yeux sur Atsushi Nakajima, la seule pensée qui lui était venue à l'esprit avait été que le jeune homme paraissait étrangement faible, comme s’il n'avat pas sa place dans le Bataillon.
Si on lui demandait des adjectifs pour décrire ce que lui évoquait l'argenté, il éviterait avec soins les mots "force", "courage" ou même "volonté".

Lors de leur première rencontre, le bicolore avait songé qu'Atsushi avait tout du parfait bouc-émissaire sur lequel on pouvait décharger tous les maux de l'humanité sans grandes répercussions.
Et il était certain que l'argenté trouverait tout de même le moyen d'encaisser, malgré l'injustice que représentait le fait d'être blâmé pour chaque faute que l'humanité commettait.

Akutagawa ne savait pas si ce trait de caractère était particulièrement admirable ou tout simplement stupide, bien qu’il penchait plus pour la deuxième option.
Toujours était-il qu'il n'avait jamais soupçonné que Nakajima était le genre de personne à protéger les plus faibles. Il n'avait jamais imaginé que le maigrichon Atsushi ait le courage de tenir tête à un vendeur en colère.

Akutagawa aurait souhaité réagir. Mais il n'avait pas eu le courage de rompre la formation sans un ordre direct de son Supérieur. Atsushi l’avait fait à sa place.
Le soldat lui en était reconnaissant, plus qu'il ne voulait l'admettre. Peut-être parce qu'il s'identifiait d'une certaine manière au gamin des rues qui avait essayé de voler.

Et voir quelqu'un réagir à sa place lui avait fait l'effet d'une décharge électrique, le bicolore avait décidé d'intervenir à son tour.
C'était ce qu'il aimait croire, comme si un étrange sentiment ne s'était pas emparé de lui en cet instant précis et l'avait poussé à agir.

En à peine quelques secondes, Akutagawa s'était senti surpuissant, comme s'il pouvait venir à bout du monde entier à mains nues.
Et même s'il voulait croire le contraire, le spectacle d'Atsushi protégeant ce garçonnet avait un lien avec ce nouveau sentiment.
Le jeune homme n'appréciait pas du tout l'étrange sensation de puissance qui lui donnait l'impression d'arrêter d'exercer un contrôle total sur son corps.

Akutagawa avait très sérieusement considéré l'option "haïr Atsushi Nakajima" qui était particulièrement attrayante selon lui.
Mais visiblement, quelque soit la "malédiction" que son père avait réussi à lui transmettre, le bicolore s'en trouvait incapable.

Son instinct lui soufflait que ce sentiment dépassait toute raison et logique et qu'il était fondé sur quelque chose de bien plus ancien.
Une évidence s'imposa à lui : il devait parler avec sa sœur.
Même si Gin était sa cadette d'un an, elle pouvait toujours avoir des réponses que lui n'avait pas.

Malgré le fait que leur père se vantait de ne pas faire de distinction entre ses enfants, Ryunosuke savait très bien que ce n'était pas spécialement vrai.

Le bicolore prendrait donc le risque de rendre une visite nocturne à sa sœur, au moins pour s'assurer qu'elle allait bien et qu'elle était traitée correctement même s'il en doutait que le contraire soit vrai.
Il fallait s'attendre à tout avec les Brigades Spéciales. 

C'était une connaissance universelle que ce régiment était majoritairement constitué de gosses de riches qui pensaient pouvoir échapper aux combats directs contre les titans tout en ramassant les lauriers.
Ce genre de personne dégoûtait Akutagawa au plus haut point.

Le jeune homme laissa échapper un soupir et il leva la tête vers le ciel qui ne s'était pas encore paré de ses couleurs dorées.
Il pouvait dire adieu à ses heures de sommeil cette nuit.

Mais Akutagawa considérait que c'était un sacrifice nécessaire.

~

La lune était haute dans le ciel, et ce n'était pas l'idéal pour passer inconnu mais le bicolore estima que le manque de lumière était suffisant pour masquer toutes traces distinctives de sa silhouette. 

Selon ses prévisions, s'il partait vers minuit, il serait de retour dans les dortoirs du Quartier Général bien avant le levé du soleil. Akutagawa espérait seulement ne pas avoir fait d'erreur dans ses calculs. 

Il atteignit rapidement le mur Sina avec soulagement. Il savait que Gin et une autre femme allaient faire des rondes de ce côté plusieurs fois par semaine, et s'il ne s'était pas trompé, aujourd'hui était une de ces fois là.

L'inquiétude commença à lui serrer les tripes quand la venue de sa sœur commença à se faire désirer après de longues minutes passées dans le froid à attendre.
Heureusement ce sentiment fut de courte durée car un murmure atteignit ses oreilles et l'instant d'après la silhouette de Gin se découpait parmi les arbres.

Il ne restait plus qu'à se faire volontairement repérer, et Akutagawa écrasa une branche sèche sous son pieds dans ce but précis.
Il espérait seulement que ce soit sa sœur qui décide de vérifier la source du bruit et non pas sa partenaire.

