*Chapitre 2* L'envers Du Miroir
Il me dévisage toujours, en silence de surcroît, et je tuerais bien pour savoir quelles sont ses pensées immédiates.
Il accepte son mariage futur avec une telle résilience que ça me porte inévitablement à me questionner sur la véritable nature de ses sentiments envers elle, mais surtout, envers moi.
Je revis avec une colère froide notre conversation de ce matin, alors que je le rejoignais dans l'abri qui nous avait toujours permis des rencontres discrètes.
Ewan l'avait découvert, construit près de la rivière par je l'imagine, d'autre amoureux transis, tout comme nous.
Sauf que ce matin, la magie fût irrémédiable brisé. Je l'attendais depuis quelques minutes déjà quand lui, habituellement si ponctuel, était arrivé avec plusieurs minutes de retard. Il avait passé la porte avec une mine longue, qui m'avait aussitôt laissé savoir que le moment tant redouté était arrivé jusqu'à nous.
La fatalité du destin comme je me plaisait à l'appeler.
Cette loi écrite par les anciens lors de la mise par écrit de la charte, il y a une centaine d'année.
Dès que les filles atteignent l'âge de seize ans, la mère doit commencer les préparatifs pour l'entrée de sa chérie dans la bonne société. Et comme si ce n'étais pas assez, elles doivent en plus, se plier à une assermentation.
Des lors que c'est deux étapes archaïques sont franchies, les mères commencent à choisir les potentiels candidats et de ce fait, j'entends plutôt par là, qu'elles s'évertuent à trouver quel serait l'union la plus lucrative et profitable pour les deux familles.
Vient les bals, les présentations obligatoires et surtout officielles des prétendants, à leur possible dulcinée. Ce manège dure jusqu'à ce qu'un seul des candidats ce soit démarqué dans le coeur des parents, tenant bien peu souvent compte des états d'âmes de leur progénitures.
S'en suis une multitude de rencontres entre les deux familles pour créer des liens et ainsi favoriser l'attachement des deux tourtereaux en devenir. Dès que la fille atteint dix-huit ans, c'est le tour de l'année officiel de fréquentation, au terme de laquelle s'ensuit les fiançailles public et une autre année sera nécessaire pour préparer un fastueux mariage. Ce qui fait que toute les femmes de vingt et un ans sont quasiment toute mariées.
Je ne fais pas exception à la règle et bien entendue, dès que j'ai eu seize ans, j'ai aussi dû me plier à ce stratagème de mariage arrangé et suivre toute les étapes requises pour répondre à toute les exigences que requiert une telle entreprise.
Ma mère avait arrêté son choix sur quelques familles bien nantis et bien que la plupart étaient des garçons pour le moins correct, aucun d'eux ne me paraissaient à la hauteur de mes aspirations romantiques. Et puis un soir, lors d'une énième soirée ennuyeuse, je suis venu sur se même balcon, prendre l'air et surtout me soustraire à cette pièce dont j'avais l'impression de n'être qu'une figurante et, c'est là que je l'ai rencontré pour la toute première fois.
L'air tout aussi blasé que moi, dégageant une insaisissable pointe de mystère et partageant, je l'ai su immédiatement, mon aversion pour ce monde.
Nous avions beaucoup discuté ce soir-là, et je pense que d'une certaine façon, il avait réussi à quitter la soirée avec une partie de mon coeur. Un être d'exception, pensant par lui-même, sans être influencé de quelques façons que ce soit par les diktats de notre société archaïque.
Puis, vient ensuite chacune des fêtes et chacune des soirées où nous réussissons à nous voler de petits moments d'intimités, nous permettant d'approfondir cette relation naissante.
Je savais que ça ne pourrais pas durer, lui aussi, mais pourtant, nous n'en parlions jamais. Évitant de gâcher ces minuscules morceaux de temps que nous réussissons à grapiller à l'issue des autres.
Un jour, celui exact ou sa mère a arrêtée son choix sur sa future compagne. Il m'a fait visiter cette petite cabane de pêche situé dans la forêt non loin de la rivière. J'avais longtemps pleuré lorsqu'il m'en avait fait l'annonce mais, ce présent nous assurant plus d'intimité avait mis du baume sur ma blessure. Le temps nous était compté et il fallait donc en savourer chaque instant.
J'avais donc décidé de profiter de chaque minute en sa présence sans songer au futur et en allant même jusqu'à oublier que sa mère avait choisi la candidate, me rapprochant dangereusement du moment qui me feraient le perdre.
Je réussis à mettre de côté le faut que de mémoire d'homme, jamais un de ces mariages arrangés n'avaient avortés.
La cause en est bien simple.
Si vous refusez, vous jetez alors la honte sur votre famille et celle-ci a le droit de vous déshérité et de vous envoyer sans rien, au seing de la populace.
Nul ne doute que plusieurs ont dû y songer au fil du temps mais nous savons tous qu'après avoir vécu une vie prospère et emplit de richesses, cette simple menace est assez dissuasive pour éteindre tout feu de rébellion brûlant dans le coeur des plus téméraires d'entre nous.
