*Chapitre 3* Arrivée
Une année complète depuis la dernière fois où mon regard a croisé le sien.
Un an entier à imaginer ce qu'aurait pu être notre vie ensemble si la société n'avait pas été ce qu'elle est.
Trois-cents-soixante-cinq jours à essayer de guérir ce coeur qu'il a laissé en miette derrière lui, après avoir fermé la porte de la petite cabane dans laquelle nous avions pris l'habitude de nous réfugier, dans le plus grand des secrets.
Cinquante-deux semaines à trouver l'excuse parfaite pour ne pas me présenter à l'invitation doré reçu par sa famille, pour venir célébrer son mariage.
Cinq-cent-vingt-cinq-mille-six-cent
minutes à cacher mes sentiments, ma colère et ma tristesse au monde entier afin de ne pas nous attirer les foudres des élus et de nos familles respective.
J'ai malgré tout réussis à survivre au temps lui-même, bien que les premiers jours furent laborieux et que je doutais alors d'y parvenir.
Ma mère et son obsession de marier sa seconde et dernière fille, avait réussis à me ramener vers la réalité. Ma réalité.
Comme cela est la coutume, des mon anniversaire de dix-neuf ans, elle avait commencée à négocier avec les parents de d'autres familles pour arriver à une entente permettant une cour plus assidue entre moi et celui qu'elle allait choisir.
Bien que cette seule idée me révulsait, me rappelant la raison pour laquelle j'avais perdu l'homme que j'aimais, j'avais tout de même fini par y trouver un avantage non négligeable.
Celui notamment de m'aider à tuer le temps ...
En plus de m'occuper énormément et de me changer les idées, ces préparatifs et le mariage de ma soeur avaient tenue la famille tellement occupée que nul ne c'était aperçu de ma perte de poids et de mon humeur explosive des premiers mois post-rupture.
Je m'étais finalement prêté au jeux, de mauvaise foi je l'avoue, mais j'avais fini par comprendre qu'il n'y avait pour moi, aucun échappatoire.
Certain des candidats étaient "intéressants", et par là, je précise que ceux qui ne me donnaient pas immédiatement envie de sauter d'une fenêtre du troisième étage après seulement dix minutes de temps partagé ensemble, sont ceux qui ont mérité le titre ronflant de partie intéressant.
Je crois bien en avoir rencontré une vingtaine, retenues en tête de liste par ma mère, pour qui, les attributs financiers et terrestres restent le critère prioritaire pour établir son choix et accessoirement tout au bas de la laisser dites liste, vient mon futur bonheur conjugale.
Depuis peu, le nombre s'est cependant restreint, passant de vingt à dix et ensuite à cinq puis, pour finir, à deux. Il ne reste que ce futur avocat, fils d'un homme du conseil. Un garçon ennuyeux à souhait, partageant son manque de personnalité avec un corps très peu harmonieux pour l'oeil.
Le deuxième pour sa part se prénomme Xan, fils sans titre, d'une famille nouvellement riche. Du moins, si c'est assez pour attirer l'attention de ma mère, je présume que la fortune est colossale...
Je sais qu'il a quelques frères et soeurs et que, jusque là, aucun d'entre eux n'avaient pu profiter de la clause de mariage de l'élite.
Cette clause prévoit un montant précis à posséder pour avoir le droit d'entrer dans la course aux mariages de l'élite.
Il a d'ailleurs avec une ennuyante voix monocorde, essayé de m'expliquer comment sa famille avait réussi à monter les étages un à un pour être maintenant considéré comme l'une des plus énormes fortunes des environs.
Selon ma mère, plusieurs femmes espéraient être sur la liste de ses potentielles et ce ne fût pas le cas, sauf pour moi apparemment.
Va savoir pourquoi j'ai attiré son attention plus que les autres jeunes filles qui sont assurément mieux élevées et fort probablement plus courtoises...
Je ne prétend pas avoir envie de devenir une vielle fille qui s'occuperait de scolariser les prochaines générations, parce-que dans l'incapacité de bien se marier. Je n'ai pas l'intention de pleurer toute ma vie, un amour qui m'aurait été refusé, et encore moins un homme qui n'a jamais été prêt à ce battre pour moi, pour nous.