— Quelque chose a bougé par là-bas, murmura une voix un peu plus grave que celle de sa sœur.
— Tu as dû rêver. Et si jamais tu as entendu quelque chose, ça doit sûrement être une bestiole.

Un grognement peu convaincu lui répondit et sa sœur ajouta :
— Très bien, puisque tu as l'air de me croire je vais aller faire un tour là‐bas. Continue sans moi, je te rejoins.
— Et s'il y avait vraiment quelqu'un ?
Akutagawa ne put déterminer s'il entendait du sarcasme ou une réelle inquiétude dans la voix de l'autre femme.

— Si, par le plus grand des hasards, il y a une personne, je crierais. Tu m'entendras.
Sa camarade dut finir par céder, car quelques instants plus tard des bruits de pas résonnèrent un peu plus loin tandis que sa sœur avançait vers lui.

— Ryunosuke ? murmura-t-elle doucement.
— Ici.
Le sursaut qui agira Gin fut facilement perceptible par le bicolore même si ce dernier choisit de ne faire aucun commentaire.
— Qui d'autre ?
— J'avais demandé à tout hasard, chuchota furieusement sa sœur. Ce n'était pas un de nos jours convenus de rendez-vous, alors qu'est-ce que tu fais ici ?

Dans la pénombre, le jeune homme distinguait à peine les contours de la silhouette de Gin, mais il n'avait aucun mal à imaginer son air agacé.

Même s'il savait qu'elle ne pouvait pas voir l'expression de son visage, il garda une face le plus neutre possible.
— Je ne te surveillais pas, promis. J'avais juste retenu que tu faisais souvent des rondes ici. J'ai seulement eu de la chance de tomber sur un des bons jours.
Gin croisa les bras sur sa poitrine.

— Très bien. Et qu'est-ce qui justifie ta présence ici ? Rien de grave j'espère ? Tu mets notre couverture en danger.
— Juste une question.
Sa sœur avait de mal à contenir son impatience, le bicolore pouvait le deviner par sa posture et sa gestuelle saccadée. Mais il pouvait également sentir qu'elle était légèrement déstabilisée : Gin savait pertinemment qu'il ne prendrait jamais le risque de venir à sa rencontre si son interrogation n'était pas pleinement justifiée.

— Oui ? demanda-t-elle d'une voix un peu moins assurée, mais suffisamment stable pour maintenir un semblant d'exaspération. 
— C'est à propos de notre père.
Il fut difficile de manquer le renfrognement de Gin.
— Quoi ? Je n'avais pas spécialement envie de parler de lui.
— Moi aussi. 

Akutagawa se racla le plus silencieusement possible la gorge.
— Il a beau prétendre, il ne nous dit jamais la même chose.
Malgré les ombres, il perçut sans difficulté le mouvement de tête négatif de sa sœur.
— Pour nous embrouiller ou pour qu'on se dispute j'imagine.
— Ses raisons d'agir ont toujours été obscures, confirma Akutagawa. Étant donné que tu es la seule que je peux joindre, j'ai besoin que tu me dises s'il t'a déjà parlé de notre capacité à former des liens avec d'autre personne.

Gin laissa échapper un petit rire.
— Ne pas être social n'a rien avoir avec le sang qui coule dans nos veines, Ryu. Juste… essaie de sourire peut-être ?
En guise de réponse, le bicolore lui jeta un regard encore plus noir.
— Ce n'était pas ma question.
— Je sais. Mais je te taquinais un peu.

Akutagawa refusa de laisser l'énervement prendre le dessus.
— Si jamais notre père a un enfant préféré, ce n'est sûrement pas moi.
— J'en doute, grommela le bicolore. Et de toute façon, tu étais dans les bonnes grâces de–
—Mais je n'ai jamais entendu quoique ce soit à propos d'une capacité à nouer des relations spéciales. Grande sœur me l'aurait dit.
— Grande sœur te dit-elle absolument tout ?
Gin grinça des dents.
— Bien sûr que non ! Mais j'espère qu'elle aurait pensé à m'en parler.

Le jeune homme réprima un grognement de frustration : tout était trop incertain, basé sur des suppositions.

Akutagawa n'eut pas le temps d'interroger d'avantage sa petite sœur car la voix de l'autre soldate résonna non loin d'eux.
— Gin ?
La jeune femme aux cheveux noirs retint un léger juron entre ses lèvres et elle jeta un regard presque paniqué au bicolore.
Ce dernier essaya de prendre un air le plus rassurant possible.

— Higuchi ? répondit Gin avec une voix légèrement tremblante. Tout va bien ?
— C'est moi qui devrait te poser cette question. Tu mets étrangement de temps pour vérifier juste une petite zone d'ombre.

Akutagawa n'osa esquisser un mouvement de peur que la dénommée Higuchi entende les feuilles craquer sous ses pieds.
Le soldat exerça une légère pression dans le dos de sa sœur, lui signalant qu'il valait mieux qu'elle y aille si elle ne voulait pas attirer de soupçons.