D'ailleurs, tout est mis en place pour que garçons et filles ne se croisent pas d'ici l'entrée officielle en société. Les études sont dispensées à la maison jusqu'au mariage pour cette raison.
C'était inéluctable, nous savions tout deux que ce jour arriverait. Seulement j'aurais espéré que l'issue me soit plus favorable. Étant donné notre différence d'âge, il était certain que je n'étais pas parmis les choix de sa mère, et encore heureux, ma soeur, issue de la même cuvée que lui, ne l'était pas non plus.
Je me maudit intérieurement pour avoir espéré, même si ce n'est qu'un instant éphémère, qu'il plaque tout et annonce à sa famille que nous allions ensemble, rejoindre les bas fond de la ville. Je n'aurais pas hésité une seule seconde à renoncer à tout et à le suivre jusque là, parce que après tout, être avec lui me suffisait.
Pourtant, la vérité est tout autre, elle me guettait depuis longtemps, tapi dans l'ombre, prête à me sauter dessus à la première occasion, annihilant en un minuscule instant, tout mes rêves de jours heureux.
Me rappelant douloureusement que bientôt, il en serait de même pour moi, que je ferais la parade à mon tour parmis ces gentilshommes qui ne souhaiteront me plaire que pour acheter la paix auprès de leur maman chérie.
Une roue vicieuse qui tourne encore et encore et à laquelle tous se soumettent sans remises en questions, sauf Ewan, qui j'en avais l'impression jusqu'à tout récemment, me comprenait.
- Tu l'as toujours su non? Je demande.
Il soupire.
-Tu l'as toujours su aussi non?
Non! j'ai envie de lui répondre instantanément. Mais je sais que même si la fillette en moi espérait encore qu'il allait me proposer de tout abandonner, de tout quitter pour se sauver avec moi, et que dès lors que nous aurions été ensemble, le reste n'aurait pas eu d'importance.
Pourtant, la femme que je suis, elle sait, et depuis le tout début, que tout cela n'était qu'une fugace utopie, nourrit par ce désir de changements, de liberté et de sentiments véritables .
-Oui, je le savais, seulement...
Je cherche mes mots, me rappelant à toute ces fois où en songe, nous avions refait le monde à notre image. Toute ces fois qui ont finient par planter dans mon être, la petite graine de l'espoir.
- Il n'y a pas de demi mesure, (il répond en avançant vers moi et en prenant mes mains aux creux des siennes.) Tu sais Nelly qu'il n'y a aucune autre issu. Nous avons passé de merveilleux moments et je les chérirai tout le reste de ma vie, mais ni toi ni moi ne pouvons nous permettre que ça dure indéfiniment. Après un certain moment, il faut savoir grandir et prendre nos responsabilités, il ajoute d'une voix qui n'est pas sans me rappeler un annonceur télévisé qui vente les vertus d'un produit inutile en répétant un texte au préalablement appris par coeur.
Je suis sidéré, voir presque cloué sur place, alors qu'il parle d'une voix si détaché et si adulte que je peine encore à le trouver derrière cette façade qu'il qualifie lui-même d'adulte responsable.
-Quand? Je demande finalement après un lourd moment de silence.
- Ceci est notre dernier rendez-vous, il annonce d'une voix froide.
Je lutte fortement contre les larmes que je sens monter. Maintenant? Il se fiance et c'est fini, c'est tout? Peut-être qu'il me teste? Peut-être qu'il n'est pas aussi prêt qu'il le laisse paraître et qu'il essaie de se montrer fort pour ne pas que je le fasse flancher?
Mon esprit se met en branle. Toute les explications, raisons et réponses possibles et imaginables se confrontent dans ma tête.
Il a remis mon monde en question dès qu'il y ai entré. Bouleversant mes croyances et ma vision fermée de l'avenir.
Comme tout ceux de ma connaissance, je n'avais jamais remis le système en cause. J'acceptai de m'y plier volontiers, croyant que c'était là, ma seule option d'avenir.
Puis avec le temps, sa perspective, et un oeil nouveau, j'ai commencé à percevoir le monde d'un autre oeil.
Allant jusqu'à défier toute logique et à adresser la parole aux employés de la maison, cherchant à comprendre d'où ils venaient et à quoi ressemblait la vie en dehors de l'élite.
J'avais même risqué une franche opinion lors d'un souper où les hommes discutaient sur le territoire en dehors de l'élite et des gens qui y habitaient. Ils les catégorisaient sans vergogne, comme étant clairement sous notre niveau et je m'étais permise une question à laquelle je n'ai jamais eu de réponses claire, mais donc je me souviens encore des conséquences.
La plus éloquente fût le changement d'attitude des membres de ma famille qui me jugeaient à présent comme une dépravée.
- La politique n'est pas pour les femmes, avait simplement répondu l'invité de mon père alors que celui-ci me jeta un regard meurtrier.
Je compris ce soir-là, quelle était la place qui m'était réservée et j'avais pleuré dans les bras de Ewan, qui me confirmait que j'étais différente et que c'est ce qu'il aimait chez moi.
Son tout premier je t'aime...
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