J'aurais cependant eu envie de plus de temps. Bien plus que ces quelques jours suivant mon dix-neuvième anniversaires. Jour mémorable où, vêtu d'une robe de taffetas verte, je fis mon entrée dans la salle de bal, devant une horde d'invités me regardant comme si je portais une pancarte au cou, annonçant que mes parents étaient maintenant prêts à vendre ma fleur virginale au plus offrant.
Bon, puisque ma fleur est fanée depuis quelques temps déjà, quelques part dans un champ appartenant à Ewan, la métaphore et peut-être mal choisie...
Quoique eux ne le savent pas, et il est très important que cela reste ainsi, sinon à coup sûr, je finirai enseignante de jeunes naïves croyant encore à l'amour romantique.
-Nellyanna? Tu es encore à milles lieux d'ici, chuchote doucement ma soeur afin de n'être entendu que de moi.
-Partout me semble mieux qu'ici, dans cette avion, entouré de folles dingues qui ne parlent que mariage, je rétorque aussi bas devant sa mine consternée.
Naturellement, ma soeur vient d'avoir vingt-et-un ans. Elle doit donc se marier au cours de l'année puisque le temps de ses fiançailles est écoulé. Je ne devrais pas en faire tout un plat. Elle est ma soeur et son fiancée semble être un homme bien jusque-là. J'arrive à garder pour moi mes remarques acerbes puisqu'elle même semble s'en réjouir, mais un avion emplit de jeune filles qui se marieront elles aussi au cours de l'année a de quoi me rendre malade.
Aucun autre sujet ne traverse la barrière de leurs lèvres. Il n'est question que de chiffons, de mariages, de réceptions, et de maris...
Que ce soit clair, je ne suis pas une rebelle dans l'âme. Je n'ai aucunement l'intention d'échafauder de plans pour m'éviter ce sort. Je suis consciente que je devrai passer par là, à mon tour et surtout, sans rechigner mais, je refuse de mettre mon cerveau en veille pour n'être plus capable de tenir une conversation qui tournerait autour de quelques choses de plus utile.
-Quand ton tour viendra, tu comprendras, répond-elle avec compassion. Pourvue que tes camarades soient plus enclines à se réjouires que toi tu ne l'es avec moi!
Même si je perçois aisément la reproche dans son ton, je peux néanmoins en sentir toute la compassion.
Nous n'avons que deux années de différence et bien qu'elle ait été ma première camarade de jeux (et possiblement la seule), celle de qui j'étais le plus proche, elle a changé à son tour, s'embrigadant volontiers dans ce jeux de séduction.
Notre amour fraternel est toujours aussi fort, même si parfois, j'ai l'impression que nous sommes à milles lieux l'une de l'autre.
Le meilleur exemple de cet éloignement, est que je n'ai même jamais envisagé de lui parler de Ewan, ni même de mon coeur brisé. Elle aurait peut-être pu le comprendre, mais l'idée qu'elle nous dénonce à ma mère m'a dissuadé au moment même où cette idée saugrenue a franchi mes pensées .
-Les filles! N'êtes vous pas aussi anxieuse que moi? Demande ma mère, avant de lisser sa jupe et de s'asseoir dans le siège faisant face au mien.
-Oh, mère, comme j'ai hâte! S'exclame ma soeur, qui semble parler le même langage que ma génitrice.
Notre mère la gratifie d'un sourie compréhensif.
-Je sais, ma chérie, je sais! Le premier mariage de la saison! Tu imagines? Nous donnerons le coup d'envoi, elle surenchérit, cachant à peine la fierté qu'elle ressent.
-Tout les autres mariages devront essayer de surclasser celui-là, j'ajoute, avec un enthousiasme feint que j'essaie de masquer autant que faire se peut.
Heureusement, elles n'y voient que du feu et continuent de jubiler tour à tour comme des petite filles la veille de Noël échafaudant des plans pour essayer de deviner leur cadeaux avant le temps.
Il est naturellement inutile de leur rappeler que ma mère a précisément choisie ce créneau horaire et a d'ailleurs payé le prix fort pour être le premier de l'année puisque c'est là qu'on en met plein la vue. Comme pour défier les autres de nous surpasser.
Évidemment, pouvoir se payer cet horaire nécessite une petite fortune alors il est logique que seul les plus riches puissent ce le permettent, affichant alors aux yeux de tous, leur suprématie financière.