Gin parut comprendre le message implicite car elle se mit à avancer, lançant un dernier regard en direction de son frère. Malgré la pénombre, le bicolore devina qu'elle lui adressait silencieusement un signe d'au revoir.

— Tout va bien, finit par déclarer la jeune femme quand elle se fut suffisamment éloignée du bicolore. J'ai cru apercevoir quelqu'un mais ce n'était qu'un tas de feuilles.
Si Higuchi douta de la véracité de cette information, elle n'en laissa rien paraître dans le ton de sa voix.

— Tant mieux alors. Continuons. 
La jeune femme aurait pu passer comme glaciale auprès de sa sœur pour toute personne ne sachant pas décrypter les intonations de la voix, mais rien de pouvait tromper Ryunosuke. 
D'une façon ou d'une autre, Higuchi s'était réellement inquiétée pour sa sœur, et ce n'était pas à cause du rapport à remplir si jamais un soldat en patrouille se faisait blesser.

Akutagawa laissa ses pensées dériver tandis qu'il restait sans bouger, droit comme un piquet à l'endroit où il était au cas où l'oreille hypersensible de Higuchi détecterait ses mouvements.
Ce fut seulement quand il fut sûr que les deux femmes étaient hors de porté d'ouïe qu'il s'autorisa enfin à bouger.

Ses jambes étaient engourdies par le froid mais Akutagawa n'y prêta aucune attention, trop occupé à se dépêcher de rentrer avant que le jour ne se lève.
Cette conversation lui avait au moins appris une chose : il devait parler avec sa grande sœur.
Et il n'avait aucune idée de comment redescendre dans les Bas-fonds. 

~

Le manque de sommeil n'améliorait en rien son humeur qui était habituellement massacrante. Le bicolore avait des envies de meurtres contre la terre entière – ou presque – et ce dès le matin.

Akutagawa était tenté par la simple perspective de retourner dans son lit et de ne plus en bouger, mais malheureusement l'armée ne le laisserait certainement pas faire. Il fit un effort surhumain pour mouvoir ses muscles et il sortit d'un pas raide de l'auberge non sans avoir posé une pièce sur la table qu'il venait d'occuper.

Ce n'était pas un gros pourboire, mais ça pouvait toujours aider. Akutagawa préférait penser ainsi.
Il se disait qu'à l'époque, il aurait bien aimé que quelqu'un fasse l'effort de lui jeter une pièce.

Akutagawa s'extirpa rapidement de ses souvenirs et il accéléra le pas afin d'être sûr de ne pas arriver en retard contrairement à Atsushi qui semblait mettre un point d'honneur à toujours être le dernier à se présenter.

Le commandant des armées les avait réunis sur la grande place de la capitale qui était généralement utilisée pour les marchés. L'ordre de convocation qu'il avait reçu le matin même l'avait surpris, d'autant plus qu'il s'adressait à tous les bataillons. Il ne put s'empêcher de songer avec amertume qu'il aurait pu limiter les risques d'être découvert simplement en attendant un jour de plus.

Il dut jouer des coudes et lancer quelques regards noirs pour se frayer un chemin à travers la foule qui avait déjà commencé à s'entasser.

Comme la première fois, Dostoïevski était seul sur la scène face à tous les soldats. Il semblait défier le monde entier d'avoir le courage de le contredire, et le monde entier retenait sa respiration, n'osant faire un pas de travers.

— Bonjour à vous, lança l'homme de sa voix de miel.
Akutagawa parcourut la foule du regard, n'apercevant nulle part les mèches argentés caractéristiques d'Atsushi. Il supposa que le jeune homme était encore une fois de plus en retard.

Le bicolore chassa rapidement cette pensée de son esprit : l'argenté n'avait rien à faire dans son cerveau. 
— Je crois que nous sommes plus ou moins au complet.
Son regard améthyste glissa sur les soldats, et Ryunosuke résista à l'envie de rentrer sa tête dans les épaules afin de se faire le plus petit possible.
— Les retardataires trouveront bien un moyen de se procurer les informations.

Une vague approbatrice parcourut l'assemblée, et Akutagawa se garda d'hocher la tête, restant parfaitement immobile faisant ainsi sa révolution silencieuse.
— Venons-en au fait : j'ai de bonnes raisons de croire que le titan désormais communément appelé “bestial” est d'une manière ou d'une autre relié aux Bas-Fonds.
Le bicolore réprima un sursaut violent en entendant le nom de l'endroit dans lequel il était né.

Il faillit presque chercher Gin du regard mais se méfiant de la vision acérée de Dostoïevski, il s'obligea à rester parfaitement neutre.
— Je me suis donc entretenu avec le roi, et il m'a accordé les ressources nécessaires pour mener une expédition dans la Ville Souterraine. Une dizaine de soldats devrait suffire, il ne faut pas attirer l'attention.

