Chapitre 4 : Le deuxieme meurtre

20 février

Maggie et Alex préparaient leur dîner dans le petit appartement qu'ils partageaient depuis bientôt un an, après une vie de couple longtemps ponctuée par l'indécision et la peur de décevoir qui animaient le professeur de sciences économiques et sociales. Alex assaisonnait la vinaigrette tandis que Maggie dressait la table.

« —Je me demande ce qu'il peut bien se passer entre l'année du bac et la première année de licence, dit Alex en pleine conversation avec sa petite-amie. J'ai des terminales absolument effrayés à l'idée de passer le bac. Et mes étudiants en L1 viennent de recevoir leurs notes de partiels catastrophiques, et ils ne semblent pas s'en formaliser plus que ça. On était comme ça nous aussi ? »

Alex était professeur en lycée et, l'autre moitié du temps, maître de conférences à l'université de Jouville après avoir brillamment validé sa thèse l'an passé. 12 ans plus vieux que sa compagne, ils ne se souciaient guère du regard des gens. Ils étaient heureux ensemble, et c'est tout ce qui comptait.

« —Je ne sais plus, lui répondit Maggie. Je crois que le stress n'a pas de prise sur moi.

—Tu ne mesures pas ta chance. Heureusement, plus les années universitaires passent, plus les étudiants s'impliquent à nouveau dans leurs études. Et ça, ça fait plaisir, un groupe qui participe. Parce que donner un cours dans un amphi blindé où tu es le seul à animer, crois-moi, c'est long. »

La conversation se poursuivit jusqu'à ce que les amoureux passent à table. Au menu ce soir, une salade composée faite maison. Pendant le repas, ils avaient pris la mauvaise habitude d'allumer la télé. C'était surtout à l'initiative d'Alex qui mettait un point d'honneur à suivre les informations.

Les nouvelles étaient inintéressantes ce soir. Alors que le présentateur parlait du salon de l'agriculture à venir, le téléphone de Maggie se mit à sonner.

« —Excuse-moi. »

Elle se leva, coupa le son, et se réinstalla à table. Malgré ça, l'appareil se mit à vibrer avec insistance quelques minutes plus tard.

« —Répond, l'incita gentiment Alex. Ça doit être important pour qu'il insiste autant.

—Je suis vraiment désolée.

—C'est rien, je devrais m'en remettre, se moqua-t-il avec bienveillance. »

Maggie alla donc décrocher son téléphone. C'était Béthanie.

« —Allô Maggie, je te dérange ?

—Oui, un peu, j'étais en train de manger. Sinon j'aurais répondu plus tôt.

Excuse-moi, je serai brève.

—Je t'écoute.

On a un deuxième cadavre.

—De Black Bird ?

Oui.

—Développe s'il te plaît.

Tu ne veux pas que je te rappelle quand vous aurez terminé de manger ?

—Non, tu en as déjà trop dit.

Il a été retrouvé en fin de journée dans le vide-ordures d'un bar-brasserie-hôtel de la rue aux Ours.

—Encore une prostituée ?

Oui. Pour le moment elle n'a pas encore été identifiée et il n'y a pas de disparition inquiétante qui pourrait lui correspondre qui a été signalée.

—Des correspondances avec le meurtre de Janice Brun ?

Tout. Retrouvée éventrée en sous-vêtements avec des organes manquants et une carte de visite similaire agrafée sur son soutien-gorge.

—Qui a fait la découverte ?

Un employé de l'établissement en sortant les poubelles. Il est actuellement interrogé.

—Comment tu le sais ? On va être placés sur l'enquête ?

Pour l'instant on n'a aucune injonction de Patron. C'est Raphaël qui m'a prévenue, il a essayé de t'appeler mais tu ne répondais pas alors il a essayé de mon côté.

—Et comment il est au courant, lui ?

Il allait rentrer chez lui quand son collègue a été appelé. Heureusement, il s'entend assez bien avec lui, alors il a pu glaner quelques infos pour nous les retransmettre.

—Merci de m'avoir prévenue. Autre chose ?

Non, je pense qu'on en saura plus demain matin en venant aux bureaux. Je vous laisse, bonne soirée, et passe le bonjour à Alex. »

Sitôt après avoir prononcé ces mots, Béthanie raccrocha sans que Maggie n'ait pu lui demander de faire de même pour Coline. Lorsqu'elle retourna à table, Alex avait arrêté de manger et il regardait sa petite-amie d'un air interrogateur.

« —Tu as le bonjour de Béthanie, l'informa Maggie.

—Tu la remercieras pour moi. »

La jeune femme hocha la tête et se remit à manger avec appétit. Alex ne l'imita pas, il continuait de la dévisager.

« —Il y a un problème ? le questionna la détective.

—Tu vas reprendre du service ? Enfin, je veux dire, vous allez avoir une nouvelle enquête ?

—Certainement.

—Le probable tueur en série ?

—C'est ça. Pourquoi ?

—Parce qu'à chaque fois que tu pars enquêter, je ne vis plus. Tu te mets en danger et tu ne t'en rends même pas compte.

—Alex, on en a déjà discuté. C'est mon métier et j'aime ce que je fais. Je suis consciente du danger que je cours et je reste vigilante. Et Patron nous protège aussi.

—Tu restes vigilante ? Tu as été empoisonnée au sirop d'ipéca, on t'a tailladé le bras, on a voulu te tirer dessus, on...

—Ça va, ça va, j'ai compris.

—Et tu ne veux même pas porter ton arme de service sur toi.

—Je n'aime pas les armes, c'est mon droit.

—En plus cette fois c'est un tueur en série !

—Oui, et il faut des gens pour les arrêter.

—La police peut très bien s'en charger. »

Sur ces mots, Alex se leva, jeta les restes de son assiette qu'il balança ensuite dans l'évier, manquant de la briser, et claqua la porte de la chambre en allant se coucher. L'appétit coupé à son tour, Maggie ne termina pas son plat. À contrecœur elle jeta aussi les restes dans la poubelle, remplit le lave-vaisselle, débarrassa et nettoya la table avant d'aller se coucher à son tour. Cette nuit, les deux amoureux dormiraient dos à dos, sans le moindre contact physique, sans même se souhaiter bonne nuit.

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