-Nellyanna, Angelyssa, n'oubliez pas toute les deux de sourire à la sortie de l'avion, nous avons réservé les meilleures photographes des alentours et ils nous attendent dès la sortie pour immortaliser ce moment, explique ma mère en se levant pour aller vanter la vue de l'île louée par ma famille, à une pauvre Lady qui devra lui répondre à quel point c'est fabuleux, tout en faisant la liste mentale de toute les choses qu'elle devra essayer de surpasser.
Ma soeur la suit et outre le son de sa magnifique traîne doré qui frôle le sol, je me retrouve à nouveau avec le silence de mon cubicule.
J'aimerais tant avoir cette envie de festoyer en ce jour de fête, pourtant, mes pensées sont obsédées à la simple idée de devoir côtoyer Ewan et ça femme.
Je sais qu'ils seront présent, le contraire serait inadmissible aux yeux de nos familles, mais ça signifie que je devrai renforcer cette carapace qui hélas n'est, même au bout de ces jours sans fin, toujours pas indestructible.
La voix du commandant dont le grésillement fait taire instantanément toute les femmes présentes, annonce notre arrivé d'une voix enthousiaste.
Les femmes, toutes très exitées, laissent échapper quelques petits sons semblables à celui d'une petite souris avec la queue coincé. Elles tapent dans leur mains, et sautillent avant de se mettre en rang et de finalement sortir de l'avion, prenant grands soins de me laisser ma place dans la file, auprès de ma soeur et ma mère.
J'affiche un sourire radieux et nous descendons l'escalier escamotable, sous le flash persistants des photographes grâcement rémunérés à cette tâche.
Je ne saurais dire ce qui ce passe exactement, mais tout ce masque de mensonge tombe d'un seul coup, alors que je prend conscience que je souris véritablement pour la toute première fois depuis des lustres.
Est-ce le soleil qui brille si haut dans le ciel et dont les rayons bouillonnants réchauffent immédiatement monc corp, me faisant ressentir une impression de bien-être coulant presque sur ma peau? Peut-être est-ce l'air marin emporté par la brise? À moins que ce ne soit le bruit de la mer entourant cette île, dont les vagues se déchaînent avant de frapper les rochers qui l'entourent? Possible que ce soit un amalgame de toutes ces choses à la fois, mais si j'avais à voter, je voterais pour cette vaste étendu de verdure qui s'étend à perte de vue, couvrant les montagnes majestueuses environnantes dont je n'arrive même pas à dicerner le sommet.
Un paradis, voilà ce qu'est cet endroit. Je souris, je suis heureuse et même mon corps ne me semble plus porter autant de poids que lors de notre départ.
Assurément, il sera impossible de battre le lieux de célébration, et pas seulement pour l'année en cours, mais bien pour la prochaine décennie au moins!
Nous montons toutes à la suite les unes des autres dans un escalier extérieur ressemblant à s'y méprendre à du marbre et qui serpente aux travers de la pente escarpée, sur laquelle est juchée un imposant hôtel en pierre.
Le premier pallier mène à une gigantesque galerie donnant accès à ce qui me semble être l'entrée principal. Le deuxieme palier contourne le bâtiment et permet apparemment un accès direct aux étages des chambres des invités.
Nous faisons donc l'ascension jusqu'au premier palier, délesté de nos bagages qui seront apportés par les employés de l'hôtel.
Quelques pas de plus et nous avons toutes le souffle coupé, non pas par l'exercice que requiert cette marche, mais bien par cette vue imprenable que nous offre le derrière de l'hôtel. Je comprend instantanément que celui-ci a été construit à flanc de montagne et donc derrière lui, s'étend une forêt verdoyante à perte de vue.
Nous logerons donc dans ce qui semble avoir l'architecture d'un immense château, tout en possédant les modernités que comportent le monde actuel.
Ma chambre m'est rapidement nécessaire et le valet qu'on m'a attribué, accepte volontiers de m'y conduire, pendant que ma mère fait l'éloge historique de l'endroit à un auditoire en pamoison.
J'entre dans l'ascenseur, le sourire toujours aux lèvres, avec cette impression insouciante que le bonheur est à portée de mains quand, en une seconde, tout mes espoirs s'envolent en une explosion fracassante et douloureuse.
Deux lèvres qui se touchent d'un baiser chaste mais affectueux. Deux paires de lèvres, dont l'une appartient à l'homme de ma vie.
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