Fyodor Dostoïevski eut un lent sourire.
— Evidemment, cette expédition repose sur le volontariat afin d'être sûr de pouvoir disposer de membres à cent pour cent investis. Et elle sera dirigée par Higuchi Ichiyô.
De nouveau, Akutagawa retint une expression moqueuse : la Ville Souterraine était connue pour être délabrée et abritée uniquement de voyous qui attendaient un cul de sac pour venir trancher la gorge des pauvres passants.

Personne n'aimait voir la misère sociale, et le fait que les bas-fonds soient totalement souterrains n'arrangeait pas la chose : pour les citoyens d'en haut l'option “faire l'autruche” était encore plus attrayante.

Le bicolore n'avait pas besoin de jeter un regard dans la direction de Gin pour savoir qu'elle songeait sérieusement à se proposer en tant que volontaire.
Et s'il se proposait à son tour, cela n'engendrerait que des soupçons sur eux.

Il n'avait aucune envie de savoir que sa sœur traînait dans la misère qu'abritait la Ville Souterraine, alors il leva soudainement la main.
Le regard améthyste de Dostoïevski croisa le sien, et il fit de son mieux pour ne pas frissonner sous les pupilles inquisitrices qui le fixaient.

— Oh ? Nous avons un premier volontaire ! Approche !
La dernière chose que Ryunosuke avait envie de faire était de se trouver aux côtés du commandant, mais il n'avait pas le choix.
Il savait que Gin n'oserait pas se proposer en tant que volontaire juste après lui, et elle ne prendrait pas le risque d'attirer l'attention sur eux.

Le jeune homme pouvait imaginer sans difficultés le regard noir de sa sœur posé sur sa nuque.
Malgré sa répugnance, Akutagawa se fraya un chemin parmi la foule et vint se tenir aux pieds de Dostoïevski, en bas de la scène.

— Bien, j'aime les personnes qui savent prendre des décisions sans tergiverser. N'ayez crainte : c'est sans danger.

Le commandant étant dans son dos, Akutagawa saisit l'opportunité de chercher le regard de sa sœur dans la masse de personnes. Il finit par la repérer et le froncement de sourcils qu'elle lui adressait n'augurait rien de bon.

Malgré ce qu'il lui en coûtait, le bicolore l'ignora totalement : cette expédition lui offrait également le parfait prétexte pour redescendre dans la Ville Souterraine. 
Les gens s'étonneraient peut-être de sa rapidité à se proposer, mais ceux qui avaient fait part de la formation lors de l'incident trouveraient cela moins étonnant.

Akutagawa se moquait bien de ce que l'on pouvait dire de lui dans son dos : cette occasion lui permettait de protéger Gin de Dostoïevski et de retrouver son autre soeur afin de lui poser des questions sans éveiller de soupçons.
Il n'allait pas se priver de l'occasion, réputation ou non.

Une autre main se leva et les yeux d'Akutagawa se posèrent avec surprise sur Kyôka, le menton relevé et un air de défi dans les prunelles.
— Bien, répéta Dostoïevski. Approche alors.
La jeune fille s'exécuta d'une démarche raide et militaire. 

Deux autres mains se levèrent et avec consternation le bicolore remarqua qu'elles appartenaient à Lucy et à Mark qui se frayaient déjà un chemin dans la foule.
Akutagawa fut tenté de faire marche arrière mais il finit par se contenter d'un roulement d'yeux.

Une personne dont les traits lui étaient inconnus vint les rejoindre au pied de l'estrade ainsi qu'un Atsushi visiblement embarrassé.
Le bicolore ne put empêcher un sursaut de colère d'agiter son corps quand il aperçut la silhouette de l'argenté.

En réponse à son regard noir meurtrier, Atsushi se contenta de hausser les épaules tout en riant nerveusement.
— Dostoïevski était furieux parce que j'étais obligé de faire parti de l'escouade, se justifia le jeune homme. Il faut obligatoirement quelqu'un pour représenter le commandant s'il n'est pas présent. Et comme je suis son subordonné direct, j'ai été envoyé.

Akutagawa lança un regard blanc à Atsushi, ne sachant quoi répondre à l'explication de l'argenté. Que Dostoïevski soit en colère pour une chose comme celle-là lui paraissait irréaliste.
Mais il ne fit pas part de ses interrogations à l'autre soldat malgré le fait qu'il avait envie de pouvoir partager son opinion à quelqu'un. 
Gin l'écoutait toujours et il en faisait de même pour elle, mais leurs rendez-vous étaient trop espacés, et il était sûr qu'il ne la reverrait pas avant un bon bout de temps.

Parfois, Ryunosuke aurait aimé protéger sa petite sœur un peu mieux qu'il le faisait.
Quand le bicolore releva la tête, deux autres soldats les avaient rejoints : Ranpo Edogawa et Kunikida Doppo.

Akutagawa les reconnaissait de la semaine de remise à niveau, étant donné que les deux hommes avaient fait parti des soldats chargés de les superviser.
Au même moment où il se demandait où était Yosano, la jeune femme brune entra dans son champ de vision, un sourire satisfait sur le visage.

Le bicolore était surpris que Dostoïevski ait pu rassembler autant de soldats pour une mission mystérieuse dans la Ville Souterraine. Il ne doutait pas que le commandant disposait d'excellents moyens de persuasion, mais il restait toujours dubitatif.
Ou alors il était possible que, comme lui, les autres soldats avaient quelque chose à régler dans les bas-fonds.

Si Atsushi était seulement là par obligation comme Higuchi qui dirigerait l'opération, les autres volontaires ne pouvaient pas en dire autant, Akutagawa le premier.
Il ne savait pas vraiment si cela l'arrangeait, mais il ferait avec.

— Bien.
Fyodor Dostoïevski eut un sourire satisfait qu'il ne chercha même pas à cacher.
— Les soldats auront les détails de la mission plus tard dans la journée. Je tiens à préciser que c'est tout d'abord une expédition de reconnaissance avec un but scientifique au lieu de simplement vouloir éliminer quelques titans.

Quelque chose passa dans les yeux du commandant, et son sourire prit une ombre inquiétante.
— Non. Il faut viser plus grand.

Akutagawa frémit, même s'il ne comprenait pas entièrement toute l'ampleur que ces paroles avaient.
— Vous pouvez remercier les volontaires. Ils vous ont évité un tirage au sort. Si j'étais vous, je serais reconnaissant.

"Sauf que vous n'êtes pas nous" avait envie de répliquer le jeune homme, mais il se mordit la langue de toutes ses forces.
Être insolent de changerait strictement rien à son plus grand regret.

— Je pense que l'on peut dire que cette assemblée est terminée ! L'escouade partira dans deux ou trois jours selon comment elle s'en sort.

Ils n'avaient pas le droit à l'erreur, et Akutagawa sentait dans le ton de Dostoïevski qu'il ne leur pardonnerait aucune faute.
Le bicolore se demanda vaguement dans quoi il s'était engagé, avant de se rappeler qu'il avait surtout fait ça pour sa sœur.

Il n'avait qu'à espérer de s'en sortir vivant.

~

La plupart des soldats devait sûrement penser que Higuchi n'avait absolument pas la carrure pour pouvoir gérer le stress qu'était diriger une escouade.
Peut-être était-ce la faute de sa carrure qui n'était pas menaçante au premier abord, ou alors celle de son regard angélique.

Akutagawa n'avait pas spécialement d'avis sur la question étant donné qu'il n'avait jamais vu la jeune femme sur le terrain, mais il savait pertinemment bien qu'il ne fallait pas juger trop vite sur les apparences.

Et une erreur de jugement coûtait toujours cher. Le bicolore estimait que Dostoïevski connaissait suffisamment les soldats haut-gradés pour savoir qui pouvait garder la tête froide même confronté à la pression et qui ne le pouvait pas.
Cette mission semblait tenir à cœur au commandant, et il n'y avait aucune raison valable pour qu'il la sabote volontairement en la confiant à une débutante.

Les gens aimaient juste proférer des ragots.

Akutagawa craqua ses phalanges : cela faisait déjà une bonne demi-heure que les soldats volontaires attendaient le retour de la blonde dans le vestibule.
Dostoïevski avait dit qu'il allait informer Higuchi des moindres détails de la mission, et le jeune homme ne voyait pas quel était l'intérêt qu'ils restent sur place.

Higuchi ne pourrait sûrement pas absorber autant d'informations en une heure et le commandant devrait tout leur ré-expliquer, alors Akutagawa était sûr qu'ils étaient coincés ici pendant un bon bout de temps.
Peut-être que Dostoïevski voulait qu'ils apprennent à se connaître un peu mieux.

Cette pensée le fit frissonner de dégoût, et il l'éloigna rapidement de son esprit.
Dostoïevski n'était certainement pas du genre à concevoir ce genre de plans futiles. Pour renverser un gouvernement, ça oui, Ryunosuke voulait bien l'imaginer. 
Le commandant faisait uniquement des plans pour des choses de ce type. Le reste, il était sûrement assez fort pour manipuler les gens et obtenir ce qu'il voulait sans qu'il ait à suivre une liste.

Ce n'était pas une pensée très rassurante.

— Vous pensez qu'on va attendre ici encore longtemps ?
La voix de Mark s'éleva dans le petit vestibule et Akutagawa retint un soupir.
Son regard passa rapidement sur les visages des autres membres : Ranpo semblait totalement désintéressé par la situation et  Kunikida et Yosano étaient trop plongées dans leurs pensées respectives pour faire attention à la conversation.
Il ne restait plus que Lucy et Atsushi. L'argenté sembla vouloir répondre quelque chose au brun, mais le bicolore le coupa.
— Oui.

Mark sursauta involontairement au son de sa voix.
— Ça le mérite d'être clair au moins.
— Tu voulais une réponse, tu l'as eu.
Atsushi lui jeta vainement un regard en biais, sûrement pour lui signaler de mettre plus de tact dans ses phrases mais Akutagawa préféra ignorer ses signaux.

Lucy tapota l'épaule du brun en seul signe de réconfort et ce dernier parut tout de même reconnaissant.
— C'est sa propre estimation après tout, intervint rapidement Atsushi. Il peut se tromper aussi.
Visiblement, l'argenté essayait toujours d'être diplomate, même dans les situations les plus inappropriées.
Akutagawa ne put s'empêcher de rouler des yeux.

Si Atsushi remarqua son geste, il l'ignora complètement.
Le bicolore ne fit aucun commentaire de plus, et il laissa le silence retomber sur leur petit groupe.
— Ça sera dangereux vous pensez ?
La voix de Mark s'était de nouveau élevée dans l'air, et cette fois-ci Akutagawa prit un soin particulier à avoir l'air absorbé par l'examination de la table basse.

— Peut-être, répondit Yosano qui semblait être sortie de sa rêverie. Les missions sans pertes et sans dégâts n'existent pas de toute façon.
Le brun ne parut pas le moins du monde rassuré par sa réponse mais pourtant il n'insista pas.
— Espérons que personne ne meurt alors.

La jeune femme hocha la tête approuvant les propos de Mark.
— Oui. Quelques blessures au maximum. Ça serait un détail mineur.
Le brun parut s'offusquer à l'entente des mots "blessure" et "détail mineur" mis côte à côte, mais il finit par répondre d'une voix relativement calme :
— Mineur ? Si une personne est blessée, elle devient un fardeau pour le reste de l'escouade.

Pour une fois dans sa vie, songea Akutagawa, Mark n'avait pas totalement tort. Et le bicolore s'attendait presque à entendre Yosano répliquer quelque chose comme "il faut savoir faire des sacrifices".
— Non.
Elle secoua légèrement la tête.
— J'ai les compétences médicales suffisantes pour traiter des blessures mineures et plus graves. J'imagine que c'est pour cette raison que Dostoïevski a voulu que je me présente.

Un détail dans la phrase de la jeune femme brune captura immédiatement son attention, et il releva la tête pour se joindre à la conversation.
— Je croyais que c'était sur la base du volontariat.
— Ça l'est, en effet. Mais Dostoïevski est venu me parler juste avant son discours en me disant qu'il apprécierait fortement que je participe à sa mission.

Akutagawa fronça les sourcils.
— Est-ce qu'il t'a proposé quelque chose en échange ?
Il préférait poser une question plutôt que d'accuser un de ses supérieurs.
— Non. Il ne m'a pas offert une somme d'argent exorbitante, figure toi.

Yosano eut un sourire moqueur.
— Je me serais proposée de toutes manières. Pour aider Paradis à lutter contre les titans.
"Ou contre l'invasion Mahr" songea pour lui le bicolore. Ce n'était pas un secret que la résistance contre l'Empire Mahr se trouvait dans la Ville Souterraine. Peut-être était-ce parce que le pouvoir de Dostoïevski ne s'étendait pas aussi loin.

Akutagawa hocha la tête en réponse à la brune, et il se fit la réflexion qu'elle avait très bien pu être menacée par le commandant. Ça ne l'étonnerait pas que Dostoïevski possède un moyen de pression sur chacun de ces soldats.

— Ou alors c'est uniquement un prétexte pour tenter de contacter ce qui reste de la "résistance", lança Lucy avec désinvolture, disant tout haut ce qu'il pensait tout bas.
Yosano la fusilla immédiatement du regard.
— Comment oses-tu insinuer ça ?
"entourée de Mahrs" ne franchit pas les lèvres de la brune, mais pourtant l'expression flotta dans l'air.
— C'était une supposition.
— Eh bien elle est fausse. Je suis fidèle au Bataillon.

Akutagawa lui lança une oeillade prudente, mais le visage de la jeune femme ne laissait rien paraître.
— Alors garde tes accusations injustifiées pour toi, s'il te plaît.
Lucy inclina rapidement sa tête.
— Désolée. J'émettais uniquement une hypothèse.

La jeune femme brune lui lança un dernier regard suspicieux mais elle ne répondit rien, se contentant de fixer ses yeux sur un point dans le vide.

Après ce qui semblait être de longues heures, la porte du petit cabinet s'ouvrit enfin et Higuchi en sortit, accompagnée de Dostoïevski. 
Par réflexe, tous les soldats se levèrent maladroitement et ils tentèrent d'effectuer le salut du Bataillon. 

— Repos.
Le commandant eut un sourire qui se voulait apaisant dans leur direction.
— Comme vous le savez déjà, Higuchi vous supervisera pendant cette mission. Elle connaît déjà tous les détails du plan et vous les fera parvenir en temps et en heure.

Dostoïevski leur lança un regard lourd de sens.
— C'est une mission à but scientifique : il vous faudra prélever des échantillons.
"Pourquoi envoyer autant de soldats ? songea Akutagawa, la Ville Souterraine est relativement calme quand on sait passer inaperçu." Mais il supposait que Dostoïevski avait ses raisons.

— Demain matin dès le levé du jour, vous devrez être présent devant les bureaux administratifs de la capitale afin de pouvoir accéder à la salle de réunion.
Dostoïevski eut un dernier hochement de tête dans leur direction.
— Ne soyez pas en retard. Sur ce, bonne journée.

Et sous leurs yeux ébahis, le commandant leur adressa un salut ponctué par un sourire moqueur avant de disparaître par l'encadrement de la porte.
— Est-ce qu'il a fermé son bureau à clé ?
Toutes les têtes se tournèrent vers Atsushi qui avait pris la parole d'une voix hésitante.
— Sûrement. Et si ce n'est pas le cas, libre à toi de vérifier et d'accepter la sanction si tu te fais prendre, répondit Mark avec un ton faussement enjoué.

Atsushi déglutit péniblement à l'entente des derniers mots et il baissa son regard sur le sol comme si le carrelage était soudainement devenu un sujet d'étude passionnant.
— Il faut croire qu'il voulait juste mettre notre patience à l'épreuve ~ 
La voix chantonnante de Ranpo s'éleva en même temps que le brun traversait le petit groupe de soldats.
— Si vous n'y voyez pas d'inconvénients, je vais y aller à partir de maintenant. Si j'étais vous, je ne serais pas en retard demain matin~

Sur ces derniers mots, Ranpo disparut à son tour par l'encadrement de la porte.
Yosano eut un soupir agacé avant de parcourir les membres de l'escouade restant dans la pièce d'un œil dur.
— Vous devriez tous faire pareil. Ça serait dommage qu'on parte directement avec un membre de moins.

Akutagawa ne pouvait pas être plus d'accord.

~

Rentrer tard dans sa chambre louée et se lever tôt le lendemain n'était absolument pas une chose à faire.
Akutagawa se retrouvait avec des cernes encore plus gros sous ses yeux, lui donnant un air plus mort que vivant.

Ses muscles semblaient se mouvoir grâce à une force invisible, et Akutagawa ne savait pas comment il pouvait continuer à avancer.
Tout dépendait de la force mentale, il supposait.

Le jeune homme étouffa un bâillement tandis qu'il se concentrait afin de ne pas faire un pas de travers et de s'étendre de tout son long. Peut-être était-ce un vain attempt de conserver sa dignité qui fuyait un peu plus à chaque fois que ses paupières se fermaient.

Il fit tout de même attention aux quelques soldats Mahr appartenant aux Polices Spéciales qui patrouillaient non loin de là. Il n'avait pas envie de déclencher une dispute en sortant légèrement du rang et de ce fait être réprimandé et perdre l'avance qu'il avait.

Quand il arriva enfin devant les bureaux administratifs, ce fut avec soulagement que Ryunosuke constata qu'ils n'étaient pas encore ouverts.
A l'entente de ses pas contre la pierre, Atsushi qui était pelotonné contre les marchés releva brutalement la tête. 
— C'est l'heure ? marmonna-t-il d'une voix pâteuse.
— Non pas encore.

Atsushi poussa un soupir soulagé.
— Tant mieux. Je crois que je m'étais légèrement assoupi.
Akutagawa roula des yeux.
— Tu as dormi devant les bureaux ? Est-ce que tu as un réveil si défectueux que ça ?
L'argenté s'agitait nerveusement.
— Non ! Je n'aurais jamais osé dormir devant les bureaux administratifs. Disons simplement que je suis venu tôt et que hum, mon manque de sommeil m'a rattrapé.

Le bicolore lança une oeillade prudente à ce jeune homme qui représentait un mystère total pour lui.
Pendant dix longues secondes, Akutagawa eut la peur insoutenable de se retrouver seul avec le soldat, et il fut soulagé quand il aperçut la forme de Yosano accompagnée de celle de Kunikida.

L'argenté provoquait suffisamment de réactions étranges chez lui, il n'avait pas la moindre envie de lui faire la conversation. Et il était évident que le jeune homme craignait qu'Akutagawa sorte un couteau de sa poche à tout moment et lui tranche la gorge.

— Eh bien, lança Yosano d'un ton amusé, je vois que vous êtes respectueux des horaires. Surtout toi, Atsushi. Tu étais toujours en retard pendant la semaine de remise à niveau.

L'argenté eut un rire gêné avant de se confondre une nouvelle fois en excuses, sous le regard légèrement horrifié de la brune qui voulait juste le taquiner.
Akutagawa ressentit un besoin urgent de rouler des yeux mais il s'en abstint.

Plus rapidement qu'il ne l'avait imaginé, les autres membres de l'escouade les rejoignirent, et Dostoïevski fut le dernier à faire son apparition.
— Je vois que vous respectez la ponctualité. Bien. Entrons : l'été commence à toucher à sa fin, il fera meilleur à l'intérieur.
— Allez-vous assister au compte rendu de Higuchi ? demanda soudainement Kunikida d'une voix tendue.

Le commandant se tourna vers lui.
— Je n'en vois pas l'utilité. Je lui fais totalement confiance, et je suis sûre qu'elle sera capable de ne rien omettre.
Dostoïevski adressa un sourire mielleux à la jeune femme qui garda obstinément ses yeux fixés au sol.
— Evidemment.
Higuchi tentait de prendre un air convaincu, mais son ton ne pouvait sonner plus faux qu'en cet instant.

Néanmoins, le commandant lui donna un bref hochement de tête dans sa direction avant de la dépasser et de continuer son chemin.
— Allons-y, finit par articuler la blonde après un moment de silence.

Ils obéirent tous sans protester et sans émettre un son, chose n'étant pas coutume.
Akutagawa songea que c'était l'effet que Dostoïevski avait sur les gens.

~

— De larges empreintes bien trop grosses pour appartenir à des bêtes ont été retrouvées aux abords de la Ville Souterraine, commença Higuchi en se raclant la gorge. Tout laisse à penser que le titan bestial – comme les spécialistes ont décidé de l'appeler – est passé par là.

— Mais les gens auraient vu un titan de dix-sept mètres de haut passer à côté de leur maison, non ? objecta Yosano.
— Apparement non : les traces s'arrêtent à l'entrée de la ville, et aucun habitant n'a pu déterminer ce qu'il s'était passé.
Higuchi déglutit avant de reprendre la parole.

— C'est donc à nous que revient la tâche de suivre les empreintes et d'essayer de retrouver ce titan.
Cette fois-ci, ce fut au tour de Lucy d'intervenir.
— Qu'est-ce qu'un titan serait aller faire dans la Ville Souterraine ? Et surtout sans dévorer tout le monde sur son passage.
La jeune femme eut un léger tressaillement nerveux qu'elle masqua plutôt bien mais pas suffisamment selon Akutagawa, avant de répondre tout en passant une main dans ses cheveux.

— Hum… Nos spécialistes qui se sont penchés sur la question ont de bonnes raisons de croire que le titan posséderait en réalité une intelligence propre.
Un juron retentit sur sa droite et le bicolore nota rapidement le visage défait de Mark.
— Manquerait plus que ça, marmonna le brun entre ses dents. C'est une mission suicide.
— Ne dis pas n'importe quoi.
Kunikida lui lança un regard noir qui ponctua la fin de sa phrase.

— Le commandant n'oserait pas–
La fin de sa phrase mourut dans sa gorge tandis que le blond à lunettes réalisait que Dostoïevski était très bien capable de ce genre de chose.
— S'il est intelligent, qu'est-ce qui l'empêcherait de nous tendre une embuscade ? ajouta Atsushi avec un tremblement dans la voix.

Ranpo réajusta ses lunettes sur son nez tandis qu'il intervenait dans la conversation.
— Dans tous les cas, il est blessé. Et s'il est indemne par un quelconque miracle de la nature, il doit nous craindre, du moins un peu plus qu'avant. Il n'oubliera pas de sitôt les lames de nos équipements.
— Est-ce que c'est censé être rassurant ? finit par lâcher Akutagawa, s'attirant ainsi tous les regards.
"Oui" fut la seule réponse qu'il obtint.

Devant leur manque d'attention, Higuchi claqua dans ses mains une fois afin de ramener le silence.
— Un habitant de la Ville Souterraine a bien voulu héberger notre escouade.
Ryunosuke sentit que la fin de la phrase n'allait pas lui plaire.
— Dostoïevski a tenu à ce que son nom reste entre nous, et je vous conseille de prendre cette clause de confidentialité très au sérieux.
Ils hochèrent tous la tête à l'unisson. 
— Son nom est Mori Ôgai.

Akutagawa se sentit plonger dans un puit sans fond. Ses pressentiments s'avéraient toujours justes d'une manière ou d'une autre et il n'était pas sûr que cette perspective le réjouissait.

~

Ville Souterraine, 920

"Papa" était encore occupé cette semaine. Il l'était de plus en plus ces derniers temps, et cela ne lui convenait absolument pas.
Sa mère était toujours couchée et le reste de sa famille ne présentait pas une grande source de divertissement.

"Papa" voyait beaucoup l'autre dame, celle qui avait des marques noires encore plus prononcées que sa mère sous les yeux, celle qui parlait fort le soir quand il était tard et qui s'excusait le lendemain matin.
Le comportement des personnes adultes était définitivement étrange.

"Papa" rencontrait régulièrement deux autres messieurs aussi. Ils avaient toujours un air sévère sur le visage et c'était à se demander s'ils savaient sourire. Ils ne restaient jamais longtemps, eux. Pas comme la dame.

"Papa" faisait beaucoup de choses étranges, si bien qu'il n'avait plus le temps de s'occuper correctement de ses enfants. C'était ce que sa mère lui reprochait quand ils se disputaient, leurs cris de colère résonnant dans toute l'habitation.

La question qui se posait était la suivante : "est-ce que papa était quelqu'un de bien ?" Un pressentiment disait que non.

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